Castlevania. Qui, à Ashnard, n’avait pas entendu parler de ce légendaire et puissant château ? Entre les contes populaires circulant sur l’horrible et cruelle famille l’habitant et les innombrables missions et autres rapports effectués par bon nombre des clans vampiriques ashnardiens, Castlevania était un château qui revenait régulièrement sur la table. Outre être un château immense, Castlevania jouissait aussi de riches domaines, ainsi que d’une position stratégique utile, le château et ses domaines étant en effet très proche d’une grande route commerciale qui serpentait le long de l’Empire. Ainsi, bon nombre de grands clans vampiriques, depuis des siècles, avaient proposé au seigneur du domaine, le Duc Richard L. de Castlevania, une alliance, la possibilité de rejoindre des clans prestigieux et puissants. Et, à chaque fois, la réponse avait été négative, faisant de ce duc un original, un
excentrique, qui disposait d’une armée de monstres et de Lycans. Plusieurs clans avaient historiquement tenté de le démettre, afin de s’accaparer cet impérial château, mais Castlevania n’était pas si facile que ça à prendre.
Mélinda avait entendu parler de ce château, bien entendu, mais sans jamais y songer davantage. Honnêtement, qu’aurait-elle pu espérer avoir de la part de Castlevania ? Elle dirigeait un bordel, et, aussi arrogante soit-elle, elle ne jouait pas dans la même cour que ce Richard et les autres clans... Mais ça, c’était avant.
Avant que Mélinda ne se marie, avant qu’elle ne devienne officiellement une
Comtesse... La Comtesse du domaine de Carnelle, qu’elle partageait désormais avec sa femme,
Vanillia. Elle avait hésité à la faire venir à cette séance, car elle était sa femme, mais Castlevania était un lieu dangereux et éloigné. Cependant, il aurait été impoli de venir à une telle invitation sans sa femme, et ce même si bien des esclaves de Mélinda avaient dit que c’était un piège.
«
Les clans ne veulent pas d’un nouveau clan en jeu dans la course, Maîtresse... Et, après avoir refusé pendant tant d’années de les rejoindre, il faut s’attendre à une réaction hostile de leur part. »
Quand Mélinda avait constitué son clan, l’Empire avait publié ses statuts dans le Journal Officiel de l’Empire, et tous les clans et autres grands noms s’en étaient emparés. Cependant, Mélinda ne s’était guère attendue à ce que sa constitution intéresse un vampire aussi puissant et isolé que le Duc de Castlevania. Pour autant, peu de temps après cette publication, le harem avait reçu une missive, émanant de Castlevania, invitant solennellement «
la Comtesse Mélinda Warren, Maître du Clan Warren, et Sa Suite », à une réception organisée à Castlevania. La même invitation avait été formulée à quelques-uns des plus grands clans vampiriques ashnardiens. Qu’est-ce que Richard voulait ? D’après les observateurs, on disait qu’il voulait créer son propre clan.
«
Mais quel rapport avec nous ? -
Tu n’as pas que des ennemis parmi les vampires, répliqua Bran dans leur chariot.
Et ce Richard... Il n’appartient pas aux clans. En un sens, vous vous ressemblez. Toi et lui, vous avez toujours refusé de vous soumettre aux grands clans vampiriques. »
Pour accompagner Mélinda dans ce périple, il y avait Bran, son grand-frère et protecteur, ainsi que Vanillia, assise à côté d’elle. Depuis la fenêtre, Mélinda observait le paysage, sa main jointe dans celle de Vanillia. Elle ne le montrait pas en extérieur, face à ses esclaves, mais, ici, dans l’intimité de sa famille proche, la vampire laissait ses doutes s’exprimer. Parfois, elle pouvait voir des Lycans qui se baladaient rapidement le long des arbres ou des collines entourant Castlevania, rappelant la puissance de l’homme... Puis ils arrivèrent devant le château, filant le long d’un pont surplombant un cour d’eau. Des gargouilles, des wyverns, passaient par ici. L’endroit était rempli de monstres et de créatures surnaturelles obéissant à la volonté du Duc de Castlevania.
Les grilles s’écartèrent toutes seules devant le chariot, et ce dernier s’arrêta dans les écuries, à l’intérieur du château.
«
Nous y sommes... »
Des hommes d’une laideur repoussante, visiblement des mutants, les accompagnèrent, confirmant le fait que Richard aimait jouer avec le gène humain. Les créatures, ressemblant à des bêtes poilues avec des crocs, les invitèrent à les suivre. Mélinda hocha la tête. Elle portait sa belle robe dorée, ainsi que des gants, et sa main resta dans celle de Vanillia. Bran, quant à lui, fermait la marche.
