Sauvé par le vide. [Pv Valériane]

L'air était frais. Pourtant, la situation l'était beaucoup moins.
Les Contrées du Chaos n'ont jamais été le lieu qu'il était le plus conseillé de traverser. C'était après tout un endroit dangereux et vide de toute vie. - Sauf de celle qui veut vous décapiter, évidemment. - Mais parfois, l'appât du gain, et encore plus, l'appât des objets uniques était plus fort que tout. Michan, et les autres qui pouvaient se trouver en lui, s'était depuis longtemps préparé pour cette expédition. Recouper toutes les informations disponibles pour créer le chemin le plus sûr possible, s'équiper au mieux, tout prévoir au poil, et surtout, se préparer au pire. Le garçon était rôdé dans ce domaine, ce n'était pas son premier détour par les Contrées du Chaos, mais c'était en effet sa première fois non-accompagné dans les Landes Dévastées. Il pensait honnêtement être capable de se défendre, et ne pas avoir de problèmes, après tout il s'entraînait régulièrement à maîtriser les capacités de son sabre, à manier celui-ci, ou encore à matérialiser les éléments auquel il était affilié. Il se trouvait lui-même plutôt doué, mais se juger soi-même n'a jamais été simple. Et le fait est que son propre jugement s'était avéré faux. Il s'était retrouvé capturé par une créature tentaculaire plutôt étonnante, qui semblait pouvoir changer de forme. Tantôt presque humanoïde, tantôt complètement dimorphe, ressemblant presque à un slime duquel s'échappait ces tentacules rosâtres et effrayantes, elle avait jeté le Neko au fond d'une caverne, estimant certainement que puisqu'il n'était pas du sexe féminin, il n'était d'aucun intérêt à la reproduction, mais pourrait toujours servir de garde-manger. La Caverne n'était pas bien grande, mais elle semblait bel et bien cachée entre divers rochers des Landes, la rendant presque invisible pour l'oeil non averti.

Il n'avait presque pas eu le temps de se défendre, avait été mis au tapis presque instantanément suite aux assauts répétés de la créature qui pouvait presque attaquer à 360° autour de lui à l'aide se foutues tentacules. Pas même le temps de dégainer Vixen, son sabre. Il s'était évanoui une première fois, et c'était réveiller plus profondément dans la taverne, "ligoté" à l'aide d'un bien étrange mucus. Son arme se trouvait à quelques mètres de lui, mais il ne pouvait l'atteindre, et ne pourrait de toute façon pas l'utiliser puisque ses mains étaient bloquées. Il n'avait qu'un seul espoir : Que quelqu'un vienne à son secours. Autrement, ce serait la fin du voyage, et même s'il était prêt à ça, estimant que personne ne l'attendait, l'idée de vivre encore quelques belles années lui était tout sauf déplaisante. Surtout que, puisqu'il y pensait, -On a toujours du temps pour réfléchir quand on est prisonnier-, il ne pourrait jamais devenir un Ange, ni même un Démon, il n'était après tout qu'un simple jeune homme suivant ses convictions, il n'était finalement ni pur, ni impur, il n'était que lui-même, avec tout ce que ça impliquait au point de vue de ses troubles de la personnalité et du comportement.

Finalement, ne pouvant décemment faire autre chose, il se contentait de fredonner différents airs de musique. Etant à cheval entre Terra et le "Monde réel", on retrouvait de tous dans les airs fredonnés. Des chansons du siècle passé de la Planète Terre, ou des mélodies tout à fait originales du Plan de Terra. Il n'osait pas faire trop de bruit, après tout, le bête rôdait sûrement encore. Qui sait combien de temps il lui restait à vivre avant de finir dévoré par cette étrange bestiole ? Etrange bestiole, qui, d'ailleurs, ne semblait pas appartenir au coin. Comme si elle sortait tout droit d'un autre Monde. Comme si elle était directement échappée des Enfers.

Le soleil semblait se coucher peu à peu, de ce qu'il pouvait entrevoir depuis l'intérieur. En supposant qu'il n'était pas resté dans les pommes plusieurs jours, cela voulait dire que ça faisait presque 12 heures qu'il était séquestré ici. Certainement suffisant pour quelque de normal pour devenir fou, mais un garçon déjà fou peut finalement se révéler insensible à un tel destin. "Alors, c'est ici que l'on va mourir ?" pensa Michan, immédiatement rejoint, plus froidement, par Enolys, qui le couvra d'un : "Si t'avais pas été aussi intéressé par un pseudo-trésor, pseudo-ancien sur une pseudo-carte, pseudo-vraie, on en serait p'têt pas là. C'est de ta faute. DE TA FAUTE !" Meï, toujours plus réservé, n'osait pas "parler", ou plutôt "Communiquer avec les autres facettes du jeune homme". Mais il était certainement effrayé, scandaleusement effrayé. Sa peur se répercutait sur le corps de l'Hybride, qui tremblait de tout son long, alors même que son visage était plus serein. La créature savait-elle seulement qu'il était un Terranide ? Il portait sa capuche sur la tête après tout, cachant ses attributs félins. Enfin, pour qu'elle puisse savoir ça, encore faudrait-il qu'elle pense. Cette horrible bête n'était peut-être rien de plus qu'un vulgaire parasite vivant à la surface de cet endroit, après tout.

