L'argent du Malin | Damien, Kagome

L'argent du Malin
Damien Thorn | Senjou Kagome

Damien Thorn n'avait pas besoin de payer pour baiser. Entre sa richesse, sa relative célébrité, son influence et son statut d'Antéchrist, il avait l'embarras du choix entre les admiratrices, les ambitieuses, les copines gracieuses et les zélotes prêtes à tout pour attirer son attention et le satisfaire. Mais on ne pouvait pas juste se nourrir de par sa propre importance. Pour entretenir les convenances, passer par des services tarifés était la norme. Et oui, on pouvait se faire la secrétaire, la députée et l'adoratrice, mais seulement si on compensait par un bon chèque versé au bénéfice des TDS, les travailleurs du sexe.
Entre ses parties fines et sa propre consommation, Damien Thorn entretenait une très bonne réputation.
Depuis son arrivée à Seikusu, il était vrai qu'il était moins consommateur. Il lui fallait le temps de prendre connaissance du marché local et de ses règles, évidemment. Mais il était aussi très occupé par ces portails étranges et par toutes les curiosités qu'offrait ce petit coin de Japon. On lui mit néanmoins la pression, finalement. Et lorsqu'il vint le moment de faire un choix, Damien exigea de son " gars " la crème de la crème. Il n'avait pas l'intention de piocher au hasard dans le pool commun et avait aussi l'intention de se poser comme un mécène généreux de la communauté des ouvriers du plaisir.
Bien entendu, son gars lui invita Senjou Kagome. Prestation no limit et satisfaction garantie, disait-il. Sa réputation était si impeccable qu'il avait vérifié si elle était digne de confiance. Le seul truc, c'était le paiement, à faire en biens de luxe. L'hôtesse fournissait même une liste à la demande, une " source d'inspiration " comme elle l'avait dit, afin de guider ses clients vers des biens convoités ou faciles à écouler.
Damien avait accepté.
Quelques soirs plus tard, elle avait été conduite jusqu'à son appartement privé, au cœur de Seikusu, dans les derniers étages de l'immeuble au mètre carré le plus onéreux de la ville, et de loin. A l'intérieur, la lumière était tamisée. Un intérieur design et des œuvres d'art résumaient la décoration. On devinait qu'il y passait peu de temps, n'y faisait que des sauts. Une des portes semblait blindée et possédait un verrou d'apparence très complexe, ceci dit, signe que la pièce derrière conservait soit beaucoup de valeurs, soit un lourd secret ; et peut-être les deux.
Conduite jusqu'au salon, où Damien attendait en observant les rayons du soleil couchant sur l'horizon, elle fut ensuite laissée seule avec son client, qui attendit le bruit de la porte d'entrée pour, enfin, se mettre en mouvement. L'un et l'autre purent enfin se découvrir, le jeune homme en costume sur mesure détaillant de ses yeux bruns légèrement brillants et parfaitement neutres le visage délicat aux yeux verts, la coiffure courte, la taille fine sous la poitrine lourde, les hanches larges, bref, le physique avantageux et avantageusement habillé de la professionnelle de l'orgasme. Il était très satisfait, mais ne le fit pas paraître. Marchant jusqu'à arriver dans son espace social, il resta silencieux quelques secondes en sondant son regard.
— On vous a chaudement recommandé, prononça-t-il finalement, d'un ton si nonchalant qu'on aurait dit qu'il parlait de la réputation d'une boulangerie. On dit que vous n'avez aucune limite. C'est vrai ?
Il se tut, lui laissant le temps de confirmer avant de glisser la main dans sa poche intérieure et d'en sortir un sac en soie noire qu'il lui tendit. A l'intérieur : une clé de voiture de luxe et un bijou qu'elle recherchait, d'or et de diamants.
— Un autre sac d'une valeur équivalente est disponible si vous le souhaitez, mais je pense que cela devrait couvrir nos affaires. J'espère que vous aimez la voiture avec laquelle on vous a conduit ici, elle sera garée à l'endroit où vous l'avez laissée.

De par son métier, la belle émeraude avait vu passer toutes sortes de clients. Hommes, femmes, créatures de toutes sortes et de toutes envies. Difficile de se laisser surprendre après tant d’années de pratique, bien que l’envie de stupre, elle, restait inaltérée malgré les péripéties. Le simple fait d’imaginer ses prochains ébats avait le don de plonger la belle dans une transe dont elle mettait habituellement plusieurs minutes à ressortir, forcée de se stimuler elle-même l’entrejambe au risque d’en oublier ce pourquoi elle se déplaçait toutes les nuits.

Ainsi cette fois-ci, un client un peu timide. Ce fut du moins ce qu’elle pensa, puisqu’il ne s’était ni présenté de lui-même, ni manifesté personnellement de quelque manière que ce soit. S’il pourrait bien sûr s’agir d’un haut dignitaire ou d’un quelconque homme d’affaire aux moyens abondants, difficile de faire la différence à la base de si peu de moyens. Qu’importe, Senjou ne refusait de toute manière aucun contrat quel qu’il soit… et d'où qu'il vienne.

