Sentez vous cette odeur ? Non ? Sentez ! C’est comme…
…des mûres !
Oui, des mûres pourries qui tâchent le sol et dont la senteur moisie emplie vos narines et vous écœures au plus haut point. Ces fruits issus des ronces les plus solides et coriaces. Elles arrivent de nulle part, croient, se fixent à tout et se répandent partout tel un poison qu’on ne cesse de repousser avant de les voir revenir de nouveau et avec la même vigueur à couvrir toute l’espace possible. Elles donnaient à ces vieux bâtiments glauques situés dans les quartiers de la Toussaint un aspect encore plus effroyable qu’il ne l’était déjà. Cette bâtisse pour fou, massacrée par les griffes du temps, n’était plus qu’un vestige d’une probable gloire passée. Les rumeurs les plus folles avançaient que cet endroit avait jadis abrité les plus grands noms de la psychologie, des hommes tous devenus fous en ayant découvert le fin fond de la pensée humaine, peut être en ayant pratiqué dans cet endroit. Qui sait ? Bien que ce maître qu’est le destin eut gain de cause sur l’esthétisme de cet endroit, cet asile sans nom fonctionnait toujours. Il abritait en son sein la Folie pure, cloisonnée entre quatre murs capitonnées, mais bien présente. Parmi les clients, pour la plupart sans-nom, se trouvait un spécimen que l’on qualifierait de « prometteur ». C’est-ce dernier que deux hommes en blanc étaient venus chercher.
L’un d’eux le plus vieux était baraqué et recouvert de multiples cicatrices hideuses sur le visage le rendant affreusement laid, son strabisme divergeant lui donnait un air complètement idiot voir comique mais il semblait malheureux comme frapper par la misère constante qui régnait en ces lieux. L’autre, plus jeune et mince sans physique incroyable s’adressa à l’aîné.
« Qui va-t-on chercher cette fois ci pour l’arroser ? Demanda-t-il avec une impatience digne d’un petit enfant que l’on emmenait dans un magasin de jouets. »
« Sans doute l’un de nos plus atteints de patients. J‘peux pas l‘saquer.»
« Ah ? Qu’a-t-il d’original c’gars là ? Encore un qui congèle son gosse et qui égorge les passants qui le regardent de traviole ? Répondit il avec un air amusé. »
Le vieux se tourna vers le jeunôt et prit un air sérieux avec les sourcils fronçant ses yeux anormaux. Le reflet vitré de ses orbites faisait froid dans le dos et le ton de la conversation tourna du comique au glacial. Le vieux rétorqua à l’imbécile heureux.
« T’penses que tu peux l’gérer parce qu’il serait un de ces fous dangereux pervers pédo comme l’autre gus qui s’est finalement étranglé avec sa propre langue ? Non, ce gars là est pire que tout ce que tu as put t’imaginer. Les psys pense qu’il s’imagine être un dieu vivant ou un messie un truc dans l’genre. Mais il est pas plus saint que j’suis évêque. Il a tenté de violer à maintes reprises le personnel féminin… comme masculin, il déclare des discours les plus hideux, faisant l’apologie d’un asservissement de l’humanité et d’un massacre systématique de ses opposants. Et ses écrits ne sont qu’incitations à la haine, et invocations de démons et de forces obscures. J’en ai lu un bout, je n’ai pas dormis de la s’maine. Brrr… je préférai qu’on se magne, qu’on le rince et qu’on l’r’foute dans son cachot vite fait bien fait. »
Le jeunôt sur le coups balayé par ces froides déclarations se tût jusqu’à leurs arrivés devant la porte de cet être que l’on taxait de démon. Pendant que le vieux faisait tourné la clé dans la serrure de l’imposante porte en métal, ce dernier lui dit.
