Macha, déesse mineure des malédictions, était l'une de ces jeunes divinités en constante hausse de puissances lors des derniers siècles. Ses capacités à maudire autrui trouvaient facilement preneur sur le marché et augmentaient à une vitesse considérable son emprise au panthéon. Malchance éternelle, vieillesse physique prématurée, Incapacité à ressentir toute forme de sentiments, tant de classiques que la divine créature n'hésitait pas à user, même si son faible se tournait vers des méfaits plus élaborés. Pour exemple, elle avait dernièrement maudit un chevalier renommé de la garde royale à nexus, le gratifiant d'un sortilège profondément ennuyeux. Celui-ci après chaque phase de sommeil se retrouvait constamment téléporté sur la surface de terra, au hasard... Une boutade dont elle était fier et qui avouons le, était un aveu de son ennui. Il fallait bien trouver de quoi se distraire après 617 ans d'existence...
Cependant, il serait une erreur de croire que seul ce don lui a offert son statu, la déesse ayant à son actif une capacité de métamorphose très avancée sur son propre corps ou ceux d'autrui, et une autorité divine lui permettant de contrôler la chaire des êtres inférieurs.
Mademoiselle Macha, mademoiselle Macha
Agitée, l'une des apôtres court sur les sombres dalles carrelées du temple, enjouée à en blaser Macha, rétorquant d'un simple coup d'oeuil.
Je te l'ai déjà dit, ne semble pas si heureuse en m'apportant les nouvelles du jour.
De sa voix calme au ton si gris, Macha essaye de ne pas complètement se désintéresser de ce qui va suivre. Elle le sait bien, même si elle n'aime pas ça et qu'elle aurait sûrement préféré dormir quelques années, la fainéante déesse se doit d'écouter son sujet, qui lui rapporte la longue liste des possibles nouveaux adeptes. D'un geste dépourvut de motivation, sa main fait signe de commencer. Plus tôt elle en aura fini, plus tôt Macha pourra recommencer à flâner sur son trône d'os et de crâne.
Nous avons recensé 314 nouveaux adeptes potentiels cette semaine ! Dit-elle dépliant une liste aussi longue que futile.
La plupart des voeux formulés ne sont qu'affaires de vengeances ou de cupidité, j'ai pris soin de les placer en tête de liste comme elles sont souvent les plus crédibles, Mademoiselle Macha !
Encore cette maniaquerie, elle s'en serait bien séparée si elle n'avait pas si peu de créatures à son service, et si elle n'était pas si mignonne. Macha avait beau vite se lasser des choses avant de tomber dans la spirale de l'ennuie, pour autant, si une chose pouvait la captiver, c'était bien les êtres assez mignon et de petites tailles de préférence. Il s'agissait sûrement là de la raison pour laquelle ses serviteurs paraissaient tous sous les traits de petites poupées vivantes. Un peu à son image.
314... hein, ça a encore baissé. Ce n'est pas comme ça que j'atteindrais les meilleures places du panthéon.
La ou la majorité des dieux répondaient aux prières justes, la jeune déesse trouvait elle son business dans la formulation des mauvais souhait. En échange de son âme une fois que le moment de sa mort serait venu, l'entité ayant formulé le voeux voyait celui-ci réalisé sous forme de malédiction, souvent hasardeuse selon la bonne humeur de Macha. Il fallait bien sure aller à la rencontre de tous ces possibles pactisant aux désirs néfaste, sachant que plus de la moitié se désistaient au dernier moment, justifiant qu'ils ne pensaient pas que ça marcherait vraiment...
Bon... au moins ce devrait être plus rapide... Dit-elle en affalant son bras contre l'accoudoir orné d'ossements, pour y écraser la tête dans la main.
Et il y a aussi cet autre problème... concernant votre dernière malédiction... elle n'aurait pas fonctionné comme prévue et... Mademoiselle ?
Elle ne l'avait pas encore remarqué, mais les pupilles orangées de sa déesse semblaient concentrés dans le vague, déjà bien ailleurs. Elle n'avait pas écouté un traitre mot de ce qu'on venait de lui dire
On m'appelle.
Je... je ne vois personne vous êt...
Sombre idiote !! On veut m'invoquer.
Voilà qui était un fait rare, Macha, déesse de la malédiction était convoqué par un ancien rituel dont peu connaissaient l'existence. Pour en venir à de telles méthodes, le contrat devait être des plus sérieux et son sang ne fit qu'un tour.
J'y vais... Dit-elle en se levant de son trône, affichant fièrement sa silhouette d'à peine 1 mètre 61 et sa peau violacée de bout en bout, recouvert d'une simple culotte blanche aux apparences des plus simples. Pour le reste, ce n'est sûrement pas la pudeur qui aura raison d'elle, quoi que sa longue tignasse couleur framboise et coiffée en deux couettes a au moins le mérite de couvrir sa poitrine. Une fabuleuse chevelure, dont les deux chouchous confectionnés à partir des crânes d'anciens serviteurs rappel constamment le danger de contrarier une divinité.
Ma... mademoiselle ? Alors que sa douce voix raisonne dans le grand temple, il ne lui aura fallu qu'un battement de paupière pour perdre de vue sa déesse, déjà bien loin. A ce moment, quelque part sur terre, Macha venait de répondre à l'appel et était apparut dans le grand hall d'un manoir. Personnes aux environs, mais un rapide coup d'oeuil permet aisément de deviner la strate sociale du détenteur, et son appartenance à la race humaine. Nul doute que ces créatures faibles d'esprit hurleraient de peur devant mon corps tatoué et à la couleur de peau si peu commune. Mais d'ailleurs, ou étaient-ils ces pactisant ?
