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« le: jeudi 27 mars 2014, 16:51:20 »
L'épaisseur du gland gorgé de sang s'aventurait déjà entre les monts du séant rebondi et charnel de l'Indocile, serpent vicieux cherchant le premier terrier à venir infiltrer. Cato ne visait rien de particulier, ni même un peu de plaisir. Lorsqu'il avait recours au viol, ce n'était pas tant pour l'acte sexuel que son côté avilissant et humiliant. Forcer une femme à geindre de terreur et de honte en enserrant le volume épais de sa queue par contrainte était pour le borgne une façon plus sûre d'attendre l'extase orgasmique que ne le serait probablement une union "simplement" consentie. Il passait sa frustration et sa colère sur la pauvre victime soumise à ses pulsions sordides et ne recherchait pas d'autre satisfaction que la destruction de la fierté et de l'honneur de sa proie. Le résultat de sa "performance" ne l'intéressait pas et qu'il soit un bon ou mauvais amant n'était même pas un point de considération qu'il abordait alors qu'il enfilait ses centimètres de chair dans une matrice non-consentante. Forcer, souiller, détruire. Rien d'autre.
La brune avait éveillé un certain désir chez lui, pourtant. La vision de son corps nu nimbé par la lumière tendre de la lune et des étoiles l'avait excité et lui avait martelé que si elle avait été tekhane, cette chienne lui aurait marché dessus comme toutes les autres. Alors Cato n'avait pas daigné lui laisser une chance de se défendre, la faisant expier pour le simple fait d'être une femme. A son oeil, c'était une justification des plus correctes.
Une troisième option ? Le calme de la voix qui avait évoqué cette possibilité avait stoppé la course de la tête phallique à l'instant même où celle-çi était venue buter contre l'oeillet secret de la brunette. Qu'envisageait-elle de faire ? Que POUVAIT elle faire ? Le mercenaire comprit une seconde trop tard qu'il avait fait une erreur en ne veillant pas à s'occuper du bras laissé en liberté, pensant que les coups de poing auraient suffisamment sonné la belle pour qu'il puisse la saillir sans qu'elle ne présente une réelle défense. Le pétrole de la lampe imbiba les draps et Sicarius se retira en un éclair, sa sagacité lui évitant de se retrouver en proie aux flammes qui avaient surgies sans source visible. Son bond lui avait collé le dos au premier mur venu en laissant tout le loisir à la femme de reprendre contenance... Après être parvenue à lui prendre son arme ! Le mercenaire s'en rendit compte quand il tenta lui-même de s'en saisir, ses doigts aux ongles sales et cassés se refermant sur le vide. Loin de se démonter, le tekhan continua son geste en levant sa jambe, venant dégainer la dague qu'il gardait toujours dissimulée dans sa botte. Un mouvement de poignet plus tard, la lame était tenue par la pointe pour être lancée vers une cible dont les courbes affolantes se découpaient dans les flammes dansantes.
- Je ne vais pas fuir. Je ne vais pas vous tuer non plus.
Cato ne répondit pas, préférant focaliser sa seule rétine sur le point vers lequel il envisageait de planter Mélisandre. Déjà, ses muscles se tendaient et ses nerfs se préparaient à transmettre l'ordre de lancer la dague vers la cible en s'assurant d'y mettre assez de force pour faire mouche ou tout au moins distraire l'attention de la fuyarde. T ant pis pour les flammes qui dévoraient déjà le bas de sa cape de voyage, heureusement encore gorgée de l'eau pissée par l'orage qu'il avait essuyé un peu plus tôt. La chaleur serpentait sur sa peau balafrée, la rougissant toujours un peu plus à chaque seconde qui passait. La fumée lui piquait le nez et la gorge et serait bientôt assez épaisse pour lui boucher la vue. Quoi qu'il décide de faire, le borgne aurait à vite l'accomplir. A la seconde où son bras allait s'étendre pour faire en sorte que la dague traverse la pièce enflammée et le corps de la femelle, cette dernière fit preuve d'une audace que Cato n'avait encore jamais croisé. Dans un culot fantastique, Cairn s'était déclarée prête à se brûler seule la cervelle.
