Dans une tanière de béton... [Fea/Kiraki]

Voilà déjà plusieurs jours que Fealóceruin est arrivée sur Terre. Pour comprendre comment elle en est arrivé là, il faut remonter une semaine en arrière.
Sur Terra, elle avait rencontré le représentant d'un village ayant plusieurs disparitions à déplorer. On racontait que de terribles créatures s'étaient installées dans des ruines et qu'elles dévoraient quiconque s'y aventurait. Fea accepta pensant que cette mission ne serait pas différente des autres. Pourtant une fois sur place, quelque chose l'intrigua rapidement. Il y avait bien des créatures qui l'accueillirent tous crocs et toutes griffes dehors. Mais, plus elle progressait, moins elle rencontrait de créature et plus la magie se densifiait dans l'air. Elle traversa sans soucis de nombreux seuils protégés par des runes. Ces dernières étaient sans effet sans elle et elle atteignit facilement le cœur des ruines pour y trouver une arche étrange. Un mur liquide l'emplissait et ondoyait, dévoilant une ville aux constructions rectilignes. Il était possible de contourner l'arche, mais d'un côté comme de l'autre, le paysage visible à travers l'arche ne changeait pas. Poussée par la curiosité, ma dragonne passa sous l'arche et traversa ce mur liquide.
Elle se retrouva sur Terre, sans possibilité apparente de retour. Le portail qu'elle venait d'emprunter était à sens unique et les runes présentes dans les ruines étaient censés repousser les petits curieux pour leur éviter la même mésaventure que Fea. La dragonne se retrouva dans un quartier populaire où les passants ne manquèrent pas de lui jeter des regards tour à tour surpris, choqués, moqueur, ou dans de rares cas indifférents. Elle posa des questions et on lui en posa d'autres. On la prenait pour une ivrogne sortit d'un bal costumé ou pour une folle échappé de l'asile quand elle parlait de magie. Elle ne faisait rien pour cacher ses cornes et elle était vêtu d'une épaisse chemise en lin avec un pantalon bouffant et des bottes. Elle essaya d'acheter à manger, mais ses pièces d'or furent refusées. Elle parti donc sans payer et explora les environs pour se trouver un endroit isolé. Elle ne trouva pas tout de suite. Elle se cachait régulièrement, volait, et ne cessait de bouger dans la ville. Elle ne trouva jamais d'autres portails. Heureusement, elle découvrit un chantier d'immeuble laissé à l'abandon faute de financement. Elle en fit sa tanière.
Les murs et les canalisations d'eau sont posés. L’électricité est utilisable sur les premiers niveaux uniquement. Fea a préféré se poser véritablement au 5ème et dernier étage. Petit à petit, elle a récupéré de quoi dormir, de quoi faire un feu de bois, quelques vêtements. Elle sent qu'il lui faudra du temps pour rentrer... mais elle hésite à découvrir cet endroit. Elle n'a plus de chez elle depuis bien longtemps, et même si elle s'est habituée à son mode de vie entre exploration et découverte, elle n'a pas vraiment de racines fixées à un lieu précis. Le problème qui se pose, c'est celui de la maitrise de sa forme humaine. Elle était parvenu à cacher entièrement ses attributs draconiques, mais depuis son arrivée sur Terre, elle n'y parvient plus. Trop d'incertitude. Trop de méfiance dans le regard des autres. Elle se sent presque redevenir sauvage. Elle pille et vole les autres pour survivre. Jusqu'à quand tiendra-t-elle ?
Une nuit de plus passe sans qu'elle trouve de réponse. Le soleil la réveille car elle n'a ni rideau ni volet à ses fenêtre. Elle se lave dans sa salle de bain, pièce disposant de carrelage et d'une baignoire installée par des ouvriers avant l'arrêt des travaux. Elle enfile un jogging large sur ses bottes de cuir bouilli et un débardeur trop grand pour elle offre un décolleter plongeant sur sa poitrine, car comme à son habitude, elle ne porte aucun sous-vêtement. Elle fait des nœuds sur ses cornes avec des foulards. Avoir l'air ridicule ne l’ennuie pas, et sa ténue attire plus l'attention que ses écailles qu'elle ne peut dissimuler. Elle passe ensuite sa journée à chercher de quoi manger et à explorer d'avantage cette ville. Quand le soir tombe, elle monte sur un toit et reviens "chez elle" en volant. La terrasse de son balcon est suffisamment grande pour lui permettre d'attérir sans difficultés.

