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« le: mardi 30 septembre 2025, 19:16:01 »
Jack pouffa d’un rire léger quand Thanasia riposta à sa question par une diatribe courroucée. Non pas qu’il ne la trouvait pas dangereuse ; mais il commençait à comprendre comment elle fonctionnait. Le temps passé à travailler ensemble, cette proximité prolongée à l’intérieur de ce tube étroit, cet échange personnel… Il tendait à réaliser, au fond de lui, que quelque chose l’influençait au contact de la pilote sans âge, mais il ressentait d’instinct une sorte de rapprochement réciproque. Pour lui, c’était clairement une dévotion trop forte pour être tout à fait de son fait, même s’il n’avait pas la présence d’esprit de lutter contre en dépit de ce titillement instinctif au fond de lui. Pour elle, c’était un peu comme se faire à un animal de compagnie, lui semblait-il.
Puis, quand elle répondit finalement à sa question, il commença à en comprendre davantage. Les histoires qu’elle évoquait étaient effectivement très distantes, temporellement parlant. Elles l’étaient tant que l’importance que revêtait la situation à l’époque avait eu le temps de s’éroder, et que l’histoire elle-même avait rejoint bien d’autres engagements et points de tension éphémères et contextuels comme tant avaient parsemé l’Histoire de chaque peuple. « Talanta » ne dirait rien à l’Humain, même si l’évocation des torpilles cinétiques tiqua chez l’ancien militaire. Il se rappelait en avoir capturé une centaine dans une cache ennemie, après un assaut sanglant, et avoir entendu leur supérieur éclater de rire en leur assurant que, si ces antiquités étaient tout ce qui restait aux Eloniens, la guerre serait bientôt terminée.
Elonia n’avait pas de difficultés d’approvisionnement, cependant. Ils avaient probablement retrouvé le stock et songé que ça serait utile quoi qu’il arrive, ne serait-ce que pour saturer les défenses anti-aériennes tanexiennes en permettant aux ogives plus modernes et efficaces de les passer. Bref : la guerre avait duré. Lina était morte. Jack avait déserté. Et la guerre était toujours enlisée sur une colonie élonienne ruinée.
Mais, si Thanasia était déjà une professionnelle spécialisée avant que les torpilles cinétiques « reviennent à la mode », Jack pouvait en tout cas estimer qu’elle était, effectivement, très vieille ; selon ses standards, en tout cas. Et probablement pas humaine ; ou plus vraiment. Elle était peut-être un robot. Ou quelque chose qu’il ne connaissait pas encore. Mais les sensations inhumaines qu’elle lui laissait évoquaient en tout cas quelque chose qui ne lui ressemblait pas.
Il était sur le point de lui demander ce qu’elle était quand le cycle se termina, et la Thanasia cassante et hautaine ressortit, avec son langage démodé et ses jugements ; même si le vétéran les voyaient maintenant différemment. Il se retint de pouffer, se tordit pour sentir ses aisselles à peine humides, et se fit presque jeter verbalement des lieux pour filer à la douche. Il aurait probablement pu lui rappeler qu’il avait une douche à son bord, mais elle ne voulait pas le laisser partir et, en toute honnêteté, il n’en avait pas envie. Leur contact durant ces dernières minutes avait été tellement…
Depuis les conduites techniques, Jack fit irruption dans la colonne vertébrale du vaisseau, découvrant l’intérieur, le vrai. C’était un bordel dénué de tout respect de quelque convention technique ou sécuritaire que ce soit. Ce vaisseau n’avait pas été inspecté depuis des décennies. Des décennies de customisation, de mises à jour et de modifications pratiques sans que personne ne vienne lui signaler la dangerosité de certaines décisions. Elle était seule. Elle était vieille. Et était-elle seulement vulnérable à ces dangers ? Là était, peut-être, la vraie question importante.
Il n’eut pas le temps d’examiner les détails, cela dit. La belle cendrée voulait expédier la question de la douche. Pour quelque raison qui lui échappait encore, elle était soudain assez pressée, et il s’exécuta, poussé par cette drôle de sensation imposant constamment son autorité sur ses pensées, rendant ses exigences prioritaires. Il alla se doucher après avoir été écarté du chemin, cherchant à comprendre pourquoi elle passait subitement en mode couvre-feu. En fait, il avait bien une idée, mais elle était peut-être un peu trop prétentieuse pour la laisser s’imposer, puisqu’il commençait à se demander si elle n’avait pas hâte qu’il soit propre et nu pour pouvoir se le faire.
