Les bêtes avaient choisies une approche violente, mais comment peut-on leur en vouloir, rares sont les bêtes et les êtres qui résistent à leur sauvagerie, et nombreux sont les assauts produits par ces fabuleux volatiles qui finissent par la mort, exsangues, de leur proies, où à la paralysie totale de leur être suite à un coup qu'aiguillon fâcheux, les laissant frais et conscient quand les crocs finissent par déchirer la chaude et délicate chair de leurs os. Les ömkrulurs agirent donc avec une rage toute reconnaissable à leur espèces, l'un restant disponible en haut pour fondre sur sa cible dés qu'elle aura fait le faux-pas fatidique qui le laissera pleinement offert à ses serres, tandis que les autres vinrent à se concentrer sur des attaques vives, précises, cinglantes pour des bêtes de cette taille, leurs pattes s'abattant avec violence, et leurs bec claquants avec force, véritables étaux cherchant à saisir dans une multitude de petits crocs crénelés la forme du voyageur. Et quelle ne fut pas leur frustration face à la vivacité de leur proie, quelle fut leur colère quand ils remarquèrent que malgré leurs efforts, l'agilité de l'inconnu mettait en déroute leur coordination minutieuse, et fatale, ses mouvements sombres se jouant des plumes multicolores l'entourant, et son air simple soulignant le peu de difficulté qu'il avait à mettre en déroute leurs tentatives pourtant létales ! Le ballet funeste qu'ils avaient pourtant l'habitude de remporter avec grande facilité se tournant finalement en une mascarade d'affrontement, et la furie des deux bêtes aux cotés du voyageur ne fit guère que les rendre plus prévisible, plus directe, simplifiant peu à peu l'affrontement, ne manquant guère d'offrir à l'homme un divertissement clair, mais dont le défi semblait manquer.
Sulfure n'y faisait plus attention depuis un moment, mais cet affrontement, et les piaillements, les croassements insatisfaits qui s'y produisaient ne manquèrent pas d'attirer l'ouïe de la femme en haut des chemins escarpés, celle-ci se trouvant dés lors à se diriger un peu plus près de l'esplanade florale pour que ses sens aiguisés distinguent peu à peu ce qui, en cet après-midi, se déroulait plus bas sur le chemin qu'elle gardait. Et cela ne lui faisait pas vraiment plaisir. Haziëlle n'était pas dans son état normal ces derniers temps, Sulfure l'avait pressentie dans ses mots, et elle même l'avait pressentie dans sa chair, et c'est ainsi qu'elle n'avait absolument aucune envie d'avoir la visite d'un être capable de se défendre face à trois Ömkrulurs sans subir la moindre blessure, car ce genre de mal avait, avec un peu de chance et de technique, la possibilité de faire usage de cet instant de faiblesse de sa part, bien malgré elle. Alors, tandis que l'affrontement continuait de se dérouler plus bas, elle ne manqua pas de s'en éloigner, puis de se rediriger en direction du centre des lieux, près du puits permettant de rejoindre le cœur du donjon, pour finalement produire de léger sifflement, quelques sons délicats, discrets, mais qui auraient toutes tendances à parvenir à l'être qu'elle voulait convier à cet événement. Elle allait se défendre, comme elle le pouvait, et ses pratiques naturelles étaient sauvages, directes, une sorte d'instinct de meute qu'elle avait, et où elle comptait bien faire usage de tout ce qu'elle avait sous la main pour tenter de repousser ce visiteur indésirable, et ce malgré les termes de Sulfure, et son désir de voir l'homme progresser de manière graduel face à la difficulté ! Quelques battements d'ailes lui parvinrent, et elle sut qu'il arrivait, ne restait donc plus à la demoiselle à l'étrange nature d'attendre, calmement, le résultat du premier assaut.
Ce fut d'ailleurs le moment où l'homme cessa de jouer avec les trois bêtes qui l'entourait, notamment les deux qui avaient décidées de le harceler à même le sol, s'étant d'ailleurs poser à ses cotés de manières à passer d'assauts plus aériens, basées sur des coups de serres, à des tentatives d'encerclement, entremêlement d'attaques de becs furibondes, et de mouvements d'aiguillons précis, sensés le déstabiliser, ou au mieux le percer. Mais il maintenait l'allure, et sa réponse, nouvelle, surprenante n'eut guère le temps d'être analysées par les puissantes bêtes aériennes, celles-ci se retrouvant dés lors au beau milieu de l'onde de choc produit par l'homme, ailes grandes ouvertes pour originellement l'empêcher de se déplacer selon son bon vouloir, mais désormais handicapantes, offrant toute surface pour que l'effet énergétique de Losgar soit optimal. Elles furent d'abord repoussées, puis manquèrent même de chuter hors des falaises, celle-ci se rattrapant de leurs serres et aiguillons à la falaise pour ne pas avoir à connaître quelques dégâts indésirables à leur plumages, ou leurs ossatures. Quand le calme retomba, elles se trouvèrent... hésitantes. Ce qu'elles avaient prit pour une cible facile était finalement un ennemi qu'elles jugeaient désormais dangereux, et même celle qui n'avait pas participé à l'affrontement, toujours bien au dessus du voyageur, avait eut l'honnêteté de se reculer un brin, comme pour se trouver à une distance respectable, celle qui lui permettait de ne plus avoir à ressentir une éventuelle onde de choc. Rapidement, les deux qui se trouvaient plus tôt à son contact se remirent en vol, où les risques de chute étaient moins important, mais pour autant, ils ne faisaient que tourner autour de lui, pas encore prêt à lui fondre de nouveau dessus...