Michan se disait que finalement, penser autant, ça le forçait à se perdre, et que ce n'était pas vraiment ce qu'il y avait de meilleur pour sa santé mentale. Il se décida donc à faire une sieste, comme au bon vieux temps, dans l'Herbe des Forêts du Plan de Terra. Il risquait après tout de ne plus jamais les revoir.
- Avec un peu de chance, je ne me réveillerais jamais. dit-il, soupirant avant de fermer les yeux.

Il y a longtemps, très longtemps, Verox avait mit un point d'honneur à briser la vie de Valériane. Pourtant, le jour ou ils s'étaient rencontré, elle n'était pas sa cible principale. Il s'était contenté de l'éloigner, de l'occuper, pour mieux réussir son œuvre, celle de pousser le père de celle-ci à se suicider. Pourquoi ? Parce qu'il était écrit dans les astres que cet homme devait devenir un Haut-Elfe un jour, et qu'il parviendrait à libérer Arond et Heriel Athwil, deux des plus grands espions et guerriers du souverain elfique. Or, Verox ne voulait pas de ces deux individus dans ses pattes. Prisonniers et torturés depuis des décennies, tout le monde les croyaient mort. Et c'était mieux ainsi pour lui. Son but ultime était inconnu, mais ce qui était certain, c'était que tout tournait autour des elfes. Désirait-il tuer ou renverser le souverain Thamir ? Personne ne le savait. Encore moins Valériane. Elle n'était qu'une pauvre jeune femme, que l'Ombre avait désiré garder près de lui en tant qu'esclave, une marionnette, mais aussi son bras armé. Il l'avait longuement entraînée et lui avait transmis des pouvoirs puissants et destructeurs, l'envoyant ainsi aux quatre coins de Terra pour éliminer de vieux ennemis.

Mais l'ancien mage noir avait aussi pour habitude d'effectuer de nombreuses expériences dans son laboratoire secret. Ainsi, il avait souvent besoin de matériel ou de substances rares et précieuses. Se déplacer était devenu pour lui une perte de temps. Voilà pourquoi il envoyait Valériane à sa place. Et ce jour-là, justement, il avait besoin de sang de Ghatanothoa, un monstre hideux aux tentacules visqueuses qui se nourrissait de toutes les bestioles passant à sa portée, sans oublier de féconder les femelles attrapées. Et justement, Verox en avait localisé un dans les landes dévastées. Il ordonna donc à sa chère petite catin d'aller lui chercher le précieux fluide vital de cette bestiole.
Très rares furent les êtres vivants ayant été capable de vaincre ou d'échapper à un Ghatanothoa, mais il savait Valériane largement à la hauteur.

La jeune femme passa un portail créé par les soins de son maître, et débarqua dans les landes dévastées. Un endroit particulièrement dangereux où il ne faisait pas bon se balader seul. Elle n'eut pas à chercher beaucoup avant de tomber sur le monstre. Celui-ci s'était posté à l'entrée d'une grotte, dissimulé parmi d'épais buissons. Mais la belle elfette était maligne et n'eut aucun mal à le localiser et à s’approcher. Le monstre l'avait cependant sentie lui aussi. Il attendait patiemment qu'elle s'approche encore, encore un peu, puis il déploya ses hideuses tentacules qui s'élancèrent à une vitesse incroyable droit sur elle.

Valériane bondit, évita une tentacule, et s'accrocha à une autre solidement. Le monstre rugit et secoua ses tentacules en tous sens, tentant de se défaire de l'intruse. Il avait sentit que c'était une femelle, il devait donc éviter de la tuer. Son appétit sexuel était immense, car voilà longtemps qu'une femelle n'était passée à sa portée. Sauf que celle-ci était particulièrement coriace.
Valériane était beaucoup trop rapide pour lui et parvint, armée d'une simple dague, à lui couper plusieurs tentacules. Poussant des cris stridents de rage, le monstre redoubla de fureur. Malheureusement pour lui, la femelle lui était supérieur et en moins de cinq minutes, l'hideuse créature visqueuse s'écroula dans un gargouillement peu ragoutant.

