Parle moi Kaito. Je t'en prie, dis quelque chose, n'importe quoi… Les yeux baissés, fixés sur sa main qu'elle tenait toujours, Alice attendait. Elle attendait la réponse de Kaito autant qu'elle la redoutait. Ce qu'elle aurait aimé pouvoir devenir minuscule et disparaître, pour ne pas avoir à affronter son regard, le regard de son aîné qu'elle devait avoir totalement déçu en ce jour.
- La perception que j'ai de toi ?
La jeune femme déglutit. Pourquoi cette pause, pourquoi n'allait-il pas droit au but ? Se rendait-il seulement compte de l'émoi dans lequel il la mettait ? C'est à ce moment que le jeune homme fit un pas dans sa direction et, joignant ses mains sur les siennes, les porta contre sa poitrine, là où elle put sentir sans l'ombre d'un doute son coeur tambouriner à un rythme effréné. La surprise lui fit relever le visage dans sa direction alors qu'il se déclarait, la laissant sans voix, ou presque.
- Kaito…
L'émotion lui étreignait la gorge. Q-que dire après une telle déclaration ? Elle en avait le souffle coupé et les larmes au bord des yeux. Mais elle n’eut pas le temps de parler davantage qu’il l’entoura de ses bras pour la serrer contre lui avant de l’embrasser. Une vague de chaleur et de tendresse s'empara alors d’elle. Elle avait eu si souvent envie que cela arrive, à chaque fois qu’il se penchait à côté d’elle pour corriger ses exercices, qu’il réduisait la distance entre eux, pour finalement ne rien faire. Elle avait si souvent rêvé de pouvoir se blottir aux creux de ses bras, inspirer son odeur… Et là, c’était la réalité. Kaito était bien là, l’enlaçant, l’embrassant, et Alice était conquise. Elle ne voulait rien de plus qu’être avec lui, là maintenant et, fermant les yeux, elle vint presser ses lèvres contre les siennes pour lui rendre son baiser, avec toute la tendresse dont elle savait faire preuve, se hissant sur la pointe des pieds pour prolonger cet échange le plus longtemps possible. Oui, en cet instant, rien ne pouvait la rendre plus heureuse que sa présence.
Mais tous les bons moments ont une fin, et celui-là ne devait pas faire exception. Le souffle court, le coeur tapant toujours à tout allure dans sa poitrine, leurs lèvres se détachèrent, et Alice reposa les yeux pétillants d’émotions sur son ainé. Il était adorable malgré sa gêne suite à son aveu et elle mourrait d’envie de goûter davantage ses lèvres, son cou, sa peau… Mais elle ne pouvait pas se permettre de lui sauter dessus comme ça, malgré la boule de désir qu’elle sentait grandir en elle. Elle le regarda donc, s’écartant d’un pas pour pouvoir l’admirer dans sa totalité. Elle n’aurait pas pu rêver mieux, Kaito était parfait à ses yeux, tant dans son caractère que son physique, Pourquoi donc cet aveu devait se faire dans ce genre d’endroit ? Le malaise sembla les reprendre tous les deux, alors que le blond semblait vouloir détourner la discussion en lisant à haute voix la brochure qu’il avait reçu plus tôt.
Oh. Bon. Sang. Alice vira instantanément rouge écarlate. Bien sûr, elle avait déjà lu ces brochures, par curiosité ou simplement pour tuer le temps, mais entendre Kaito lire à haute voix le contenu, c’était une toute autre histoire. Elle avait l’impression encore plus que d’habitude d’être un objet, une marchandise, de vendre son corps et ses services, juste pour pouvoir vivre. Comment pouvait-il lire ça aussi calmement, et ne pas la juger ? Le début du texte était préformaté, le même pour toutes les hôtesses, mais il commençait à attaquer la partie qui lui était plus particulièrement dédiée. Une partie d’elle voulait l’arrêter, lui arracher le flyer des mains, mais elle n’y arrivait pas, car une autre part attendait son jugement à la lecture des mots qui avait été couchés sur le papier, certains sans son approbation préalable.
…Ne refusant rien et ouverte à la gourmandise...
Ne refusant rien, ne refusant rien… il fallait le dire vite. Oui, la demoiselle était de nature extrêmement docile, et disait rarement non aux clients, peu importaient les fantasies et dépravations qu’ils voulaient lui imposer, mais il lui était tout de même arrivé quelques situations où elle avait été contrainte de décevoir ceux qui payaient sa compagnie. Fort heureusement pour l’établissement, cela arrivait peu souvent, uniquement quand les clients ne se renseignaient pas assez et espéraient d’elle d’endosser un rôle de dominante. Elle avait beau donner dans le jeu de rôle avec autant de casquettes que de costumes différents pour satisfaire ceux qui s’offraient ses services, c’était une position qu’elle ne pouvait par nature pas endosser. Et puis il y avait aussi eu ce client qui avait tenté de partir dans un délire uro-scatophile… Rien que d’y repenser, elle avait des hauts le coeur…
...elle saura vous séduire par l'accueil profond de sa gorge…
Ah ça… La jeune femme avait appris que les hommes rafollaient de cette pratique sur le terrain, et elle avait également appris à l’apprécier à force de devoir satisfaire toutes ces bonnes gens. Sa gorge était désormais entrainée mais pas non plus infaillible, car il fallait dire qu’elle avait rarement affaire à des calibres impressionnants.
