Pleione aurait voulu disparaître. Se faire toute petite, partir dans un trou de souris et ne plus jamais en ressortir. Elle n'arrivait même plus à soutenir le regard de Yuko, tant elle se sentait coupable d'être aussi hypocrite avec elle. Bien sur qu'elle la désirait, qu'elle voulait s'abandonner entre les mains de cette humaine si étrange et si belle, pour s'y faire câliner et dorloter, comme quand elle n'était qu'une petite neko, courant partout dans sa maison, habillée avec ses jolies robes de princesses, rendant déjà folle ses parents et amusant sa grande sœur. Mais aujourd'hui, son plaisir n'arrivait pas à sortir de son corps. Au lieu de se jeter sur Yuko pour l'embrasser, la déshabiller et faire l'amour avec elle, Pleione continuait de la critiquer. Elle affirmait qu'elle ne l'aimait pas, qu'elle ne s'offrait à elle que pour lui prouver qu'elle ne ressentait rien d'autre que du mépris pour elle, et qu'elle était persuadée que cette humaine n'était rien d'autre qu'une sale petite peste accro à la souffrance. Mais il aurait fallu être aveugle ou complètement idiot pour ne pas voir la vérité.
Tout le corps de Pleione frémit d'aise en sentant Yuko se rapprocher, persuadée qu'elle allait recevoir la fessée qu'elle désirait tant. Mais au lieu de ça, la jolie blond se contenta de passer délicatement ses doigts sur la culotte recouvrant encore le derrière de la jeune neko, en disant qu'elle se sentirait coupable de frapper de si jolies fesses. Qu'elle préférait largement les caresser, les lécher, croquer dedans ou même s'en servir comme oreiller. La dernière idée intrigua un peu Pleione.
« Dormir sur mes fesses ? Quel genre de personne censée voudrait faire un truc pareil ? »
Pourtant, l'idée n'avait pas manqué de lui arracher un fantasme : elle voyait déjà la tête de Yuko, posée sur son derrière, à se faire chatouiller le nez par la queue de la neko. Un fantasme qui lui aurait presque donnée envie d'accepter... si elle n'était pas aussi bornée.
« En plus, comparée à ma sœur, mes fesses sont totalement plates. Personne ne pourrait s'amuser avec de cette façon. »
Encore une fois, ses complexes la tourmentait, et la tristesse se voyait sur son visage. En temps normal, elle n'avait que peu de difficultés à se montrer nue devant l'une de ses partenaires, tant que cette dernière voulait vraiment aller jusqu'au bout avec elle, mais dans le cas présent, sa rigidité d'esprit devant la jolie blonde la rendait encore plus soucieuse de ses formes. C'est aussi pour ça que, même pendant qu'elle pointait son derrière vers elle, elle utilisait ses mains pour cacher ses seins et s'appuyait sur ses coudes pour se tenir.
Pleione sortit de ses pensées quand elle sentit la main de Yuko quitter son derrière pour venir sur son dos, remontant de plus en plus vers sa tête. Puis, tournant légèrement les yeux, elle vit que Yuko venait la rejoindre, dans une position similaire à la sienne, collant sa tête près de ses oreilles, sans arrêter de la caresser. Elle lui murmura à l'oreille qu'elle savait la vérité que sa jolie neko n'arrivait pas à lui dire, et qu'elle se ferait un plaisir de prononcer ces mots à sa place.
« ...Veux-tu que je te fasse l'amour ? »
Ces mots résonnèrent dans la tête de Pleione, et leurs échos allèrent se cogner dans tous les coins de son cerveau. Cette phrase, cette phrase qu'elle n'arrivait pas à dire elle-même, mais qu'elle pensait de tout son être, elle l'avait entendu de la bouche de celle qu'elle désirait. A présent, un simple mot manquait. Un mot qui résonnait dans sa tête en même temps que les paroles de Yuko.
Oui... oui... oui... oui...
Des milliers dans son esprit, mais pas un seul dans sa bouche. C'était un mot des plus simples, mais face à l'acharnement de Pleione à refuser d'admettre qu'elle avait eu tort, aucun mot en ce monde ne pouvait lutter.
