Le vent frais et humide de la mer venait agresser le visage nu d'Ewila, ses joues rougissaient de ce froid et de l'eau salée projetée contre le bateau coulait sur ses vêtements qui, trempés, se collaient à son corps. Cela faisait maintenant trois jours que la magicienne avait embarqué sur « Le galopant », un navire marchand en route pour les îles de l'ouest, mais il ne s'agissait pas de sa destination, la sienne ils en seraient à portés dans à peine une heure désormais. Il s'agissait de l'île de Faïen. Bien qu'il s'agissait d'une grand île avec sa faune et sa flore particulières, il n'existait pas d'échanges marchands avec aucun autre territoire. C'était un endroit également à l'écart des voies navigables habituellement empruntées. Toutefois, Ewila avait réussi à suscité l'intérêt du capitaine du Galopant pour qu'il accepte de faire un léger détour afin de l'y déposer. Un intérêt qui s'était chiffré à un pourcentage élevé de tout ce qu'elle pourrait y trouver, mais elle n'en avait cure, ce qu'elle voulait ce n'étaient pas des babioles ou autres objets de valeurs communs, mais une amulette incrustée d'une pierre sacrée. Cette amulette pourrait considérablement augmenter sa puissance magique ou bien, puisque la magie ne pouvait pas tout régler en ce monde, lui permettrait de soulever une armée de quelques centaine d'hommes, suffisant pour reprendre son château et ses alentours dont elle avait été destituée par le seigneur son cousin.
-Je ne sais pas si vous pouvez le voir, fit remarquer le capitaine, un homme bourru mais juste et amical qui tendait le doigt vers l'horizon. Faïen est dans cette direction, à quelques kilomètres à peine. Nous nous rapprocherons encore un peu puis une chaloupe vous y mènera.
-Je vous remercie d'avoir suivi vos engagements.
-Hagvu n'a qu'une parole, ma dame. Et puis, il s'agit là d'un marché équitable.
Ewila acquiesca, ce marché était surtout équitable pour lui, heureusement qu'elle ne lui demandait pas ses services pour le retour, grâce à un parchemin de transport, car sinon celui-ci serait capable d'exiger d'elle l'entièreté du trésor.
Le bateau continuait de se rapprocher des côtes fendant les vagues et leurs écumes, tant et si bien qu'Ewila finit aussi par voir l'île alors que le soleil commençait à émerger à l'horizon.
-Capitaine !
La magicienne se retourna en direction de ce cri apeuré, le cœur lui battant la chamade accompagné d'un mauvais pressentiment. Celui qui venait de crier n'était autre que le vigie, posté dans le nid-de-pie, il pointait quelque chose du doigt, depuis la mer semblait-il. Mais alors que l'équipage commençait à tendre le regard, une tête hideuse apparue à côté de l'un des bastingages.
-Dragon des mers, hurlèrent certains marins alors que le monstre, d'une gueule de plusieurs pieds de long, venait de plonger de nouveau dans les fonds marins.
-Prenez les harpons, hissez les voiles, nous devons décamper d'ici !
Ce furent les derniers mots du capitaine que la magicienne put entendre. L'instant d'après, le corps du dragon semblable à une tentacule de kraken mais démesurée venait de s'enrouler autour de la coque du navire, le bois se mit à craquer jusqu'à céder complètement, les mâts tombèrent, arrachés au pont, des échardes gigantesques se mirent à voler dans les airs, l'une d'elle transperçant même le second, puis le bateau fendu en deux alla rejoindre le monstre au fond des eaux, accompagné des cadavres des marins.
Inconsciente, Ewila avait seulement eu le temps et, par chance, le réflexe, de lancer un sort de protection qui se résumait à un cocon lumineux entourant son corps, la tenant inconsciente afin de préserver le plus longtemps ses organes vitaux et la préserver de l'étouffement.
Lorsque la magicienne repris enfin confiance, étourdie, elle était allongée sur le sable chaud, loin de l'humidité de la tempête et du navire. Ewila se releva tant bien que mal, la tête lui faisant mal, ce qui arrivait en général après l'utilisation d'un sort pendant aussi longtemps. Au moins celui-ci avait fonctionné à la perfection, ses vêtements étaient à peine trempés. Sa vue s'adapta assez rapidement au nouveau paysage qui se déroulait devant elle sous le soleil qui venait de se lever, probablement depuis quelques heures maintenant. Une luxuriante jungle tropicale dont elle entendait déjà les bruits inconnus depuis la plage.