I’m goin down to the cemetry.. [PV Linnea]

Une goutte de sueur roulait sur son front, il n’osait plus émettre un son ou simplement bouger un petit doigt alors que tous ces hommes vêtu comme des Yakuza semblaient lever leurs couteaux en sa direction.  Piro était dans une situation des plus critiques, le moindre faux pas et c’était le drame. Toutes les lumières paraissaient braqué sur lui, tous les regards aussi... notre jeune héro savait bien ce qu’il faisait là, c’était même lui qui avait organisé cette petite réunion. Après beaucoup de minutes de silence ou seuls des murmures de fond rappelaient qu’il y avait d’autres formes de vie dans la grande salle du restaurant, l’un des hommes se leva et vînt serrer la main de Piro.

« Marché conclut Piro-San ! » 

Piro poussa un long soupire en portant son verre de vin à ses lèvres, il venait de gagner un gros contrat après une semaine entière de négociations et sentait enfin que le moment se reposer était venu. Après plusieurs poignés de mains avec tous ses nouveaux partenaires, il se leva et sorti du restaurant. L’air frais sur son visage lui faisait le plus grand bien, la nuit était tombée depuis un moment, il n’avait pas eu conscience du temps qui s’était écoulé mais n’avaient pas non plus envie de rentrer tout de suite à la maison.

Personne ne serait le dire pourquoi, mais ce fut très exactement à ce moment que Piro commença à se poser des questions sur sa vie. Il était heureux d’avoir remporté le jackpot ce soir, mais il ressentait un manque quelque part en lui. Ce n’était pas très difficile à comprendre,  toujours acharné au travail sans jamais prendre une pause, il commençait clairement à en avoir marre de rentrer tard à la maison pour au final se retrouver à fumer une cigarette dans son lit avant de s’endormir seul. Il regarda pendant de longues minutes sa voiture au coin de la rue, mais ne sachant pas pourquoi, il décida de rentrer à pied. Il voulait changer ses habitudes pour une fois. C’est simple en 3 ans, il était venu tellement de fois à ce restaurant pour négocier de projet informatiques qu’il avait eu le temps de gouter à tous les plats.

Sa cravate détaché, son blouson ouvert, une partie de sa chemise sortie de son pantalon, il se promenait ainsi à cette heure tardive. Décontracté,  il alluma une cigarette, tira un coup dessus puis penchât sa tête vers l’arrière et se mit à observer le ciel étoilé en expirant la fumée vers la lune. Arrivé près de la rivière il décida de s’assoir sur un banc et de continuer la médiation sur lui-même. Il cherchait des réponses, il analysait sa dépression actuel comme si c’était un problème mathématique, alors qu’au fond de lui, il savait exactement ou se situait le problème. Son cœur manquait cruellement d’amour. Il avait une vie saine c’est vrai, il avait un vrai travail passionnant mais il souhaitait avoir quelque chose de plus. Quelque chose comme tout le monde enfaite, un peu de tendresse. Le reflet de la lune sur le dessus de l’eau lui rappelait justement son dernier moment de tendresse avec une femme et ça remontait bien il y a plus de 2 ans.

I’m goin down to the cemetry.. cos the world is all wrong..
Down there with the spooks to hear ‘em sing my sorrow song..

Il se leva, se mit à murmurer cette vielle chanson, puis repris son chemin direction la maison.

Le temps est parfois si cruel que ça en devient irrésistiblement bon. C’est un peu comme s’enlever une écharde. La manœuvre fait plus mal que de sentir ce petit bout de bois sous la peau mais on le fait quand même. Dans l’espoir de se sentir mieux sans doute. Ou plus vivant. Y en a qui marchent ça. Un peu comme Linnea en fait. Rester les fesses soigneusement assises sur son trône, ouais, c’est cool. C’est carrément la classe même, sauf qu’au bout d’un moment donner des ordres devient lassant. Comment est-ce possible ? Eh bien justement. Le temps, la longueur, l’interminable. Sans compter que sans rébellion, on a pas non plus l’impression d’asseoir son pouvoir. D’ailleurs à ce jeu-là non plus elle n’y retrouve plus tellement l’adrénaline passé. Serait-ce l’heure de se réveiller ?
L’excuse est néanmoins suffisante pour que l’Hématophage se voit une nouvelle fois à parcourir les rues de Kyoto.

Elle dérive un peu comme le font les humains lorsque leur esprit se trouve confus, lorsque l’euphorie se mêle à l’angoisse et que la névrose prend place. Les cheveux noués en une natte lâche, une petite robe de satin noire et la voilà à arpenter ces dédales pavés. Même son odorat ne semble pas vouloir l’aider à trouver une victime plaisante. Et si c’était la fin du jeu ? Non. A cette pensée, la donzelle secoua la tête libérant quelques mèches au passage qui vinrent aussitôt encadré le visage doucereux. Se serait faire honte au Créateur. Hm, le Créateur. Son comportement changea soudainement, un sourire malsain marquant ses lèvres. Ses pensées l’amenèrent à retrouver cette attitude caractéristique. La marche légère ses sens captèrent tout ce qui pouvaient se trouver à sa porter. Il lui fallait désormais une cible. Pour quoi faire ? S’amuser voyons. Qu’importe la nature du jeu, au moins ça l’occuperait.
Et puis finalement c’est son ouïe qui apporta la réponse tant attendu. Un fredonnement inconnu et pourtant si familier à la fois. Elle en frissonna, s’en mordant déjà les lèvres. Et si elle avait été humaine, il aurait eu fort à parier que son ventre aurait fait un petit « Grouik »  d’envie.

« I’m goin down to the cemetry.. cos the world is all wrong...
Down there with the spooks to hear ‘em sing my sorrow song... »

Inlassablement, les paroles raisonnaient dans sa tête. Aussi douces que le timbre de la voix perçut l’avait fait vibrer pendant un instant. Et sans même s’en rendre compte son corps avait pris en chasse la jolie proie.