Kiraki est rentré de son voyage à Terra depuis déjà plusieurs mois, et il reprenait un style de vie à peu près normal. Bien entendu, on pouvait parler de vie normale si on oubliait toutes les sorties nocturnes pour se battre contre toutes sortes de personnes mal intentionnées, ses recherches sur le paranormal et la magie, ou même encore ses entraînements pour maîtriser ses pouvoirs. D'ailleurs, son travail commençait à porter ses fruits, il arrivait désormais à changer de forme bien plus rapidement, et aussi à différencier les sources d'énergie. Bon par contre, Kiraki n'était clairement pas quelqu'un qui s'investissait dans ce qui ne l’intéressait pas, il ne fallait donc pas s'attendre à ce que ses notes déjà à la limite du catastrophique remontent de sitôt. Mais il s'en moquait pas mal en fait, il voyait plus l'école comme une expérience sociale que comme le siège de son avenir. Son avenir, il le savait, serait de se battre encore contre les voyous, et de s'impliquer de plus en plus dans les affaires magiques, pour en devenir un acteur important.

En parlant de ça, Kiraki avait entendu parler depuis plusieurs jours déjà d'une personne, une femme apparemment, qui s'en prenait à certains passant et qui commettait des vols à répétition. Ce n'était certainement pas aussi grave que ce qu'avait déjà pu affronter Kiraki, mais il y avait quelque chose qui le perturbait. Il avait déjà exploré la zone où ces vols avaient lieu, et il avait alors senti que celle qui les commettait était de nature magique, ou alors en avait en elle de façon très profonde. C'était bien la première fois dans ce monde qu'il approchait un être surnaturel d'aussi près. Il ressentait de la puissance magique un peu partout dans cette ville, mais il faisait toujours en sorte de les éviter, il n'était pas encore prêt pour des rencontres directes et désintéressés avec des êtres magiques. Toutefois, il avait ici une bonne excuse de s'approcher d'un tel être, et il devait bien passer le cap à un moment ou à un autre. Il ne devait toutefois pas sauter le pas trop vite, cela pourrait lui être fatale, il avait donc besoin de se préparer et de réfléchir à comment s'y prendre.

C'est finalement un soir très sombre alors que minuit était déjà passé qu'il put se mettre en action. Il avait passé deux jours à préparer un rituel magique afin d’accroître légèrement sa force et de pouvoir résister aux effets magiques, simple précaution qui lui donnait de quoi résister à ce qu'il ne pouvait appréhender dans son plan. Il n'était toutefois pas quelqu'un qui faisait des plans sur la comète, il décida donc de rester lui-même pour cette visite, et d'être franc, le rituel n'était qu'un soutien si les choses dérapaient. Il se mit donc à passer de toit en toit afin de repérer précisément l'énergie de la voleuse. Il serait en temps normal impossible de voir avec une telle obscurité, mais Kiraki appréciait cette ambiance, pas pour se dissimuler ou de mauvaises idées, mais l'obscurité nous empêche de voir les autres ou même tout ce qu'il y a autour de nous. Certains en ont peur, mais d'autres comme lui pensait qu'il n'y avait du coup rien de plus vrai, ou de plus mensonger si on ne faisait pas gaffe. Le temps parfait pour une première rencontre. Mais l'heure n'était plus à ce genre de réflexion, car il atterrit en face d'un immeuble en construction, mais il n'y avait plus aucune trace de travaux. Il se permit donc d'entrer, sentant l'énergie un peu plus haut.

Kiraki atteint le dernier étage construit, et se plaça devant la porte où se trouvait la femme derrière, il le sentait. Mais une entrée frontale comme ça risquait de poser problème, de l'effrayer, ou même de faire que les choses déraperaient encore plus vite. Il entra donc dans l'appartement d'à côté, allant en direction du balcon afin de pouvoir sauter à celui d'à côté, celui de la femme. Une fois atterri, il savait qu'il ne pouvait plus vraiment faire marche arrière, il était même très probable qu'elle est déjà sentie sa présence, il ne connaissait pas ses capacités, autant partir du principe que tout était possible, ça évitait les mauvaises surprises. Comme il le pensait bien, il n'avait qu'à tourner la poignée pour que tout s'ouvre, et il pouvait alors s'inviter à l'intérieur. Il n'avait même pas frappé oui, mais impossible de connaître les réactions, et puis il avait autre chose à faire que de respecter la politesse. Et puis après tout, elle était coupable de plusieurs vols, il était aussi là pour ça, il n'allait pas non plus commencer à faire des courbettes, et il fallait que le message soit clair, voire même qu'il paraisse plus dangereux que ce qu'il n'était vraiment, si de l'intimidation pouvait suffire. Il ne se contenta donc que d'une seule phrase lancer dans l'appartement, les yeux tournés en direction d'une porte entre-ouverte.

"Tu t'es faits remarquer dans le quartier avec ce que tu as volés. Je ne m'en prendrais pas à toi. Je veux parler de ça. Qui es-tu ? Qu'es-tu ? Pourquoi tu fais ça ?"