Satisfaite, Valériane sortit quelques fioles qu'elle remplit de sang de la créature. C'est alors quelle sentit la présence d'un autre individu. Ce n'était pas un montre, mais plutôt quelque chose d'humain. Ou presque. La jeune femme décida de s'approcher, ses pas résonnant sur le sol de la grotte obscure. Et à force de s'enfoncer dans les profondeurs de la grotte, elle tomba sur un jeune homme, qui n'avait visiblement pas l'air rassuré. La jeune femme le fixa, puis sa voix monotone retentit :

- Qui es-tu ? Que fais-tu ici ?

Son maître ne lui avait donné aucune consigne concernant d'éventuels prisonniers de la créature. Devait-elle le tuer ? A quoi bon, ce serait gâcher de l'énergie pour rien et elle jugeait s'être assez battue pour aujourd'hui. Elle attendit donc patiemment qu'il lui réponde avant de juger la meilleure solution. 

Le jeune venait donc de vivre ce qu'il considérait impossible. S'étant considéré déjà comme condamné à mort, se retrouver face à une demoiselle - très belle en passant -, qui venait de terrasser sans difficulté la créature, était purement un don de Dieu. Après tout, elle avait la beauté d'un Ange, c'était déjà un début.

L'hybride releva la tête, clairement toujours inquiet, puisqu'il était en claire situation d'infériorité. Son arme aux formes multiples étaient toujours à côté de lui, et lui était toujours enfermé dans cet étrange mucus sans réel possibilité d'en réchapper. En clair : Il était aussi mort que le monstre qui l'enfermait au moindre mouvement trop brusque. La demoiselle lui demanda ensuite, d'une voix qu'il trouva douce d'une part, mais aussi terriblement monotone, comme dénuée de vie, qui il était. L'hybride avait manqué de simplement rire à la question, vu la complexité de sa réponse. "Qui suis-je ?.. Qui sommes-nous serait plus approrié." pensa-t'il, se retenant néanmoins de montrer toute réaction immédiatement. Le jeune Homme ne pouvait de doute façon pas cacher la vérité dans sa situation, et allait donc simplement être honnête. Il tenta de répondre froidement, la tête haute, mais vu la pression, termina par rougir, bégayant en baissant la tête.

- On.. On.. On m'appelle Michan..

Sa voix monotone était effrayante, avec le recul. Comment une beauté pareille pouvait-elle paraître si fade ? Si.. Morte. Son visage paraît formé pour être plein de vie et de joie, et pourtant, il n'en est rien. Il n'y a rien de perceptible en elle, qui la rendrait "humaine". L'Hybride l'analysait presque comme un corps dépourvu de la moindre âme. Même ses mouvements lors du combat précédent, de ce qu'il avait pu en entrevoir, étaient d'une précision parfaite. Beaucoup trop parfaite. C'était à couper le souffle. Si le dicton "L'Erreur est Humaine" était vrai, alors cette demoiselle face à lui n'était pas une humaine. Ou du moins, ne l'étais pas totalement. Ou ne l'étais plus, le cas présent. Dans tous les cas, c'était une Elfette, à en juger par la taille de ses oreilles. Par le passé, il avait entendu dire que la majorité des Elfes étaient pacifiques. Ce qu'il venait de voir était aussi pacifique qu'un volcan en éruption. Il ne savait pas trop que penser, ni même s'il pouvait se sentir en danger avec cette personne dans les parages, mais pour l'heure, il n'avait pas trop le choix, il allait devoir lui faire confiance et lui demander de l'aide.

- Dîtes.. Ca.. Ca vous dérangerait de.. D'me détacher ?

Il avait tenté de dire ça de la façon la plus simple possible, sans prendre de ton hautain, sans air de soumission non plus. Il voulait paraître le plus à l'aise possible, même si en vérité, ce n'était absolument pas le cas et il ne pouvait pas le montrer. Enfin.. Il voulait juste pouvoir se lever, et lui même n'avait aucun objectif derrière la tête avec la person-"Ouais, enfin, elle a d'sacrées jolies formes. Et une sacrée joli peau. Et des cheveux de soie. Moi j'en ai, des id-""Non.". L'hybride se contenta de lui laisser un sourire, pensant que ça pourrait sans doute la décontracter un peu. Il n'y avait plus qu'à attendre sa réaction, en espérant qu'elle serait positive, et que ce magnifique visage ne sera pas la dernière chose qu'il verra de son existence mortelle.

