- On aurait peut-être du choisir une humaine, c'est une valeur sûre. Il aime peut-être pas les petites chiennes.- Quoi ?! Mikaël, si ça c'est pas une valeur sûre, alors moi je donne ma démission. Tu l'as bien regardée ? Elle sera parfaite. Les deux hommes étaient deux de mes plus proches et de mes plus solides guerriers, sous les ordres depuis maintenant quelques années. Malgré tout, je restai u personnage fort mystérieux à leurs yeux et aucun ne pouvait prétendre réellement me connaitre. C'était mieux ainsi. Ce soir, on fêtait mon anniversaire, mes trente ans exactement. Ces années étaient passé si vites, j'arrivai à peine à y croire. Peu d'hommes pouvaient se vanter d'une telle progression de carrière en si peu de temps. J'étais un homme respecté, jeune, mais pas moins expérimenté. Et c'était tout ce qui comptait.
Pour l'occasion, mes hommes avaient tenu à me faire une surprise. Je n'étais pas réputé pour être un coureur de jupon, contrairement à eux. Je ne collectionnais pas les femmes, ni aucune autre conquête particulière. Mes hommes me reprochaient souvent d'être obsédé par ma carrière et mon rôle de dragonnier, et de ne pas assez profiter de la vie et des bonnes choses que la nature nous offrait. Peut-être avaient-ils raison. Mais je n'avais plus le cœur à cela depuis bien longtemps.
Mes hommes étaient partis chercher l'esclave à cheval, puis l'avaient ramené en douce dans ma propriété. La fête se situant dans la grande salle réservée au banquet, endroit fort peu utilisé à vrai dire, ils avaient caché le présent dans la cave à vin, une petite salle adjacente aux étagères et aux tonneaux remplis de ce liquide parfumé et délicat qui ne manquerait pas de couler à flot ce soir. Pendant que mon valet accueillait et installait les invités, moi j'observais mon reflet dans le miroir plein pied de ma chambre. Pour l'occasion, j'avais enfilé une tenue élégante de couleur bleu et argent. Une tunique serrée à la taille, un pantalon noir, des bottes parfaitement cirées, j'étais prêt... mais pas certain de pouvoir profiter pleinement de cette joyeuse petite fête. Je n'étais pas du genre festif à vrai dire. J'ai rajusté mon col, et puis je suis allé les rejoindre.
Après avoir salué tout le monde, nous n'avons pas tardé à nous installer autour de la longue table de banquet. Il y avait là pas loin d'une cinquantaine de personnes et je ne connaissais pas la moitié d'entre eux pour tout avouer. La musique raisonnait, les mets et les vins s'enchainaient, les rires et les discussions battaient leur plein et moi, j'observais tout ce petit monde d'un air interdit, un énième verre à la main. Je ne m'ennuyais pas vraiment, mais j'étais ainsi, tout sauf exubérant, plutôt introverti.
C'est alors que
Bahin se leva et fit sonner le cristal de son verre pour attirer l'attention de tout le monde. Il commença par un discours bourré d'humour et de sincérité en mon honneur. Il avait toujours été doué pour attirer l'attention et raconter des histoires. Et après quelques anecdotes et compliments, puis une gorgée de vin en mon honneur, il me fit signe d'approcher. Me levant alors, je m'approchais et il me guida un peu plus loin dans la pièce, une main sur mon épaule, jusqu'à une cage installée dans un soin de la pièce. A l'intérieur, une créature étrange, mais non moins saisissante.
- Je sais qu'on avait dit pas de cadeaux, Silas. Mais les gars et moi on a pas pu résister. On a acheté cette donzelle au meilleur marché d'esclaves de tout le pays et crois-moi, elle vaut le détour. Le vendeur m'a confirmé qu'elle était exceptionnelle ! Alors je me suis dit qu'elle ferait une bonne distraction. Qu'est-ce que t'en dis ?Le visage vide de toute expression, j'observais la créature en silence, retenant un soupire. Le but était clairement que je m'envoie en l'air avec cette belle hybride. Je connaissais assez le genre de mes hommes. Ce n'était pas qu'elle ne me plaisait pas, cette esclave dégageait quelque chose de clairement saisissant et donnerait envie à n'importe quel homme. Je n'étais simplement pas certain de le vouloir. Bahin me frappa amicalement dans le dos en riant puis entreprit d'ouvrir la cage, tendant une main à l'esclave.
- Allons, viens toi. Je suis sûr que tu meurs d'envie de te dégourdir les jambes après ce voyage, hein ? N'aie pas peur, si tu obéis sagement, personne te fera de mal ici.Silas approuvait. Bahin était une véritable brute au combat. Mais c'était un homme avec un fond particulièrement bon, et malmener des esclaves n'était pas dans ses habitudes. La plupart du temps, il les traitait avec gratitude. Du moins tant qu'ils obéissaient.
Il la fit donc sortir et je pu l'observer mieux encore. Je n'étais pas certain de pouvoir déterminer de quel animal elle avait le sang, mais c'était sans aucun doute un canidé. Elle était belle, bien présentée, bien faite, cela ne faisait aucun doute. Bahin me présenta à elle et je la saluais d'un signe de la tête avant qu'il ne l'entraine pour l'inviter à danser devant tout le monde, sur la table qui venait d'être en partie débarrassée d'ailleurs.
Tout le monde semblait apprécier l'idée. Bien qu'exhiber les esclaves ainsi me plaisait peu, je laissais faire les choses et me contentait de l'admirer. Je n'étais pas toujours réputé pour être un homme doux et sensible, j'étais même parfois le contraire.
Enfin, la fin de la fête sonna et la quasi totalité des invités rentrèrent chez eux, ivres, mais particulièrement joyeux. Après avoir salué et remercié une dernière fois les dernières personnes, j'ordonnais à mon valet de me faire couler un bain et de faire monter l'esclave dans ma chambre. J'avais aussi demandé à ce qu'on lui donne de quoi boire et manger.
Une heure plus tard, j'étais de retour dans ma chambre, propre et détendu, avec pour seul vêtement une serviette autour de la taille. Je ne fis pas tout de suite attention à la créature présente, allant tout d'abord jeter un coup d’œil au dehors. Il neigeait.
- Dis-moi qui tu es, et d'où tu viens.Si ma voix avait été plus dure, cela aurait sans doute sonné comme un ordre. Mais j'étais serein et de plutôt bonne humeur, alors celle-ci était restée posée et presque douce. Certes, je ne la regardais toujours pas, mais la politesse n'était plus vraiment de mise face à une esclave.