“ Hm… “

Humant l’air une fois arrivée au pied de l’immeuble contenant son client, un sourire se dessina sur les lèvres pulpeuses de la jeune femme. Luxueux, rien qu’à sa façade. Et au vu des moyens employés pour l’emmener, elle qui était d’habitude menée à ses rendez-vous par son propre chauffeur, ce client devait manifestement faire partie des hautes sphères. Était-ce réellement surprenant ? Au fil du temps, Senjou avait affiné de plus en plus ses recherches à tel point que les seuls pouvant répondre à ses exigences n’étaient plus que ceux jouissant de suffisamment de richesses. Ou les chanceux détenant des éléments suffisamment intéressants pour éveiller l’intérêt de la belle…

Montant finalement les marches jusqu’à l’appartement correspondant, elle fut menée jusqu’au fameux client qui l’attendait. Vêtue d’une fourrure blanche lui enlaçant les épaules sans toutefois couvrir le décolleté plongeant mettant en valeur la poitrine imposante dont elle disposait, Senjou semblait s’être apprêtée à la hauteur des moyens qu’elle exigeait. Longue robe rouge, talons aiguilles, un style indéniablement plus raffiné que l’image qu’elle renvoyait une fois en action dans le cadre de son travail.

“ Oh… “

Détaillant du regard celui qui se dévoila à elle, bravant l’obscurité, la jeune femme afficha un air de surprise. Un beau jeune homme, propre sur lui et embaumé d’un air glacial comme s’il n’était pas ici pour la même affaire qu’elle, ce dernier ne ressemblait pas aux clients qu’avait l’habitude de fréquenter la jeune femme. Grand bien lui fasse, un peu de changement ne saurait lui faire de mal… bien que la véritable nature de cet homme lui restait inconnue pour l’heure.

“ Vous n’imaginez pas. “

Dit-elle en réponse à sa question, une main placée sous le menton et un sourire irrésistiblement séducteur aux lèvres. Le terme même de “limites” était un adage dont elle s’était séparée depuis bien des lunes.

Jetant un oeil au sac déposé près d’elle, elle se délecta de l’attention apportée par ce bel inconnu… tout comme elle s’impatienta de la suite. L’expérience le lui avait suffisamment apprise: plus les moyens étaient grands, plus le client aurait de fantasmes inavouables à assouvir. Et Senjou avait hâte de savoir ce que pouvait bien cacher une petite gueule d’amour tel que lui.

“ Quelle attention, je ne pouvais rêver mieux. “

Souriante, elle laissait les rênes au client, comme d’habitude.

Damien n'avait pas forcément conscience de ce qu'il était normal de laisser à une femme qui n'avait ni tarif affiché ni limites. Il tenait simplement à ne pas donner l'impression d'être le client cheap qui aurait droit à une bonne turlute avant de s'endormir, satisfait de sa transaction. Senjou s'attendait sûrement à un moment particulier avec lui et elle ne se trompait guère en partant de ce principe. Elle pouvait probablement imaginer ce qu'il pouvait avoir en tête, mais elle ne pouvait évidemment pas imaginer sa nature, et la vitalité surnaturelle et les vices exacerbés qui venaient avec. De l'extérieur, Damien ressemblait à un jeune Européen bien propre et lisse qui se donnait un genre et était trop jeune pour avoir recours à une professionnelle pareille, mais la soirée démontrerait qu'il n'en était pas ainsi.
Senjou, derrière son attitude parfaitement séductrice et professionnelle, ne pouvait néanmoins cacher ses penchants, la soif qui l'avait poussée à devenir la femme à acheter qu'elle était aujourd'hui. Grand bien lui faisait ! Il était rare, pour Damien, de tomber sur quelqu'un d'assez vicieux pour accepter ses appétits et ses plaisirs. Il détectait en elle un vice de luxure si épais qu'on aurait presque pu le croquer au vol, ceci dit, et cela l'encourageait à poursuivre sans prendre de gants.
Et une fois la transaction acceptée, il s'approcha donc, calmement, comblant le peu de chemin séparant le social de l'intime, les yeux rivés dans ceux de Senjou. Sans un mot d'abord, il tourna autour d'elle, faisant glisser une main autour de sa taille, dans le creux de son dos. Il ne put résister au plaisir de faire courir en elle un frisson annonciateur de plaisir, jouant de ses pouvoirs psychiques pour titiller le vice en elle, rendre sa présence enivrante. Il n'avait pas besoin qu'elle le désire, mais quel mal y avait-il à pimenter les choses ?
Enfin, il la débarrassa de son boa de fourrure, le déposant soigneusement sur un sofa proche, et il baissa le nez dans son cou pour humer son parfum tranquillement en finissant son tour.
— J'ai un immense respect pour ceux qui s'adonnent totalement à leur métier, murmura-t-il finalement.
De retour face à elle, il glissa la main qui courait sur elle vers le haut, la laissant très intentionnellement s'aventurer entre les seins de Senjou, remontant encore sur sa gorge et jusqu'à son visage. Son regard suivait sa main et se replanta dans le sien comme il arrivait à destination. Ses phalanges se fermèrent sur sa mâchoire, sans violence, mais avec fermeté, et comme s'il étudiait la force de ses muscles du bout des doigts il resta là un instant, l'examinant comme une bête dont il estimait les probabilités de faire l'affaire pour son ouvrage.
— Je tiens à le préciser car vous pourriez être amenée à en douter. Avez-vous un safeword ? Ou dois-je partir du principe que vous êtes à ma totale disposition ?
S'il y avait un doute ou une fausse publicité, c'était le moment ou jamais de le dire. Et Damien se montrait bien assez assuré pour faire croire qu'il n'avait pas l'intention d'y aller tendrement.