Pleione avait toujours eu une façon bien à elle d'agir, de penser, de se comporter... une façon qui n'était pas toujours au goût de tout le monde, en particulier de ses parents. Car élever un enfant qui refuse d'obéir, c'est un vrai calvaire. Face à l'autorité, Pleione avait toujours agi en rebelle, qui refusait d'admettre un autre point de vue que le sien. Plus tard, en grandissant, elle a fini par accepter que, parfois, sa grande sœur Antares pouvait avoir raison. Mais pour les autres, le tarif était toujours le même : soit vous êtes de son avis, soit elle ne vous écoute pas. Et parmi les autres, elle se comptait elle même.
Dans le cas présent, elle refusait de regarder la réalité en face : Yuko Karistal, une fille destinée à devenir la gérante d'un puissant empire esclavagiste, était peut-être dure dans le travail, mais elle pouvait se montrer plus que tendre dans l'intimité de la chambre. C'était cet aspect dont Pleione était tombée ''amoureuse'', mais son esprit n'arrivait pas à concilier cette tendresse avec son autre facette. Et c'est pour ça qu'elle était incapable de répondre un simple « Oui » à la question de Yuko.
La douleur dans sa poitrine se fit de plus en plus grande. Elle ne pouvait plus supporter le poids de ses propres mensonges. Elle sentit ses muscles s'affaiblir et ses nerfs lâcher. Elle le laissa tomber sur le lit, à plat ventre, et mit sa tête dans ses bras pour pouvoir pleurer les larmes qu'elle n'arrivait plus à retenir. Yuko ne comprenait pas ce qu'il se passait. La seule chose qu'elle entendit, c'est une phrase, dite par Pleione avec une voix très faible.
« Antares... aide moi. »
A côté d'elles, Antares et Yuka étaient beaucoup plus joyeuses. Antares avait réussi à obtenir de Yuka qu'elle lui révèle son secret, contre la promesse qu'elle pourrait ensuite lui enlever sa robe bleue. Mais avant de lui parler, l'humaine posa sa main sur la bouche de sa neko, par crainte que sa surprise à l'entente de ce grand secret ne mette la puce à l'oreille de sa sœur neko. Cette dernière eut soudain l'envie de lui lécher la main, mais elle n'en eut pas la force, par gêne. Et quand Yuka lui murmura son secret à l'oreille, Antares crut qu'elle allait crier à cause de la surprise.
Se transformer... en neko ? En vraies nekos ?
Elle n'en crut pas ses oreilles. Ce qu'elle venait d'entendre paraissait impossible, mais elle n'avait aucune raison de douter de la parole de son hôte. C'est alors qu'elle prit conscience de ce que cela impliquait : à part sa sœur, elle n'avait jamais eu d'expériences avec d'autres nekos, et s'est dit que cela pourrait être amusant. Cette perspective fit dresser les poils de ses oreilles et de sa queue sous l'effet de l'excitation. Puis Yuka enleva sa main de sa bouche avant de venir lui faire un bisou sur le nez. De nombreuses questions brûlaient les lèvres de la neko, mais elle ne devait en poser aucune pour ne pas risquer d'ébruiter l'information à sa sœur. Et maintenant que Yuka avait tenue sa part du marché, c'était au tour d'Antares. Avec les joues rougissantes, elle se tourna et ramena ses longs cheveux blonds devant elle, pour dévoiler le dos de sa robe à sa future partenaire.
« Tu vois les nœuds dans mon dos ? Défais les, puis déserre ma robe. Ensuite, tu pourras me l'enlever. »
Yuka suivit les instructions : elle tira sur les ficelles pour détacher les nœuds, puis désserra la partie centrale de la robe.
« Bien. Maintenant, donne moi tes mains. »
Antares prit les mains de Yuka et les amena sur ses épaules pour les faire glisser le long de ses bras, jusqu'à ce que sa nuque et ses épaules soient visibles. Ensuite, Antares se leva, et sa robe glissa naturellement à ses pieds. Elle alla la poser sur une chaise, puis revint s'asseoir à côté de Yuka, ne portant plus que ses collants et ses sous-vêtements. Elle était un peu gênée, et se couvrait instinctivement le corps avec ses bras. Mais son désir était en train de brûler dans sa poitrine, et elle ne put résister à l'envie d'embrasser Yuka. Elle s'approchait de son visage quand, tout à coup, elle entendit des sanglots. Ceux de sa sœur, ainsi que sa petite voix qui l'appelait à l'aide. Évidemment, elle répondit immédiatement.
