L'Enfer c'est les autres [Tania Blacksteel]

Les miens m'avait envoyé espionner les Tekhannes. Cela devait être une mission de routine, une première mission facile pour un jeune Xenos en age de combattre. Mais les jeunes Xenos sont des imbéciles qui essayent souvent d'épater leurs ainés en en faisant plus que demandé. Je voulais me faire un nom dans la meute, être respecté et admiré par mes semblables. J'ai tenté d'enlever une générale, une cible de choix qui est venue à moi comme un cadeau envoyé par notre Dieu. L'occasion était tellement belle, tellement inespérée, je salivais d'avance à l'idée de l'interroger, de lui arracher de précieux renseignements avant de la féconder. Seulement, ça ne s'est pas passé comme prévu, les tekhannes ne sont pas des imbéciles et leurs hautes-gradées sont très bien protégées. Je pensais pouvoir me servir de ma bulle d'invisibilité pour l'enlever ni vu, ni connu, mais cette petite salope avait une arme électrique sur elle qui m'a immobilisé. Quelques secondes plus tard j'étais à demi-conscient et cerné, elles m'ont injecté quelque chose et j'ai perdu connaissance. Heureusement nos bracelets d'invisibilité s'autodétruisent automatiquement s'ils sont enlevés de force d'un Xenos, il me suffisait donc de ne rien dire pour qu'elles n'apprennent rien.

Je me suis réveillé dans une sorte de laboratoire, fermement attaché à un mur et isolé du monde extérieur par trois épaisses couches de verre pare-balles, aucune chance de m'en tirer par mes propres moyens. Oh j'ai bien tenté de me dégager quand même, mais malgré ma force impossible de bouger, les attaches étaient trop résistantes, surement prévues pour retenir captifs des formiens de grande taille. Puis un haut-parleur s'est allumé à l'intérieur de mon enceinte de confinement :

"Prisonnier n°421, espèce inconnue, arrêté pour intrusion dans des locaux militaires et tentative d'enlèvement sur une représentante de l'armée. Déclinez votre identité, vos intentions et vos moyens pour mener à bien cette attaque."

"Je ne dirais rien."

"Prisonnier n°421, nous allons vous redemander ça une deuxième fois, si vous ne nous répondez pas vous serez considéré comme un cobaye et étudié. Comprenez par là que nous testerons des armes sur vous et que nous étudierons votre cadavre. Je répète : Déclinez votre identité, vos intentions et vos moyens pour mener à bien cette attaque."

"Et je répète également : Allez-vous faire engrosser par les formiens. C'est la seule chose pour laquelle vous êtes douées."

Le haut-parleur s'est coupé. Soit elles cherchaient à me cuisiner, soit j'allais crever, les deux étaient probables. À moins d'un miracle j'étais foutu de toute façon, même si je parlais ça changerait quoi ? Elles me tueraient juste un peu moins rapidement, donc autant rester fidèle à la meute jusqu'au bout. Visiblement les tekhannes étaient sorties de la salle de contrôle, peut-être pensaient-elles me faire réfléchir ainsi ? Quelle perte de temps.

Les barrières des laboratoires tekhans étaient réputés pour être impénétrables. Et c'était la vérité. Au moins, pour le commun des tekhans. Ceux qui n'avaient jamais eu à y entrer, et qui ne savaient donc pas que le meilleur moyen de neutraliser les défenses des bâtiments étaient de passer sous terre, par les égouts.

C'était ainsi que Tania avait réussi à s'échapper il n'y a pas si longtemps que ça, et c'était ainsi qu'elle et ses camarades avaient réussi à s'infiltrer dans les locaux et à donner un bon gros coup derrière la tête des scientifiques en charge du lieu - au nombre de deux, parce que même pour les tekhanes, travailler de nuit ne se révélait pas si chouette que ça. Dans le feu de l'action, la tête d'une d'entre elles heurta le micro, expliquant son soudain dysfonctionnement.

Les bruits de pas précipités d'une dizaine d'intrus, vêtus de haillons qui cachaient d'ailleurs leur visage, résonnaient dans les couloirs du laboratoire. Si quiconque se demandait la raison de leur présence, il ne tarderait pas à avoir sa réponse : des poings tapaient sur les interrupteurs permettant d'ouvrir les portes des cellules. Surpris par cet évènement, les sujets d'expérimentations ne tardaient cependant pas à sortir et à se disperser ou à rejoindre ceux qui les avaient libérés.
Ces interrupteurs pouvaient autant ouvrir une porte, comme en ouvrir une dizaine en même temps. Il y avait probablement un plan pour le définir, ou quelque chose du même style... mais honnêtement, l'adolescente à la fourrure rayée n'avait pas pris le temps de définir quoique ce soit pendant ce raid. En temps normal, la force de l'habitude suffisait à créer une organisation naturelle. Après tout, ils n'en étaient pas à leur première escapade dans les locaux pharmaceutiques de la ville.

Le problème, avec cette super organisation, c'était qu'on ne prévoyait pas forcément ce qui allait sortir d'ici. La furry y pensa en mettant en joue une créature qu'ils avaient croisé au détour d'un couloir et qui faillit leur foncer dessus, toutes écailles dehors. Des écailles qui semblaient plantées sur la peau mutilée, poussant joyeusement dans une évidente contre-nature.

Probablement un autre résultat d'une expérimentation foireuse, soupira Tania en poussant le cadavre du bout de sa botte. La voleuse avait troqué sa tenue de sport habituelle contre un long manteau de cuir, un jean et des bottes renforcées qui lui donnaient vraiment l'air d'une aventurière rodée. Le fusil à pompe qu'elle se trimballait ne gâchait rien dans ce tableau sympathique, mais elle fronça les sourcils en constatant qu'il ne lui restait plus beaucoup de cartouches.
Ce n'était cependant pas la chose la plus difficile à trouver dans un lieu comme celui-ci - surtout quand on savait que ces laboratoires étaient sponsorisés par l'armée. Indiquant à ses "troupes" de continuer sans elle, la gamine s’avança dans un couloir et ouvrit la porte d'un des bureaux du personnel, ouvrant les tiroirs à la recherche de munitions...