S'il y avait une chose que la jeune femme n'avait pas prévu, c'était bien le fait que son assaillant l'ait poursuivit via un moyen de transport au détriment de la course à pied. Elle n'eut d'ailleurs guère le temps de réfléchir posément à la suite de cette réflexion. Effectuant un saut arrière machinal pour éviter la potentielle collision entre elle et le véhicule, elle n'avait pas songé que son geste aurait été prémédité par son adversaire. Un bref coup d'oeil derrière elle suffit à lui donner la couleur. Pas d'issues, elle était coincée. L'ange fronça les sourcils, en colère contre elle-même de s'être faite avoir si facilement et d'avoir, par ce biais, donné un coup d'avance à Don. Elle reposa son regard devant elle, regard qu'elle dû détourner assez vite, aveuglée par la vive lumière qui émanait des phares de la camionnette. Quelques rapides pas en arrière et la présence d'un léger prolongement du toit lui offrirent une meilleure vue. Pas de surprise évidemment, c'était bien le type qui l'avait abordé plus tôt dans la journée avec, cette fois-ci, un regard moins sympathique.
- Finit de rire a présent, tu viens avec moi.
Etait-il sérieux? Rubis avisa ce qui ressemblait à une arme à feu dans les mains de son traqueur et se dit que finalement la question était plutôt oratoire. Que pouvait-elle faire à présent? Le fait que Don possède un flingue était un lourd désavantage. Il lui suffirait de presser la détente si elle tentait de s'échapper vainement par l'escalade des murs pour atteindre le toit. Il ne fallait pas se leurrer, elle ne serait jamais aussi rapide qu'une balle de révolver. Foncer sur lui pour trouver une parade afin de retourner en pleine rue était perdu d'avance également. Si elle avait de la chance, elle arriverait peut-être à lui produire l'effet d'une piqûre de moustique en terme de dommages... non vraiment, elle n'était pas sortie de là. Elle revint donc à sa première idée: battre en retraite par le biais des toits. Cependant, il lui fallait une diversion, même infime, pour obtenir un tel aboutissement sans trop de casse. C'était là que ça coincait. Il lui fallait impérativement une source d'eau. Facile à dire. Les températures avaient chuté et l'air s'était rafraîchit amenant, certes, une humidité croissante mais Rubis n'était plus en possibilité de l'utiliser directement, il lui fallait une base avant un tel procédé. Il n'avait pas plu de la journée, au contraire, espérer l'existence d'une flaque, même modique, était donc absurde. La présence de liquide aqueux lui paraissait inconcevable jusqu'au moment où son regard s'arrêta sur ses mains, puis sur ses avants-bras et là, ce fut le déclic. Finalement, elle utiliserait les moyens du bord. Elle reposa ensuite son attention sur Don, l'air imperturbable.
- Je ne crois pas non.
Rapidement, elle sortit d'un mouvement habile un poignard de la poche arrière de son short. Il aurait été futile de vouloir le lancer sur Don dans l'espoir insensé de lui perforer la cage thoracique. Heureusement, c'était loin, très loin, d'être le but recherché. Ce fut son propre avant-bras qu'elle trancha d' une entaille profonde et horizontale d'environ une quinzaine de centimètres, faisant gicler le sang. Bénit soit le corps humain et ses 65% d'eau! A présent, tout était un exercice mental. L'hémoglobine, à peine sortie de son réceptacle, grossit brusquement grâce à l'humidité de l'air que Rubis lui ajoutait progressivement et promptement. L'amas de sang, à présent rouge translucide, se sépara en cinq fragments qui se solidifièrent pour former chacun ce que l'on pouvait percevoir comme des stalagmites de glace de vingt centimètres de longueur et quatre d'épaisseur flottantes dans l'air. D'un simple froncement de sourcil, l'ange envoya, d'une vitesse fulgurante, ses projectiles frigides sur son poursuivant. En réalité, seulement trois suivirent cette trajectoire, visant essentiellement le sternum et les yeux. Les cibles des deux dernières furent les phares de la camionnette qui explosèrent à leur contact, plongeant la ruelle dans l'obscurité. C'est ce moment là que choisit Rubis pour faire volte face et courir jusqu'au fond de la ruelle, ne cherchant nullement à vérifier si son dérivatif avait fonctionné sur le colosse. Prenant de l'élan, elle prit appui sur le mur du fond pour s'éjecter aussi haut qu'elle pouvait, se raccrochant ensuite à des briques mal alignées. Elle grimpa ensuite aussi vite qu'elle le pû, escomptant avoir le temps nécessaire pour atteindre le toit, sa porte de sortie.