Le château de Castlevania était très grand, à l’image des vieux châteaux vampiriques. Il abritait des laboratoires alchimiques, similaires à ceux d’autres clans. Les vampires avaient toujours aimé jouer avec la génétique et les êtres humains. Ce château était si grand qu’il aurait pu engloutir au moins cinq fois tout son manoir, hectares compris. Ils suivirent des marches, de vastes couloirs très grands avec, ici et là, des tableaux, représentant généralement le couple : le Duc Richard et la Duchesse Camillia, aussi belle que cruelle, aussi perverse que sadique. On disait quantité de choses sur ce qu’elle faisait avec les hommes et les femmes des villages et villes dépendant de l’autorité de Castlevania.
Finalement, Mélinda arriva dans le hall, et put voir plusieurs vampires bien connus :
- Lord Victor Nefarius, un très puissant vampire doté de pouvoirs magiques. Il était un baron, dirigeant une puissante baronnie ashnardienne, et son château était aussi impressionnant que Castlevania. Les Nefarius constituaient le principal rival du clan Warren, car Victor avait toujours voulu annexer le harem de Mélinda, sans qu’elle ne comprenne trop pourquoi, car Victor avait déjà de nombreuses entrées au sein de la capitale. C’était un vampire-guerrier, qui, outre son statut de Baron, avait aussi celui de Commandant militaire. Le Conseil Impérial l’appréciait beaucoup, et, si Richard voulait effectivement rejoindre un clan, Victor Nefarius était le favori ;
- Robert Nefarius était le fils préféré de Victor. C’était un homme cruel et sadique, méchant et violent, qui était aussi un puissant magicien. On ne comptait plus le nombre de personnes qu’il avait tué au cours de son existence. C’était un mage vampirique, maîtrisant la magie noire et la magie rouge, celle du sang, ainsi que la magie élémentaire. Dans sa baronnie, sa spécialité était d’organiser des battues d’esclaves ou de criminels, et, quand il couchait avec une femme, il ne jouissait qu’ne la torturant et en la défigurant ;
- Nyolan Dwëpp était une autre vampire particulière, car elle appartenait à un clan de vampires-elfes, des vampires-Drows. Ces vampires vivaient dans les profondeurs des grottes, et Nyolan était l’une de leurs représentantes. Belle et sensuelle, elle coula à Mélinda un sourire mielleux. Mélinda pouvait comprendre : elles avaient fait l’amour ensemble, il y a quelques années, quand Nyolan était venue proposer à Mélinda de rejoindre son clan. Elle avait souri devant son refus, après des heures et des heures d’une étreinte sauvage ;
- Jaskar Draconis venait de régions montagneuses et escarpées. Son clan constituait un autre clan vampirique redoutable, car, outre des Lycans, les Draconis, d’où leurs noms, avaient sous leurs ordres une meute de dragons. Jaskar était l’un de leurs Primarques, un seigneur-guerrier redoutable, chasseur de monstres et tueur de trolls. Cet homme s’était fait une réputation redoutable en tuant un fiellon. Un impitoyable tueur ;
- Riese Vernon était une vampire assez particulière, proche des Tekhanes. Elle avait ainsi un style vestimentaire assez tekhan, mais n’en restait pas moins une vampire douée. Le clan Vernon était avant tout un clan marchand, qui avait de multiples affaires à Tekhos, et utilisait des implants cybernétiques et des nanomachines pour améliorer leurs performances. C’était un clan assez isolé des autres, mais qui, du fait de ses rapports avec Tekhos, avait d’excellentes positions au sein de l’Empire.
Être entourée de tant de vampires amenait naturellement Mélinda à un geste d’humilité, car elle-même n’était pas suffisamment imbue de sa personne pour savoir qu’elle ne jouait pas dans la même cour qu’eux. Chacun de ces clans disposait de véritables armées privées, alors qu’elle, elle n’avait qu’une misérable guilde qui ressortait tout juste de ses cendres.
C’est ainsi que Richard et Camilla arrivèrent. Puissants, beaux, ils étaient de véritables
vampires, magnifiques, et menèrent leurs invités jusqu’à une grande table de réception. Mélinda s’assit avec Vanillia, tandis que Bran, comme les autres protecteurs, choisit de rester debout, rejoignant finalement une salle à côté.
«
Cher Duc, s’exclama rapidement Riese,
je ne peux que vous féliciter pour votre sens de l’hospitalité ! Castlevania est un château éloigné du manoir Vernon, mais je ne regrette absolument pas d’avoir fait ce long voyage. »
Victor Nefarius hocha lentement la tête.
«
Oui, oui, même si je ne peux m’empêcher de me demander... Votre château est solide, vos greniers remplis, votre armée toujours aussi impressionnante... Pourquoi avoir réuni tant de clans en même temps ? »
Victor n’était pas aussi diplomate que Riese, et abordait franchement les choses, sans faux-détours.