Les Petrovski étaient une famille venant de Russie. Une famille qui s’était massivement implantée pendant les années 1920, après la Révolution russe et l’avènement des Soviétiques. Les Petrovski, qui s’étaient enrichis en étant les propriétaires-exploitants de multiples mines et usines, avaient préféré fuir avec leur argent, en investissant au Japon. Un choix prudent, qui leur avait permis de fédérer une communauté russe, fuyant la menace communiste et l’expropriation de leurs biens par l’autorité publique. Mais les Petrovski n’avaient jamais été très honnêtes. Ils avaient toujours exploité leurs ouvriers. Pour le dire simplement, les Petrovski formaient une redoutable mafia, un clan solide, qui avait discrètement pu s’infiltrer à Seikusu. Pendant des années, le clan avait été dormant, et il avait, concrètement, fallu attendre l’éclatement de l’URSS au début des années 1990’s pour que les Petrovski reçoivent des soutiens, tant financiers que matériels ou personnels. Parmi eux, il y avait notamment eu l’aide de
Reto Kroes. Reto était un puissant homme de main, qui avait su considérablement améliorer l’influence des Petrovski en appliquant les méthodes privilégiées de la Mafia : le chantage, l’extorsion, la corruption, les menaces.
Ils étaient en guerre ouverte contre le puissant clan yakuza des Guramu. Jadis, les Guramu avaient régné sans partage sur la ville, avec d’autres familles japonaises, mais les rivalités et les guerres de clans entre Yakuzas avaient atténué leur influence, permettant ainsi aux Russes, notamment, de s’étendre. Mais, pour affronter les Guramu, il fallait, non seulement s’en prendre à eux directement, mais aussi à leurs innombrables soutiens, présents partout : administrations publiques, entreprises privées… Des hommes d’affaires, des fonctionnaires, des policiers, des conseillers municipaux, des banquiers… Tout ça formait un vaste ensemble, une véritable organisation qui soutenait les Guramu, permettant de blanchir ou de noircir leurs fonds, de faire des placements juteux… Soit, de manière plus générale, de doter les Guramu de toute une série de couvertures légales couvrant leurs activités illégales. Et s’en prendre aux Guramu n’était pas facile, vu les secrets qui régnaient sur Seikusu, et les relations très fortes qui existaient entre les Yakuzas et la police.
Reto avait développé une arme spéciale, une sorte de joker qui avait fini par remonter aux oreilles des Guramu. Et, plutôt que de s’impliquer directement, les Guramu avaient chargé la police d’agir. La police attaquait ainsi les entrepôts des Petrovski, mais, ce que les Guramu cherchaient surtout, c’était l’identité du «
Chaperon Rouge ». On appelait ainsi une étrange femme, méconnue, une prostituée de luxe, qui réussissait à soutirer des informations cruciales aux proches des Guramu, ou, de façon plus générale, à des cibles potentielles pour le clan. Et la police avait maintenant, suite à la descente ans l’entrepôt, un nom potentiel :
Doutzen Kroes, la fille de Reto Kroes.
Reto vivait dans une maison japonaise luxueuse au milieu de la ville. C’est là-bas que Sophia se rendait, filant tout droit dans la gueule du loup. Elle arriva devant un portail à l’entrée, et déclina son identité. Le portail s’ouvrit, la laissant garer sa voiture dans une belle cour. Un grand perron éclairé par des lanternes posées ici et là menait tout droit vers le manoir.
Devant la porte d’entrée, Reto Kroes attendait la femme, mains filant dans un pantalon, portant une veste de soirée avec une chemise dessous.
«
Bonsoir, Madame. Je suis Reto Kroes, propriétaire de cette maison, se présenta d’emblée Reto.
Qu’est-ce que la police me veut ? »