« Excuse moi une seconde, Yuka. Il faut que j'aille lui parler. »
Antares s'approcha, faisant signe à Yuko de reculer. Elle s'assit à côté de sa sœur, observant son corps nu, seulement couvert par sa culotte. Elle approcha sa bouche de son oreille pour venir lui murmurer quelques mots.
« Pleione, je suis là. Regarde moi. »
Sur ces mots, Pleione sortit sa tête de ses bras et se releva pour regarder sa sœur droit dans les yeux. Des larmes coulaient encore sur ses joues, et elle ne se souciait plus de couvrir sa poitrine. Elle était comme un chaton en larmes, suppliant qu'on s'occupe de lui. Alors Antares prit une drôle de décision : elle alla embrasser Pleione, sous les yeux des jumelles Karistal. Elle resta moins de cinq secondes, puis s'éloigna. Pleione la regarda avec stupeur, et peut-être un peu de colère.
« Pou... pou... pou... pourquoi tu as fait ça sous leurs yeux ? »
« C'est le seul moyen que je connaisse pour être sur que tu n'aurais pas envie de me mentir. »
Antares regarda sa sœur avec sa tendresse habituelle.
« Je sais que tu es triste. Cela fait suffisamment longtemps que je vis avec toi pour savoir ce que tu penses. Tu as envie de dire quelque chose à Yuko, mais ton comportement imbécile t'empêche d'admettre tes erreurs. Alors si tu ne peux pas lui dire à elle... tu pourrais me le dire à moi, honnêtement, ensuite je le lui répéterai. Alors, dis moi... que ressens tu pour Yuko ? »
Pleione observait sa sœur, le regard triste, les larmes aux coins des yeux. Son sourire, l'affection dans sa voix et dans ses grands yeux bleus lui décidèrent à se confier, sans mensonge et sans crainte. Elle avait une totale confiance en sa sœur. Sa voix était chargée de tristesse.
« Je... je n'aime pas le travail que Yuko fait avec son père. Je trouve que c'est un travail ignoble, qui exploite le malheur d'autres humains et de terranides, comme nos domestiques. Mais... j'aime Yuko. Je l'aime en tant que personne. Je veux sentir la chaleur de son corps contre le mien, je veux sentir ses baisers et ses caresses partout sur ma peau et sur mes parties de neko, je veux pouvoir lui faire l'amour un million de fois, de toutes les façons possibles, je veux qu'elle comprenne à quel point je veux la chérir. Mais je n'arrive pas à le lui dire... »
Pleione se remit à pleurer. Antares essuya ses joues avec ses mains, tout en douceur.
« Et bien, ne t'en fais pas... Maintenant, elle l'a entendu. »
Pleione releva la tête. Elle remarqua alors que Yuko était juste derrière sa grande sœur. Elle fondit littéralement en larmes, puis se jeta sur Yuko, la serrant contre elle de toutes ses forces. Enfin, elle était libre de montrer son affection, sa fichue retenue la laissait enfin tranquille.
« Yuko, je... je suis désolée. J'ai essayé de te dire que je voulais le faire avec toi. Mais je n'ai pas réussi à te l'avouer. J'étais trop bornée pour ça. Mais je te désire plus que tout, et je veux que tu me fasses l'amour. Alors, s'il te plaît, pardonne moi pour toutes les méchancetés que j'ai pu te dire.
Je t'aime Yuko. Je t'aime de tout mon cœur. »
Pleione se frotta contre sa future partenaire, laissant ses larmes couler sans retenue.
Antares la regarda avec amour, puis retourna auprès de Yuka pour reprendre leur conversation. Mais après le baiser qu'elle avait échangée avec sa sœur, elle avait tort d'espérer que les Karistal ne chercheraient pas à en savoir plus.