« Got a date to see a ghost ♪ ♬ » Souffla-t-elle alors que ses yeux embrassaient la silhouette au-devant.

Il avait tout l’air d’un homme. Et d’ailleurs cette simple idée suffit à la réjouir et lui renvoyer l’image du Créateur. Linnea se dandina en fredonnant le reste de la mélodie, de quoi agrandir le sourire qui trônait sur ses lippes. Pourtant, elle resta bien sagement derrière lui. Non mais, manquerait plus qu’elle doive se présenter la première. Et puis d’ici, la vue n’était pas désagréable à voir le regard qu’elle lui portait. Elle n’irait quand même pas jusqu’à lui sauter directement dessus tout de même.
Une nouvelle fois le Créateur vint hanter ses pensées. Décidément. Elle s’obligea à garder un minimum de tenue. Manquerait plus qu’en plus, il la prenne pour un fantôme.

« Seul au monde » est une expression qu’on aurait pu utiliser lors de cette scène puisqu’il était possible de présumer que toute la ville s’était couchée plutôt juste pour laisser le champ libre au drôle d’oiseau qui venait de se perdre dans ses pensées. Lors de cette marche nocturne seule la fumée, se mélangeant aux notes de musiques, animait le paysage froid, sans vie. Du moins c’était le cas avant d’entendre une résonnance au niveau des paroles quelques pas derrière lui. Un frisson lui parcouru le corps en effet il avait la certitude d’être seul qu’il avait baissé sa garde et ne faisait en rien attention à l’environnement dans lequel il errait. Il tendit ainsi l’oreille pour écouter avec plus d’attention et sans plus aucuns doutes quelques secondes après, les nouvelles paroles qui voguaient maintenant sur son  écharpe de fumée, étaient bel et bien la suite du blues qu’il fredonnait. Dans sa tête une tornade de sentiments contradictoires traversait ses pensées refroidissant d’un coup sec le jeune garçon qui n’osait faire un pas de plus. C’est ainsi que le frisson qui lui parcouru le corps à cause de l’effet de surprise quelques secondes auparavant, venait d’être remplacer par une vrai impression de froid. C’était comme si tout d’un coup un épais brouillard glaciale venait de recouvrir l’environnement autour de lui. Mais ce qui perturba le plus le jeune homme c’était le fait qu’une autre personne connaissait cette vielle chanson blues des années 50. Bordel ils étaient à Tokyo, ce n’est pas courant de trouver quelqu’un qui connaisse encore les paroles de ces vielles musiques, surtout peu connu comme celle qu’il fredonnait. Même lui ne connaissait cette chanson que depuis quelques temps, après un diner d’affaire avec un Afro Américain avec qui il s’était plutôt bien entendu et qui lui avait parlé de toute cette période musicale. Il se dit ainsi que c’était peut-être une bonne occasion de rencontrer quelqu’un avec qui discuter de musique.

« Makes me feel happy to hear him rattle his bones… » Souffla-t-il en se retournant lentement vers la mystérieuse inconnue.

Il n’était pas au bout de ses surprises, une femme habillé de noir se tenait devant lui, elle était élégante et n’avait rien d’une afro américaine. Justement ce qui surprit le plus Piro ce fut la couleur de peau. Toute blanche c’était irréaliste. Elle semblait briller dans le noir. « Got a date to see a ghost » Ces paroles venaient de sonner juste. Un fantôme, peut-être mais pourquoi ne ressentait-il pas de peur ? Ce n’était pas comme si Piro était quelqu’un de très courageux, Il ne savait le dire lui-même ; était-il intrigué, capturé par un sort d’envoutement ou alors était-il tout simplement attiré par la beauté de l’être ivoirin. De plus qu’elle chance, une femme, dire qu’il souhaitait justement changer un peu ses habitudes, il avait devant lui la parfaite occasion pour vivre un simple moment de discussion avec une demoiselle hors du contexte travail. Ce genre d’activité peut vous paraitre totalement ordinaire, mais ce n’était pas le cas de Piro. Habituellement à une heure aussi tardive il serait tranquillement au plus profond d’un rêve ou voir encore au travail, mais jamais ne serait en compagnie d’une femme élégante sans aucun motif relié de prêt ou de loin avec les affaires. Il souhaitait pouvoir profiter de l’instant, c’est ainsi qu’il se décida d’entamer la conversation même s’il avait toujours ce frisson qui lui parcourait le corps. Il ne tenait pas pour acquis la certitude d’être en sécurité ou en danger, mais il avait l’habitude de se montrer fort au travail. Il savait que faire bonne impression était primordiale, il lui sourit donc et s’inclinât.

-Vous m’avez surpris, dit-il. Vous êtes magnifique.

Que se passait-il ? Il ne se souvenait pas, même en cherchant très loin dans sa mémoire, d’être aussi direct avec une femme. Ni un bonsoir, ni un « enchanté », il avait tout simplement besoin de renouveau, de pimenter un peu sa vie. Pourtant il s’était fait une petite répétition avant d’ouvrir la bouche, il prévoyait de se présenter et sortir une phrase en rapport avec la beauté de la nuit présente. Mais au dernier moment, sans cafouillage, les paroles qui en sont sorti représentait tout simplement ce qui lui traversait l’esprit. L’action qu’il entreprit ensuite fut tout aussi étonnante, il retira sa veste et s’approcha de la demoiselle.

-Vous devez avoir froid.

Il s’était fait cette réflexion puisqu’elle n’était vêtu que d’une simple robe noire et qu’il venait à l’instant de ressentir comme une diminution de la température ambiante. De plus le visage pale de la femme le réconfortait dans l’idée qu’elle ne devait pas avoir si chaud que ça. C’est ainsi qu’en s’approchant d’elle,  qu’il put mieux distinguer son visage et remarquer les lèvres rouges, pulpeuse,  comme le sang de la chanteuse de blues qu’il venait de rencontrer ce soir. Son cœur battait vivement et ce de plus en plus vite à mesure qu’il passait sa veste sur les épaules de Linnea.

