«
C’est la Vierge de Guerre ! -
Je croyais que c’était une légende... -
Et ça, c’est issu de mon imagination, peut-être ?! »
Une collègue se précipita vers Sarah, et l’aida à se relever, faisant grommeler la policière. La Vierge de Guerre... Elle avait entendu parler de cette femme, mais, comme le soulevait l’une de ses collègues, on estimait généralement que la Vierge était avant tout une sorte de légende urbaine, et ce parce qu’elle était assez récente, et qu’on ne la voyait pas systématiquement. Une légende urbaine, ou un outil de propagande que la police utilisait. Dans une ville où les méta-humains commençaient à s’affirmer et à être autre chose que des cobayes de laboratoire, en prétendant être des
vigilantes, le gouvernement redoublait de vigilance contre eux. Certes, il existait maintenant beaucoup d’agents du secteur privé qui aidaient la police à maintenir l’ordre, mais l’État continuait à détenir le monopole de la violence légitime, ne le partageant qu’avec des partenaires triés sur le volet. Avec des
vigilantes, on plongeait dans l’inconnu, face à des personnes où l’État n’avait aucun contrôle... Or, s’il y avait bien une situation qu’un État détestait, c’était celle où il n’avait aucun contrôle. Par conséquent, Tekhos voyait ces justiciers, comme Spider-Woman, comme des menaces à appréhender. Néanmoins, malgré les campagnes de presse, ces personnages recevaient l’appréciation de la foule, et bénéficiaient d’une certaine forme de popularité, car ils n’hésitaient pas à prendre des risques, et les réseaux sociaux voyaient se multiplier les groupes de soutien à tel ou tel
vigilante. Ainsi, pour Sarah, la
Vierge de Guerre avait toujours été le super-héros créé par la police.
Une impression qui se confirma en la voyant manipuler les éléments autour d’elle, abattant froidement les tueurs du Shogunate, sans aucune pitié. Sarah la vit ainsi tuer à bout portant un homme venant pourtant de se rendre. Une lourde bavure policière sur Terre, une réaction normale sur Tekhos, une société où les mâles étaient dans une position franchement peu enviable, et n’avaient pas beaucoup d’options pour s’en sortir. Autant dire que les gangs fourmillaient dans les ghettos.
Cependant, les ennemis commençaient à affluer autour de l’hôtel, remontant depuis la rue. La bataille pour l’
Edoras District ne faisait que commencer, et Pez’, qui commençait à aller mieux, sentait le Witchblade revenir en force.
*
Tu comptes agir comme une bleue encore longtemps ? Utilise tes pouvoirs !*
Les policières étaient clairement en infériorité numérique, et la Vierge de Guerre, en voyant ça, posa sa main sur le sol, et modifia la neige, la condensant et la solidifiant, formant ainsi deux épais murs de glace qui entourèrent les policières, bloquant les tueurs situés le long de la rue. Entre-temps, la femme avait ôté sa visière, révélant un superbe visage roux, une longue chevelure lui tombant en cascade sur le dos. Cependant, les femmes n’avaient guère le temps pour ce genre de choses, et se mirent donc toutes à filer. Les murs de glace étaient déjà en train de fondre, et, alors qu’elles filaient dans l’entrepôt de l’hôtel, en face de l’hôtel, sur un toit, une silhouette similaire les observait.
Zao s’était déplacé, et vit les femmes refermer derrière elles les portails, s’offrant ainsi un bref moment de tranquillité. Solitaire, l’homme se retourna alors, et approcha sa main cybernétique de l’une des petits boules argentées tournoyant autour de lui. Ses drones de reconnaissance, de communication, et de soutien tactique... La police avait bien raison de se méfier du
Shogunate, car ce gang était plus qu’un gang ; c’était une véritable milice, disposant d’un matériel militaire considérable. Zao posa sa main sur le drone, et appuya sur un bouton, faisant émettre au drone quelques bips. Ensuite, une image holographique vint à se former, et, devant les yeux de Zao, la communication s’établit avec le Grand-Temple, et avec la fille de Xia,
Katsu, toujours aussi magnifique dans sa robe rouge en latex.
