Une journée comme les autres : Miya s'était levée trop tôt, trop solitaire, s'était habillée avec les premiers vêtements qu'elle avait trouvés, et coiffée d'une main passée dans la crinière désordonnée de ses cheveux. Pas de maquillage, pas d'autres bijoux que l'anneau solitaire à son annulaire gauche. Elle s'était passée de l'eau sur la figure, et avait un peu pleuré avant de se sécher le visage. Elle s'apprêtait à sortir de sa chambre, à l'étage du bar où elle travaillait, mais avant cela, elle barra d'une croix le jour de la veille. Une journée de plus s'était écoulée, sans lui.
L'immortelle n'avait pas besoin du calendrier pour savoir depuis combien de temps exactement Ryuga avait disparu. Mais c'était un rituel, un autre poignard qu'elle s'enfonçait dans le coeur, à chaque nouvelle rature. Une fois au bar, elle salua tout le monde d'un chaleureux sourire - il était si facile de faire semblant que tout allait bien ! - et prit un café avant de servir les premiers clients. Miya détestait le café, mais au bout de presque deux ans, elle a fini par s'habituer au goût amer de cette boisson au parfum pourtant si délicieux... La matinée, passe, tranquille, et arrive la course du midi, où le bar se retrouve bondé d'hommes d'affaires pressés, et d'étudiants plutôt tranquille. Il y a un groupe qu'elle finit par bien connaître, et qui pense être familier avec elle ; Miya les trouve juste amusants. Ils lui font régulièrement partager leurs cours, auxquels elle s'intéresse plus ou moins, selon la matière. Ce qui lui plaît, chez ces jeunes, c'est leur insouciance, et la façon dont un tout petit problème leur semble être la fin du monde. Ca avait un côté charmant.
Aujourd'hui, donc, elle essayait de s'intéresser à un cours de philosophie, auquel elle ne comprenait pas grand chose... Après un sourire désolé, elle partit s'occuper des autres tables, servir les bento commandés. Alors qu'elle pensait retourner voir son petit groupe d'étudiants, elle vit un jeune homme seul, à sa table. Elle vint le voir, lui servit un sourire et demanda :
- On s'occupe déjà de vous ? Ou puis-je prendre votre commande ?
Se tuer à la tâche était un bon moyen de se changer les idées, et dans cette matière, Miya était imbattable.