Magnifique ?
Non ce n’était certainement pas le Créateur. Bien sûr qu’elle est magnifique. Elle est même au-delà de l’entendement. Du moins c’est ce qu’elle croit. Son éducation laisse parfois à désirer, certes mais il aurait été le Créateur il ne l’aurait pas trouvé juste Magnifique. Aussi, au-dessus de son œil droit, un sourcil se redressa. Proche de perdre son sang-froid, elle ne cilla pas, le dévisageant du regard simplement. Etrangement, l’Hématophage se contrôlait assez pour le laisser venir jusqu’à elle sans lui sauter à la gorge. Et puis, ce n’était pas non plus comme ça qu’on l’avait élevé.
Dans son esprit, une pensée perça lentement sa léthargie. La situation demandait peut-être un sourire de sa part... Doucement, les lèvres de la Sangsue s’étirèrent dans un sourire charmant. De quoi le complaire dans son impression. La preuve il s’autorisait même à l’approcher pour passer sa veste par-dessus ses épaules.

Mutine, elle le laissa faire, profitant de la manœuvre pour s’enivrer de son parfum. Sa poitrine se gonfla, ses sens se brouillant dans cette délicieuse inspiration. Il est certain que si Linnea n’avait pas été aussi calme, elle l'aurait certainement déjà violé. A la place de ça, elle se confondit dans un petit sourire, plissant tout juste les yeux alors que ses lèvres restaient inlassablement closes et elle s’inclina. C’est ce que font les Japonais, non ? Quoique, accordons que venant de sa part, cela paraît surtout suspect.

« Merci, c’est gentil. » Lui souffla-t-elle à l’oreille, prête à le mordre et lui distiller son venin.

Néanmoins, encore une fois, elle s'en tint à un comportement des plus exemplaires. La donzelle recula vivement de quelques pas pour éviter tout contact. Etrangement, elle sentait une forme de malaise l'envahir. Elle savait déjà que l’instant serait court, que son moment d’humanité serait de l’ordre de l’éphémère dans son éternité, aussi, elle devait se faire un devoir d'en profiter à sa juste valeur.
Ses prunelles gravirent la sombre silhouette, observèrent le visage de son inconnu. Il y avait bien du Créateur là-dedans. Linnea s’emmitoufla un peu plus dans sa veste, revenant l’air de rien se planter devant lui pour le scruter dans les moindres détails avant de lâcher un drôle de grognement. Plus glam tu meurs. Lentement, elle se hissa sur la pointe des pieds, son visage se trouvant désormais à sa hauteur. Consciencieusement l’Hématophage inspira, se mordant la langue comme si cela saurait faire taire ses ardeurs.

« C’est dommage, tu pues. » Et pouf, elle perdit de sa hauteur en reculant d’un pas.

C’était trop beau pour être vrai. Sa frimousse s’agita encore. Le nez plissé, elle se dandina avant d’ôter la veste en grimaçant. La donzelle avait relevé la même odeur sur Piro. Impérieuse, elle leva un bras pour lui tendre l’objet parfumé de cette horrible odeur de tabac froid.

« C’est du gâchis. »

Le visage fermé, elle attend. Mais pas trop quand même, au risque de lui envoyer la veste au visage. C’est qu’elle est très patiente en plus.

« Merci, c’est gentil. »

Que ces mots ont chamboulé les pensées de notre cher Piro, elle avait une voix surréaliste, se pouvait-il qu’il soit tombé dans une autre dimension ou alors s’était-il endormi sur le banc près de la rivière et tout ceci s’expliquerait simplement par un rêve. Il souhaitait répondre quelque chose d’intelligent mais le fait qu’elle se soit aussi rapprochée de lui ne faisait que le perturber d’avantage. Commençant à avoir de sérieux doutes sur l’authenticité de la scène actuelle, la plus facile des conclusions semblait réellement pencher du côté du songe et ainsi donc, se réconfortant dans cette idée il s’imagina qu’il pourrait  profiter de la situation pour l’amener ou il souhaiterait ; bien sûr c’était son rêve. S’imaginant donc qu’il contrôlait son rêve et par la même occasion la femme devant lui, il voulut la faire se rapprocher d’avantage de ses lèvres. Ce qu’elle fit. Avait-il vraiment un contrôle sur le monde autour de lui. Tout ceci expliquerait pourquoi il avait l’impression d’être un personnage d’une peinture représentant un polar en noir et blanc.

« C’est dommage, tu pues. »

Et bam, comment sortir de son propre rêve. What What, mais qu’est ce qui vient de se passer ?  Le jeune geek venait de redescendre sur terre instantanément tellement le choque d’entendre d’une voix sèche cette phrase l’avait surpris. Clairement dans l’image qu’il s’était fait de la toile en noir et blanc, on ne l’attaquerait pas de front et de cette façon. Quel était le problème, sentait –il si mauvais ? Pourtant depuis qu’il avait son entreprise il prenait soin de lui ce n’était pas comme si c’était l’ancien Piro de 19 ans qui s’enfermait dans sa chambre qui ne se souciait que peu de savoir s’il était propre sur lui ou non. Il mit automatiquement son cerveau en mode réflexion et analysa toute la situation à une vitesse folle  avant de trouver une réponse possible au problème posé. Pour rappel, Piro est con, mais pas bête, s’il a bien quelque chose pour lui c’est son mode cerveau en éruption. La réponse qu’il retint ; l’odeur de la cigarette. Hum il se sentit un peu honteux tout d’un coup. Etant plus jeune,  il s’était promis de ne jamais se mettre à fumer mais chemin faisant pour gagner certains contrat il dû se prostituer et accepter un cigare ou l’autre pour ne pas paraitre impoli auprès de ses futurs collaborateurs. Depuis il avait trouvé en la cigarette un bon antistress. Mais elle avait raison, ce n’était vraiment pas digne de se présenter à une femme alors qu’on empeste le tabac. Il ne savait plus quoi dire et se sentait gêné mais c’est alors que Linnea enfonça le clou encore plus profondément.

