Tout ça était délirant, mais une chose semblait bien réelle dans ce florilège d’animaux, de sons, et de couleurs explosives : le
sexe, et White Rabbit... Pourtant, n’était-elle pas, comme Anouk l’avait relevé, une
fausse lapine ? Dès lors, quelle légitimité avait-elle pour déterminer ce qui était vrai de ce qui était faux ? La seule réalité, dans ce monde, et dans toutes les dimensions, c’était que rien n’avait d’importance. On vivait pour mourir, et tout ce qu’on construisait finissait par revenir à la poussière.
Dust to dust, ashes to ashes, disait-on ainsi. Alors, qu’est-ce qui était vrai, qu’est-ce qui avait de l’importance ? S’éclater, rien de plus. Se faire plaisir, se lâcher, et ne penser à rien d’autre qu’au lendemain. La société ne s’écroulerait pas pour autant, car il y aurait toujours des gens préférant faire passer le bonheur des autres avant le leur (officiellement, du moins). La véritable liberté, pour White Rabbit, ne s’obtenait que par le biais d’un désintéressement sincère et honnête au reste des choses, au reste du monde, pour ne se préoccuper plus uniquement que des choses amusantes et divertissantes. C’est ainsi que White Rabbit fonctionnait. Le bien, le mal ? La démocratie, la dictature ? L’impérialisme occidental ? La guerre entre Nexus et Ashnard ? Tout ça lui passait au-dessus de la tête. Elle n’était là que pour s’amuser et profiter du bon temps. Éventuellement, elle rendait la justice, à sa manière. La femme était une anarchiste convaincue, ce qui faisait qu’elle pouvait aussi bien s’attaquer aux criminels qu’aux policiers. La Lapine avait tout simplement sa propre philosophie, sa propre vision du monde et de la vie.
Anouk se rapprocha de son intimité, montant sur la table, et White Rabbit posa une main sur sa tête, plaquant son visage contre ses cuisses. Elle avait baissé sa culotte, et utilisait sa magie pour que du sucre colle à ses parois intimes, sans en descendre. C’était bizarre, troublant, mais, au point où elle en était, c’était bien le cadet de ses soucis... Si tant est qu’elle considérait cela comme un souci. Le sucre la chatouillait, et sentir la langue d’Anouk filer entre ses cuisses l’aidait à se sentir mieux, puisqu’elle récupérait du sucre à chaque coup de langue... Un sucre qui serait certes un peu humide, mais un sucre quand même. Main posée sur sa tête, la Lapine la laissait faire, soupirant silencieusement, tandis que, autour d’elles, on entendait des explosions de joie, de couleur, et de lumière. Les idées affluaient dans la tête de la Lapine, mais elle continuait à laisser Anouk la lécher, lui faire plaisir... Et se faire plaisir.
Au bout de plusieurs minutes, la Lapine repoussa alors Anouk, la renvoyant contre son siège, et un harnais de sécurité s’abaissa alors sur elle, comme si elle était sur le siège d’un manège d’attraction. L’harnais venait du haut, et l’immobilisait, impossible à retirer. Un sourire sur les lèvres, White Rabbit sauta de la table, et récupéra sa culotte rose, la remettant entre ses jambes, sans qu’on ne sache trop d’où elle venait. Elle se pencha alors vers Anouk, et posa un doigt sur son nez, brièvement, avant de s’exprimer.
«
Le lapin est un guide pour la folie, petite Anouk. Que je sois un vrai lapin ou pas, quelle différence ? Toi-même, tu n’es pas Alice. Tu es dans mon monde, petite Usagi... Si tu veux en sortir, il te faut retrouver les lapines. Il y en a deux, et, si tu les retrouves toutes les deux, tu auras droit à une récompense. »
White Rabbit lui sourit à nouveau, penchée vers elle, et continua son manège en s’asseyant sur le fauteuil, ses jambes filant de part et d’autre de celles d’Anouk. Elle rapprocha ainsi sa poitrine d’elle, mais se baissa, pour que son visage se plante face à celui de son invitée, et qu’elle puisse voir les yeux violets de la magicienne.
«
En attendant, je t’offre un tour sur le Bolid’. »
Ayant dit cela, la Lapine s’écarta, et Anouk constata alors que son fauteuil était désormais fixé sur des rails, et avait changé de place, se trouvant face à celui des autres, formant une ligne. White Rabbit s’écarta, et souffla un baiser à Anouk, avant que la machine ne démarre. Le fauteuil s’avançait le long du sol, et il n’y avait pas de planches sur lequel s’appuyer. Les jambes d’Anouk flottaient dans le vide, et le manège grimpa ensuite une côte, dans une espèce de gros canon long.
«
Paré au décollage ! entonna quelque part une voix
off.
3... 2... 1... GOOOOOOOOOOO !! »
Il y eut comme une explosion, et le manège fila à toute allure, pour s’envoler dans le ciel, et, en regardant bien, on pouvait voir qu’il était tiré par des cerfs et par un cocher bedonnant vêtu de rouge... Comme le chariot du Père Noël. Le chariot s’envolait au-dessus d’une ville indistincte, évoquant une sorte de Nexus fantasmagorique, avec des champignons géants qui faisaient la taille d’immeubles ici et là. Il y avait également des bâtiments à l’architecture curieuse, semblant avoir été conçus par un Numérobis qui se serait échappé ici : des portes à la place de fenêtres, des escaliers de travers, des étages faits à côté des rez-de-chaussée, s’appuyant eux-mêmes sur d’autres rez-de-chaussée... Des oiseaux volaient parfois près du chariot, explosant alors en mille artifices qui tombaient sur les spectateurs. Anouk ne pouvait que suivre le manège, qui se rapprochait lentement d’un château central, sur une grande place circulaire.
Le chariot se rapprochait de la grande place centrale, et, en s’approchant, on put voir que cette place était reliée à deux autres places, une au nord, une au sud, chacune ayant une statue de lapine. Était-ce les deux lapines dont White Rabbit avait parlé à Anouk ? Le chariot s’approchait à vive allure du sol, et, alors qu’il allait s’y écraser, les cers s’en servirent pour sauter, bandant les muscles avant de les relâcher, mais le harnais de sécurité retenant Anouk s’ouvrit alors, sans prévenir.
«
On largue le premier cadeau, HO-HO-HO-HO !! » s’exclama le curieux Père Noël.
Anouk se retrouva sur le sol, devant le palais... Où une autre fête avait lieu. Une fête multicolore et folklorique, devant un château semblant tout droit sorti d’un conte de fées.