Il faut que je ramène Estelle dans l'église ! Là, je serai sur mon territoire, et je pourrai non seulement y voir plus clair, mais surtout faire fuir cette démone hors d'elle. Je dois vite me rappeler où j'ai rangé le livre d'exorcismes, et me souvenir de ceux auxquels j'ai assistés ; mais ceux-là étaient ardents ; là, il y a la fragile Estelle, et je veux absolument la sauver... pour qu'elle se donne corps et âme à son sauveur. Et, si ça ne réussit pas, je vais invoquer d'autres forces, celles que m'ont appris les vieux sorciers lors de mes années en Afrique ; c'est de la magie noire avec des entités puissantes, c'est même dangereux d'appeler des forces du mal pour combattre un démon, mais je n'aurai pas le choix.
Trop de temps perdu à réfléchir ! Estelle reprend ses esprits, alors que j'aurais pu profiter de son évanouissement, non pour abuser d'elle même si j'en meurs d'envie, mais pour la porter jusqu'à l'église. Mais je sens toujours une bosse distendre mon pantalon, devant ce corps troublant. Oh Dieu, pourquoi suis-je donc si faillible ? Mais je vais me racheter, hein ; je vais tuer ce démon, car c'en est un n'est-ce pas, et ça équilibrera les comptes avec les quelques élèves passées et à venir. Trop de temps à attendre la divine réponse, Estelle s'est levée, sa robe a glissé, juste une culotte orne ce corps sublime. Dieu, guide-moi, je suis perdu. Je touche ma croix encore une fois, seul roc où me raccrocher.
« (…) As tu compris qui nous sommes (...) ? »
J'avais donc raison ; ce « nous » trahit la réalité des faits ! Il y a celle que je désire, et la chose qui la possède. Je suis face au Diable, le sang, le feu, la souffrance, celle qu'inflige la chose à la jeune femme que je désire. Oui, car il y a, malgré tout, ce désir charnel, cette irrationnelle envie d'elle comme je n'en ai jamais eu avec les autres élèves, qui n'étaient que des passades. Allons, Yves, reprends-toi ! Tu ne vas pas copuler avec le Diable, voyons.
« (...) mais ce n'étais pas très agréable (...) »
« Mais je ne demande qu'à vous faire des choses très agréables, Estelle. »
Non, qu'ai-je dit ? Ce n'est pas moi ; Dieu, je te le jure, enfin je crois. Le démon s'est emparé de moi, il me fait dire des choses que je ne pense pas. Enfin si, je les penses, mais pas comme ça.
« (…) tu devrais te rendre dans l'autre monde une fois (...) »
Cette démone veut m'entraîner sur son territoire, là où elle sûre de m'avoir ! Tant que je reste ici, je conserve mes atouts et la force divine. Ailleurs, je ne sais si je les aurai encore.
« Je ne sais qui tu es vraiment, ni d'où tu viens. Mais je suis avant tout homme d'Eglise, et je dois demeurer au service de mes engagements. »
Oh Dieu, même si tu sais combien mon âme est tourmentée par cette femme, ne laisse pas mon âme s'enfuir aux mains du Diable. J'ai toujours été ton fidèle serviteur ; je n'ai péché que dans l'amour et, du haut de ta grandeur, tu as pu voir comme j'ai fait jouir toutes celles que j'ai eues dans mon lit. J'ai même veillé à n'utiliser que la sacristie, et jamais l'église.
« Je ne cherche pas vraiment à faire le mal... voit moi plutôt.. comme une libératrice, en parlant de se libérer... connaissant la vérité, tu aurais toujours envie d'Estelle, ou tu es plus dans le style de... mon "amie" aha... désolé. »
Un démon qui ne veut pas faire le mal ? Ca n'existe pas. Mais c'est Estelle qui me parle, par une autre chose. Je dois être en plein cauchemar ; Dieu, si c'est toi qui m'y a plongé, explique-moi pourquoi. Pour m'interdire de la toucher parce qu'elle est pure, ou pour m'informer qu'elle a en elle une démone à combattre ?
« Oui, Estelle, je l'avoue, j'ai envie de... »
Je parviens juste à stopper cette phrase qui m'a échappé. Mais je ne sais que trop combien je ne demande qu'à me perdre dans ces yeux si bleus. Tiens, j'étais persuadé y avoir vu des lueurs rouges, et là plus rien. Le cauchemar continue ; la plus belle des élèves est devant moi, et j'ai peur de la toucher.
Passant la main sous ma chemise, j'en sors ma croix fidèle, qui me sauva tant de fois, j'en suis certain. Je la serre si fort dans ma main, je n'ose pas la pointer vers Estelle, car c'est à elle que je pourrais faire mal.
« Je ne sais qui vous... Non, qui tu es, Estelle. Si tu souffres, je veux te soigner. Si la religion peut t'aider, je serai ton guide de conscience. Si tu es perdue, je saurai t'accompagner. Mais explique-moi tout ça ! Le baiser que tu m'as donné m'a fait voir des choses horribles, alors qu'il devait être si doux. Je veux savoir ce que tu veux vraiment. »