Ville de Seikusu, Kyoto, Japon, Terre > Les alentours de la ville

Luzki ѳѳѳ Cachette champêtre

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Vaz Chonaev:
Vaz était suivi. John, son alter ego américain, en était persuadé. La même personne l'avait suivi à travers le centre commercial. A chaque étage, à chaque rayon, lorsqu'il se trouvait un point de vue, il pouvait l'apercevoir, de près ou de plus loin.
Ou de plus loin.
Peut-être qu'il divaguait. Il perdait la boule à force de fuir.
Mais pouvait-il seulement prendre le risque ?

Il avait employé les grands moyens, prenant le bus où, bien sûr, le type l'avait suivi, avant de descendre subitement à un arrêt aléatoire où un autre bus se présentait aussi. Il avait changé de ligne, puis changé de sens de circulation, avait hélé un taxi, payé cash après quelques minutes à conduire en droite ligne. Il avait attrapé le train et était descendu à la première station, donnant sur une zone rurale proche de Seikusu.
Et maintenant...

Et maintenant ?

Et maintenant, il trouvait un point défendable et il attendait.
Il n'avait jamais traqué personne seul. Un groupe de filature comprenait au moins deux piétons et deux véhicules. Il avait pu être suivi, malgré ses précautions. Il n'en savait rien. Le FSB pouvait être paranoïaque et déterminé ; et ça avait déteint sur lui.

Concentre-toi ! Focus, John !

Même dans sa tête, il ne se parlait plus sous son nom de naissance. Vaz, c'était un autre, un alter ego qu'il ne pouvait laisser sortir de sa cachette qu'en présence de Jane ; enfin, d'Aly.

Il marcha un moment. Les étendues dégagées qu'offraient certains recoins des environs le rassuraient, offraient des champs d'observation appréciables malgré les barrières menaçantes des lignes d'arbres délimitant parcelles et chemins.
Il finit par repérer une ferme paisible au milieu d'un grand espace ouvert. Les bêtes semblaient avoir été rentrées. La petite maison, silencieuse, semblait endormie malgré la lumière persistant à une fenêtre. La grange se présentait bien. Elle offrirait un bon point de vue, une bonne couverture.
Il jeta son dévolu sur la bâtisse en bois et combla la distance au pas de course. Il entra un peu précipitamment, dérangeant plusieurs animaux tandis qu'il cherchait une échelle pour grimper et obtenir le meilleur point de vue possible.
Il aurait préféré être discret, mais les animaux, maintenant, commençaient à s'éveiller.
Il semblait bien qu'il venait de griller sa couverture.

"K'tchyorti!" râla-t-il entre ses dents, à l'adresse des bêtes.

Lucie Moreau:
La journée fut rudement longue pour la belle Française. Elle passa sa journée de travail en crèche en plein cœur de Seikusu, à s'occuper des petites têtes brunes, à faire des coloriages et des découpages, mettant des petits bouts de papier et des paillettes partout. Mademoiselle Moreau avait beau aimé les enfants comme s'il s'agissait de sa propre chair, elle reconnaissait que cela restait fatiguant. Bien que les enfants japonais étaient sûrement moins agités, plus sages que les petits monstres français, ils n'en restaient pas moins des enfants. Il fallait savoir les tenir, les rappeler à l'ordre si jamais, mais aussi les débarbouiller, etc...Tout cela pouvait être usant d'une journée à l'autre.

Cependant, quand la rondouillette revenait en ses murs, sa journée était loin d'être finie. Déposant ses affaires dans sa chambre, la jeune femme à la chevelure de feu se défit de ses habits tâchés de chocolat et autres peintures, pour mettre des vêtements bien plus confortables et chauds. Ses débuts et fins de journée rimaient toujours avec soin de ses bêtes. La demoiselle avait réussi à avoir un terrain avec assez de place pour accueillir quelques animaux. Cela lui rappelait un peu sa Provence natale. Elle avait même gardé un petit lopin de terre pour en faire un potager, histoire d'avoir quelques légumes. Il faut dire que tout ce qui est fruits et légumes, c'était très cher au Japon. Il était loin le temps où elle se promenait au marché et que parfois, certains marchands lui offraient des légumes ou fruits touchés.