« J’vais t’le mater vite fait bien fait ton gars il va sentir la quenelle passée s’il s’imagine pouvoir me baiser comme ça. »
Le vieux ne répondit pas, et ouvrit la porte dans un grand clong… clong… clong…
Notre héro, exténué par une journée de travail, entre ses rendez-vous avec le journal, ses dédicaces, ses déclarations publiques à la TV il n’avait plus de temps pour lui durant la journée. De retour dans son immense propriété, il se sentait harcelé par les filles généreuses qui peuplaient son territoire. Tant de charmantes êtres, tous vêtus de bikinis à cause du règlement imposé par le maître de maison. Bart décida pour éviter à ces dernières un nouveau choc passionnel semblable à celui qu’elles avaient toutes subies la nuit dernière, de repousser leurs avances qu’un temps. Cela permettait aux ladies de se préparer mentalement à rencontrer l’espace infini et aussi de faire « monter la sauce ». Ainsi pouvait il profiter d’un peu de temps à lui pour continuer l’écriture d’un nouvel ouvrage sur sa mission divine. Tandis qu’il déclamait des phrases d’une puissance cosmique infinie, il entendit l’immense pendule qui trônait dans son bureau. « Clong »… « Clong »… « Clong »…
« Tiens, il est déjà si tard, se dit il, je vais aller me doucher et ensuite combler mes charmantes brebis »
Il posa ses écrits sur son grand bureau fait dans un bois tropical assez cher, et se dirigea vers la salle de bain en traversant le long couloir qui séparait son quartier de travail, de ses quartiers privées. Il ne prit pas la peine de refermer les portes derrières lui. Deux filles vint se greffer à sa course, il déclara sur un ton amusé et moqueur :
« Désolé les filles, je m’occupes de vous plus tard, vous pouvez vous chauffer dans ma chambre. J’arrives après la petite douche. Eh eh eh. »
Arrivé dans la salle de bain, il se dévêtit, balança ses vêtements sur le sol de marbre et sauta dans la douche derrière d’imposants rideaux de douches pourpres. La douche étant faite pour accueillir plus d’une personne, ces rideaux donnaient avec la lumière une ambiance visuelle des plus kitch. Merci à l’entreprise de rideaux de douche qu’il racheta la semaine dernière. L’eau chaude coulait, le savon moussait et la vapeur qui se dégageait emplit rapidement la pièce. Bart aimait bien cet ambiance sauna qui se dégageait à chaque fois, et pour une fois il pouvait tranquillement se frotter de partout sans craindre que ses ladies perdent connaissance sous l’intense vision qu’il offrait volontiers à ses brebis. Et puis soudain, un violent mal de tête frappa notre messie. Sous l’intense violence qui frappait son crâne, il glissa en arrière, tomba dans le rideau de douche et se sentit comme aspiré dans un puissant vortex avant qu’un voile noir ne se répande sur son visage et ne lui fasse perdre connaissance.
« PUTAIN ! BORDEL qu’est-ce qui t’as pris de balancer tout le jet d’un coup ? Tu veux le tuer ou quoi ?! Aide moi à la relever, hurla le vieux sur son collègue et sous-fifre moral. »
Alors qu’ils se précipitèrent sur le corps inerte de la Folie pure, le jeune répondit tout angoissé.
« J…j’ai pas supporté qu’il me traite de gonzesse. Et… t’as vu son regard ? Je suis sûr qu’il allait passé à l’acte… qu…qu’il allait me violer ! C… c’est un grand malade ce type. T’as entendu ce qu’il disait ?! Et ce qu’il a peint sur les murs… Si il allait passé à l’acte avec ça… je n’oses pas imaginé. Eh ! Laissons le là et repartons, il ne vaudra rien de mieux qu‘à l‘état de cadavre.»
« Non, ce serait corrompre notre santé mentale que d’être responsable de sa mort. Je vais le ramener dans sa cellule, toi va chercher un médecin. S’il se réveille je le préférais là bas et facilement enfermable s’il dégénère… Oh… mais… il se réveille ! Plaques lui les bras je vais chercher la camisole. »
Tandis que le vieux empoigna la camisole pour se précipiter et emballer le colis. Le patient ouvrit petit à petit les yeux et à la grande surprise générale les deux constatèrent un changement radical dans la psychologie de l’individu. Son regard semblait accrocher les alentours, comme si ses hallucinations s’étaient estompés pour lever le rideau sur le vrai monde. Il balbutia aux deux blouses blanches.
« Mais… qu’est-ce que je fous là moi ? J’étais dans ma douche et là j’suis dans des vieilles douches communes pourries. Aidez moi à me relever vous deux. Tsss… Puis il constata la camisole qui bloquait ses membres. Putain ! Mais qu‘est-ce que vous m‘avez fait bande de connards ! Détachez moi tout de suite vous savez pas qui je suis ou quoi ? Faut faire consulter quand on a le cerveau aussi endommagé. »
Les deux compères se regardèrent avec l’air totalement déconcerté, ils ne répondirent rien au délire du patient alors qu’ils le ramenaient dans sa cellule. On pouvait l’entendre dire « Lâchez moi ! Laissez moi ! C’est un enlèvement odieux ! ». Puis ils allèrent directement voir le psychologue chargé de son cas pour leur dire la nouvelle, mais ils apprirent que ce dernier s’était donné la mort pour des raisons encore inconnues. Mais qui serait le prochain psychologue qui suivrait ce dangereux fou furieux ?