Mais quand même, quel beau corps. Enolys était assuré qu'il ne pouvait se permettre de gâcher une telle beauté dans un simple sauvetage ridicule, et était prêt à rester là s'il pouvait en avoir plus. Encore fallait-il que le choix soit le sien, ce qui était loin, très loin d'être le cas.

Valériane fixait le garçon sans sourciller, aussi immobile et paisible qu'une statue. Et un regard tout aussi vide. Il n'était pas difficile de voir que la jeune femme était étrange, que quelque chose clochait chez elle. En général, ceux qui la croisait comprenait très vite d'où venait ce malaise qu'elle déclenchait chez tout le monde. C'était son regard. Ces yeux si vides, si inexpressif, comme si... comme si elle était morte. Une coquille de chair sans âme. Et c'était exactement ce qu'elle était.

Le jeune homme face à elle était en bien mauvaise posture. Avachit contre la paroi de la grotte, l'air fatigué, il était prisonnier d'un étau gluant et visqueux généré par le Ghatanothoa. Depuis quand était-il là au juste ? Difficile à dire en vérité. Dans tous les cas, il semblait intrigué par elle. A cause de son côté monotone peut-être, ou par le fait qu'elle venait de terrasser un monstre terrifiant. Un peu des deux ? En vérité ça lui était bien égale à notre elfette, elle était surtout curieuse de savoir qui il était et ce qu'il faisait là. S'il pouvait servir à quelque chose, autant s'y attarder un instant.

Il se comportait bizarrement. Tantôt il prenait un air sûr de lui, puis la seconde après, il rougissait et bégayait, indiquant alors qu'on l'appelait Michan. Valériane pencha légèrement la tête sur le côté, observant encore davantage cet étrange individu. Elle resta silencieuse, comme tout à coup déconnectée. Perdant alors certainement patience, le jeune homme lui demanda si elle pouvait le détacher. Le corps de la belle s'anima de nouveau, redressant sa tête, le visage toujours arrêté sur un masque inanimé. Soudain, elle tourna les talons et commença à s'éloigner.

Le pauvre Michan devait se dire qu'elle avait décidé de le laisser pourrir ici. Pourtant ce n'était pas le cas. Elle se rapprochait du corps moue et répugnant du Ghatanothoa et souleva quelques énorme tentacules avec une facilité déconcertante, cherchant sa gueule. C'était un tour circulaire, béant, puant, avec deux rangées de crocs acérés. Ne semblant pas importuné par l'odeur fétide qui s'en dégageait, elle plongea ses mains à l'intérieur, et les retira couverte d'un amas de bave gluante et translucide. Alors enfin elle revint vers la jeune homme et s'accroupit face à lui, commençant à étaler la bave sur les liens.

- La salive de Ghatanothoa, à forte concentration, permet de décomposer rapidement les composants organiques. A digérer le corps de ses proies. Il attaque aussi cette matière. Ça permet à ce monstre de gober son déjeuner sans se soucier des liens.

La salive était en effet très efficace. Mais elle prenait ses précautions pour ne pas que la bave entre en contact avec la peau du garçon. En effet, cela pourrait avoir des conséquences handicapantes et douloureuse. Mais Valériane, elle, ne ressentait pas la douleur. Et ses mains, qui devenaient rouges, attaquées par la salive, n'étaient pas un problème. Car très vite, ses chairs se recomposèrent d'elles-même. Une fois l'individu libre de ses mouvements, elle se releva.

- Tu n'as pas répondu à mon autre question, Michan. Que fais-tu ici ?

Sa voix était toujours dénuée d'émotion, toujours sur le même ton monotone et ennuyeux.

Il faut avouer qu'au premier abord, voir la demoiselle se retourner, était synonyme de "Voilà, tu vas rester croupir ici pour le restant des tes (quelques) jours.". Mais il semblerait qu'il s'était trompé. La demoiselle avait commencé à parler, étalant une science que l'hybride était bien incapable de comprendre, ne s'étant jamais intéressé à la Chimie, à l'Alchimie, ou à tout autre type de science. La demoiselle, pourtant, semblait bien s'y connaître. Et il avait à vrai dire remarqué encore plus que ça en elle. Malgré que sa voix étant restée monotone, pendant toute son explication, elle avait au préalable légèrement incliné la tête. On analysait souvent ce genre de comportements comme un réflexe d'incompréhension, ou de curiosité. Ca montrait donc bel et bien une chose : Il y avait quelqu'un, quelque part, là dedans. Visiblement très amoché, mais il y avait quelqu'un. Ce qui ne manquait pas de faire plaisir à l'hybride, ayant eu peur de tomber sur une folle furieuse, ou n'importe quoi, au premier abord. Mais visiblement, son Ange Gardien veillait sur lui et lui avait offert cette seconde chance. Ou du moins, c'est ce qu'il croyait, au plus profond de lui même.