« C’est du gâchis. » dit-elle en lui tendant son bras pour lui rendre sa veste.

Oi, C’est bon cette fois il allait redevenir le Piro habituel qui ne sait pas se tenir devant une femme sans savoir quoi faire et en s’enfermant de plus en plus dans sa timidité.  « Mais bordel »,   se disait-il en voyant la veste tendu dans sa direction, « suis-je vraiment un looser » ?  C’était une soirée spéciale, il n’avait pas pris la même voie que d’habitude, il avait décidé que pour la soirée que si le Piro habituel choisirait une direction à un croisement qu’il prendrait une autre. Il se redressa et la regardait à présent dans les yeux sans relâcher son regard pendant quelques instants avant d’attraper le bras tendu par le poignet et de tirer la mystérieuse jeune femme par le bras.

Vient.

En la conduisant par le bras sans pour autant forcer, il l’amena quelques mètres plus loin à l’endroit où il s’était reposé auparavant devant la rivière. Ensuite en prenant bien soin de remettre sa veste, il lâcha son énigmatique partenaire, se dirigeât vers le bord de l’eau et plongea la tête la première dans la rivière glaciale. Cette épopée l’ayant conduit dans l’eau, revigora Piro. En remontant à la surface il se mit à rire avant de se retourner vers la blancheur incarnée, sourire  et pour finalement lui déclarer.

Ainsi, j’espère que l’odeur ne te dérangera plus.

Elle avait pourtant bien tout du rêve. Son existence même est une hérésie dans les yeux des cartésiens. Pourtant la belle et douce chimère se tient droite, aussi froide que vivante, sous les yeux de Piro. D’ailleurs n’a-t-il pas sentit le froid transpercer son derme à son contact ? Il lui faut bien quelques imperfections, histoire de rendre le tableau plus beau encore. Linnea resta silencieuse, bien que surprise par l’initiative de son inconnu. Ca ne devait pas se passer ainsi. Tout son être se mit à hurler violemment devant l’imprudence qu’il commettait. Comment un humain pouvait se permettre de la toucher sans même qu’elle ne l’ait décidé, ni même autorisé ? Dans son petit être, son esprit venait d’entrer en conflit avec on ne sait trop quoi. Un penchant sans doute plus humain de sa personnalité qu’on aurait pu le croire.
Docilement, la petite Sangsue le suivit, se laissa guider sans s’opposer à la manœuvre. A quoi bon ? Crier au viol ? Elle en serait capable mais l’idée ne lui a toujours pas traversé l’esprit. Se dégager sèchement pour lui apprendre qu’on ne traite pas ainsi une demoiselle ? Etrangement, elle n’en a pas plus envie.
Maligne, tout au fond de son ventre la curiosité la tiraillait et prit le dessus sur son instinct. Il fallait la jouer fine, laisser le sortilège agir et il tomberait à ses pieds, comme tous les autres. Forte de cette dernière impression, Linnea montra même un semblant d’enthousiasme, un sourire chassant l’expression surprise qui avait prit possession du minois laiteux.

Arrivant non loin du cours d’eau, il la relâcha enfin et elle put jouer les petites humaines fragiles et farouches. Dans une moue, elle frotta vigoureusement son poignet en poussant un soupire proche du gémissement agonisant.

« Non mais ça va pas ? » S’offusqua la donzelle en le regardant se jeter littéralement dans la flotte.

Elle haussa un sourcil, la bouche entrouverte une main se levant dans les airs comme si elle allait l’appeler avant de retomber mollement contre sa cuisse dans un soupire blasé.

« Hm, c’est quoi ça ? Un nouveau prototype attestant de la défaillance de l’humanité ? » Marmona-t-elle en croisant ensuite les bras sous sa poitrine.

Et à peine la tête du jeune homme fut-elle visible qu’elle reprit son air doucereux et un tantinet niais.

« Ainsi, j’espère que l’odeur ne te dérangera plus. »

Gardant pour l’heure le silence, elle inspira doucement sans le lâcher du regard. De sa place en tout cas, elle ne percevait plus l’odeur du tabac froid ou alors son odorat etait trop parasité par les effluves boisées des environs. A petits pas, elle vint jusqu’à la berge et s’agenouilla. N’allons lui donner prétexte à regarder ailleurs non plus. Une nouvelle fois elle inspira ses mains s’agrippant à la verdure pour qu’elle puisse se pencher sans prendre le risque de finir dans l’eau.

« Maintenant ça sent le tabac froid humide. » Releva l'Hématophage tout aussi naturelle.

Est-ce qu’au moins cela existe ? Pourtant, dans sa bouche, ça sonne terriblement vrai. A croire que le charisme vampirique attaque la raison à tous les niveaux.
Linnea se redressa en reculant de quelques pas avant de lui resservir son visage outré.

« Et maintenant je suis censée être terriblement gênée parce que, intelligent que tu es, tu vas m’attraper la crève et que je ne pourrais pas… »

Elle plissa les yeux en croisant à nouveau ses bras sous sa poitrine. Non, elle n’allait quand même pas lâcher le morceau aussitôt ? Pourtant ses mains se crispèrent sur ses bras nus, déjà énervée de se laisser aller aussi bêtement à penser tout haut. Pourquoi a-t-il fallut qu’il lui fasse penser au Créateur, pourquoi ?
Au prise de sa conscience et de l’irrésistible joute verbale à laquelle toutes deux s’adonnaient, Linnea pivota pour lui tourner le dos. Là, à la dérobée, elle s’autorisa une grimace et un soupire.