Hier, Lucie s'était occupée de son potager et avait bêché toute la journée pour refaire des rigoles et ainsi aérer la terre. Elle se disait qu'un jour, elle essayerait la culture de riz. C'était quelque chose que les Japonais mangeaient absolument tous les jours ! Cela lui ferait peut-être une réserve...Quoiqu'il en soit, aujourd'hui, elle s'occuperait de ses animaux. Ouvrant les portes de la grange, elle salua ses amis à quatre pattes, visiblement ravis de la retrouver. S'armant de la fourche située non loin de l'entrée, la Française retira la paille salie, tout en la déposant dans la brouette, et la remplaça par de la chaude et toute propre. Lucie rajouta également du foin pour ses herbivores, quelques grosses poignées de grains pour ses volailles, ainsi que des croquettes pour ses chats. Elle remplit également les gamelles d'eau. Les chiens, eux, mangeraient dans la maison. Elle préférait les avoir avec elle, si jamais il y avait un souci, que ce soit aussi bien une intrusion qu'un simple malaise...

Après sa rude journée, Lucie appela ses deux chiens, Starky et Lola, deux bouviers bernois, et les emmena dans la maison. Bien sûr, pour les régaler, elle prit le temps de leur remplir les gamelles d'eau et de croquettes, mais aussi, dans deux petits bols à part, y mettre un peu de pâtée pour gros chiens. C'était une façon de leur faire plaisir, parce qu'ils avaient été sages toute la journée et avaient protégé la maison. Non pas qu'il y a beaucoup de problèmes au Japon, mais il existe tout de même, et il vaut mieux être prudent que trop laxiste. Elle les laissa ensuite tranquille, pouvant voguer calmement dans la maison. Lucie savait pertinemment qu'ils ne feraient pas de bêtises...

La jeune femme bien en formes se rendit ensuite dans sa salle de bain et prit quelques temps pour se débarbouiller. Une bonne douche ne faisait de mal à personne ! Une fois fait, elle se couvrit d'une simple nuisette noire, la demoiselle à la chevelure de feu se dirigea dans sa cuisine, vers son frigo plus précisément, ne se prenant que de quoi faire un petit sandwich. Elle avait la flemme, ou plutôt, n'avait plus de force pour faire quoique ce soit d'autre. Sa journée avait été longue et difficile. Elle méritait bien le repos du guerrier. À la base, la Française avait prévu de s'installer dans son lit et de se regarder quelques épisodes d'une série très en vogue sur une plateforme de streaming, mais trop épuisée de sa double journée, elle savait que ce ne serait pas le cas. Mettant un pied dans son lit, puis l'autre, se couvrant de sa délicieuse couverture, il ne fallut pas longtemps avant qu'elle ne sombre dans les bras de Morphée...

La nuit se passa calmement. Mais alors qu'elle était en train de rêver de son ex, non pas que ça lui plaisait sincèrement, un grognement la fit se réveiller. Un de ses chiens, Lola, venait de se dresser sur ses quatre pattes, les oreilles légèrement haussées, la truffe en direction de la grange. La chienne semblait sentir quelque chose, ou peut-être avait-elle entendu quelque chose que Lucie n'avait pas capté dans son profond sommeil...La Française devait s'assurer qu'il n'y avait personne dans sa propriété, aussi bien dans sa maison que sur son terrain. Il était même fort possible que quelqu'un lui vienne voler des légumes dans son potager pour lequel elle avait durement travaillé. Elle fit le tour de sa maison bien rapidement, mais Starky et Lola grognaient de plus en plus vers l'extérieur.

Se chaussant de ses sabots de plastique, de son gilet vert par dessus sa nuisette, ainsi que d'une lampe torche, ou plutôt de l'application lampe torche de son téléphone, la jeune femme prit son courage à deux mains et s'avança prudemment vers la grange, là où les chiens semblaient aller...Lucie entama une lente inspection extérieure de la bâtisse, mais comprit rapidement que quelque chose clochait à l'intérieur, vu l'agitation de ses chiens qui grattaient à la porte, mais aussi des animaux restés à l'intérieur.

