« Je crains, Grayle, que cette apparence ne prends pas racine dans vos souvenirs. Je n’ai que pour modèle vous et vous seul ... »
Grayle resta silencieux, le temps de réfléchir à cette phrase. Cette femme... c'était lui ? Il la regardait, encore. Une version féminine de lui ? Etait-ce donc pour ca qu'il reconnaissait quelque chose dans l'apparence de la Sage ?
" Oui, c'est logique... "
Elle se mit à sourire, avant de le faire se relever, en le tenant par les poignets. Il ne put s'empêcher de caresser ceux de la femme, visiblement ému, alors qu'elle continuait de parler. Qu'elle cite Mahadevi fit bondir son coeur. Depuis qu'il était seul sur la route éternelle, il n'avait pas eu le moindre signe de la Déesse, qui appartenait désormais à un temps lointain, de simples bribes de souvenirs effacées, presque un rêve, une illusion. La Sage venait de lui confirmer, ds siècles après, qu'il n'avait pas rêvé. Que la Déesse avait bien existée, que lui existait. Que son pélerinage infini avait un sens...
" Oui... oui je l'accepte, de tout mon coeur. " dit-il d'une voix claire, plus décidé qu'il ne l'avait jamais été...
Il sentit un poid lourd se détacher de son coeur. Un sentiment de tranquilité. Tout devenait flou. Il se souvint qu'il était dans une illusion. Qu'en réalité, son corps reposait au fond de l'eau. Alors que tout se dissipait peu à peu, il reprit la parole.
" Est ce que je vais vous revoir ? "
Silence. Il se mit à sourire. Il n'était pas triste. Personne n'avait autant d'expérience que Grayle dans les adieux.
" Merci de me laisser une chance... et d'avoir partagé votre histoire. " Alors qu'il disparaissait peu à peu, il lui fit une révérence, sa voix s'évanouissant comme dans un murmure.
" Je ne vous oublierai pas... "
Il se réveilla.
Les yeux ouverts, Grayle regarda autour de lui. Il était toujours dans le bassin, au fond de ce dernier, si c'était possible. Il était en position foetale, et grimaca en bougeant ses bras et jambes, ankilosés. Combien de temps était-il resté sous l'eau ? 30 secondes ? 1 minute ? 2 heures ? L'éternité ? Il sentit une force puissante et invisible le faire remonter,le repoussant peu à peu vers le haut, de plus en plus vite.
Dans le même temps, l'eau entrait dans ses poums. Il poussa un cri étranglé, paniquant. Il était déjà mort de noyade, une fois, et c'étant sans doute une des pires qu'il ait jamais ressentie. Il s'agitait dans l'eau, sentant une douleur puissante dans son corps, avant de crier.
Il voyait le plafond.
* Huh ? *
Le monde tournait. Il se rendit compte qu'il avait été projeté en l'air dans une explosion aquatique. Grayle flotta un instant dans les airs, poussant un cri plus aigu que d'habitude, avant de retomber dans l'eau. Il disparut sous l'eau un bref instant, avant de revenir à la surface d'un seul coup, se précipitant vers le bord, se hissant en dehors du bassin. Il crachait de l'eau, toussant comme un pestiféré, crachant de l'eau. Il ne voyait rien, à cause de ses longs cheveux devant son visage, et il les écarta d'une main.
* Attendez... mes cheveux ne sont pas si longs ! * pensa t-il avec étonnement, avant de regarder sa main, plus fine et élégante que les siennes, d'ordinaire calleuses.
* Hein ? *
Il était étalé face contre terre, et se redressa un peu sur ses genoux, et regarda son corps. Une belle paire de seins, fermes, ronds, pendant doucement, de l'eau y coulant sur le sol.
* Hein ?! *
Il recracha, vidant l'eau de ses poumons, avant de se retourner sur le sol, respirant avec peine, choqué. Ou plutot... choquée. Grayle regarda son entre-jambe, et vit avec un mélange de stupeur complète, d'effarement total et d'excitation... rien. Pas de sexe.Enfin, pas de membre. Il était devenu une femme. Elle était une femme. Plus petite, fine, avec un bassin généreux et de longues jambes, une voie plus fine, mais, en regardant les traits de son visage, elle s'agissait indubitablement de l'homme qu'il était auparavant. Une belle femme, une beauté simple, tranquille et apaisante, sans artifice ni exageration. Exposée au regards de toutes, Grayle , soudainement prise d'un excès de pudeur, se mit à cacher les formes de son corps, essayant encore de réaliser ce qui se passait.