Quartier de la Toussaint
15 minutes après l’explosion«
Aïe... Bordel... »
Tout était noir, tout était sombre. Rachel entendait à peine sa propre voix, et ne percevait plus le monde extérieur. Sa lourde armure était devenue un épais sarcophage, une prison. Tout était désactivé, éteint, et elle ne pouvait même pas remuer le petit doigt. Tout avait été désactivé, mais, pour autant, elle sentait le souffle du vent sur certaines parties de son corps, glissant sur sa combinaison légère, censée protéger son corps. Elle grimaça, sous la douleur. Au moins, elle n’était pas morte, mais, à ce train-là, elle allait rapidement manquer d’oxygène. L’armure avait été percée à hauteur du cou, et elle pouvait donc respirer... Mais de manière très difficile. Rachel ferma les yeux, se forçant à ne pas paniquer, se disant que les secours allaient arriver. Les renforts étaient en route, elle le savait, elle avait entendu la radio... Le problème était que les renforts étaient éloignés.
Et eux étaient proches.
*
Merde, on aurait pas du les sous-estimer...*
Encore une fois, la femme essaya de remuer, mais sans succès. L’armure était complètement inerte, et elle ne pouvait même pas lever la main pour abaisser la plaque sur son visage. L’impuissance... C’était vraiment la situation qu’elle détestait le plus au monde. Elle avait souvenir de s’être écrasée dans une cour de basket, en plein milieu de la Toussaint, mais tout était parti dans tous les sens. Elle avait fait une chute de plusieurs centaines de mètres. Le simple fait qu’elle soit encore en vie tenait presque du miracle.
Seikusu Base Camp
Centre de commande de la section japonaise du SHIELD
15 minutes après l’explosion«
Comment ça, plus aucun contact ? -
La balise ne répond plus, Commandant ! Voyez par vous-mêmes ! -
C’est totalement impossible, les systèmes d’urgence sont censés fonctionner dans n’importe quelle circonstance ! -
Il n’y a pas d’erreur, le satellite fonctionne bien... Monsieur, il faut ordonner le repli, nos hommes se font massacrer... -
Et leur laisser l’armure ?! Vous déconnez, ou quoi ?! »
Le Commandant Browning était complètement paniqué, et il y avait de quoi. L’Opération Flatdown avait complètement foiré, après des jours et des jours d’une organisation minutieuse, en coopération avec les forces japonaises. Pour le Commandant, ça ne faisait aucun doute : il y avait un traître, et il soupçonnait naturellement les Japonais. La situation était cauchemardesque. L’Unité-1 avait été intégralement massacrée, et l’Unité-2 se repliait, tandis que les forces d’assaut japonaises avaient été prises en embuscade. Tous les détails de Flatdown avaient été communiqués à l’ennemi, et le pire était la chute d’Iron Girl. L’armure s’était écroulée comme une pierre, et, quand elle s’était reçue l’attaque, le signal GPS avait émis une brève alarme, avant de s’éteindre brusquement. Sur l’immense carte tactique de la grande pièce faisant office de centre de commandement, le pointeur correspondant à l’armure avait subitement disparu.
Dès lors, les informaticiens du SHIELD s’activaient. Ils pianotaient nerveusement sur les touches pour essayer de déterminer le point d’impact. Le plan du Commandant Browning était simple. Les ennemis leur avaient tendu un piège pour récupérer l’armure, et il comptait bien empêcher ça. L’Unité-1 n’existait plus, et il allait donc devoir compter sur l’Unité-2 pour aller la récupérer, coûte que coûte.
Comment un tel cauchemar est-il possible ? Browning s’épongea le front, couvert de sueur, s’efforçant de rester calme, voyant déjà sa tête sauter. Il serait tenu pour responsable s’il n’arrivait pas à retrouver Iron Girl, et aurait, non seulement le Pentagone sur le dos, mais aussi le père de Miss Hawkes, le général Hawkes, qui se ferait un plaisir de briser sa carrière.
L’opération n’aurait pas du déconner à ce point, il avait pris toutes les précautions d’usage. Fermant le syeux, les souvenirs de la débâcle lui revinrent à l’esprit.
Quartier de la Toussaint
10 minutes avant l’explosionDeux unités, deux points d’attaque, une cible : un appartement miteux de la Toussaint. L’appartement était perdu dans le quartier. L’objectif était d’appréhender les cibles à l’intérieur, d’empêcher à tout prix la destruction des lieux, et de mettre la main sur le Bricoleur, ou sur des preuves. Le Bricoleur était un criminel mondialement recherché. Phineas T. Mason était un individu assez âgé, né dans le Wisconsin, qui était recherché à cause de ses inventions. Il ne portait pas le surnom du Bricoleur pour rien. C’était un criminel activement recherché, car il armait des terroristes, et, depuis quelques mois, le SHIELD l’avait mis en priorité des cibles à rechercher, dans la mesure où on le soupçonnait de fournir des armes et de l’équipement high-tech à de nombreux super-criminels. La longue enquête du SHIELD les avait amenés dans cet appartement, une planque du Bricoleur, afin de le neutraliser.