Au cas où on l'attaquerait, la jeune femme décida de s'armer de la bêche restée à l'extérieur, et la tenant fermement à deux mains, ouvrit brusquement la porte rouge de la grange d'un coup de pied. Elle leva la bêche au dessus d'elle, prête à frapper. Elle n'avait pas vu qui était là, elle ne savait pas pourquoi la personne était là, mais il y avait bien quelqu'un. Levant la bêche au dessus de son épaule, elle s'annonça, en japonais bien sûr, les mains et jambes tremblantes, alors que ses chiens montraient les dents, prêts à attaquer.

- Qui...Qui est là ? Ne touchez pas à mes animaux ! Sortez de ma grange ! Je...Je suis armée et bien entourée!

Elle ne faisait clairement pas la fière, mais elle était prête à se battre s'il le fallait...

Vaz Chonaev:
Lorsqu'au concert du bétail s'ajouta celui des chiens, John sut qu'il avait été irrémédiablement compromis. Que ce soient ses poursuivants ou les propriétaires de la petite ferme, quelqu'un venait à sa rencontre désormais.

Il n'était pas équipé pour un affrontement. Il était parfaitement capable d'incapaciter ou de tuer s'il le fallait, mais il voulait par-dessus tout éviter un acte de violence, qui attirerait l'attention de la police à coup sûr, s'il le pouvait. Ils n'étaient pas en mesure de changer encore une fois de pays, pas encore.
Mais, pour sauver sa vie peut-être, pour tenter de préserver sa liberté sans doute, il devrait peut-être s'y résoudre.

La porte s'ouvrit brutalement, lui arrachant un petit sursaut. Il s'immobilisa, s'efforçant de contrôler sa respiration pour rester calme et ne pas faire trop de bruit ; non pas qu'une respiration lourde de plus fasse forcément une différence ici.
Il attendit un signe lui permettant d'évaluer la situation pendant un temps qui lui parut être une éternité. Le faisceau d'une torche balaya la grange. Une voix féminine s'éleva. Une femme ?

Une lueur d'espoir perça l'esprit du fugitif, qui risqua un regard, découvrant la Blanche enrobée et plus mal apprêtée encore que lui. Courageuse, elle était prête à défendre sa propriété, mais elle était bien seule et bien désarmée. S'il y avait eu un homme, elle l'aurait envoyé. Elle aurait attendu s'il n'avait pas été là. Non, celle-là ne pouvait se reposer que sur elle-même.
Une femme seule était une cible facile pour bien des choses. Bien sûr, la violence était toujours une option, même si les chiens...
Il ne pouvait pas vraiment s'y risquer avec deux chiens en plus face à lui. Mais il y avait d'autres moyens. Il avait besoin d'une cachette et elle avait sûrement des besoins simples à assouvir, comme tout le monde, pour le dire sans le dire.
Une étrangère comme elle, à l'écart de la ville, pas conforme aux canons de beauté du temps
...

John s'y résolut : levant les mains en l'air, il décida de la jouer franc-jeu et de compter sur la sollicitude de son interlocutrice et sur sa belle gueule, comme souvent.

"C'est bon ! Je sors ! Rappelez les chiens, je vous en prie. Je suis confus je... Des types louches me suivent depuis des heures et je n'ai trouvé qu'ici pour me cacher je
... Je ne demande qu'à attendre ici d'être sûr de les avoir semé. Je vous en prie, madame. "

Lucie Moreau:
D'un simple sifflement, Lucie appela ses deux beaucerons.

- Starky, Lola. Au pied.

Les deux chiens obéissèrent à leur maîtresse, se postant devant elle comme pour lui servir de rempart au cas où. La jeune femme se baissa légèrement pour leur caresser la tête, histoire de les calmer afin qu'ils ne se mettent plus à grogner.

- Voilà. Ils ne bougeront pas à condition que vous ne m'attaquiez pas. Sortez...

La Française ne faisait toujours pas la fière. Elle avait du mal à tenir en place, les jambes tremblantes. Pourtant, elle tenait fermement cette bêche, seule véritable arme qu'elle savait utiliser. Mais même si elle avait ses chiens, seul face à un homme, elle ne pouvait pas faire grand-chose.

- Sortez ou j'appelle la police !

Lucie balaya la grange avec sa torche, pour trouver d'où venait cette voix masculine. Pour l'instant, rien en vue. Il disait juste vouloir se cacher...

- Vous êtes un fugitif...Qui me dit que ce ne sont pas des policiers qui sont à vos trousses ?