D'ailleurs, si l'on analysait clairement le comportement du Terranide, on pouvait analyser quelques étranges phénomènes liés à son "Comportement intérieur". En effet, les yeux de celui-ci, en opposition au vide présents dans ceux de son actuelle compagne, semblaient pleins de vie, et changeaient de couleur, passant du Jaune-Orange, au Rouge, ou parfois au Bleu. Ce n'était peut-être qu'un détail, mais il était plus que visible une fois qu'une personne était vraiment en face de lui, et n'était pas toujours facile à expliquer pour éviter la découverte de son "Secret".

Toujours est-il que la demoiselle finit par l'aider, utilisant la bave du monstre tentaculaire pour le libérer. Il ne comprenait pas exactement tout. En fait, il avait surtout été très étonné en réalisant que, malgré qu'elle ait désigné la substance comme particulièrement dangereuse, corrosive, etc., celle-ci ne se gênait pas pour la porter dans ses mains. Tout ceci avait donné lieu à une drôle de scène. L'Hybride vivait assez mal le fait de voir les mains de l'Elfette s'abîmer autant à cause de lui, et avait manqué à plusieurs reprises exiger qu'elle arrête, qu'il devait y avoir d'autres solutions, mais lui même n'en avait pas été capable. Et d'une certaine façon, tant mieux, puisqu'il était maintenant libre, et que, pour une raison qu'il ignorait, et qu'il ne pouvait même imaginer, l'Elfette venait de reconstituer ses mains, sans le moindre problème, comme si ce n'était qu'un phénomène naturel. Une sorte de cicatrisation ultra-développée et avancée. Michan décida de ne pas en parler, pas pour le moment, en tout cas. Il commençait à trouver la femelle de plus en plus fascinante, de part sa force physique, et cette capacité de régénération unique en son genre. Mais cela la rendait également encore plus dangereuse. "Et non moins désirable." aurait ajouté Enolys, s'il avait été ici. Toujours est-il qu'elle avait posé une question, et que toute question mérite réponse. Le garçon allait donc lui fournir la réponse qu'elle attendait. Ou qu'elle n'attendait pas. La vérité en tout cas. Pourtant, avec le stress, Michan, Meï et Enolys étaient incapables de diriger sereinement le corps de l'Hybride. Ainsi..

- J-Je.. Je.. Je.. suis.. Cartographe. J'fais des cartes, quoi. Et je.. Je cherche des.. J'cherche des trucs avec des cartes. D-Des.. Trésors.. A-Ar.. Artéfacts..

Le changement de ton de la personne avait du être clairement visible. Timide et réservé pour Meï, Calme et le plus posé possible malgré la peur pour Michan, et assuré, presque insolent, avec Enolys. Ses yeux avaient certainement également virés à de multiples reprises de couleur, avant de revenir à un orange à peu près serein, tandis que l'autre virait légèrement au violet, preuve de son instabilité actuelle. Il expira et inspira à deux ou trois reprises, et ramassa son sabre, qu'il rengaina. Ses habits étaient encore humides de la substance que l'Elfette lui avait permis de retirer, mais au moins, il était libre. Et ne s'en plaindrait pour rien au monde. Prenant son courage à deux mains, il posa une question à son tour :

- Et.. Vo-T-Toi, que fais-tu ici ?

Les discussions allaient bon train dans la tête du Terranide, chacun doutant de si la personne en face d'eux était amicale, hostile.. Tout ceci était toujours difficile à déterminer.

Pourquoi Valériane s'intéressait-elle à ce garçon ? Certainement pas par compassion, ni par pitié. Mais pas intérêt. La jeune femme n'était plus capable d'éprouver de la générosité envers les autres et en générale, elle tuait beaucoup plus d'individus qu'elle n'en sauvait. Alors pourquoi libérer celui-là ? Pourquoi ne pas le tuer, comme ce monstre ? Elle n'avait qu'un mouvement à faire. Un geste, un seul. Mais elle n'avait tout simplement pas reçu d'ordre. Elle ne tuait pas par plaisir et n'éprouvait pas de déplaisir non plus à le faire. Mais en tous les cas, elle ne supprimait jamais la vie sans raison. Si son maître n'avait pas donné d'indication concernant la vie ou la mot d'éventuel témoin, elle n'avait aucune raison de lui faire du mal. En revanche, il pouvait lui servir d'une quelconque manière que ce soit, ou plus précisément, servir les intérêts de Verox.