« Allez Robin des bois, finit le bain de minuit. On a inventé la douche entre temps. »

« Maintenant ça sent le tabac froid humide. » Et bien décidément elle continuait de le descendre d’un ton sarcastique. Dire qu’il n’avait pas du tout prit la situation au sérieux et qu’il essayait justement de ponctuer leur rencontrer avec une petite touche humour. La froideur des paroles de Linnea n’avaient par contre aucune commune mesure avec celle de la rivière. Il avait l’impression que l’eau le poignardait de tous les côtés et n’allait surement pas rester beaucoup plus longtemps nageant ainsi comme un canard solitaire dans cette eau glaciale. Oh merde se disait-il, son tout nouveau Smartphone dans sa poche, sa Nintendo 3DS tout juste sorti dans l’autre, une tablette graphique caché dans son caleçon  et le poireau qu’il avait volé au restaurant qui se trouvait dans sa manche… Tous foutu… Allait-il finir sa vie de cette façon, toujours le même gaffeur qui n’en manque pas une pour se faire remarquer. « Et maintenant je suis censée être terriblement gênée parce que, intelligent que tu es, tu vas m’attraper la crève et que je ne pourrais pas… » Qu’avait-elle voulu dire par cette phrase, il ne savait pas et n’y prêtait pas vraiment attention car il était bien plus concentrer à tenter de rejoindre la berge et sortir enfin de l’eau. Arrivant prêt du bord la demoiselle se retourna et soupira une phrase à propos d’un Robin des douches. Encore une fois, il n’avait pas vraiment tout compris car le vent et le bruit de l’eau masquait une grande partie des mots qu’il percevait.  De suite, il se hissa hors de l’eau et rejoignit sa partenaire. -   Enchanté, moi c’est Piro. J’avoue que l’odeur n’est pas vraiment partie.   Il avait en tête l’idée de la douche à présent, il se demandait s’il ne valait pas mieux rentrer vite fait chez lui, prendre une douche rapidos et rejoindre à nouveau la jeune femme. Mais il se faisait tard et est-ce qu’elle allait accepter d’attendre le jeune homme et puis pour faire quoi ? Certains jeux vidéo, tel que Magicka, lui sont alors passé par la tête. Bah une femme ça ne devait pas être si différent d’un homme ; un petit jeu vidéo en multi il n’y avait rien de mieux pour finir une soirée. -   Dit moi qu’est-ce que tu fais aussi tard dans les rues ?  Si ce n’est pas indiscret bien évidement… Il venait d’oublier le vouvoiement, il se sentait bien plus à l’aise qu’au début et c’était à présent comme s’il la connaissait depuis un moment déjà. Puis, elle avait un peu le visage de son petit chihuahua, vous savez le genre de regard sérieux mais au même temps tout mimi et  avec lequel on s’attend à ce que la langue sorte à tout moment pour pendouiller la bouche grande ouverte. Tout d’un coup notre jeune geek se senti à nouveau en confiance et dit. -   Est-ce qu’une jolie fille comme toi est célibataire ? Encore une fois il ne savait vraiment pas pourquoi il disait ce genre de choses, mais l’idée d’avoir une si jolie demoiselle, no pixel, à son bras ne lui dérangeais pas le moins du monde. -   Hum tu n’es pas obligé de répondre. Boh, je pense que je ne vais pas tarder à aller prendre une douche, je commence à avoir particulièrement froid. Mon appartement n’es pas très loin, tu veux venir ? Je t’offre avec plaisir un café ou un thé pour te réchauffer. Bon c’était un peu déplacé comme demande, on aurait dit un vieux pervers violeur qui essayait de s’attaquer à une nouvelle proie. Mais finalement pourquoi pas. Il n’avait pas vraiment de mauvaises pensées, de toute façon Piro en était incapable, il souhaitait juste ne plus avoir l’air d’un boulet trempé comme devrait l’être Mario™ alors qu’il passe sa vie dans des tuyaux. De plus il s’inquiétait vraiment de la santé de la demoiselle, il l’avait touché en l’emmenant dans le coin et avait remarqué sa peau glaciale. Après un gloussement, il jetait un vif regard autour de lui et s’étonnait encore de ne voir personne dans les rues. L’ambiance glauque présente autour des deux protagonistes rendait Piro mal à l’aise, il se mit même à imaginer qu’un vampire pouvait apparaitre soudainement et s’attaquer à eux. Son imagination débordante finalement n’était pas si éloigné de la vérité

Les convenances humaines ont ce petit côté attendrissant qui n’avait jusqu’à présent jamais laissé Linnea de marbre. Jusqu’à présent seulement. Ses lèvres s’étirèrent dans un petit sourire narquois alors qu’elle gardait une position statique dans un léger déhanché. A nouveau face à lui, il fallait néanmoins bien concéder que toute la mise en scène de Piro prêtait à sourire, à défaut de la charmer.

« Hm, Linnea. » Souffla-t-elle sans vouloir le couper dans sa réflexion.

Elle hésita même à lui tendre une main et au dernier moment l’Hématophage se ravisa. Ses bras retombèrent mollement contre ses cuisses.

« Dit moi qu’est-ce que tu fais aussi tard dans les rues ?  Si ce n’est pas indiscret bien évidement…
- Je euh…
- Est-ce qu’une jolie fille comme toi est célibataire ?
- Eh bien, je…
- Hum tu n’es pas obligé de répondre. Boh, je pense que je ne vais pas tarder à aller prendre une douche, je commence à avoir particulièrement froid. Mon appartement n’es pas très loin, tu veux venir ? Je t’offre avec plaisir un café ou un thé pour te réchauffer. »

Il se taisait enfin et Linnea voyait déjà sa jauge de patience en chute libre. Elle ferma les yeux en expirant lentement comme si cela l’aiderait à apaiser les pulsions qui la taquinaient sévèrement. Quand la nourriture parle, ce n’est jamais bon signe. Dans un total contrôle, les deux billes azurées retournèrent embrasser l’image du jeune homme glissant sur sa gorge avant d’aller sagement s’ancrer dans ses prunelles et se confondre dans un nouveau sourire charmant.