Un puissant frisson d'horreur parcourut son échine. Et si cet homme n'était pas tout seul ? S'ils étaient plusieurs ? Elle devait s'attendre à une embuscade ? Et s'il était seul, était-ce un meurtrier ? La prendrait-il en otage pour échapper à ses poursuivants ? Et s'il s'occupait d'elle et qu'elle devenait son repas ? Beaucoup de trop de questions extrêmes et sans réponse...C'est la voix chancelante qu'elle répondit à l'inconnu.

- Êtes-vous venu me tuer et me découper ? Je...Je suis très mauvaise en goût !

Son corps fut parcouru de spasmes. La peur grondait dans son estomac, lui faisait brûler l’œsophage. Ses poumons se soulevaient grandement et avec difficulté. Il lui était compliqué de respirer correctement. Son cœur bâtait si fort dans sa poitrine qu'elle eût l'impression qu'il allait exploser ou sortir de son corps. La rondouillette était courageuse, mais pas infaillible. Soudainement, les yeux de la rouquine se mirent à briller. Des larmes roulèrent sur ses joues bien charnues.

- J'veux pas d'ennui non plus ! Maintenant...Vous allez vous rapprocher, sans être brusque...

Elle usa de la manche de vieux gilet vert pour essuyer les larmes sur son visage blanc parsemé de taches de rousseur. Ses deux mains potelées revinrent serrer le manche de la bêche si fort, que les jointures de ses doigts furent colorées d'un blanc laiteux.

- J'veux pas d'ennui...Mais je me défendrai si j'ai besoin !

Vaz Chonaev:
La petite rousse était vulnérable. Malgré la présence des deux chiens, elle était au bord de la crise de nerfs, de la panique. Vaz n’avait pas besoin de la voir pour le savoir. Tandis qu’il se déplaçait doucement vers l’échelle pour s’exécuter et redescendre, il pouvait l’entendre, à sa respiration et à sa voix. Les animaux n’aimaient pas ça. Ils sentaient son angoisse et s’agitaient. Mais les chiens écoutaient malgré tout, soucieux de faire plaisir à leur maîtresse dans un moment de détresse.
Elle se faisait des films, aussi. Elle voulait savoir s’il était poursuivi par la police et s’il était une sorte de tueur en série cannibale. La question faillit lui arracher un rire, mais il se retint sans mal en raison de la tension de l’instant.

« Rassurez-vous, je suis un bon citoyen. J’ignore qui me suis ni pourquoi. »

Il n’était pas vraiment honnête, mais qu’allait-il lui dire ? Qu’il était un ancien agent spécial du FSB, un déserteur russe peut-être poursuivi par une bande de spetsnaz énervés ? Bien sûr ! S’il voulait qu’elle lâche les chiens pour de bon… Elle aurait peut-être de la compassion pour quelqu’un qui avait abandonné la cause russe, au vu du contexte, mais il ne parierait pas là-dessus. Et elle avait déjà trop peur pour en rajouter.

« C’est compris. Ne vous inquiétez pas. Je descends. »

Il était arrivé à l’échelle. Doucement, sans geste brusque, dans un silence presque total, il la descendit, dos tourné à elle. La lueur de la lampe-torche lui passa dessus avant de se braquer sur lui. Il inspira profondément, se détendit. Il devait avoir l’air inquiet, mais sympathique et accessible. Il faillit se rappeler de devoir prendre un air séduisant mais… Il songeait qu’il ferait l’affaire.
Il toucha le plancher bas et, levant les mains, doigts écartés, il se retourna en douceur. Aveuglé par la lumière, il laissa le temps à la rousse de le dévisager, de l’analyser, de vérifier qu’il n’avait rien sur lui. Sa tenue était plutôt simple : un pantalon gris et une chemise blanche. Le pantalon était fin, la chemise bien cintrée et ouverte sur deux boutons, les manches relevées. Ses chaussures de ville, noires, étaient crottées après avoir couru à travers champs, ainsi que l’ourlet de son pantalon mais, sinon, il était parfaitement présentable.

« Je m’appelle John. Et vous ? »

Affectant un sourire pincé, il pencha la tête sur le côté d’un air adorable. Une main passa devant ses yeux clairs pour le protéger de la lumière, faisant passer à Lucie le message qu’elle commençait à l’incommoder, l’amadouant peut-être pour la convaincre de la baisser.

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