Ces drôles de pierres rectangulaires étaient vraiment bizarres ! Chez Maîtresse Alaunriina, Luna n’en avait jamais eu, pas plus qu’à Tekhos Metropolis, dans la mesure où Mirei ne résidait pas près d’un cimetière. Il y avait plusieurs rangées de petites pierres rectangulaires, et elle les reniflait silencieusement, ne sentant rien de particulier, voyant des bouquets de fleurs et d’autres objets. Pourquoi donner des fleurs à des cailloux ? Était-ce un genre de superstition ? Une sorte d’autel magique dédiée à une quelconque divinité ? Luna avait du mal avec le concept de « divinité », mais elle en avait entendu parler. Elle avait compris que les Dieux étaient les maîtres ultimes, mais ne comprenaient pas pourquoi, selon les discours, soit ils n’existaient pas, soit ils existaient. Dans son clan natal, il n’y avait pas de divinité. Du moins, pas qu’elle s’en souvienne. Et, ni Maîtresse Alaunriina, ni maîtresse Mirei, n’avaient chez elles de quelconques monuments à l’honneur de divinités.
*Ce doit sûrement être ça, des anfractuosités naturelles devant lesquelles on prie pour obtenir des faveurs...*
Prierait-elle devant ? Pour demander quoi ? Elle-même n’en savait rien. Que Maîtresse Alaunriina revienne ? Qu’elle ne soit jamais devenue une esclave ? Elle était incapable de faire consciencieusement le bilan de ses années de servitude avec Maîtresse Alaunriina. Les regrettait-elle ? Oui, évidemment. S’en souvenait-elle avec nostalgie ? Désirait-elle y retourner ? Voilà des questions à laquelle elle avait envie de répondre un « NON » franc, mais, si c’était ce qu’elle pouvait dire devant les autres, au fond de son cœur, ce « NON » franc ressemblait plus à un murmure, à un « Non ? » mal assuré. Certes, Maîtresse Alaunriina avait été cruelle et sadique avec elle, Luna l’admettait volontiers, mais elle lui avait aussi fait découvrir bien des plaisirs forts, bien des délices qui l’avaient marqué. Elle avait adoré les parties de sexe avec elle, et avait même fini par adorer toutes les fois où elle la balançait en pâture à ses hommes, à ses monstres, à ses lianes tentaculaires qui la prenaient de partout. Elle avait fini par adorer être réveillée en pleine nuit en sentant quelque chose dans ses fesses, elle avait adoré s’endormir sur le sexe dressé de Maîtresse Alaunriina, après lui avoir fait l’amour pendant des heures et des heures. Maîtresse Alaunriina était aussi cruelle qu’attirante, bénéficiant d’une perversion sans égale. Elle avait montré à Luna qu’il existait tout un pan de plaisir dont elle ignorait l’existence, une facette incroyablement riche et diversifiée, intense et profonde, dans laquelle elle avait fini par se plonger avec envie. Avec joie, elle était devenue la poupée sexuelle de Maîtresse Alaunriina, car cette soumission lui procurait des plaisirs immenses. Il ne s’était pas écoulé une seule journée sans qu’elle ne doive faire des « trucs », comme elle les appelait. Des « câlins ». Elle savait que c’était du sexe, mais, pour elle, tout ça, c’était un peu la même chose, à des variations différentes.
Perdue dans ses pensées, elle n’entendit pas sa nouvelle Maîtresse approcher, jusqu’à ce qu’elle lui demande de s’approcher. Luna sursauta, craignant d’avoir fait une bêtise, craignant d’avoir été dans un endroit interdit, et sentit alors Maîtresse Hinata se glisser dans son dos, commençant à lui faire quelques explications sur ce qu’elle avait devant les yeux. Elle lui expliqua qu’il s’agissait de « stèles », et Luna comprit qu’elle s’était légèrement trompée... Elle pensait que ces stèles servaient à prier des Dieux, mais il s’agissait plutôt de prier les morts. C’était curieux, mais, en toute honnêteté, venant de la part d’humains, qu’est-ce qui n’était pas curieux ? Elle sentit Maîtresse Hinata poser ses bras autour de son cou, la poitrine de sa Maîtresse glissant contre son dos. Un frisson parcourut le corps de Luna, qui étouffa un petit miaulement, ses joues rougissant légèrement. Maîtresse Alaunriina la prenait parfois dans cette position... Mais Luna ne sentit rien s’enfoncer dans ses fesses. Au lieu de ça, Maîtresse Hinata lui demanda si elle voulait prier avec elle, requête qui étonna un peu la neko.
*Prier ? Mais je n’ai jamais fait ça, moi !*
Maîtresse Hinata s’écarta un peu, avant de s’agenouiller devant la stèle, Luna la regardant avec curiosité. Elle se mit à fermer les yeux, sans rien dire. La neko pencha la tête sur le côté, surprise. Que faisait-elle ? Qu’est-ce que tout cela signifiait ? Elle peinait à y comprendre quoi que ce soit, et eut la surprise de voir une larme s’échapper de l’un des yeux de Maîtresse Hinata. Elle... Pleurait ? Pourquoi pleurait-elle ? Elle ne s’était pas fait mal... Il devait s’agir de cette autre douleur, celle dont Maîtresse Alaunriina ne voulait jamais entendre parler, quand elle avait le cœur qui lui pinçait, généralement quand elle pensait à son clan. Pour effacer cette douleur, Maîtresse Alaunriina lui défonçait sauvagement les fesses, si fort que toute sensation était occultée de l’esprit de Luna, qui ne pensait à rien d’autre que ce gros sexe enfoncé en elle.
Maîtresse Hinata finit par se relever, et invita Luna à la suivre. Ensemble, elles quittèrent les stèles, retournant dans les jardins, et Maîtresse Hinata lui posa alors une question très personnelle. Luna, qui marchait à quatre pattes, releva la tête pour la regarder, avant de la rabaisser. Sa famille... Comme Maîtresse lui avait posé une question, elle était obligée de répondre.
« Je... Je suis née au sein d’un... Euh... Un clan, je crois... Nous étions... Nous étions beaucoup. Des nekos qui vivaient dans les profondeurs d’une forêt, et... Nous ne portions pas de vêtements. »
C’était une précision qu’elle jugeait utile de faire, car Maîtresse Hinata, comme toutes les personnes qu’elle côtoyait depuis sa capture, étaient habillées.
« J’avais des nekos plus âgés qui s’occupaient de moi, dont une... On m’a appelé ‘‘Luna’’ parce que je suis née un jour de pleine lune. Elle, elle s’appelait Rosa. Je... Je suppose que c’est ce qui ressemble le plus à une mère. »
Luna se renfrognait, baissant toujours la tête. Il lui suffisait de prononcer son nom pour se rappeler d’elle. Une femme sympathique, charmante, avenante, qui lui faisait de gros câlins le soir, enroulant sa queue contre elle pour l’aider à s’endormir, et la rinçait dans les rivières.
« Je ne me souviens plus de grand-chose... »
C’était un mensonge, et elle avait honte de mentir à sa Maîtresse, mais repenser à son clan lui faisait mal. Elle n’osait pas regarder Maîtresse Hinata, sachant que son mensonge était trop gros pour se cacher. Elle s’attendait donc à recevoir quelques coups pour sa désobéissance, et pour avoir menti à sa Maîtresse.