« Bien, j’allais donc dire que j’allais aussi rentrer chez moi. Je viens d’emménager dans le coin. Ouais, je viens de me séparer de mon compagnon du coup, j’avais besoin d’en parler avec une amie, j'ai passé la soirée avec elle. D’où le fait que je me promène toute seule en pleine nuit. Wouhou. »

Elle termina son mensonge dans un petit rire nerveux toujours en train d’imiter un hypothétique fantôme avant de se demander si elle n’en faisait un pas un peu trop. Il faut dire que parler avec un homme est assez nouveau pour elle. En général, elle se contente de sourire, mordre, embrasser, gémir, et goûter l’extase. A condition de tomber sur un bout de viande compétent. Cela va sans dire. Et sans grande surprise son esprit dérivait déjà sur des pensées à l’obscénité délicieuse.
Au moins désormais il avait un personnage plus ou moins posé, une humaine toute nouvelle dans le coin, célibataire et le cœur brisé... Y a qu'à profiter ! Même si l’agencement des informations n’était pas des plus naturel, ça ne perturbait pas plus la Vampire. Et puis on ne lui demandait pas non plus de sonder ses propos pour en déduire le taux de véracité.
Revenant à la réalité elle secoua la tête en relançant, l’air de rien, la marche pour s’éloigner du cours d’eau. Certes, elle ne sait pas encore où il habite mais elle n’est non plus dénuée de toute logique.

« Et toi ? Tu es allé traîner dans un lieu glauque pour avoir un aperçu de ce que veut dire être débauché ? »

Le bleu de ses yeux s’était intensifié comme si c’était possible alors que les iris de la demoiselle s’accordèrent à un furtif coup d’œil, cherchant peut-être à lui voler quelques secondes d’outrage, puis elle secoua vivement les mains dans les airs en accélérant le pas.

« Hmnan. Je dis n’importe quoi. Tu te sentirais complètement perdu dans ce genre d’univers. D’ailleurs, es-tu vierge ? »

Elle se planta devant lui, s’arrêtant net aussi sérieuse que si elle lui annonçait être un vampire.

« Pas le signe hein, sexuellement parlant, bien évidemment. » Se sentit-elle obligée d’ajouter, persuadée qu’il soit aussi naïf.

Oui c'est une information capitale.

Une fois l’invitation à l’accompagné chez lui proposée, il ne fallut pas plus de 2 secondes avant qu’elle n’ouvre la bouche pour s’exprimer par rapport aux circonstances qui ont rendu le contexte de cette rencontre possible. Selon ses propos elle semblait avoir été parachutée par son intime pote sur l’appartement d’une de ces alliées. Elles auraient, entre guillemets, gentiment discuté lors de leur soirée pyjama et puis elle se serait rendue seules dans les rues car elle n’aurait pas apprécié la tournure prise d’une certaine partie de Monopoly. Et bien tout s’expliquait enfin. Piro n’avait pas manqué de remarquer le petit sourire qui s’installait sur les Linnea’s lips. Même l’intonation de sa voix était fausse et ne correspondait pas aux propos suggéré. Mais le petit « Wouhou » en fin de phrase ne lui laissait non plus aucun doute sur le taux de turlupinade de celle-ci. Il avait clairement remarqué qu’il passait pour un jobard au prêt du vampire, mais ce n’était pas suffisant pour se laisser démoraliser. « Et toi ? Tu es allé traîner dans un lieu glauque pour avoir un aperçu de ce que veut dire être débauché ? » La jeune femme c’était mise à marcher dans la direction opposé à la rivière -bien évidement- et Piro, toujours trempé de la tête aux pieds, la suivit. Gardant le silence il réfléchissait pourtant en essayant de trouver quelques mots à prononcer suite à la tirade qui lui était tombé dessus. C’est vrai que du point de vue d’une parfaite inconnue, voir un homme, habillé tel un pingouin, trainer dans les ruelles sombres avait de quoi faire réfléchir. Il voulait pas paraitre coupable de quoi que ce soit, il savait très bien que le quartier chaud n’était pas très loin et en plus dans la direction qu’il suivait. Il imaginait déjà le regard arbitraire de Linnea se poser sur lui, le condamnant de n’être qu’un vieux pervers qui allait voir les filles de joies après son boulot. Ou pire, un yakuza quelconque espérant le passage d’une demoiselle pour l’emmener de force dans une fourgonnette. Toutes ces réflexions le perturbaient beaucoup, il essayait de passer en mode « cerveau en éruption » mais il n’y arrivait pas. Il cherchait désespérément un moyen d’arrêter de s’imaginer ce que l’autre pouvait penser de lui. -   Je euh… « Hmnan. Je dis n’importe quoi. Tu te sentirais complètement perdu dans ce genre d’univers. D’ailleurs, es-tu vierge ? » -   Eh bien, je… Non mais elle n’arrêtait plus de parler tout d’un coup. Le cerveau de Piro ramait et ne tournait plus que sur un seul core, elle devait lui laisser le temps de redescendre sur terre car en ce moment il était encore dans son trip Yakuza . Une fois arrivé aux mots qu’elle venait de prononcé, de grands yeux d’étonnement sont apparu sur son visage. Il avait déjà remarqué qu’elle avait par moment des réactions des plus bizarres mais il ne pouvait s’attendre une question comme celle-ci.  En plus il se senti un peu offensé aussi par le fait qu’elle ne puisse le visualiser dans un univers de débauche. Encore une fois c’était contradictoire, en effet quelque instants auparavant, il souhaitait justement qu’elle ne s’imagine pas de mauvaises choses sur lui. Mais là c’était vraiment le considérer comme un enfant. « Pas le signe hein, sexuellement parlant, bien évidemment. » Alors là c’était la goute qui faisait déborder le vase, ok il prenait ça comme si c’était un petit jeu entre eux, mais n’allait pas tarder à lui montrer qu’il n’était pas si naïf qu’il n’en avait l’air. Pourquoi l’imaginer puceau aussi ? Piro n’était pas moche, il était même plutôt élégant, il donnait aussi l’impression d’avoir confiance en lui. Non, il n’allait pas se laisser dominer par une femme qui venait tout juste de tomber d’un avion. Il l’observa dans les yeux pendant quelques secondes. La dernière relation stable de Piro ne datait pas d’hier c’est vrai, mais il lui arrivait aussi de s’adonner aux plaisirs de la chair. En effet, sa première petite amie l’avait rendu plus que joueur dans ce domaine. Mais il y avait surtout quelqu’un avec qui il avait tout appris, une gothique dont il lui arrive encore aujourd’hui de penser, ensemble ils avaient beaucoup expérimenté, il en était fou amoureux mais au final ils n’ont pas pris le même chemin. Ne la lâchant pas du regard le vampire, il répondit tout simplement. Non. Le froid n’était plus supportable, il devait s’empresser d’enlever ses vêtements mouillés ou alors la pneumonie ne tarderait pas à lui tomber dessus. La situation l’embêtait car à présent il voulait faire son badboy. Il passa une main dans ses cheveux,  les tira vers l’arrière, se redressa et dit. Ce genre d’univers est mon quotidien. Et toi chérie, es-tu vierge ? Quel abus, « ce genre d’univers est mon quotidien », si ce n’était pas un moyen de s’enfoncer plus qu’il ne l’était, moi en tant que narrateur je ne saurais vous le dire. Pauvre enfant. Il lui avait par ailleurs retourné la question, même s’il s’attendait à une réponse négative. Le fait qu’elle lui tienne tête ainsi rendait la situation comique mais aussi rendait Linnea de plus en plus intéressante aux yeux de Piro. Son genre de femme avait du caractère et ne se laissait pas faire ; les petites écervelés c’était amusant, mais ça ne tenait jamais sur la durée. Pourquoi cette question ? Dit-il en s’approchant de son visage jusqu’au moment où celle-ci se trouvait assez proche de lui pour qu’il puisse sentir le souffle de Linnea sur son visage. Il lui prit la main et dit; Voudrais-tu jouer avec moi ?

