« L’Écorcheur », un individu sombre, peu recommandable, qui faisait des siennes à travers toute l’archipel japonais. Il avait écorché pas moins de vingt-cinq péquins en une année seulement. C’était le nouveau tueur en série dont les médias n’arrêtaient pas de parler. Surnommé ainsi par les médias, en dépit des insistances de la police pour ne le nommer que « le meurtrier », il gagnait en popularité auprès de psychopathes aussi atteints que lui. Foule d’hommes avaient essayé de l’imiter, mais il manquait toujours un détail crucial. Néanmoins, ça surchargeait la police criminelle. En deux mois de temps, le nombre de crimes avait augmenté de 10%. Et parmi ces crimes en plus, tous étaient des copies de ceux de l’Écorcheur. La plupart des meurtres étaient bâclés. Des individus sans expériences qui s’initiaient au meurtre, ce n’était pas une sinécure. Beaucoup d’imitateurs avaient pu être arrêtés, mais la popularité de l’Écorcheur grimpait en flèche, surtout due à son habileté à échapper aux contrôles de police.
Mirage, tout en faisant justice la nuit, s’était plus ou moins installée en tant que détective privée à Seïkusu. Depuis quelques semaines qu’elle était là, elle avait déjà résolu quelques petites enquêtes de vol, mené des filatures pour des couples jaloux, ce genre de chose. Et, la nuit, elle avait fait mettre en cellule pas moins de treize violeurs et voleurs en tout genre. Forte des connaissances léguées par les sœurs Temple, elle n’avait eu aucun mal à se forger une identité civile irréprochable, et à investir le peu qu’elle avait gagné dans des actions de petites sociétés d’électroniques ou ce genre de choses. Elle souhaitait faire fructifier ses gains pour pouvoir acheter un local de taille honnête afin d’y installer le siège social de son entreprise. Être détective nécessitait des frais, et un lieu où entreposer les dossiers. Elle ne pouvait pas tout laisser dans le petit studio de 20m² qu’elle louait pour l’instant. Elle n’avait même pas de garage !
Quand elle avait entendu parler de l’Écorcheur pour la première fois, Mirage s’était aussitôt intéressée à l’affaire. Ce criminel lui rappelait quelque chose, comme un souvenir caché. Peut-être un tel homme existait-il aussi dans le monde d’où elle venait, et les sœur Temple avaient sûrement entendu parler de ça, d’où la réminiscence. Mais ça ne changeait rien au fait que la jeune détective décida de se lancer sur l’affaire. Elle avait suivi les meurtres à travers tout le japon, s’arrêtant brièvement sur chaque scène de crime -sans pouvoir l’étudier à sa convenance à cause des policiers qui ne reconnaissaient pas les détectives comme étant des collaborateurs- et avait constitué un bon dossier sur le criminel.
S’étant arrêtée brièvement à Tokyo, elle avait profité d’un cybercafé pour mener quelques recherches en boostant discrètement l’ordinateur. Piratant les sites du gouvernement avec ingéniosité, elle avait alors découvert un fait que les enquêteurs gardaient secret. L’Écorcheur n’agissait pas qu’au Japon. Il avait déjà un passif aux États-Unis, ainsi que dans divers pays européens. Et pour finir, il s’étendait aussi au-delà du Japon, sur le continent asiatique. S’envoyant toutes ces données sur un serveur secret, Mirage remit l’ordinateur du cybercafé à son état d’origine, effaça toutes ses traces, et fila à l’aéroport pour réserver un billet pour le dernier endroit où un crime de nature à être celui de l’Écorcheur avait été trouvé.
Elle y fut en moins de trois heures. Elle rôda autour de la scène de crime, glanant de précieux renseignements, et fut dépitée de constater que le crime datait d’une semaine déjà. Les enquêteurs n’avaient aucune piste sérieuse.
En soupirant, elle avait alors décidé de rentrer à Seïkusu faire le point sur ce qu’elle savait. Elle avait donc reprit un billet d’avion, le surlendemain, et attendait à présent à l’aéroport surpeuplé que son vol parte.
« L’avion du vol 179 d’America Airlines, à destination de Seïkusu, ne pourra repartir suite à des problèmes techniques importants. Les passagers de ce vol peuvent se rendre à l’accueil de l’aéroport pour se faire rembourser le prix de leur voyage, ou bien pour échanger leur billet d’avion contre un billet en suite de luxe pour une croisière jusqu’à destination. Merci de votre attention, et bonne journée à vous. »
Et voilà. Pile le vol qu’avait réservé la belle détective. Elle hésita un moment entre le remboursement ou la croisière, mais en voyant que le prochain vol pour Seïkusu n’était pas prévu avant trois jours, elle décida d’opter pour le trajet maritime.
Et la voilà donc, à suivre une hôtesse au travers du luxueux paquebot nommé L’Argonautica jusqu’à la suite 1818 qui lui avait été attribuée. Aux portes de la cabine, l’hôtesse lui remit la carte magnétique nécessaire pour entrer et lui souhaita une bonne traversée, répétant qu’elle était à sa disposition pour le moindre de ses désirs.
Sans attendre, la brune passa la carte dans le lecteur, et entra dans la suite. Elle n’avait pas de bagages, si ce n’est un grand sac à main avec le nécessaire pour se changer, se laver, et être belle. Elle avait aussi un ordinateur portable et un Smartphone, ainsi que tous ses papiers et un peu de liquide. Elle déposa son sac sur le canapé de la luxueuse suite, et trouva rapidement les branchements réseaux qui permettraient d’avoir accès à l’internet. Elle brancha son ordinateur, pirata quelques services de sécurité, et eut accès à la base de donnée des enquêteurs sur l’affaire de l’Écorcheur.
Décidant qu’elle visiterait la suite plus tard, elle préféra noter toutes ses impressions et ses observations dans son dossier sur l’affaire, réunissant ce qu’elle savait, et ce que les enquêteurs savaient. Elle sauvegarda le tout, rapidement, et songea qu’une bonne douche lui ferait du bien avant de tenter de retracer tout le parcours du criminel dans le monde.
Quittant son jean et son débardeur dans le salon, près de son sac, elle se dirigea vers la salle de bain en sous-vêtements (une petite culotte en dentelle assorti à un top de même matière, d’un vert presque fluo qui, étrangement, rendait l’ensemble séduisant) avec son nécessaire à douche.
Quelle ne fut pas sa surprise quand, en entrant, elle trouva quelqu’un qui barbotait dans l’élégante baignoire de la suite. Silencieuse et choquée, elle resta un instant sur le pas de la porte, ne s’étant pas encore fait remarquer de l’inconnu. Plusieurs idées lui passèrent par la tête, en voyant l’individu de dos. L’Écorcheur est ici !, ou bien On dirait Rhodes…, ou encore C’est un tueur à gage, il est là pour me tuer !, bref, que des pensées un peu paranoïaques. C’est pour ça que, silencieusement, elle dégaina l’arme qui était coincée dans sa jarretelle, et la braqua sur le crâne de l’inconnu. Elle avance, sans bruit, et plaque brusquement le canon doré sur la nuque de l’inconnu.
« Qui êtes-vous, et qui vous a envoyé ? »
Pas paranoïaque du tout.