L’Unité-1, l’Unité-Bravo, était soutenue par Supergirl, et attaquait depuis le rez-de-chaussée. L’Unité-2, l’Unité-Alpha, elle, était secondée par Iron Girl, et venait depuis les hauteurs. L’Opération Flatdown se déroulait en deux attaques conjointes dans un grand appartement poussiéreux qui regroupait plusieurs pièces, sur tout un étage. Le satellite du SHIELD leur avait permis d’obtenir la confirmation de la présence de plusieurs personnes dans l’appartement. La police japonaise, dont le soutien était indispensable pour que le SHIELD puisse exercer une opération militaire, avait pour ordre de sécuriser les lieux. Pour ça, il y avait trois camions blindés remplis de troupes d’élite dans les environs, des camions camouflés prêts à intervenir si la situation se corsait.
L’opération était extrêmement importante. Elle l’était d’autant plus que Stark Industries avait récemment été victime d’une attaque informatique de haut niveau. Peu d’informations avaient filtré sur cette attaque, mais Stark Industries était très proche du SHIELD. Les rumeurs disaient que les terroristes cherchaient à obtenir les schémas tactiques de l’armure d’Iron Girl, afin de mettre au point une arme capable de la court-circuiter. Il n’y avait cependant aucune preuve tangible, les informations émanant de Tony Stark, un homme que l’armée respectait peu... Et Browning en faisait partie. Penser que ce type arrogant et prétentieux avait pu finir directeur du SHIELD, même à titre provisoire, était insupportable à admettre. Les agents de Browning avaient mené leurs recherches pour savoir ce que les pirates avaient pu voler, mais le temps avait joué contre eux.
L’Unité-1 était entrée la première, Supergirl utilisant sa vision spéciale pour voir à travers les murs, aidant ainsi à repérer les ennemis potentiels. Armés d’armes paralysantes, les soldats du SHIELD, des soldats d’exception, d’anciens militaires qui, pour leurs compétences exceptionnelles, avaient été recrutés par le SHIELD, étaient entrés dans le salon, neutralisant les criminels. Leurs tatouages indiquaient l’appartenance aux Yakuzas, comme la police japonaise l’avait signalé. On avait repéré des strip-teaseuses, ainsi que des drogues dans les bouteilles du bar.
L’appartement s’étalait sur deux étages. L’Unité-2, de son côté, était sur le toit, se scindant en deux : une équipe en rappel pour atteindre la terrasse des chambres, l’autre par les marches pour arriver à l’étage du-dessus. L’ »Unité-1 gravissait l’escalier. Une porte s’était ouverte sur un autre tueur, et une fléchette tranquillisante l’avait atteint à la nuque. Un tir parfait. Le gangster s’était écroulé comme une masse, et les agents spéciaux s’étaient avancés dans le couloir, tirant sur tout ce qui bougeait : malfrats, aussi bien que les prostituées avec lesquels ils faisaient l’amour, pour certains.
«
Aucune présence du suspect, avait annoncé ABravo-Leader par son intercom à ses supérieurs.
-
Reçu, Bravo-Leader. Poursuivez. »
Grâce à des caméras implantées dans leurs casques, on pouvait voir leurs progressions. On pouvait également mesurer leur rythme cardiaque, relativement calme. Des professionnels. Ils s’avançaient dans les couloirs, lorsque Supergirl avait froncé les sourcils, annonçant que les murs d’une pièce étaient faites en plomb, l’empêchant de voir à travers. Le rythme cardiaque des soldats avait très légèrement augmenté, sous l’effet de l’adrénaline. Formation classique d’entrée en force. Deux à gauche de la porte, deux à droite. Un cinquième se posta devant, et sortit de son équipement un miroir, pour voir autour de la porte. Il leva la main, faisant un signe que les agents comprirent clairement. Pas d’ennemis derrière, ni de pièges. Cependant, le miroir avait de gros angles morts. L’agent spécial s’était relevé, en retrait. On avait retiré l’ampoule du couloir, les soldats activant leurs lunettes de visions nocturnes. De petites bombes furent fixées à la porte, et cette dernière explosa brièvement, s’écartant de quelques centimètres. Immédiatement, un agent balança une grenade étourdissante à l’intérieur. Tous détournèrent la tête.