S’il savait ! Ses pensées l’occupaient trop tandis qu’il se glissait dans la cabine claustrophobique, mais notoirement confortable de la vampire. Sa tranquillité fut néanmoins perturbée par la découverte de la quantité de lotions spécialisées, et à priori destinées à une série d’autres espèces, qu’il put trouver là. De nouvelles questions se posaient, comme, par exemple : Thanasia était-elle une métamorphe, ou une chose du genre ? Il trouva des flacons apparemment pour humains, improbables par leur forme et leur conditionnement, et d’une odeur… ancienne. C’était à peu près ce que le vétéran s’imaginait lorsqu’il songeait à ce que devait se mettre son arrière-grand-père en sortant en boîte. C’était perturbant, une expérience nouvelle et propre à le désorienter. Pour autant, ce n’était pas non plus désagréable. Et sans doute s’était-il trop perdu dans ses recherches, ses questionnements et ses sens, car ses habits n’étaient plus là lorsqu’il tenta de les récupérer, trouvant une serviette blanche à la place.
« Ah… »
Quant Thanasia était-elle entrée ? S’était-elle rincée l’oeil en passant ? Il était un peu contrarié de ne pas l’avoir remarquée ; de ne pas savoir, aussi. Décidément, cette femme, quoi qu’elle soit, le perturbait. Et, comme il arrêtait l’eau consciencieusement, habitué des douches limitées comme tout voyageur, il commença à entendre la musique, légère et organique, s’élevant à l’intérieur du navire. Une hésitation le saisit avant d’attraper la serviette et de la nouer autour de sa taille : cette fois, il en était sûr, en fait, l’étrangère voulait de lui, à sa façon. Et son apparition à sa sortie ne lui laissa plus de doute, sertie comme elle était de bandes ne couvrant que les parties intimes de son anatomie, promenant sa sculpture svelte et fine à travers son vaisseau sans un brin de pudeur déplacée.
En la détaillant, il pouvait être sûr d’une chose : sa plastique était effectivement inhumaine. La perfection du grain de peau n’était pas juste absolue, elle était forcément naturelle. Même la chirurgie de restauration épidermique la plus avancée laissait des traces ou gardait le souvenir du temps. Il le savait pour avoir fréquenté, une fois, une femme bien plus âgée que son apparence et sa parole l’avaient laissé entendre. Comme toute autre chose, quelque chose semblait clocher chez Thanasia et, soufflant le chaud et le froid, deux coupes en mains, elle le défiait de s’en aller ou, au contraire, de se soumettre à ses plans pour la « nuit ». Et, ce faisant, son regard, pour la première fois, le détaillait avec intérêt, un sourire étirant ses lèvres fines perpétuellement figées dans leur amusement narquois. Il ignorait si elle s’était rincée l’œil, mais elle était d’humeur, et lui se savait au menu en tout cas.
Oh, il n’en était pas effarouché. Il était plus souvent chasseur que chassé, et sinon assez souvent à pied égal avec l’autre, mais il lui arrivait aussi d’être chassé et il n’y voyait aucune problématique humiliante, comme certains hommes mal dans leur virilité. Au contraire, il se sentit flatté, que cela ait à voir avec son influence ésotérique ou non. Sa voix lui semblait avoir chantonné, et sa dent, longue canine, s’était exhibée avec une voracité lubrique, chassant la curiosité de son développement inhabituel. Il la suivit du regard, pensif, détaillant ses courbes discrètes, son pas de fauve, ses griffes noires, humant son parfum qui frappait le fond de ses sinus comme s’il cherchait à attaquer son cerveau directement. Il se sentait chassé, en effet. Chassé, désiré, comme un plat de viande rouge. Oui, cette femme ne faisait pas dans la romance, ceci était clair pour lui aussi.
Naturellement, à peine la plateforme était-elle revenue à vide qu’il s’y était dirigé, laissant un dernier regard à ses vêtements, attendant près de la sortie, à proximité du cockpit, avant de les laisser pour prendre l’autre chemin. Le chemin de l’inconnu, de l’excitation. L’ancien pont stratégique du Moniteur avait été transformé en un véritable boudoir, repaire à la fois chambre, lupanar et donjon de la maîtresse des lieux. L’atmosphère s’en dégageant disait au moins cela de l’endroit. Ici, il n’y avait plus de trace du vieux navire de reconnaissance rafistolé et bidouillé. Thanasia y dévoilait son goût pour le luxe et ses affinités particulières. Obscurité et lumière se disputaient ici, et pas seulement pas la clarté des éclairages. Le contenu de ses casiers, s’il n’avait pu vraiment le détailler, lui avait sauté aux yeux comme un assemblage éclectique d’objets de plaisir. Il n’était pas surpris, plusieurs espèces ayant de très longues vies évoquant souvent la recherche de nouveauté venant avec l’ennui de l’accoutumance. Mais lui, où mettait-il les pieds ? Il n’était pas surpris, mais, peut-être, un peu intimidé.