«
Rapport de situation ? demanda-t-elle.
-
Le premier raid a été correctement intercepté, mais les policières ont réussi à se retrancher dans l’hôtel, grâce à l’intervention de la Vierge. »
Le
Shogunate n’avait pas prévu que le camp adverse enverrait si vite leur meilleur atout. En un sens, c’était une bonne chose, car les policières présentes ici seraient séparées des principaux ennemis. Le
Shogunate les avait délibérément laissés s’enfoncer si loin dans leur quartier, mais les renforts ennemis se heurteraient à de la résistance dès qu’ils franchiraient les ponts menant au clan. De fait, c’était même le
Shogunate qui comptait attaquer, en profitant de leur avantage psychologique pour prendre les postes de police.
En effet, dans les ghettos, on retrouvait toujours la même configuration : les postes de police se situaient maintenant tous à la périphérie, et incluaient maintenant la caserne de pompiers ou les hôpitaux. La plupart des établissements hospitaliers qui se trouvaient au centre des ghettos, pour des raisons historiques, avaient été relocalisés à la périphérie, près de postes de police fortifiés, qui tenaient davantage de fortins qu’autre chose. Ce soir, le
Shogunate comptait les prendre, et, de là, ils continueraient leur guerre ouverte contre le pouvoir en place. La stratégie du
Shogunate était simple : faire comprendre aux Tekhanes que ce quartier était désormais le leur, et que, si le gouvernement persistait dans ce qui était maintenant vu comme un acte d’ingérence, ils n’hésiteraient pas à répondre.
«
Si nous parvenions à la tuer rapidement, ou, mieux, à la capturer, afin de l’exécuter en public, nous porterions un solide coup au moral des Tekhanes... -
C’est aussi ce que je pensais, Katsu-sama. -
Très bien... Je vais demander à Khân de venir en personne. Quant à toi, surveille le déroulement des opérations. »
Zao hocha la tête. Au sein du
Shogunate, Zao avait un rang assez élevé. Il était considéré comme un officier, mais il n’était pas le seul. L’homme dont Zatsu venait de parler était un autre officier, et un redoutable tueur,
Khân, le Maître de Guerre. Il commandait à ce titre les redoutables
ninjas du
Shogunate, ceux que Katsu envisageait d’envoyer dans l’hôtel.
Lui, de son côté, continuait à surveiller...
...Pendant ce temps, à l’intérieur de l’hôtel, les policières verrouillèrent rapidement le portail, tout en respirant rapidement, épuisées... Mais pourtant conscientes que ce siège ne faisait que commencer. Elles s’étaient attendues à un combat difficile, mais ce qui venait d’arriver avait été au-delà de leurs prévisions
*
C’était un foutu piège, songea Sarah.
Le Shogunate a été informé de notre projet...*
Un plan d’une telle envergure pouvait facilement filtrer, même si le haut-commandement avait tenté de contrôler au mieux toutes les communications à ce sujet.
«
Il y a encore des collègues à nous coincées dans la rue principale, signala alors une policière.
Il faut rapidement déverrouiller l’entrée principale pour les sauver. -
Et se faire tirer comme des lapins ? rétorqua une autre.
On est en infériorité numérique, et elles sont sûrement mortes à l’heure qu’il est ! Je pense que nous devrions plutôt nous retrancher ici et attendre les renforts ! »
La décision, en définitive, appartenait à leur capitaine : la belle et redoutable
Lisa. Reprenant aussi son souffle, elle hocha la tête.
«
Nous bénéficions du soutien de la Vierge... Et nous sommes des policières, Mesdames ! On ne laisse pas tomber les nôtres ! On ignore quand les renforts arriveront, et je ne compte pas laisser mes collègues se faire torturer par ces sales enfoirés ! On remonte jusqu’au hall d’entrée, on récupère nos blessées, et on leur explose la gueule ! »
Un plan simple, mais compréhensible.