L'odeur stagnante des poubelles. Cette odeur qui prends à la gorge, qui remplie les poumon d'elle même, comme si c'était une entité à part entière, dont on pouvait presque sentir la texture poisseuse sur sa langue. Le froid glacial de la soirée, si présent dans les courants d'air du quartier ne parvenaient pas à rafraichir cet endroit. Les mur irréguliers de constructions mitoyennes fait à la va vite faisait ressembler la ruelle à une suite de virage en épingles. Des contenaires, des cartons détrempés. Au sol, bouteilles cassées, préservatifs usagés, Une évacuation qui refoule...
Maxence sorti de la poche interieur de sa veste une pall mall qu'il alluma, afin de chasser l'odeur de ses poumons. Il prit une longue inspiration, et souffla lentement sa fumée vers le ciel.
Voilà deux mois qu'il n'était pas revenu ici. Deux mois depuis que « l'amoureux de la Toussaint » avait été tué. Ici même, après s'être occupé de sa dernière victime. Une prostituée, comme toute les autres. Louna. Elle l'avait bien aidé, il fallait lui reconnaître. Malgré elle. Bon dieu, ses pipes étaient divines... Et c'est pourtant grace à son épaule, gravé d'une profonde morsure, qu'il avait éprouvé le plus de jubilation.
Une fois les analyses faites, le schéma était simple. L'amoureux prenait contact avec les filles du coin sous sa forme humaine. Il couchait avec elle, ou il le pouvait. Il les marquait a coup de dent. Et la nuit de la pleine lune il revenait les voir pour les mordre à nouveau. Sous sa forme de lycan.
Louna avait servie d'appât; Louna y était restée. Maxence avait bien faillit faire de même. Nom de Dieu, s'il s'était attendu à ça...
C'était là, sans ce renfoncement que gisait Louna. Deux mois et on voyait encore les traces brunes de sang mal rincées. Maxence regarda le sol à nouveau. Dire qu'il aurait pu lui aussi finir là, couché, éventré, son sang venant se mêler à celui de la pute dans les égouts. Quand on y pense...
- Connerie... marmonna-t-il en donnant un coup de pieds dans une bouteille qui alla se briser contre une poubelle. C'est comme ça qu'il allait finir ? Après tout... C'est bien comme ça que ses collègues lui prédisait sa fin. Une fin de minable pour un minable.
Mais était-il pour autant plus heureux de s'en être sorti ? A moitié mort, plusieurs jours d'inconscience à l'hôpital, avec entre l'épaule et le cou une nouvelle cicatrice sur le tableau abstrait de son épiderme. Le temps de se remettre, et ensuite à nouveau chargé par les supérieurs. Aucune félicitation pour avoir mis fin aux meurtres. Au contraire, on lui reprochait d'avoir mis en danger la vie d'autrui.
D'une pute, merde ! Ils n'avaient pas bougé le petit doigt pour elle. C'était lui qui avait reglé cette histoire ! Et il était sur que cette pauvre fille devait se sentir heureuse, là où elle était, d'avoir pu servir à arrêter ce massacre !
Retour a la maison au bout de deux semaines, immobilisation de 30 jours. Le temps d'une nouvelle Pleine lune. Le temps de comprendre qu'il s'en était encore moins bien sorti qu'il pensait. Il s'endort assommé par le scotch, il se réveillé dans son lit au milieu des lambeaux de ses draps et de son boxer, sa fenêtre fracassé, couvert du menton à la queue d'un sang qui n'est pas le sien, avec entre les dents des morceaux d'un truc qu'il ne se souvenait pas avoir jamais mangé. Reveillé par un appel en urgence de son superieur.
- Ton congé est fini Blanche-neige, on a un nouveau salopard sur les bras.
Il s'est parfaitement vu, arrivé sur la scène de crime, à grand renforts de flash lumineux, dévorer la gorge de cette gamine, une lycéenne qui rentrait trop tard d'une soirée trop arrosée. Il a vu son chemisier déchiré par le centre avec une lame si aiguisée qu'elle avait entamé le soutient-gorge et le ventre de la fille, et a immédiatement compris qu'il avait fait ça avec une griffe, plantée sur une mains au bout d'un bras couvert de fourrure grise, deux fois plus gros que la normale. Un bras qui était sensé lui appartenir, mais qu'il n'avait jamais vu ainsi.
Les marques de ses crocs pendant qu'il se penchait sur elle, les griffures de ses hanches pendant qu'il la saisissait comme un mannequin de paille et la pénétrait violemment. Le bruit de ses hurlements, le bruit de la chaire qui cède sous la pression de son sexe, et ses propres halètements de chien en rut...
- Ça y est, t'as pété tes derniers plombs, comme ils avaient dit.
Il avait accepté l'enquête. Il avait surtout enquête sur lui-même. Il n'était pas fiché au central malgré toutes ses mises à pieds. La semence abondante qui s'échappait de la fille ne lui causerait pour le coup aucun ennui.
Il était replongé dans le folklore, dans les romans de science fiction, dans les films, puisque la science tout coup affirmé qu'un loup-garou n'était qu'une légende. Il lui fallu se contenter de quelques règles.
Il était devenu un Lycan. Il allait devoir se surveiller à chaque pleine Lune.
Mais qu'est ce qu'un foutu Garou foutait ici ? Est-ce qu'il était une erreur de la nature , Est-ce que tout les serial killers étaient en fait des monstres de légendes ? Les vampires, ça existe ? Les anges, les démons ? Est ce qu'il allait maintenant se bruler le cul s'il touchait une petite cuillère en argent ?
Il y avait des tas de questions. Et peut-être que sous ces tas d'ordures se trouvait des réponses. Là où tout avait commencé pour lui.
- Connerie, répéta-t-il en envoyant voler d'une pichenette sa cigarette consumée qui alla exploser en une gerbe de braises contre un mur. C'est trop romantique tout ça. « Le début de tout ». Il se voyait mal incarner un jeune apprenti au début d'une quête mystérieuse dans les « abyssales obscurités » du monde. Pas à plus de trente balais, pas avec une bouteille de Jack Daniels par jour dans le sang, les cheveux blancs, et deux fantômes qu'il trainait derrière lui comme des boulets rivés à ses pieds. Des fantômes qui, dans une autre vie, l'avait appelé « papa », et « chéri ».
Plongé dans ses pensées, il s'alluma instinctivement une nouvelle cigarette, et observa longuement la lune dont les quartiers se remplissaient progressivement. Dans quelques jours, il allait devoir dormir à nouveau avec ses chaînes. L'idée lui hérissait déjà les cheveux sur sa nuque.