Il était étrange ce jeune homme. Elle sentait qu'il n'y avait pas qu'une part humaine en lui. Un hybride ? Peut-être..., mais autre chose clochait. Elle fut rapidement spectatrice d'une bien curieuse chose, alors que Michan lui expliquait enfin la raison de sa présence. Il ouvrait la bouche, mais différentes voix en sortirent et ses yeux changèrent de couleur. Voilà qui aurait pu stupéfier n'importe qui. Mais bien entendu, Valériane resta de marbre.
Il avait parlé d'artefact. Voilà ce que retint surtout la jeune femme. L'information était en effet très intéressante, car Verox était friand de ces choses-là. La jeune femme n'avait pas besoin d'ordre précis pour cela, elle savait d’avance qu'elle devait partir à la recherche de ces choses. Et ce jeune cartographe pouvait la mener jusqu'à elles.

La voix, celle qu'elle avait le plus entendu jusque là, celle de Michan, retentit de nouveau dans la grotte, lui demandant à son tour ce qu'elle faisait là. Valériane laissa quelques secondes en suspens, puis répondit :

- J'obéis.

Elle n'avait guère le droit, ni l'envie, ni le besoin de lui en dire davantage. Elle s'avança, jusqu'à se trouver très proche du jeune homme, à un souffle de lui seulement. Alors elle parla de nouveau.

- Trouvons ces artefacts ensemble, Michan. En combinant ma force et ton savoir, ça ne devrait pas être difficile.

Même si cela se voyait peu, elle était insistante. Elle ne comptait pas laisser cette opportunité lui échapper. Et ce jeune homme rendrait sa tâche plus facile, plus rapide. Et ensuite ? Ensuite... elle aviserait.
Elle avait volontairement ignoré cette sorte d'étrange dispersion de la personnalité, comme s'ils étaient plusieurs dans un seul corps. Disons que pour l'heure, ça ne la concernait pas et que de toute manière, son état ne lui permettait pas franchement d'en éprouver une quelconque curiosité plus poussée.

Michan avait été pris de court. Recevoir une réponse résumée par un simple "J'obéis." était déjà une énigme en soi. Obéir à quoi ? Ou à qui ? Pourquoi ? Comment ? Vu la puissance de frappe avec une simple dague de la demoiselle, elle ne pouvait oser imaginer ce dont la femme était capable, et encore plus si elle était en capacité de manier une quelconque magie. Qui pouvait bien la faire obéir ? Il préférait ne pas l'imaginer pour l'instant, il aurait sans doute le temps d'y penser plus tard, pour le moment, il devait déjà profiter du fait d'être sauvé, ce qui n'est pas rien, tout de même. De plus, alors que l'Hybride était toujours aussi pensif que précédemment, sa capuche noir masquant toujours ses oreilles, l'Elfette s'approcha de lui, dangereusement. A quelques centimètres près. Il n'avait pu s'empêcher de rougir d'une part, et de se mettre dans une posture défensive également, préparé à endurer un coup s'il devait arriver. Mais le coup n'arriva pas, heureusement.  Au contraire, plutôt qu'une arme, ce furent des mots qui s'échangèrent.

- Trouvons ces artefacts ensemble, Michan. En combinant ma force et ton savoir, ça ne devrait pas être difficile. Dit-elle.

L'Hybride n'osa pas répondre au premier abord. Elle était en train de lui proposer d'aller à la Chasse aux Trésors avec lui, donc. Et vu comment elle avait engagé la conversation, il avait plutôt intérêt à s'y tenir. Cela soulevait néanmoins quelques questions pour lui.. Qui allait garder les trouvailles ? Elle ? Lui ? Difficile à affirmer. Le fait est que Michan n'avait aucune chance face à elle en combat singulier. Il parviendra peut-être à se défendre, mais en aucun cas à riposter. Il n'était pas de force à lutter contre cette femme. Femme qui paraissait d'ailleurs être de son âge, puisqu'il venait d'atteindre sa 18^ème année humaine tout récemment. Si forte et si jeune. Il n'arrivait donc vraiment pas à s'en remettre. Cette femme avait vaincu la créature qui l'avait mis au tapis si aisément. Il se sentait faible à comparé d'elle. Mais après quelques simples secondes de réflexions, la vérité lui sauta aux yeux. S'il part à la recherche d'artéfacts quelconques dans tout le monde, ce n'est pas pour s'amuser, c'est, et il le sait parfaitement, pour devenir plus fort, toujours plus fort. Pour pouvoir un jour repousser tous les obstacles et réaliser ses rêves. Se venger de ses malheurs passés, tout simplement.