« Ce genre d’univers est mon quotidien. Et toi chérie, es-tu vierge ? »

Voilà qui devenait on ne peut plus intéressant. Bien qu’il fasse un tantinet proxénète pour le coup. Une lueur maligne brilla l’espace de quelques secondes dans les yeux de l’irréelle créature. Sait-il seulement avec qui il discute. Tout son être se réjouissait à l’idée de tomber sur un petit téméraire prétentieux.

« Pourquoi cette question ? Voudrais-tu jouer avec moi ? »

Il s’était montré de plus en plus arrogant, s’autorisant même à franchir le cercle indicible qui délimitait son apparente humanité, aussi fausse soit-elle. La machine se mit en route dans un naturel déroutant et l’Hématophage retira sèchement sa main. Elle se mit à sourire, ses lèvres s’ouvrant sur la dentition outrageusement carnassière. La Sangsue jubilait presque devant pareille situation.

« Parfait. Si quelqu’un comme toi disparaît de la société personne ne le remarqua. » Lui souffla-t-elle alors qu’il se trouvait toujours aussi proche de son visage avant de claquer des dents, comme si elle avait eu l'intention de le mordre. « La qualité reste à définir cependant. »

Le sourire de la belle disparut et les prunelles électriques de Linnea allèrent trouver du réconfort dans la vision de son cou dégagé. Elle fit la fine bouche, son index allant relever le menton du jeune homme comme un ordre indiscutable. Elle n’oserait pas le mettre en pièce tout de même ? Silencieuse, elle continua son inspection. Deux doigts de son autre main se posèrent sur la peau de son cou, présageant déjà le froid d’une morsure à venir. Sous ses doigts elle put sentir le sang pulser au rythme de son palpitant, cherchant presque à y percevoir une accélération de ses battements. Après tout, il ne pouvait pas rester de marbre devant le spectacle dont elle avait décrété qu’il ne serait que le spectateur.

« Avec un peu de chance tu as déjà croisé quelqu’un comme moi, hm ? »

Il va sans dire que la question n'attend pas de réponse. Et il n'est pas non plus dit qu'elle l'écouterait s'il lui prenait l'envie de lui en donner une. Mais alors que les ongles de ses doigts glissaient sur sa peau, l’éraflant par moment, son regard revint trouver celui de Piro. Aussi mauvaise soit-elle, on ne pouvait imaginer plus beau bourreau, un être aussi finement pensé pour soumettre l’Homme à tous ses caprices. Toujours aussi sérieuse dans son étude, elle recula d’un pas, retirant sa main de son cou dans une petite moue contrainte. Tout en le dévisageant, elle porta ses doigts jusqu’à ses lèvres. Ses lippes s’entrouvrirent pour laisser filer sa langue qui vint aussitôt recueillir les fines particules d’hémoglobine sur le bout de ses doigts. Au-dessus de son œil droit, un sourcil se redressa laissant entrevoir une surprise de sa part.
Linnea finit par secouer sa main, chassant par la même occasion son dernier masque et laisser reparaître sa délicate arrogance.

« En fait, il serait plus juste de demander si toi, tu veux jouer avec moi. »

Si tôt dit que la seconde d’après, l’irréelle vint se mêler à la réalité de Piro et créer sa brèche dans le temps. Elle se trouvait désormais contre lui, sa poitrine se gonflant doucement contre le torse du jeune homme alors qu'elle se ravissait de son odeur. Le désir fourmillait déjà au bout de ses doigts et ceux-ci allèrent trouver la nuque du jeune homme dans un soupire qui lui aurait brûler les lèvres si elle avait été encore humaine.

« N’est-ce pas ? » Murmura la jeune femme en déposant un baiser sur les lèvres de Piro. Et pour s’assurer qu’il comprenne parfaitement les règles du jeu, une canine perfora sa lippe inférieure. Miam.

