La foule se dispersa rapidement, les gens parlant entre eux. Un alcoolique qui faisait une crise, il n’y avait rien de particulièrement exceptionnel, et Jane fut tentée de rentrer chez elle rapidement. Elle se dirigeait vers le portique quand un homme se mit à parler :
« Hey, il a laissé tomber quelque chose ! Là, dans le buisson ! »
Juste à côté de la porte d’entrée, il y avait des séries de petits arbustes. Jane se retourna, et vit l’un des individus s’approcher, attrapant quelque chose qui s’était accroché à une branche. Une espèce de collier noirâtre avec, au bout, une grosse dent.
« Qu’est-ce que c’est que ce truc ? Un accessoire de film d’horreur ? »
Jane regarda la dent, et fronça les sourcils, sentant... Elle sentait quelque chose émaner de cette longue dent ressemblant à celle d’un Lycan. C’était... C’était curieux, et Jane se mit à froncer les sourcils, ayant presque l’impression que la dent lui parlait. Ouais, comme l’Anneau de Sauron. Elle fronça un peu plus les sourcils, voyant la dent remuer sous l’homme qui la tenait. Elle était trop grosse pour appartenir à un homme, et l’instinct de Jane lui soufflait que cette dent n’était pas normale. Elle vit un doigt le toucher, et n’entendait même plus les autres parler, sentant une sourde vibration émaner de cet objet en apparence anodin. Clignant des yeux, Jane sentit alors une autre vibration, bien moins magique, le long de son épaule. Elle tourna la tête, et vit sa sœur, Nell.
« Et bien, Jane, qu’est-ce que tu fabriques ? »
Jane cligna des yeux, revenant peu à peu à la réalité, et vit l’homme avec la dent. Il ne savait pas quoi en faire, et, sans répondre à sa sœur, l’apprentie-sorcière s’approcha, et lui prit l’objet des mains.
« Hey ! Qu’est-ce que vous faites ? »
Elle le regarda rapidement, et répondit sur un ton qui lui était assez familier quand on lui cassait les pieds :
« Mêlez-vous de votre cul, et foutez-moi la paix. »
Surpris et outré, l’homme cligna les yeux, cherchant quoi répondre, mais Jane était alors partie.
« Tu veux faire quoi avec cette merde ? Et... Il s’est passé quoi, dehors ? J’ai entendu des sirènes !
- Un poivrot a fait une crise en me tombant dessus.
- Un poivrot ?! »
Nell, visiblement, avait du mal à comprendre. Jane observait toujours l’objet, le tenant à bout de bras, alors qu’elles étaient dans l’ascenseur.
« Jane ? Jane ?! The Earth is calling you, sweetheart !
- Hein ? Quoi ?! »
Surprise, Jane releva la tête, et vit le regard interrogatif de sa sœur.
« Tu t’es droguée ou quoi ?
- Hein ?! N-Non ! C’est juste que… Cet objet, c’est… J’sais pas, mais y a un truc bizarre avec lui.
- Ouais, il est moche. Je savais pas que t’aimais les trucs moches... Mais je devrais pouvoir te dégotter des trucs utiles... Je ne sais pas, moi...
- C’est pas ça...
- Un vieux pneu crevé, par exemple… Ou le caleçon d’un de mes ex’…
- Je crois que cet objet a des propriétés magiques !
- Cette merde ? Tu te fous de moi, là, ou... »
Nell n’acheva pas, croisant le regard déterminé de sa sœur, ce genre de regard qui disait qu’elle ne plaisantait pas. Nell regarda donc un peu plus attentivement la dent, sceptique.
« Seriously ? » finit-elle par demander, revenant à l’anglais.
L’ascenseur s’arrêta, et les deux femmes sortirent. Jane lui expliqua plus en détail son altercation avec ce type, puis se rendit dans sa chambre. Elle mit une heure à chercher des informations, à l’aide de son livre magique, mais ne trouva rien de très intéressant. Aucune information utile sur cet objet, sur les dents... Ça n’avait pas la gueule d’un talisman magique. Nell revint la voir au bout d’une heure. Jane était toujours sur son lit, à tourner les pages de ce gros bouquin poussiéreux.
« Any progress ? demanda-t-elle.
- A ton avis ? rétorqua Jane en grognant.
- Obviously, no…
- Come on, please ! »
Nell haussa les épaules, avant de faire une suggestion :
« Et si on allait voir son propriétaire ? Il pourra sûrement te dire plus de choses... Et, à mon avis, il doit être sorti de la cellule de dégrisement... »
Jane décida d’opter pour la voie de la facilité, et accepta. Elle monta dans la voiture de Nell, et laissa cette dernière conduire. Nell se rendit à l’hôpital central, un bel établissement. Le Japon n’avait pas à rougir de son système de santé, et, en chemin, les deux Californiennes s’arrêtèrent pour acheter une boîte de Ferrero Rocher, afin de les offrir au poivrot. Le chocolat était l’arme ultime de la négociation. La voiture s’arrêta sur le parking.
« Je t’attendrais en bas, à la cafétéria.
- Okay.
- Tâche de ne pas trop traîner.
- Je ne m’attarde jamais inutilement.
- Je te fais confiance sur ce point. »
Jane alla voir la standardiste, lui expliquant faire partie de la famille du poivrot, se gardant bien de l’appeler ainsi. Cette dernière lui expliqua, après une rapide recherche, où il se trouvait, et l’adolescente fila sur place, tenant à la main sa boîte de chocolat, la dent dans la poche de son jean. Elle s’avança ensuite le long du couloir, marchant vers la salle, un peu anxieuse. Et si le poivrot était un mage ? Était-ce seulement possible ? Qu’après tant d’errance, Jane soit enfin tombée sur un mage ? Elle n’osait vraiment y croire. Son cœur s’emballait à cette idée. Elle avançait vers la pièce... Avant de voir un homme en sortir précipitamment. Un docteur, vu la blouse qu’il avait sur le corps.
« SÉCURITÉ ! SÉCURITÉ ! »
Jane cligna des yeux, indécise, et vit alors l’homme sortir. Le poivrot... Qui semblait parfaitement réveillé. Jane poussa un petit cri, et vit l’homme se retourner vers elle, une lueur de démence dans les yeux.
*Un psychopathe !*
Le docteur qui fuyait appuya sur l’alarme la plus proche : l’alarme à incendie. Il brisa le verre, comme dans les films, et enfonça sa clef, ses doigts tremblants, tandis que Jane sentit ses jambes trembler. Elle n’était malheureusement pas une héroïne, et elle en lâcha la boîte de Ferrero Rocher, avant de commencer à reculer, ayant l’impression d’être tombée sur un remake de Terminator. Elle se retourna, et se mit à courir, s’éloignant. Dans le dos de l’homme, deux agents de sécurité, à une bonne dizaine de mètres, débarquèrent, et pointèrent leurs armes sur l’homme.
« Il a attaqué Will, mon assistant ! Je... J’ai entendu son cou se briser !
- Mains en l’air, connard !
- Ne nous oblige pas à tirer ! » hurlèrent les agents.
Leurs mains tremblaient légèrement. Ce n’était pas non plus des policiers d’intervention. Jane, de son côté, courait à toute allure, paniquée, et heurta quelque chose sur le sol. Elle tomba par terre, et en lâcha la dent magique, qui se mit à rouler devant elle.