Mais Thanasia, contre toute attente, se voulait rassurante maintenant, le prenant avec un mélange d’appréhension et de tranquillité tel qu’il avait transpiré durant leur travail commun, mais qui ne s’était alors exprimé que de manière silencieuse et réactive. Il avait pris la coupe entre ses doigts en hochant la tête, croisant son regard méfiant avec des yeux chargés d’interrogation. Il la regarda s’éloigner, imita ses gestes, s’arrêta lorsqu’elle lui ordonna d’approcher, et lui retourna encore ce regard interrogateur, se demandant quelles étaient les règles de l’accord qu’elle semblait avoir passé sans l’en informer. Pourtant, avant même de le réaliser, il se réalisait déjà rendu sans y penser, fronçant les sourcils, interdit. Il l’entendait parler, évoquer sa domination intrinsèque sur lui, et sentit le pied se poser sur lui, le caresser avec ce mélange étrange de légèreté et de puissance. Mais il se sentait aussi à moitié hors de son propre corps. Elle lui donnait des consignes en le parcourant du bout des orteils, et lui, s’il entendait, s’il enregistrait, était juste captivé par cette perte de contrôle lancinante, se sentant à nouveau là tout en ayant l’impression de n’être qu’un invité dans sa propre enveloppe.
Il se retrouvait nu, palpé du pied, stimulé malgré lui dans un frisson lubrique, et ses yeux raccrochèrent les siens pour la première fois depuis sa brève absence. Il se demanda si elle pouvait lire dans ses pensées, et de la crainte le parcourut en frissonnant tout le long de son échine. Mais le frisson vint à ses reins pour se décharger dans son aine, éveillant son sexe flasque qui commença à palpiter, et qui commanda à tout son corps de pulser, irrésistiblement, au nom d’envies viscérales qui, certes, existaient en lui, mais semblaient lui avoir été arrachées d’une simple pensée étrangère, imposées à sa psyché. Un leitmotiv s’éleva en lui, se scandant en liseré de ses pensées, accroissant la chaleur montant de ses tripes, inondant ses songes d’un seul et même moto : il devait la servir, il devait lui plaire, il la voulait, il la voulait à s’en briser les lombaires. Bientôt, rien d’autre ne circula dans sa tête, et ce flacon d’huile posé là à son intention ne lui échappa pas, pas plus que sa destination.
Alors, influencé par la créature mystérieuse et affamée, comme possédé par une force nouvelle ayant pris le contrôle de son corps, l’homme se mit en mouvement. Ses gestes se firent soudainement résolus, tranquilles et assurés, et il se pencha pour attraper le flacon d’huile, qu’il souleva pour le déboucher et commencer à en écouler un filet sur la ligne de ses clavicules, avant de s’enduire de sa main libre, couvrant torse, épaules, nuque, bras, comme tout ce qui était atteignable, de cette huile de massage odorante et sensuelle qui l’échauffa en magnifiant sa plastique puissante, le faisant luire comme un excellent filet enduit de beurre. Quoi de plus approprié pour une femme gorgée d’appétit ?
Et puis, recroisant le regard de la petite créature, il s’avança encore vers elle, se faufilant malgré sa jambe, jusqu’à ce que son aine se porte au niveau de son mont de vénus. Il ne fit rien d’obscène encore, même si sa virilité, stimulée, bien qu’encore pendante, s’était gorgée de désir, grossie, presque ferme en main, son appétit palpable, et visible par les pulsations la parcourant régulièrement. Non, il croisa son regard avant de descendre les yeux à sa gorge, à son corps et aux bandes la couvrant. Il tendit les mains, attrapa ces dernières au niveau de son sternum et les déchirèrent d’un mouvement ferme, exhibant ses petits seins et découvrant buste et abdomen. La dominant ainsi, sans un mot, il leva le flacon au-dessus de sa silhouette et en laissa un filet s’écouler, s’écrasant sur elle et, à peine l’huile à même sa peau, une épaisse main chaude la couvrit, l’enduisant avec une sensualité brute, possessive, ne se gênant pas en parcourant tant son ventre, que les reliefs légers de sa poitrine, la massant avec une fermeté presque douce avant de s’arrêter, portant son attention plus bas, attrapant les bandes croisées à son pubis, tirant, encore…