La bombe explosa, et ils entrèrent en masse. Bravo-Leader ouvrit la porte d’un grand coup de pied, et pointa son arme, un puissant fusil d’assaut.
Le miroir n’avait pas vu les discrets fils qui partaient sous les lattes, menant au lit, où trônait une puissante bombe.
Bravo-Leader fut le premier à voir la bombe. Mais il ne fut pas le premier à mourir. En réalité, toute l’unité mourut en même temps. La bombe était placée dans une pièce spéciale, avec des piliers porteurs, et provoqua la destruction de toute l’installation.
Ce fut l’explosion. Le moment précis, névralgique, où Flatdown dégénéra totalement.
Quartier de la Toussaint
10 secondes après l’explosionIl y eut une intense vibration. Ensuite, Rachel, qui faisait partie de l’équipe dans l’escalier, sentit comme une vibration, et manqua tomber. La bombe était puissante, et ils se trouvaient deux étages au-dessus. Le sol se mit à trembler, la cage se fissura, et les étages supérieurs se mirent à tomber. Les agents spéciaux poussèrent des hurlements paniqués en sentant le sol se dérober sous leurs pieds. Les piliers de soutien de l’immeuble étaient extrêmement vieux, et, comme dans la plupart des quartiers de la Toussaint, n’étaient pas aux normes. Ils gémirent sous ce poids supplémentaire à porter, et ployèrent en quelques secondes.
Rachel pensa à activer son armure, tandis que le plafond leur tombait dessus, et que le sol disparaissait dans un amoncellement de gravats et d’éboulis.
Iron Girl avait réussi à sortir, au milieu de soldats hébétés, et avait perçu plusieurs explosions et fusillades au loin. Les policiers en embuscade, leurs renforts, étaient tombés dans un piège. Des Yakuzas les attaquèrent rageusement. L’un des camions fut bloqué sur place, une rafale abattant le chauffeur et son copilote. Un autre camion fut visiblement plus réactif, et réussit à s’échapper du traquenard, avant d’être piégé dans la rue, et de se défendre contre de nombreux tueurs. Rachel était en train d’aider les soldats, quand Supergirl était sortie des décombres, visiblement en pétard, son costume légèrement déchiré.
«
Il faut les évacuer de là ! » avait-elle lancé.
Rachel était d’accord, et, tandis que Supergirl libérait les agents du SHIELD des décombres, balançant au loin les gravats, elle n’avait pas vu une femme se déplacer dans son dos, la ciblant soigneusement... Avant de lui balancer une décharge de kryptonite concentré. Dans un hurlement de douleur, Supergirl s’était mollement écroulée au milieu des gravats, sous un rire sardonique... Et, devant ses yeux, Iron Girl avait vu l’un des super-criminels équipés par le Bricoleur.
«
Pauvre SHIELD, avait lancé la femme.
Depuis que Fury est parti, vous n’êtes plus rien... »
Rachel connaissait cette femme. C’était Lady Octopus. La version féminine, plus rapide, et visiblement mieux équipée, de Doc Ock.
Carolyn Trainer avait jadis été l’assistance du docteur Otto Octavius, qu’elle avait toujours vénéré. Fidèlement soumise à ce dernier, et partageant ses délires mégalomaniaques, elle l’avait aidé à transformer une secrétaire effacée, Angelina Brancale, en une tueuse sexy et amoureuse d’Octopus, Stunner. Lady Octopus se voulait comme l’héritière de Docteur Octopus.
«
Carolyn Trainer, vous êtes en état d’arrestation pour... -
Oh, je hais ce nom, il ne me rend pas hommage ! »
Le combat s’était enclenché, et il était évident que Lady Octopus n’était pas de taille. Elle esquivait habilement les tirs plasma de Rachel, et cette dernière choisit de s’envoler, frappant en hauteur, les tentacules peinant à l’atteindre. Pour autant, Rachel ne la sous-estimait pas. Et c’est ainsi qu’elle n’avait pas vu le complice de Lady Octopus. Sur un toit, il avait visé cette dernière avec une sorte de fusil très précis, balançant une décharge électrique qui, en atteignant l’armure, l’avait paralysé. Les tentacules de Lady Octopus avaient alors craché de l’acide, atteignant l’armure, puis Rachel s’était reçu un coup de tentacule à hauteur du cou, arrachant des morceaux de plaque, avant que la gravité n’attire à elle l’armure. Elle était tombée comme une pierre, avait heurté un mur, et s’était perdue dans les quartiers de la Toussaint.
«
Retrouvez-là ! avait hurlé Lady Octopus.
Nous avons besoin de cette technologie ! »