Non loin de là, un bar ouvert jusque tard le soir accueillait encore quelques clients et clientes. Valadhiel en faisait partie, quand l’ange déchu n’était pas à la recherche de viles créatures de la nuit ou de démons, elle prenait du temps pour le passer avec les humains et les découvrir, les comprendre. Ce fut d’ailleurs l’un des principaux reproches qu’elle fit tout le long de son existence pendant son statut de milicienne céleste. A quoi bon protéger les créations de Dieu si nous n’apprenons même pas à les connaitre ? Bien entendu, tout n’était pas si blanc. Les hommes et les femmes qui peuplaient cette planète portaient autant le bien que le mal, certains plus que d’autres. Mais comme qui dirait, le bien et le mal ne sont qu’une question de point de vue.
L’ange noir ne faisait plus partie des troupes divines, certes. Mais, ça ne l’empêchait pas d’accomplir toujours son devoir et de protéger les innocents mortels. Jamais elle n’assassinat un des siens par pure soif de sang ou vengeance, pas comme l’a fait un autre ange déchu, désormais roi de l’Enfer, souverain des démons et du Mal à l’état brut. Non, non, il n’y avait pas à tergiverser… Lucifer représentait bien l’incarnation du mal. Et pourtant, certains anges et archanges voyaient désormais Valadhiel comme lui, comme cet infâme démon.
Assise sur une chaise à siroter une bière tout en écoutant les quelques japonais discuter, elle n’arrêtait pas de ressasser certaines périodes de sa vie. Enfin. Pouvait-on appeler ça une vie ? En tout cas, celle qui se faisait passer pour une certaine Aurora avait un franc succès et beaucoup n’arrêtaient pas de la fixer des yeux. Il fallait dire qu’une Européenne, ici… c’était plutôt rare. Si sa crinière blonde existait toujours, ça n’aurait été encore que plus plaisant pour toute cette populace. Les locaux devaient imaginer que la brune, toujours assise seule sur une chaise à une table isolée, ne comprenait pas un traître mot.
Alors que la créature ailée cachait sa présence, elle en sentit une autre. Il ne s’agissait pas de n’importe quoi, de n’importe qui. La magie utilisait appartenait à celle des cieux, de la Lumière divine. La conclusion, bien que hâtive, semblait évidente. Un ange se trouvait à quelques pas d’ici. La femme brune paya l’addition en adressant un bref merci dans la langue des autochtones. Arrivée en plein milieu de la rue et lorsque tous les regards n’étaient plus dirigés vers la belle brune, les ailes sombres de l’ange se déployèrent et elle s’envola en direction de la source de magie.
Son voyage l’emmena à quelques pas, une station de métro. Sa tête se pencha vers le tunnel, d’où venait cette utilisation de divines forces. Valadhiel sauta sur les rails, par chance, à une heure pareille… aucun tramway ne circulait et les stations furent abandonnées jusqu’au petit matin. Une magnifique cuirasse ébène aux symboles antiques apparut le long de son corps à la place de ses vêtements de ville. Cette armure lui moulait parfaitement ses formes, mais, que serait une guerrière sans une arme ? En l’occurrence, sa magie ténébreuse fit apparaître deux lames longues jumelles entre ses mains.
Arrivée à la hauteur d’un homme, ou plutôt d’un ancien camarade de champ-de-bataille, l’ange noir aux ailes déployées grimaça mais ne dit aucun mot. Aucune émotion belliqueuse ou haineuse ne s’échappait de l’aura de Valadhiel, elle semblait juste… indécise en attendant la réaction de son opposant.