Malheureusement pour les Ömkrulurs, ce n'était pas cette observation qui allait leur permettre de gagner une satisfaisante pitance.
« Il semblerait qu’une autre démonstration suffirait à calmer leurs ardeurs. Hm, ça devrait faire l’affaire. »
Les bêtes ne comprirent guère le comportement de l'étranger, et comme cela était naturel, les ennemis d'un tel genre ne fleurissaient pas sur les flancs d'Ahn Ak'Thar, les laissant tout simplement affronter cet homme dans l'inconnu de ses capacités, et finalement, un désavantage certain face à leur capacités toutes naturelles. Alors oui, il s'agissait de bête endurante, puissantes, des terreurs du ciel qui avaient tendance, en de maints endroits, à être considérées comme des entités chasseresses dénuées de prédateurs, mais tout cela n'avait que peu d'importance face à un homme aux capacités énergétiques, ou psychiques, ce qui justifiait notamment toute la prudence avec laquelle ces oiseaux préparaient leur prochain assaut, mais aussi pourquoi, désormais, ils n'avaient pas eut la présence d'esprit de se défendre du léger caillou projeté dans les airs, malgré son étrange éclat. La déflagration ne fut guère agréable, les éclats tranchants et pointus de la roche non plus, et pas un seul des prédateurs ne fut épargné par cet essaim d'aiguillons terrestres, quelques gouttes de sangs volants dans les airs, quelques plumes déchirées aussi, avant que tout trois se mirent à croasser de manière plaintive, battant immédiatement des ailes pour quitter la proximité de ce féroce combattant. Elles reconnaissaient sa victoire, elles abandonnaient l'affrontement, pour préserver leur vie, et rapidement, de trois hautes formes, il ne resta plus que quelques éclats bariolés au loin, plus bas, observable par le voyageur désinvolte depuis son chemin de pierre. Beaucoup se sentiraient fier de cet exploit, mais rien ne l'indiquait chez l'être sombre, qui n'eut comme réponse qu'un geste presque insultant d'évidente facilité...
… Pour Haziëlle, attentive depuis ses hauteurs, cela allait se payer.
« KRRIiiiiiiiyyyëëëëëh »
Le cri strident, bestial, au timbre aiguë si particulier qu'il en blessent les tympans vint à se produire, haut dans le ciel du désert, tandis qu'une ombre de plus en plus large commençait à envelopper la zone où se trouvait l'homme, le plongeant dans de biens étranges ténèbres juste avant qu'il ne puisse distinguer son nouvel assaillant. L'instant d'après, un fracas terrible vint à accueillir le piqué d'une bête céleste titanesque, un oiseau dont la taille avoisinant les sept mètres de hauteur n'avait d'égal que l'envergure de ses ailes, celles-ci balayant le chemin d'un vent de tempête alors qu'il venait de frapper à l'endroit exacte où s'était trouver le voyageur attentif, qui avait eut les réflexes d'esquiver son létal assaut. Son plumage était d'un noir ébène, et les plumes inférieurs de sa paire de membre aviaire étaient si légère et si difformes qu'elles semblaient finalement se muer telles des flammes, sous l'effet d'un vent continu mais étrangement absent. Son bec anthracite, large, d'une taille moyenne proportionnellement au gigantisme de la bête, se terminait par cet aspect crochu typique des rapaces les plus connus, mais son corps musculeux, étendu à partir des épaules en un cou puissant, épais, laissait entendre que les pratiques de chasses de la bête ne se limitait pas au dynamisme de ses chairs. Ses serres, tranchantes, étaient actuellement si bien plantées dans la roche que celle-ci s'était affaissée sous la pression des pattes de l'oiseau, mais bien plus terrifiant encore, sa pupille d'un vert étrange, ophidien, venait de se placer sur l'homme avec cruauté, et ce dernier devait sûrement commencer à sentir son propre corps s'engourdir, comme sous l'effet de quelque hypnose normalement bien interdite aux espèces aviaires.
Losgar se tenait, en cet instant, face à celui qu'on appelait, légitiment, le seigneur des cieux sur Terra : Un Rûkh, titanesque oiseau de proie dont la rareté n'a d'égale que sa dangerosité. Lentement, d'ailleurs, il rabat ses ailes, se plaçant de manière à regarder l'homme de ses deux pupilles pétrifiantes. Dans un instant, il les ouvrira à nouveau, et si l'homme ne parvient pas à se libérer, par une puissante volonté, de l'hypnose de la bête, il n'est pas à douter qu'il allait souffrir de la projection de celles-ci, afin d'aller s'écraser plus bas et de servir de repas à cette légende vivante...
Et déjà, ses plumes frémissent.