Dure matinée. Erwan se retourna dans son lit, encore et encore, y cherchant sa place. Il avait pour habitude de dormir du côté droit du lit. Mais, ce matin, cette parcelle était occupée. Une jolie petite blonde - une japonaise aux yeux débridés et aux cheveux décolorés - dormait paisiblement à ses côtés. Il fronça les sourcils, s'allumant une cigarette. En son for intérieur, il espérait que l'odeur la réveillerait. Et puis qu'elle finisse par déguerpir sans demander son reste. Depuis qu'il n'avait plus de nouvelles de Miya, le jeune français s'occupait comme il le pouvait. Mais aucune de ces pimbêches perchées sur des talons aiguilles ne lui plaisait vraiment, au final. Pire, les couinements incessants de ces créatures asiatiques lui tapaient sur le système. Un petit voyage me fera du bien. C'est sur ce constat qu'il sortit des draps, pour se diriger vers sa cuisine. Un café. Un café noir, fort, qui le réveillerait, pour sûr. Le jeune homme écarta les rideaux de son salon, se laissant éblouir par les premiers rayons du soleil sans mot dire.
- Erwan ?
... Il l'avait presque oublié. La jeune fille, dont il ignorait l'âge et ne souhaitait pas vraiment le savoir, entra dans la pièce, tout en finissant d'enfiler sa robe. En le voyant, elle comprit qu'elle n'aurait pas le luxe de squatter cet appartement plus longtemps. Dieu merci. Erwan appréciait moyennement les midinettes qui pensaient qu'une nuit à ne pas dormir déboucherait sur une relation longue, durable, pleine d'amour et de bonheur. Il lui offrit un sourire.
- Je vais ... y aller, je pense.
En voilà une idée qu'elle est bonne. Le jeune homme lui indiqua la porte de la main, hochant la tête pour la saluer, la cigarette aux bords des lèvres. Et cette petite conne la claqua violemment en sortant. Il entendit un moment ses talons claquer sur les marches, avant qu'elle ne disparaisse complètement. Alors, il respira.
Cette journée serait bonne. Il le sentait. Il le voulait. Erwan fit sagement le tour de son appartement. Chambre, où il refit le lit. Salle de bain, où il prit la plus délicieuse de toutes les douches. Cuisine, où il ingurgita un café. Salon, où il s'affala pour mieux reprendre ses esprits. Les lieux étaient plutôt luxueux, il fallait l'avouer. La chambre était aussi vaste que le salon, qui, lui, donnait sur une petite cuisine où un bar et ses chaises faisaient office de salle à manger. Il y avait, ici et là, des tableaux, des photos, des cartes postales, qui s'étalaient sur tout un mur. Les autres étaient blancs, sauf un, dans sa chambre, où des personnes griffonnaient des mots, à l'encre indélébile. Il ne méprisait pas ces femmes qu'il baisait. Elles aussi pouvaient écrire quelque chose sur ce mur. Mais il appréciait que ces nuits soient uniques. A force de courir après un souvenir, de vouloir recréer un moment spécial, on se gâche la vie. Disons qu'il avait fait son choix. Le français écarta tous les rideaux noirs et longs, laissant la lumière entrer, ouvrit même une fenêtre pour aérer - putain, c'était quoi, ce parfum à deux francs six sous qu'elle portait ? - avant de s'allumer une nouvelle cigarette.
Et c'est à cet instant qu'il entendit sonner. Erwan en sursauta presque. Il habitait au dernier étage et, habituellement, il entendait les personnes monter jusque chez lui. Pas cette fois. Enfilant une chemise à peine fermée, un jean, il entreprit d'ouvrir la porte, le visage fermé.