«
Alors, c’est ta première journée ici ? Je suis sûre que tu vas te plaire ! Même s’il faut se lever tôt... »
Le système scolaire japonais était réputé dans le monde entier pour son élitisme et son caractère extrêmement chronophage et anxiogène. Une réputation entièrement justifiée, quand on savait par exemple que certaines écoles maternelles organisaient même des concours d’entrée pour les bébés. Toute la scolarité japonaise était faite sous le regard d’une compétition féroce entre les élèves, et, selon de nombreux analystes, était l’une des principales raisons du fait que le Japon soit l’un des pays connaissant le plus grand nombre de suicides... Et peut-être aussi la raison pour laquelle, aux yeux des étrangers, l’imagination japonaise apparaissait comme totalement farfelue. Dans une société étouffante et asphyxiante, l’art était un moyen de s’évader et d’égayer ses pensées en songeant à autre chose que les cours. Mais, parfois, le système éducatif se rappelait cruellement à vous, et, pour Mishima, c’était le cas quand le
Sentā approchait.
Le
Sentā, c’était un mot qui pouvait déclencher des crises d’hystérie. On l’appelait, plus globalement, le « test du Centre national des admissions à l’université », et c’était un test qui était géré par une autorité » administrative indépendante, rattachée au gouvernement japonais, et qui, au Japon, faisait office de ce que, chez les Occidentaux, on appelait «
Baccalauréat ». Cependant, si, en France, le Bac’ était un examen scolaire destiné à vérifier l’acquisition de compétences jugées élémentaires et fondamentales à l’approche de la majorité civile, au Japon, le
Sentā n’était rien de plus qu’une porte d’accès vers l’université. Dans les faits, comme on ne pouvait plus faire grand-chose en France avec juste son pauvre Bac’ en poche, cette différence idéologique était estompée, mais une autre différence résultait dans le fait que le
Sentā, contrairement au Bac, était un concours dont le niveau variait selon ce que les lycées et les universités proposaient.
Ce test était très difficile, et, à chaque fois qu’il approchait, le lycée recrutait plus de surveillants pour aider l’équipe actuelle de surveillants. C’est dans ce cadre que le lycée Mishima proposait un
Sentā blanc, et le lycée avait sollicité plusieurs surveillants pour venir surveiller les classes, avec possibilité, par la suite, d’avoir un emploi. Il n’était évidemment pas à temps complet, mais c’était ainsi que l’emploi fonctionnait au Japon, par une série de courts emplois dans différentes boîtes. De cette manière, le Japon évitait le chômage, mais flottait malgré tout au bord de la récession économique... Ce qui faisait du Japon un cas à part pour les analystes économiques, car c’était le seul pays du monde disposant d’un taux de chômage très faible, et d’une croissance économique inexistante. On ne faisait rien comme les autres au Japon, après tout.
Tout ce laïus pour dire que Pepper avait maintenant une nouvelle collègue, qui avait répondu à l’annonce du lycée, et qui avait été engagée par le lycée. Cependant, Pepper ne se faisait pas d’illusions. Il y avait, certes, le
Sentā blanc, mais Stella n’avait été recrutée que parce qu’elle était belle. Son dossier, comme n’importe quel dossier ce candidature, avait été transmis au bureau de la personne désignée par le Conseil du lycée, pour gérer les candidatures : Morimoto-san. Morimoto-san était un homme d’affaires riche, l’héritier d’une longue famille de Seikusu, très riche, et qui avait participé à la création du lycée. Cependant, et encore plus concrètement, ce n’était pas Morimoto-san en personne qui gérait les dossiers de candidature, mais sa fille,
Reina Morimoto, qui était aussi une terrible perverse.
Stella n’était là que pour servir d’amante sexuelle, et, si elle voulait avoir un emploi durable à Mishima, il allait falloir qu’elle gère le vrai visage de Mishima... Car Stella n’était pas née à Seikusu, mais venait d’arriver dans la ville. Elle avait donc légitimement besoin d’un emploi, et Mishima payait bien... Mais Mishima demandait des compétences qu’on ne pouvait pas vraiment mettre sur un CV.
Voilà donc où les deux femmes se trouvaient, dans une salle de repos, à 6h30 du matin, en attendant l’arrivée d’un supérieur pour pouvoir préparer la salle d’examen. Pepper avait ouvert la porte à Stella, avant de la guider vers la salle de repos.
«
Ça va, t’es pas trop fatiguée ? Tu... Tu veux que je prépare du café ? »
Pepper avait pris soin de ranger son gode, mais, en proposant de faire du café, ce n’était pas totalement innocent... Car Pepper comptait mettre dans le café, qu’elle ferait elle-même, un petit ingrédient spécial,
made in Mishima.
De l’aphrodisiaque...