Il n'avait finalement pas le choix. Il devait accepter. Pour vivre, et pour devenir plus fort également. C'était un passage forcé, si l'on tient à rester rationnels. La décision étant prise, et plus à prendre, l'Hybride prépara une réponse, avant de réaliser qu'il lui manquait une donnée follement importante : Le patronyme de l'Elfette. Elle connaissait son nom, il était en droit de connaître celui de cette étrange créature, tout aussi charmante que fascinante.

- Je.. Ouais. O-Ouais. Bon.. Bonne idée ! Mais.. Vous avez un.. Nom ?

.. Il était franc avec lui même, l'insistance inexpressive de la demoiselle l'effrayait, l'effrayait au haut point.

Michan semblait vraiment intimidé et un instant, Valériane se dit qu'il était possible qu'il refuse son offre et part en courant. Elle voulait garder ces artefacts pour elle, ça ne semblait pas un mystère et elle ne cacherait d'ailleurs pas cette vérité si le jeune homme le lui demandait. Elle était bien assez capable de lui arracher ces objets puissants s'il le fallait.
Elle était très proche de lui et il semblait un peu mal à l'aise. Avait-il peur d'elle ? Craignait-il qu'elle ne le tue ? Où bien étais-ce parce qu'elle était une femme et lui un homme ? L'esprit étrange de la jeune femme se disait qu'il s'agissait sans doute d'un peu des trois, mais elle ne s'en formalisa pas. Elle ne pouvait juger un tel comportement car ça lui était complètement égale. Tout ce qu'elle voulait, c'était servir son maître et lui ramener ces artefacts en main propre.
Michan hésita donc un court instant, jugeant le pour et le contre, un peu perdu dans d'autres pensées inconnues dans doute, avant d'accepter sa proposition et de lui demander son nom.

L'elfette avait en effet omit de se présenter. Étais-ce un simple oubli ou une volonté de rester anonyme ? De toute manière ça n'avait aucune espèce d'importance. La jeune femme se redressa et posa une main sur sa poitrine avant d'annoncer :

- Mon nom est Valériane. Mettons nous en route. Maintenant.

C'était sans appel. Elle se détourna cependant pour aller chercher les fioles de sang qu'elle était venu récupérer. Elle les disposa dans la paume de sa main, les faisant mystérieusement disparaître les unes après les autres. Ceci fait, elle repoussa une mèche de cheveux de devant son visage et se tourna de nouveau vers le jeune cartographe.

- Guides moi. Je te suis.

Le ton de sa voix était décidément capable de désorienter n'importe qui. Tout était dans l’impératif, elle semblait vouloir tout contrôler. Elle était aussi saisissante qu'intimidante. On ne savait jamais si on devait lui faire confiance et ce devait être le cas de Michan. Mais elle ne savait pas faire autrement.

Son ton était toujours aussi insistant. En fait, elle semblait en même temps un peu plus vivante, mais surtout beaucoup plus effrayante que précédemment. Michan était persuadé d'une chose : Il ne pourrait pas s'enfuir vivant. Ou plutôt que s'il décidait de s'enfuir, ce serait vers la mort. Et autant avait-il pu être désespéré et serein à l'idée de décéder plus tôt, après avoir été sauvé d'une façon pareille, il était hors de question que son aventure s'arrête ici. Mais tout de même, l'insistance de la demoiselle l'effrayait. Elle s'appelait.. "Valériane" ? Un beau nom, sans doute. Mais vu sa situation, il ne pouvait pas vraiment se permettre de juger. Qu'allait-il faire ? Il n'en était pas sûr lui-même. Pouvait-il lui faire confiance ? L'Hybride en doutait de plus en plus. Elle était si insistante. Elle pourrait sans doute l'éliminer à tout moment et se casser avec les "trésors". En fait, il devait trouver une solution pour partir d'ici. Ou pour la mettre suffisamment en danger pour pouvoir fuir. Même s'il avait peur de ne pas être capable de la laisser dans le pétrin de toute façon. Le fait est qu'il connaissait l'emplacement d'un objet plutôt unique à proximité d'ici. D'après le peu de données que la carte qu'il possédait à ce sujet pouvait offrir, il semblerait que l'objet soit enfermé au fond d'un énorme Donjon, le genre donjons qu'on ne voit que dans les fins des Jeux Vidéos trouvables sur Terre. Un endroit, en somme, supposé être plutôt dangereux, et pas forcément des plus simples à parcourir, surtout à deux. S'il la faisait passer devant une fois dans ce paradis des pièges, il aurait une chance de la mettre dans une situation difficile. En tout cas, c'est ce qu'il espérait.