Un autre aurait peut-être fondu devant cet acte inattendu, presque chevaleresque. Lui se contenta de laisser un bruit de langue agacé sortir d'entre ses dents, jaugeant comme il le pouvait la sincérité de la menace. En temps normal, sûrement aurait-il jugé avec discernement et agit immédiatement en conséquence. Hélas, la chambrée tranformée en antichambre infernale commençait à le rôtir. La chaleur devenait de plus en plus lourde à supporter et le borgne avait comme la désagréable impression que ça et là, sa peau cloquait déjà. Le décompte du temps qu'il pouvait encore tenir dans la pièce avait commencé, s'égrainant à une vitesse folle.
Elle lui proposait de le... Suivre ? C'était là une bien curieuse déclaration, aussi inattendue que douteuse. Bien entendu, Cairn posait ses conditions. Lui laisser le flingue. Ne pas la toucher. Le borgne toussa, sa gorge agressée par la charge âcre qui se dégageait du mobilier enflammé. Son oeil le brûlait, la pointe de ses cheveux était à présent un souvenir. Et sa cape ne tarderait pas à être un linceul embrasé. Pourtant, du mieux qu'il le pouvait, l'homme garda de son éternel flegme quand il commença à répondre. Les dommages du feu pesaient, le faisaient de plus en plus souffrir. Pourtant, Sicarius refusait obstinément de le laisser paraître. Avec moins d'aisance qu'à l'accoutumée, il fallait bien le dire.
- Je ne chassais pas ta tête, je ne comptais pas sur la prime. Tu pourrais te faire sauter le crâne que ça me laisserait indifférent.
C'était vrai. Son chemin avait croisé le sien par hasard et comme il n'envisageait pas spécialement d'encaisser la monnaie, Cato considérait ne pas perdre grand'chose à la laisser se suicider pour lui échapper. A part le Vanguard, qui lui avait coûté une petite fortune et qu'il ne pourrait maintenant plus aller récupérer si le cadavre de Cairn venait à tomber dans les flammes... Dans lesquelles d'ailleurs elle semblait bien à l'aise. L'heure n'était toutefois pas aux spéculations.
- On va aller à Ashnard. Pour voir ce que t'as dans l'estomac et ce que tu me prépare sur la route. Parce que tu n'proposes pas ça pour la beauté du geste, hein, pétasse ? Je n'te toucherais pas tant que tu serais en mesure de m'en empêcher. Ne baisse jamais ta putain de garde, à aucun moment. Et garde en tête une chose. Il s'arrêta pour tousser. Peu importe ce qui se passera, si je dois crever tu m'accompagneras. Oooh oui, tu peux en être absolument certaine.
Il n'était plus possible pour lui de tenir dans cet enfer délimité par quelques mètres carrés. En guise de bonne foi, le mercenaire prit quand même le temps de ranger son couteau de là où il l'avait tiré, constatant qu'une cloque déformait déjà le dos de sa main. La tendant quand même à Cairn, il lui fit signe de suivre et se tourna vers la fenêtre dont il défonça la vitre à coups de poing avant de se propulser au travers, comptant sur sa résistance pour encaisser le choc contre la terre détrempée qui reposait sous les tailles où il avait campé. Rageur, le borgne l'était. Contraint de fuir la chambre ainsi, il laissait à sa proie une porte ouverte pour lui échapper.
Toutefois, le feu qui se propageait alerterait vite les gardes du domaine, si ce n'était pas déjà fait. Sicarius devait penser à une façon de prendre la fuite et envisageait déjà de voler l'étalon dont Cairn lui avait parlé un peu plus tôt. Sans trop compter sur la parole de l'esclave en fuite pour autant, le borgne s’accordât dix secondes à l'attendre sous la fenêtre. Passé ce délai, il jouerait la fille de l'air et se promettrait de se mettre en chasse si Mélisandre venait à lui filer aussi bêtement entre les doigts.
Pour de bon, cette fois. Et pas pour la prime, mais pour la chose à laquelle le Black Raven accordait le plus de valeur sur ce monde pourri : l'honneur. Le sien.