Toute réflexion faite, la situation aurait pu être pire.
Grayle s'était déjà trouvé dans la marmite d'ogres et dans l'estomac d'un dragon. Il se souvint de la fois où une elfe noire s'était entichée de lui, ce qui n'avait pas été une expérience aussi plaisante que la phrase pouvait laisser entendre. Ce qu'elle avait aimé chez lui était sa capacité à se régénérer, lui permettant de le couper encore et encore et encore.
Alors, assis en tailleur sur le sol froid de la crypte, à l'abri de la pluie et du froid -même si la crypte elle-même n'était pas très chaude-, il n'avait en soi pas de quoi se plaindre.
Alors pourquoi était-il en colère ?
Marguerite lui manquait. Plus qu'il ne l'admettait, et à un point où il en avait un peu honte. Peut-être était-ce parce qu'ils avaient été interrompus alors qu'ils étaient au paradis. Il avait déjà imaginé la suite. Ils faisaient l'amour encore et encore et encore, s'endormaient épuisés l'un contre l'autre, et le lendemain matin, la magie serait encore là. Un beau jeune homme se réveillant auprès d'une belle jeune femme, sans rien demander de plus ni faire de mal à personne.
Marguerite lui manquait.
Assis en tailleur sur le sol de la crypte, il patientait. Il n'avait pas sommeil. Il était resté la nuit ainsi, méditant et maugréant sa frustration et les mauvaises pensées qui empoisonnaient son esprit. Il pourrait sortir... oui, il avait de quoi s'échapper dans son sac. Mais les villageois n'avaient pas été trop sévères, et surtout, en opérant ainsi, il causerait des problèmes à Marguerite. Il serait forcé de partir.
Et Marguerite lui manquerait.
Il sourit. Des siècles d'existence, et il lui arrivait encore d'avoir le coup de foudre pour de jeunes filles en fleur.
En un sens c'était rassurant.
Lorsque Marguerite fit irruption, le cœur de Grayle fit un bond si fort qu'il se transmis au reste de son corps et il se retrouva sur ses pieds devant Marguerite. Elle était toujours aussi belle dans sa simplicité, l'obscurité grise et bleutée de la crypte donnant un aspect surnaturel, presque fantomatique à sa stature.
- Je n'allais pas très bien... mais depuis quelques secondes, je vais beaucoup mieux. Personne ne t'a fait de mal ?
Il tendit sa main vers elle, se saisissant de ses doigts. Il caressa doucement ses derniers, avant de porter le revers de sa main à ses lèvres, lui faisant un baisemain. Grayle adorait la... fausse innocence, si l'on pouvait dire de Marguerite. Il savait que ce genre de numéro lui plaisait, alors il jouait le rôle avec plaisir. Se redressant, il se fendit d'un sourire. Toutes les sombres pensées de son esprit se retrouvèrent chassées.
- J'ai beaucoup pensé à toi cette nuit. Et le pire, c'est qu'il ne mentait pas. Je suis désolé que ça ai fini en eau de boudin... ses yeux se posèrent sur le panier en osier. Comprenant instantanément ce que c'était, il fondit sous le charme de la brune.
- Est-ce une invitation à dîner ? Avec quelques chandelles peut-être ? murmura-t-il d'une voix doucereuse.