Cette fois, c'en était trop. Gabriel avait dépassé une limite que Ciara ne pensait même pas avoir. Elle avait subi, en un silence forcé, tout ce qui amusait Gabriel. Mais là, dans le coffre de la voiture, elle trouva qu'il avait déjà débarrasser les bornes, et qu'il n'était pas question qu'elle le laisse continuer. Elle le laissa l'aider à s’extirper du coffre de la voiture. Elle le laissa même l'attacher au pare choc.
La suite, par contre, elle ne laissa pas passer. Le baiser la paralysa d'effroi, et c'est la douleur de la morsure qui la ramena à la réalité. D'un geste, elle cassa la chaîne entre ses poignets, et sans même y faire attention, elle posa les mains sur son torse, et le repoussa. Sans canaliser complètement sa force... Gabriel vola jusque dans les poubelles, dans lesquelles il s'étala lamentablement. Ciara eut une demi seconde de remord, bien entendu. Mais cela ne dura, effectivement, qu'une demi seconde. D'un geste rageur, elle retira le scotch qui scellait ses lèvres. Elle avait les larmes au bord des yeux, mais se jura de ne pas faire le plaisir à Gabriel de pleurer devant lui.
Un rapide coup d'oeil au pare choc de la voiture la renseigne sur le fait qu'elle n'a rien. Ce n'est qu'ensuite que ses pas foncent vers Gabriel. Elle ne l'aidera pas à se relever et mettra les poings sur les hanches, le dominant de toute sa stature.
- Cette fois, ça suffit ! Vous allez beaucoup trop loin, et croyez moi, vous allez avoir de sérieux problèmes avec votre hiérarchie. A trop vouloir vous prouver à vous même que vous êtes le meilleur, et surtout en faisant n'importe quoi, vous vous exposez à de sérieuses représailles. Je n'ai pas besoin que vous me prouviez vos conneries, et si je vous voyais encore tabasser quelqu'un, je me ferai même un plaisir de vous briser une côte en vous plaquant au sol ! Alors, faites mal votre boulot comme vous aimez tant. Pour ma part, j'ai assez fait les frais de votre connerie !
Un pas en arrière, et il lui suffit d'une impulsion pour prendre son envol. Ciara est tendue comme jamais, et dans une colère comme elle en a rarement ressenti. Un rapide coup d'oeil à la ruelle lui apprend qu'elle est vide, alors qu'elle passe au dessus. Elle ressent ce plaisir mesquin d'avoir eu raison, et de prouver à Valmy qu'il avait tort. Qu'elle avait hâte de le voir revenir, la queue entre les jambes, et sans doute frustré, quand il rentrerait au commissariat.
Car oui, contrairement à ce qu'il pouvait croire, Ciara ne s'enfuyait pas. Si elle avait réellement fait une erreur, elle estimait ne pas être au dessus des lois, et devoir payer pour cela. Avait-elle eu vraiment tort d'arrêter Gabriel dans la ruelle ? Si c'était le cas, elle paierait sa dette auprès de la société japonaise. Mais lui aussi aurait à rendre des comptes...
Ciara se posa devant le commissariat, et y entra. Ses menottes étaient cassées à ses poignets, elle avait la lèvre supérieure rougie par une marque de dents... C'est tout naturellement, penaude, qu'elle se dirigea vers le bureau de la seule personne à s'être montrée sympathique avec elle. Ciara eut un pauvre sourire pour Dick, et elle lui montra encore ses poignets...
- Je crois que je vais avoir encore besoin de votre aide, Inspecteur Grayson...
Et nul doute qu'au retour de Gabriel, Ciara aurait sagement repris sa place, dans la salle d'interrogatoire. Avec en prime, un chocolat chaud et son portable à portée de mains menottées.