Cela faisait environ trois jours que Pipa s'était faite acheter par ce noble patibulaire et grossier... dans le marcher aux esclaves, elle avait été placée en-avant des cages, pour sa beauté et sa rareté... si ce n'était pas pour l'acheter, les gents, en-passant devant la boutique, s'arrêtaient pour la regarder, puis dans soixante pour cent des cas, ils se disaient qu'une petite esclave supplémentaire dans leur lit ne ferait pas tache, et ils entraient dans la boutique pour voir ce qu'il y avait de plus abordable qu'elle pour leur bourse. La terranide-oiseau servait à la vente, mais aussi à appâter les clients... et c'était ainsi qu'elle avait attiré le regard de ce noble à la mauvaise réputation, autant pour les gents-libres que pour les esclaves... selon ce qu'on disait, il achetait rarement au marcher, préférant se servir chez les gents qu'il escroquait en les forçant à lui céder leur fille, ou c'était pour eux la ruine. Mais là, visiblement, il décida qu'il ne laisserait pas passer une aussi belle occasion de mettre la main sur quelque-chose d'aussi rare... et c'était ainsi que, suite à transaction qui avait coûtait bien cher à son nouveau maître, Pipa s'était retrouvée ici.
Son nouveau maître se prit tout-de-suite d'affection pour elle... enfin, plutôt pour son joli petit minois, pour ses ailes gracieuse, et pour sa poitrine rebondit. Et désormais, chaque fois qu'il avait un temps de libre, il venait le passer avec elle... il la faisait danser pour lui dans des tenus orientales presque transparentes durant des heures, la faisait le masser son gros dos grassouillet... voir des parties plus intimes de son anatomie... et le soir, avant de s'endormir, il s'amusait avec son corps. Cet homme sentait mauvais et il était grossier, et surtout lourd lorsqu'il s'endormait avec la tête sur ses seins... mais Pipa ne trouva aucune raison de vraiment se plaindre : il était exigeant et ne la laissait que rarement se reposer entre une danse, un massage et un petit plaisir, mais au moins il n'était pas violent... pas avec elle, en tout-cas, bien qu'elle ne lui ait pas encore donné de raison de le faire... jusque-là, elle avait docilement obéi à chacun de ses ordres sans broncher, même lorsque cela lui faisait mal.
Oh, et puis un autre point positif : temps qu'il gardait ses désirs sur elle, elle dormait dans son lit, et c'était beaucoup plus chaud et confortable que sa cellule d'esclave chez les marchands. Durant la troisième nuit passée avec lui, la harpie avait réussie à s'endormir malgré le poids de son maître qui pesait sur elle... la soirée qu'ils avaient passés ensemble l'avait laissée complétement épuisée. Elle rêvait, et tout se passait sans accro... jusqu'à ce qu'elle soit violemment réveillée, alors que le noble lui criait dans les oreilles...
Tout se passa si vite qu'elle ne comprit pas ce qu'il se passait... elle s'assit, regarda son maître, puis une femme qu'elle ne connaissait pas à-côté d'elle, près du lit. Les gardes, armés de leurs épées, entrèrent... Pipa poussa un cri de terreur et cacha son corps nu avec la couverture. Puis vint le moment où la femme l'attrapa, lui faisant mal au bras, puis la chute... et enfin, avant que la harpie ne puisse se remettre de ses émotions, l'inconnue l'avait relevé et entraînée dans les jardins. Tirée par le poignais, elle ne pouvait que courir derrière elle, la couverture qu'elle avait emportée volant dans son dos. Elle fit passer au coin de son œil les végétaux du jardin de son maître, puis le grand portail ouvert... elle avait du mal à bien distinguer les choses, cependant, dans la nuit... et finalement, elles pénétrèrent dans la forêt.
Tendis que les ombres des arbres filaient autour d'elles, les idées de Pipa, embrumées par le réveil brutal et par la peur, commencèrent à s’éclaircir... elle comprit qu'elle venait de se faire voler. Elle se sentait égarée, maintenant... quand elle était chez les marchands, on lui avait appris qu'il lui fallait obéir à ses maîtres, et à celui ou celle qui l’achèterait... mais comme on venait de la voler, qu'est-ce qu'elle devenait ? La chapardeuse était-elle devenue sa nouvelle maîtresse ? Ne valait-il mieux pas qu'elle essaye de lui échapper pour retourner auprès du noble, par crainte que celui-ci la punisse de ne pas avoir essayé de le rejoindre, et de s'être laissée emporter ? Les yeux de Pipa tombèrent sur les armes de la femme... elle décida qu'elle lui faisait peur, et qu'elle préférait encore retourner auprès de ce grossier-personnage plutôt que de rester avec cette femme qui pourrait bien décider de la tuer lorsqu'elle n'aurait plus besoin d'elle. Pipa n'avait jamais montrée de résistance à qui que ce soit, et jusque-là, elle s'était laissée emporter sans rien dire... mais d'un coup, elle freina en plantant ses serres dans le sol et réussit à échapper à l'étreinte de sa ravisseuse. Puis elle fit demi-tour et partit en sens-inverse...
Cependant, elle avait un mauvais sens de l'orientation, surtout pendant qu'il faisait nuit... elle partit trop vers le sud-est et se perdit d'avantage dans la forêt. Elle ne courut pas bien longtemps... et elle finit par se prendre le pied dans une racine, avant de s'affaler mollement sur le sol couvert de feuilles mortes. Essoufflée, elle se redressa et regarda autour d'elle... dans la pénombre, elle distingua qu'elle se trouvait dans une clairière... il y avait un petit lac, à-côté d'elle. Un vent froid se leva, et elle serra d'avantage la couverture autour de ses épaules... elle était bien contente de l'avoir. Elle resta ainsi quelques minutes, voulant retrouver son souffle avant de chercher à-nouveau à rentrer chez son maître... mais d'un coup, un grognement sonore se fit entendre, et le grognement se répéta autour d'elle. Pipa remarqua alors que des yeux brillaient dans la nuit... dans un rayon argenté de lune, un grand loup gris s'avança. L'animal était drôlement maigre... oui, bien-sûr : le seigneur de ces terres aimait la chasse, et si il ne tuait pas les loups, il décimait leurs proies. Ce grand loup et sa meute étaient affamés... et ils avaient décidés d’inclure Pipa dans leur menu.
Quelque-chose tira sur la couverture de la harpie... Pipa se retourna et vit qu'un loup, croyant mordre dans la proie, en avait saisi le bout. Alors que la meute fonçait sur elle avec des hurlements sauvages, elle lui laissa la couverture et courut, nue, jusqu'à un arbre, sur lequel elle monta à l'aide de ses griffes. Les loups, environs une douzaine, restèrent au-bas de l'arbre en grognant, attendant qu'elle tombe ou qu'elle descende toute-seule. Accrochée à une branche, Pipa ferma les yeux, terrorisée, et cria :
-AU SECOURS !!! AIDEZ-MOI !!!