Jusqu’à présent, rien ne troublait le silence dans le petit bureau de Viktor Dragov. Un gardien avec son propre bureau? Et oui! On n’en attendait pas moins de la part d’un être aussi dévoué envers son métier, après tout. Il avait obtenu promotion par-dessus promotion depuis des années, ainsi son supérieur lui avait-il donné bon nombre davantage au fil du temps pour le récompenser de son bon travail au sein de la prison Eternum. Assis à son bureau de métal, le gardien de prison avait les yeux posés sur de nombreux documents, notamment les dossiers de tous les prisonniers récemment arrivés à Eternum. Nombre d’entre eux étaient des criminels hautement dangereux qu’on avait traqués pendant longtemps avant de finalement leur mettre le grappin dessus. D’autres, en revanche, n’avait visiblement pas l’air d’être fait pour cet endroit. Des erreurs judiciaires, sans doute. C’était tellement fréquent et ce depuis des lustres. On ne prenait souvent même pas la peine de faire passer les accusés devant la cours. On les jetait tout simplement dans une petite cellule bien crasseuse, au cas où.
Cela faisait plus d’une heure qu’il étudiait les dossiers, et il ne pouvait pas cacher le fait que ses yeux commençaient lentement à fatiguer. Puis, tout à coup, brisant le silence de sa pièce privé, un autre gardien fit irruption devant lui, une autre pile de feuille à la main. Bon sang, pourquoi ne mettait-il pas ça sur une tablette électronique. Tekhos était un endroit particulièrement technologique, alors pour la prison ne possédait-elle pas toutes les innovations? Aucune idée… Il allait devoir porter plainte pour ça, un jour.
Le nouveau venu fit trois grands pas afin de rejoindre le bureau de son supérieur avant de lui tendre ses nouveaux documents. Trois feuilles, en fait. Les trois derniers prisonniers, frais du jour. Viktor tendit la main avant d’attraper les papiers et posa ses yeux bleus sur la première page.
Jill Valentine
24 ans
Humaine
Accusée de meurtre sur un citoyen
Temps d’incarcération : Indéterminé.
Une femme? C’était devenu de plus en plus rare, en fait. Le reste des créatures féminines qui se trouvaient toujours à Eternum étaient pour la majorité d’entre elles de pauvres souillons que lui-même ne baiserait pas, même si elles étaient les dernières femmes sur Terra. Même si elles avaient un sac sur la tête. Soudain, alors qu’il s’apprêtait à poser ses papiers sur le coin de son bureau, l’autre gardien s’exclama :
- Monsieur Dragov! Cette fille! Elle a… Elle a une poitrine gigantesque!
Viktor s’étouffa avec sa salive devant les yeux ronds de son petit acolyte. N’avait-il jamais vu de seins de sa vie, celui-là? Il criait cela comme s’il n’avait jamais rien vu d’une femme. Quoi qu’avec la tête qu’il avait, c’était possible… N’empêche, si cette mademoiselle Valentine valait le coup d’œil, il valait mieux aller se présenter à elle pour lui souhaiter un bon séjour à Eternum. C’était la moindres des choses, après tout, non?
Le gardien de prison se leva donc, accompagné, collé à ses basques, par son collègue, de six ans son cadet. Il ignora royalement tout ces commentaires impertinents sur le reste des prisonniers, marchant à belle allure dans le couloir qui menait à l’aile des nouveaux arrivants. Il porta une main distraite à sa matraque électrique. Au moins, l’équipement des gardiens étaient plus modernes que les facilités de la prison… Il pianota sur le manche en caoutchouc de ses longs doigts fins, se demandant s’il ne devait pas électrocuter ce garçon trop bavard. Mais à peine effleurait-il cette agréable idée qu’il arriva finalement devant la cellule de la nouvelle arrivante. Celle-ci avait les yeux levés sur la grille d’aération du plafond. Immédiatement, Viktor sourit. Ce n’était pas la première fois que des gens tentaient de s’échapper. Il connaissait par cœur toutes leurs minables tentatives, tout les recoins de la prisons, toutes ses sorties. Jill apprendrait tôt ou tard qu’on ne fuyait pas Eternum si facilement. On ne le fuyait pas facilement, lui non plus.
- Hum…
Il toussota afin d’attirer son attention, ce qui fonctionna. Agressive, elle lui demanda immédiatement ce qu’il voulait. Phrase à laquelle Viktor ne pu s’empêcher de sourire à nouveau. Une tigresse, celle-là, il le sentait. C’était bien plus plaisant que d’avoir à faire avec toutes ces autres princesses pleurnicharde qui passaient leur temps à brailler et à se rouler en boule dans le coin de leur cellule. Viktor Dragov regarda le dossier de Jill qu’il avait trainé avec lui avant de dire :
- Bienvenue à Eternum, mademoiselle Valentine. (Il leva les yeux sur elle, un sourire narquois peint sur son visage.) Vous ne comptez tout de même pas nous fausser compagnie si tôt, n’est-ce pas?
Il fit signe du menton la grille au plafond. Il l’aurait à l’œil, elle pouvait en être totalement certaine sur ce point. Puis, alors qu’il ouvrait la bouche pour dire quelque chose, son acolyte, toujours près de lui, l’interrompit :
- Monsieur Dragov, vous devriez voir ses…
- Tais-toi, morveux… grogna Viktor sans lui lancer un regard.
- Mais...Viktor….
De la main, il lui fit signe de déguerpir, et l’autre jeune homme s’exécuta, penaud. En tête à tête avec la prisonnière, Viktor joua de nouveau avec le manche de son arme électrique, pencha légèrement la tête sur le côté et sourit de nouveau avec charme. Un charme empoisonné, bien entendu.
- Nous allons pouvoir faire connaissance, puisse que vous restez avec nous un moment.
L’E.S.P.er fit un pas vers la cellule et porta ses deux mains sur deux barreaux avant de susurrer du bout des lèvres :
- Mon petit doigt me dit qu’on ne vous à pas donné votre uniforme de prisonnière, je me trompe?
Évidement que non… Viktor jaugea d’un regard concupiscent la tenue de Jill, qui moulait agréablement ses formes, sans parler de sa poitrine qui était en effet, comme promis par son partenaire, bien voluptueuse. Vraiment, cela faisait une petite éternité qu’il n’avait pas reçue de prisonnière si bien roulée. Viktor sortit alors son trousseau de clé avant d’ouvrir la cellule de Jill, puis y entra avant de refermer la grille, la verrouillant à nouveau. Il se planta devant elle, à quelques mètres de distances, avant de devenir tout à coup bien plus sérieux qu’auparavant. Son visage se fit sévère et sa voix autoritaire alors qu’il déclarait :
- Vous vous êtes mise dans un sacré pétrin, mademoiselle Valentine. Abattre un homme de sang froid est passible de la peine de mort, le saviez-vous?