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« le: vendredi 02 septembre 2011, 00:37:45 »
- Patience ! Reviens ici de suite !
La-dite Patience se rit de cet ordre et file comme l'éclair dans la ruelle mal éclairée. Et puis soudain, elle s'arrête, et fond en larme. Elle pleure ainsi cinq bonnes minutes, déversant son chagrin, et renifle fort peu gracieusement. Son regard noisette est noyé de larmes, son joli petit nez est rougi, ses joues sont ruisselante et ses lèvres d'un rose à peine soutenu sont tremblotante à mesure qu'elle sanglote. Elle tourne alors la tête, et sa chevelure acajou masque son visage. Ses cheveux sont longs, mais attachés en deux couettes enfantines. On peut ainsi nettement voir que ses oreilles sont percées et accueillent de perles de nacre bleues.
Et puis la demoiselle se reprend, redresse les épaules, bombe sa poitrine généreuse, met les mains sur les hanches, et se campe sur le sol jambes écartées. Elle arbore une moue boudeuse, et fait face à la petite femme replète qui lui cours après depuis près d'une heure. Elle résiste à l'envie de jouer avec le ruban qui souligne sa taille fine, et darde sur sa gouvernante un regard meurtrier. Celle-ci ne fait pas gaffe à cela et reprend son souffle, en haletant :
- Patience, vos parents vont être furieux après vous.
La jeune femme hausse les épaules, faisant tressauter sa poitrine, et lâche un ricanement désabusé.
- Peuh. Je suis effrayée.
Elle serre les dents, et défit du regard la vieille femme de venir la chercher pour la ramener à la maison. Celle-ci s'avance, et murmure d'une voix douce, apaisante :
- Patience... Vous vous êtes perdue trois fois aujourd'hui, il est temps de rentrer...
- La faute à qui si je me suis perdue ? C'pas moi qui ai voulu déménagé dans cette bourgade pourrie où personne ne parle un mot d'anglais. Ici, tout le monde piaille en Jap'. Au moins, à St Louis, j'pouvais d'mander mon chemin...
Patience... Contrairement à cette légende qui raconte que l'enfant adopte le comportement donné par son nom, Patience est une jeune femme de 17 ans survoltée et avide de liberté. Elle a l'habitude de s'enfuir de chez elle pour aller rejoindre ses amis et faire la bringue toute la nuit. Mais voilà. Ses parents en ont eu marre, et l'ont exilée dans leur résidence secondaire à Seikusu, en compagnie de sa gouvernante : Marie. Patience déteste ça. Elle est perdue, et n'a aucun amis. Son ancien lycée lui manque. Elle regrette le temps où elle était la reine du lycée, et se retrouve seule dans celui de Seikusu. Cette adorable peste, provenant d'une richissime famille, n'est pas ce qu'on pourrait appeler une personne fiable et digne de confiance. Elle ment, vole, se drogue parfois, bois et fume, et fait tout un tas d'autres bêtises. C'est une vraie peste avec ses congénères féminines, et un putain d'allumeuse avec ses camarades masculins. Pas qu'allumeuse d'ailleurs. Elle n'hésite pas à aller jusqu'au bout, et adore se faire prendre par ceux qu'elle agace t qu'elle pousse dans leurs retranchements. Elle adore le sexe de manière générale, et est prête à toutes les expériences. Ou du moins, elle se plaît à le croire.
Car sous cette facade arrogante et hautaine, orgueilleuse et aventureuse, se cache une fille qui a tout de même un coeur. Un coeur qui la pousse à agir pour sauver les animaux, à risquer sa vie lorsque ça en vaut le coup, à pleurer lorsqu'elle est submergée de tristesse, etc... Elle n'est pas généreuse, loin de là. Mais elle est humaine. Et même si elle ne croit pas en l'amour entre deux personnes, elle croyait à l'amour filiale. Naïve petite enfant, si vite détrompée. Ses parents sont deux aristocrates très occupés avec divers business. Elle a passé son enfance solitaire, et compense par sa façade survoltée oui. Elle ne veut pas laisser voir ses faiblesses, et enchaîne les conquêtes pour combler un manque affectif.
Elle a grandit à Saint Louis, en Amérique, après une naissance difficile. La femme qui l'a mise au monde était une mère porteuse. Sa propre mère n'a pas voulu déformer sa si jolie silhouette pour un enfant. Dès le départ donc, elle n'a pas eu de chance. Elle a passé la plupart du temps seule, fuyant ses précepteurs et ses gouvernantes. On lui a fait l'école à la maison, sous prétexte que ça ne valait pas le coup de dépenser des sous pour le trajet jusqu'à l'école. Elle n'a jamais été à l'école, jusqu'à ses onze ans. Déjà affirmée, elle a tempêté jour et nuit pour qu'on la laisse aller au collège, et puis ensuite au lycée. Elle a alors tout fait pour être reconnue, pour être adulée. En troisième, c'était la Reine incontestée de son collège. Sa première année de lycée a été pour elle l'année de sa transformation en femme. Elle a passé le cap de la première relation sexuelle, et a commencé à boire et à fumer lors des rave party ou lors des fêtes organisées par ses amis. Alcools, sexe et drogues. Shopping et escapades interdites. Elle découchait souvent, et travaillait dur pour garder son statut de fille la plus populaire. Mais ses notes n'étaient pas touchées par cela. Très intelligente, elle n'avait pas besoin de beaucoup travailler pour obtenir de très bonnes notes.
Mais un jour, ses parents en ont eu assez de ses frasques. Pour ses dix-sept ans, qu'elle a bien fêté avec ses amis, elle a eu la surprise de trouver deux hommes en noir à la maison, l'attendant de pied ferme. Des armoires à glaces, engagées par ses parents pour l'escorter, avec sa gouvernante, jusqu'à l'aéroport. La maison avait déjà été vidée de ses effets personnels, et le tout se trouvait à Seikusu dans l'une des nombreuses résidences de ses parents. Elle a eu beau courir, les hommes en noir l'ont rattrapée. Elle a été droguée, et s'est réveillée dans une chambre à Seikusu avec un horrible mal de crâne. De là, elle a été inscrite au lycée local. Mais elle sèche souvent les cours, et se la joue inaccessible. Elle n'aime pas sa vie à Seikusu, et elle fuit la maison autant que possible.
Comme ce soir d'ailleurs. Elle a posé son sac de cours, et est partie vadrouiller en ville. Sa gouvernante sur les talons. Et la voilà, dans ce cul de sac, en train de lancer des injures à la vieille femme, de maudire ses parents, pour finalement s'effondrer, à bout. La fatigue a eu raison d'elle, et elle se réveillera dans sa chambre à nouveau, le lendemain. Voilà la vie de Patience Travers.