Une réponse qui s'offrit d'elle-même en un éclat de rire, provenant de l'étage, un groupe de jeune filles à en juger par ces gloussements insupportables. Cela lui rappelait un bien mauvais souvenir alors qu'elle montait lentement les escaliers de ses pieds nus, la dernière invocation aussi avait été faite par des jeunes filles, voulant juste s'amuser... La déesse avait dû leur donner une bonne leçon en châtiant l'une d'entre-elles. Qu'en serait-il cette fois-ci ? Alors qu'un simple volet qui venait de claquer violemment contre la fenêtre avait réussi à les effrayer, coupant net leurs ricanements. Puis, ce fut un nouveau rire qu'elle observa silencieusement les bras croisés sous la poitrine, avant que l'une des filles, la grande rousse de la bande, ne se retourne dans un sursaut d'effrois. Bien entendu ce sont les autres qui finissent par suivre, alors que d'un simple geste de pincements du pouce et de l'index, les lèvres de la rouquine semblaient tout-à-coups scellées.
C'était là tout le pouvoir de contrôler la chaire des êtres vivant, contrôlant les muscles de ses lèvres pour qu'elle ne puisse les ouvrir.
Je n'apprécie pas le bruit, la prochaine qui ouvre la bouche gouttera à mes talents de coutures...
Quelque chose n'allait pas, Macha cherchait un quelconque désir de maudire autours d'elle, en vain. C'était pourtant des choses qu'elle était capable de ressentir pour se diriger vers ses pactisant, mais là, le néant, seulement de la stupeur à son égard... rien qu'un groupe d'étudiantes écervelés qui avaient voulut s'amuser avec les esprits. Encore des idiotes... qui lui faisait perdre son précieux temps !
Macha, déesse des malédictions. Mais je ne vous propose pas mes services n'est-ce pas mesdemoiselles ?
Inutile de perdre d'avantage de temps, elle en est sure en un tour de regard : cette invocation n'est que le fruit d'un hasard, un passe-temps de gamine ridicule méritant sanction. Si maudire de force ne lui apporterait aucune notoriété supplémentaire en tant que déesse, cela pouvait au moins constituer une punition de choix, dont elle cherchait déjà la victime dans ces rangs.
As... Tram... gram...
Débutait alors une quête aux allures morbide dont la sentence n'était pas encore dévoilée. Chaque intonation de cette célèbre mélodie angoissante était accompagnée de la main de Macha sur le crâne de l'une des humains, à tour de rôle, jusqu'à finalement prendre fin sur une jeune brune élancée, aux cheveux très longs.
Non... non, pitié ne me tuez pas !! C'est son idée à elle ! C'est pas de notre fau...
D'un simple geste, la déesse prend contrôle de son corps, l'obligeant à plaquer sa propre main contre sa bouche et couchant férocement son dos au sol, comme un plomb de plusieurs tonnes. Son attention va alors à la rousse, hôte des lieux et de ce rituel d'après son amie.
Alors c'est toi... mhh... Quel est ton animal préféré ? C'est juste pour m'assurer de ne pas te transformer en quelque chose que tu aimerais...
Mais le désintérêt pour l'adolescente se fait soudain quand les yeux de la déesse se portent sur la dernière. Ce petit être si fragile et si mignon qui la captive. Si c'est plus petit qu'elle, c'est forcément assez mignon pour être digne d'intérêt. Alors cette peste aux cheveux orangée subit elle aussi le même sort : plaquée lourdement au sol sous son propre poids.
Toi... Ce sera forcément toi.
Elle lui relève le menton. Cette brune aux couettes et aux lèvres pulpeuses doit à peine dépasser le mètre 40, pile la taille qu'elle affectionnait chez ses sujets.
Pour toi, je vais faire un effort... Je vais t'offrir une malédiction plus élaborée, ma toute dernière création.
Elle aussi, ses mouvements sont entravés de force à l'exception que je lui laisse le droit à une agréable position assise. Elle ne le sait peut-être pas, mais en cet instant, elle a sauvé ses amis d'une malédiction funeste, en estompant malgré-elle la colère de la déesse, qui formule déjà une incantation en langage ancien, le même utilisé pour le rituel. En conclusion, elle reçut pour sceller le sortilège un bref baiser sur son petit nez retroussé. Un geste inutile mais amusant.
Demain, quand tu te réveilleras, tout sera différent... mhhh... à moins que ce ne soit l'inverse en fait.
Sans plus de cérémonie, Macha attrape ce qui a servit au rituel et le porte sous ses bras, transperçant une dernière fois de ses deux pupilles orangés l'hôte des lieux.
Ce sont des pouvoirs au-delà de votre compréhension, pas des jeux pour petites filles...
Sa colère, débordante soudainement, en vient à en faire exploser l'ampoule, dans le flash et les éclats qui font à nouveaux sursauter de peur les filles, libérées de leurs entraves. Un laps de temps durant lequel Macha profita pour disparaître, et regagner son temple.
Pour la première fois depuis longtemps, la divinité mineure affichait un sourire amusé, très léger peut-être, mais c'était assez rare pour être souligné. Elle savait d'or et déjà que la nature de cette malédiction allait lui permettre de s'amuser, ne serait-ce même qu'un peu...