L’
hélicoptère tournoyait dans les airs, faisant du surplace. Les deux pilotes, depuis leur cockpit, voyaient les immenses tours du cœur de Tekhos Metropolis, des tours qui semblaient se perdre dans les nuages. En contrebas, le contraste était bien différent. L’éclairage public était défaillant, et les grandes tours du secteur, bien petites face à ces immenses buildings, étaient délabrées et en triste état. C’était un endroit dangereux, ravagé par les trafics, presque une zone de non-droit, où l’autorité tekhane avait bien du mal à s’implanter. C’était l’un de ces fameux ghettos de mâles, ces endroits où la municipalité, il y a des années, avait décidé de regrouper la majorité de la population de sexe masculine La pluie menaçait ce soir, mais les femmes à bord de l’hélicoptère n’en avaient que peu de choses à faire.
Se tournant vers ses passagères,
Braider, la pilote, qui avait retiré sa veste en cuir, était ainsi en soutien-gorge, leur signala le feu vert :
«
OK, mes petites cailles ! La cible a été confirmée, c’est bien lui ! J’vous rappelle qu’il est pas du genre prince charmant, ce coco-là. Checkez vos équipements, et vous pourrez aller nous le ramener ! »
Jacqui, une femme ayant reçu de nombreux implants cybernétiques, était la chef de l’opération de récupération. Cette dernière hocha lentement la tête, comme pour signaler qu’elle avait bien reçu les ordres. Les Novaquiennes n’avaient que des armes tranquillisantes, car il ne fallait pas tuer la cible, mais ce n’est pas pour autant qu’elles venaient avec des pétoires rouillées. Elles avaient délaissé leurs fusils d’assauts pour des grenades fumigènes, des
flashbangs, et, surtout, des pistolets électriques. Ces armes lâchaient des espèces de fléchettes électriques qui répandaient dans le corps un tas de volts. Un seul de ces tirs était suffisant pour assommer un mammouth, si on visait bien. Même si la cible était rapide et puissante, un seul tir suffirait à la neutraliser.
Toute l’escouade portait le même uniforme, une
combinaison moulante renforcée, qui avait l’avantage de protéger le corps, tout en ne ralentissant pas les mouvements. La seule qui ne portait pas cette combinaison était celle qui resterait en soutien sur le toit, leur tireuse d’élite,
Shooty. Elle avait été améliorée par les nanomachines de Novac, les fameuses Gen-7, et, grâce à cet implant, sa vision était accrue, de même que les tremblements de ses mains, qu’elle pouvait réduire à l’aide de ses nanomachines, en ralentissant son rythme cardiaque, le ralentissant tellement qu’elle ne faisait alors plus qu’un avec son amour : un fusil de précision terriblement efficace.
Shooty avait pour mission de rester sur le toit d’une tour en face de celle où résidait la cible, afin de pouvoir le surveiller, et soutenir le reste de l’escouade.
Le reste de l’escouade se composait donc de
Jacqui, mais également d’autres femmes :
Jessica,
Trysha, et
Morrigan, cette dernière ayant accepté de se séparer de son habituelle armure lourde pour la combinaison règlementaire. L’idée n’était pas de décimer tout le quartier, mais d’appréhender un seul homme. Les quatre femmes s’apprêtaient à descendre, avec
Shooty, sur un toit faisant face à celui où était la cible. De là, elles utiliseraient des grappins pour rejoindre la façade de l’autre immeuble, et embarquer à l’intérieur, afin d’appréhender la cible. Avec un grappin et une ventouse, son corps serait ensuite relié à l’hélicoptère.
Elles savaient que l’homme était fort. C’était un ancien Black Raven, l’un de ces mâles qui avaient été modifiés, et dont les transformations génétiques avaient servi de base au projet «
Terminator », actuellement en cours.
«
Okay mes chéries, ne le sous-estimez pas, et ne vous faites pas repérer. En piste ! »
Jacqui sauta la première, s’accrochant au filin, et atterrit sur le toit, rejointe par ses camarades.