… le moelleux du creux de sa poitrine…
Sans doute un des points auquel elle avait été le plus préparée mentalement, avant même d’être débauchée dans ce club. Elle avait l’habitude qu’on la regarde davantage dans les seins que dans les yeux, et ce même alors qu’elle avait pris l’habitude d’aplatir sa poitrine afin qu’elle n’apparaisse moins grosse qu’en réalité aux yeux du monde. Alors quand des hommes avait demandé à profiter de la chaleur de ses monts découverts pour assouvir leurs envies lubriques, elle n’avait pas eu la moindre surprise, et aujourd’hui encore, rares étaient les clients qui ne réclamait pas la possibilité de profiter de ce don de la nature.
…sa passion pour la sodomie…
Ahem, Alice aurait adoré corrigé cette phrase. La passion de ses clients surtout. Parmi tous ceux qu'elle avait eu, ceux qui n'avaient pas tenté de s'infiltrer par cette entrée se comptaient sur les doigts de la main. Au point qu'elle finissait presque par se demander si les hommes n'avaient pas un souci avec son intimité. Après, pas qu’elle n’appréciait pas ça non plus, mais ça devenait presque répétitif, à croire que ses fesses fermes attiraient bien plus que de raison.
…Que vous soyez venu seul ou en groupe avec vos amis, Alice aura préparé pour vous sa chambre ou une suite pouvant accepter jusqu'à dix personnes...
Dix personnes… ça avait été son maximum, mais heureusement que ça n’arrivait pas tous les jours. Un flash lui revient, celui de la soirée Wonderland… Oh oui, elle ne s'en rappelait que trop bien. Un groupe d'une dizaine hommes d'âge mûr qui avaient tous allègrement exploré toutes ses entrées vers le pays de merveilles, pour finir par la couvrir de leur semence, faisant passer sa tenue de la robe bleue d'Alice au lapin blanc sans changer de costume. Bon sang ce qu’elle avait honte en y repensant. Faites que Kaito ne l’apprenne jamais.
En parlant du jeune homme, ce dernier avait interrompu sa lecture, et interieurement, Alice en soupira de soulagement. Qu'est ce qu'il aurait pensé en voyant les prochains paragraphes qui decrivaient les nombreux équipements des chambres, ainsi que les accessoires disponibles ? Les meubles de la pièce étaient remplis de tant de vibromasseurs, plugs et autres articles de bondage en tout genre. D'ailleurs, la demoiselle ne l'assumait pas vraiment, mais elle était assez friande de l'utilisation de ces derniers. Cette sensation de ne plus avoir le contrôle de la situation, de ne pouvoir que subir, elle trouvait cela grisant au delà du raisonnable. Enfin, Kaito le decouvrirait peut-être de lui-même ?
En parlant du loup, ce dernier avait relevé la tête et éclata de rire en la regardant. E-est-ce qu’elle avait eu une quelconque réaction qui avait eu cet effet sur lui ? Sans doute pas, car il s’excusa de nouveau.
- Euh ... wow! Je suis nul! Super performance pour détendre l'ambiance ... Hum ... je te présente mes excuses pour cette lecture inadaptée.
Malgré ses joues rouges, Alice ne put réprimer un petit rire à son tour. Même dans ce genre de moment elle ne pouvait s'empêcher de le trouver craquant, et elle voulait le lui faire comprendre. Alors, sans rien dire de plus, elle s'avança à son tour vers lui, prit ses mains dans les siennes et, se collant à lui, approcha son visage pour lui prendre un nouveau baiser avec toute la douceur qui lui était propre. Elle voulait qu'il ressente toute l'affection qu'elle avait pour lui, celle qu'elle ne savait exprimer avec des mots.
L'échange fut bref, mais la jeune femme espérait qu'il ait suffit à exprimer ses sentiments. Elle baissa les yeux ensuite, et un sourire se dessina sur son visage. Sans regarder son compagnon, elle alla posé doucement sa main gauche au niveau de son entrejambe. Voila donc ce qui avait causé cette drôle de sensation qu'elle senti contre son ventre un peu plus tôt. Elle le sentait déjà extrêmement durci sous ses doigts et retourna son visage vers le sien, un air amusé sur le visage.
- Tu n'as pas à t'excuser mais… J'ai l'impression que ce que tu as lu ne t'a pas déplu, je me trompe ?
Prononçant ces paroles, elle se mit à caresser son engin qui semblait bien à l'étroit dans son jean désormais. Elle n'avait beau pas le voir, elle devinait à la forme qui se profilait sous sa main que le jeune homme n'avait pas à rougir de sa taille, qui pouvait clairement rivaliser avec les clients les mieux membrés auxquels elle avait déjà eu affaire.
- Tu veux peut-être que je m'en occupe, "Maître" ? Après tout tu as payé pour ça~
Elle ponctua sa phrase d'un petit rire des plus sincères. Elle n'était aucunement moqueuse, mais souhaitait simplement lui faire plaisir, de la manière qu'il le désirait. Elle était certes à son service par "contrat" pour cette nuit, mais pour lui, elle ne se limiterait pas au strict minimum dont elle se contentait le plus souvent. Elle tenait à le rendre heureux et était prête pour cela à se plier à ses moindres envies, des plus simples aux plus folles.