- O-Ouais, bien sûr, suis moi. Dit-il, sortant une carte jaunie de son sac, celle-ci datant vraisemblablement de quelques siècles.

L'entrée du Donjon était à environ une dizaine de kilomètres au Nord-Ouest d'ici. Plus au Nord qu'à l'Ouest, sans doute. Il n'avait pas vraiment pensé à s'en approcher seul, conscient qu'il n'avait aucune, absolument aucune chance d'en réchapper seul, mais il était accompagné cette fois ci, même si sa compagnie n'était pas spécialement la personne avec qui il avait le plus hâte de voyager. Il n'avait pas le choix, de toute façon, alors ça ferait l'affaire, non ?

Un autre phénomène étrange était en tout cas survenu. La demoiselle avait récupéré des fioles du sang de la créature qui avait séquestré l'hybride, et ça semblait d'ailleurs être la principale raison de sa venue. Mais les fioles avait disparues. A l'instant où il avait tourné la tête, alors que celles-ci étant dans ses mains, elles avaient disparues sans laisser la moindre trace. Encore quelque chose d'étrange qu'il ne saurait expliquer. Enfin, il ne comptait pas en parler, tout comme le fait qu'elle avait semblé avoir la capacité exceptionnelle de se regénérer en cas de dégâts corporels. Eviter les sujets qui fâchent, pour le moment.

L'hybride avait donc entrepris le déplacement, ayant rassemblé ses autres affaires légèrement éparpillées dans la caverne, et se prépara à rejoindre la sortie. Il ne s'attendait pas à beaucoup de conversation durant le trajet, bien sûr, mais il espérait tout de même que son acolyte du moment, Valériane, se dénouerait un peu. Enfin, dans le cas où elle est réellement quelqu'un, avec des sentiments, et que tous les légers signes qu'il avait pu percevoir n'étaient pas juste des folies de sa part. Dans tous les cas, après son "J'obéis", il était clair pour l'hybride qu'il ne pouvait laisser l'Elfette garder les artéfacts qu'il trouverait. Surtout sans savoir à qui elle "obéit". D'ailleurs, il avait bien intérêt à cacher la vérité sur son sabre, mais ce ne devrait pas être un secret trop difficile à garder, après tout.

Valériane ignorait complètement où ils allaient se rendre et ce qui les attendrait là-bas. Mais ce n'était pas un problème. Son créateur l'avait faîte quasi immortelle, indestructible et surtout dotée de pouvoirs stupéfiants. Il n'y avait rien sur cette terre capable de l'abattre. Du moins, Verox en était persuadé. Il avait lourdement travailler pendant des décennies pour arriver à ce résultat.
Michan avait alors un seul et unique avantage sur elle : il connaissait le chemin. La belle elfette allait donc devoir le suivre à l'aveugle et lui faire confiance là-dessus. Mais peu importe, rien de grave ne pouvait arriver. Le jeune homme semblait honnête envers elle, tandis que de son côté, Valériane lui cachait l'essentiel. Si elle avait été normale, nulle doute qu'ils seraient devenus de très bons amis. Elle avait toujours été sociable et généreuse, attentive aux autres. Mais tout ça avait disparut depuis longtemps et le fautif semblait inatteignable. Tout semblait perdu pour elle depuis longtemps.

Les deux individus se mirent en marche, direction Nord-Ouest. Valériane était silencieuse, comme à son habitude, regardant droit devant elle, mais néanmoins attentive à tout ce qui se passait autour. En cas de danger, elle serait capable de les protéger. Défendre quelqu'un n'était pas dans ses habitudes, mais les tuer gratuitement non plus. Elle n'avait aucune raison de s'en prendre à ce cartographe. Sauf bien sûr si celui-ci se montrait subitement agressif ou... gênant.
Le lieu où ils se rendaient semblait plutôt éloigné de cette grotte, car de longues minutes passaient, puis une heure entière. Mais bien évidemment, la jeune femme ne manifestait aucune impatience. Rien. Elle était muette. Du moins pendant un long moment avant de demander :

- Sais-tu te battre, Michan ?

Elle devait savoir quel était son niveau. Pour se rendre compte si elle allait devoir le défendre sans cesse ou s'il était un minimum capable de se débrouiller contre un ennemi de base. Après tout, il serait dommage qu'il meurt si tôt.

Les environs étaient calmes, aucun monstre ne semblait décidé à leur sauter dessus. Peut-être avaient-ils assez de flair pour savoir qu'ils n'avaient aucune chance, ou alors c'était l'heure de la sieste. Le soleil était encore assez haut dans le ciel, la nuit ne tomberait pas avant plusieurs heures, mais il faisait chaud.