Shooty suivit en dernier, et s’allongea sur le toit, utilisant le viseur de son fusil pour voir la cible. De leur côté,
Jacqui et les autres utilisèrent des gadgets spéciaux, fournis par l’armée tekhane, et balancèrent de longs filins noirs qui se plantèrent sur la tour en face. Il y avait une bonne centaine de mètres qui les séparaient, mais les filins pouvaient s’étendre sur plusieurs centaines de mètres. Elles s’élancèrent alors le long des câbles, à l’aide de mousquetons, filant comme s’il s’agissait de tyroliennes.
Shooty, quant à elle, visait l’appartement, transmettant les informations par radio.
«
Rien de suspect à signaler, il mate la télé sur son canapé... »
L’escouade arriva contre la façade de l’immeuble, plantant leurs pieds contre le mur, puis attachèrent à leurs mousquetons un corde, tout en utilisant des adhésifs pour fixer ces derniers contre les murs. Ce faisant, elles se laissèrent ainsi lentement descendre vers l’étage de l’homme.
Les choses auraient pu être aussi simples que ça. Atteindre l’étage en question, balancer une grenade étourdissante, puis lui balancer plusieurs décharges électriques dans le corps. Malgré ses deux cœurs, il s’écroulerait sur place, et se réveillerait à Novac. Ce n’était pas le meilleur moment de lui proposer un contrat, mais, si on s’était contenté de frapper à sa porte, il aurait probablement essayé de violer la femme qui était venue lui faire cette proposition.
Malheureusement, les choses ne se passèrent pas aussi facilement.
La tour dans laquelle la cible vivait appartenait depuis quelques semaines à l’un des nombreux gangs de rues qui se partageaient Tekhos : les Red Bones. Les Bones prélevaient un « loyer « auprès de chaque habitant, une forme d’extorsion, et n’hésitaient pas à abattre ceux qui étaient contre l’idée de payer, ou, à défaut, les torturaient. Ils étaient nerveux, agressifs, et avaient des armes. Certains avaient des implants cybernétiques, ce qui n’avait pas aidé à les arranger, les rendant plus agressifs, plus violents, plus instables. Et les Bones avaient décidé de rendre une petite visite à Cato. Ils étaient en train de vider les différents appartements, afin que toute la tour leur appartienne, et celui-là avait décliné leur offre de partir. La phase diplomatie allait donc laisser place aux hommes d’actions. Armés, ils s’avançaient le long des couloirs, chargeant leurs mitraillettes, leurs fusils à pompes.
«
Où crèche ce fils de pute ? s’exclama l’un d’eux, portant une armure assistée rapiécée.
-
On se rapproche, Boss. »
Le Boss tenait entre ses mains un
solide fusil à pompe, et s’approcha de la porte. Méconnaissable parmi tant d’autres. Ses hommes se postèrent de part et d’autre, et le Boss se planta devant. C’était une vraie montagne, faisant bien deux bons mètres, et il avait une sérieuse envie de défoncer de la gueule ce soir. Les implants... Il voyait rouge, le genre de rouge qui pouvait lui amener à descendre dans la rue pour flinguer tout ce qui bouge, ou ne bouge pas. Et là, il y avait ce petit peigne-cul qui refusait de décarrer. Il le prenait pour un clown, c’est ça ?! Un putain de contractuel venu lui proposer je-sais-pas quel contrat de réaménagement de merde ? Rien qu’à y penser, l’homme sentait la colère s’emparer de son cerveau. Il tapa à plusieurs reprises sur la porte.
«
Trou de chiottes ! T’as oublié de payer, alors on t’apporte la facture ! »
Comme s’il trouvait sa réplique drôle, il visa la porte avec son fusil à pompe, et tira. La porte manqua se couper en deux sous la puissance terrible de l’arme, et, d’un coup de pied ravageur, l’homme la repoussa, avant de se décider à entrer, ayant dans le but de tirer sur tout le mobilier.