Le grand jeu venait enfin de commencer, le vampire n’avait que trop observé le spécimen et il était temps de passer à l’attaque. Ce fut ce que fit Linnea en rétorquant une phrase des plus révélatrices. Mais la disparition d’un Piro de la société n’allait pas etre aussi discret qu’elle ne se l’imaginait. Et oui en effet, elle semblait penser qu’après toutes les âneries qu’il avait prononcées qu’il ne devait être qu’un simple rebus de la société. Il en était persuadé après avoir entendu le sujet de la suite des mots sortant de sa bouche.  Mais pourquoi cette femme jouait ainsi avec lui, c’était exactement la question qu’il se posait, était-ce une tueuse en série ou alors juste une blague de mauvais gout. La réponse aurait été éclaircie de suite s’il avait remarqué la dentition vampirique de l’hématophage quand celle-ci se mit à sourire après avoir retiré sa main de celle de Piro, cependant son regard avait été attiré par le geste brusque qu’elle venait d’exécuter à fin de se libérer son emprise. Il n’avait toujours pas de réponse à ce moment précis, mais les deux doigts parcourant sa nuque le firent frissonner. Elle lui avait aussi remonté son menton pour mieux distinguer son cou. Mais ce qui choquait le plus Piro, ce fut l’évanouissement du sourire qu’elle portait aux lèvres. Même s’il prenait plaisir à sentir les doigts parcourir sa peau, il n’arrêtait pas de penser à ce qu’elle avait voulu dire. Il ne comprenait pas non plus comment elle pourrait le faire disparaitre vu qu’elle semblait ne porter aucune arme sur elle. La vampire n’arrêtait pas de l’inspecter tandis que lui cherchait toujours une logique aux évènements présents. L’inconnue sur laquelle il calait était la raison, le pourquoi. Ainsi il hésitait, elle avait l’air sérieuse et son regard semblait transpercer l’âme du jeune geek. Mais d’un autre coté tout, ceci était dénué de sens et la blague douteuse se frayait la première place dans le top des idées saugrenues qui expliquerait la situation. Il ne sentait pas pour autant confortable, une goutte ou deux de transpiration se mélangèrent ainsi à l’eau qui coulait encore sur lui. Un pas ou deux en arrière n’auraient pas été un lux, mais il se tenait droit comme paralyser portant toute son attention sur les prochains mots que prononcerait le vampire.

Quelqu’un comme elle ? Une joueuse, une tueuse en série, une nymphomane ? Il avait besoin de plus d’indication pour la cataloguer quelque part. Il avait du mal à se concentrer en sentant les ongles sur sa peau le griffer petit à petit. Suite à ça, elle fit un pas en arrière et porta ses doigts sensuellement aux lèvres. En sortant sa langue pour venir lécher lentement le bout de ses doigts, un petit sourire discret apparu sur un coté des lèvres de la sangsue, laissant apparaitre une canine plus que développée. Il était là, juste devant lui, le dernier indice qu’il cherchait. Le puzzle se mit en place mécaniquement et sa réaction, de s’identifier face à une vraie vampire, fut de se retrouver paralyser d’avantage qu’il ne l’était. Voilà donc l’explication qu’il attendait, il avait porté son attention à la recherche d’une arme, mais n’avait pas pris en compte que l’arme pouvait être tout un corps. Le sens des mots de Linnea prenait enfin toute une réelle signification. Etonné mais pas effrayé, il souhaitait répondre à sa question. En effet Piro avait déjà rencontré un être de la même espèce quelques années auparavant. Il avait alors passé une nuit des plus torrides en sa compagnie et avait découvert une nouvelle façon de s’amuser à coup de morsures et de sang. Mais il retenait surtout qu’il avait évité la mort sur le fil du rasoir. L’air ambiant c’était encore plus refroidit et son cœur accéléré. On ne jouait pas ainsi avec un vampire sans prendre de grands risques. Il sentait que son heure était venu. Oui cette fois, il s’était fourré dans de beaux draps et ne s’imaginait pas arriver jusqu’au lever du soleil.

D’une voix séduisante elle lui posa une question, qui encore une fois allait tourmenter les méandres de ses méninges. Ne le laissant pas réfléchir le vampire vint se coller à son torse avant de l’embrasser brusquement sur les lèvres tout en transperçant la lèvre inférieur et faisant couler son sang. L’adrénaline parcourant le corps fit rapidement accélérer sa pression sanguine, la peur avait fait place à l’excitation, il avait appris à aimer ces petits jeux lors de sa première rencontre avec un vampire. Il fermait les yeux en profitant des lèvres pulpeuses qui lui avaient été offerte. Après s’être lentement retiré de ces alléchantes lippes, les questions sans réponse lui retombèrent sur le crane. Pourquoi était-il encore vivant alors qu’il avait été plutôt maladroit avec elle ? Comment se sortir vivant  de cette situation? D’ailleurs, il ne savait pas encore quoi répondre à la question en suspens. Car selon ses calculs, dans aucun de scenarios qu’il pouvait s’imaginer, vivant il  finirait. Même en ne sachant toujours pas ce qui allait se passer, l’envie d’embrasser à nouveau sa partenaire refit rapidement surface. Il se pencha donc sur elle et déposa ses lèvres saignantes sur siennes.

- Mes choix sont plutôt simple, soit je meurs, soit je joue avec toi avant de mourir, dit-il en retirant ses lèvres de la vampire.

Etrangement la mort ne lui faisait pas peur, sur le moment il souhaitait juste profiter des derniers moments dont il allait pouvoir jouir. Il connaissait les vampires et pouvait affirmer avec la quasi-certitude qu’ils aimaient jouer avec leurs proies avant de les tuer. Et ce temps qui allait lui être imparti, s’il pouvait choisir ce qu’il en ferait, serait de pouvoir profiter du corps de la femme en face de lui. L’attirance qu’il avait pour cette dernière était indescriptible. Cependant même s’il s’apprêtait à bientôt mourir, il ne souhaitait pas tomber dans le coma suite à une pneumonie. Les vêtements trempés lui glaçaient le sang. Il se força à reculer d’un pas sans pour autant fuir le vampire et se mit à enlever son blouson. Il ne tardait pas ensuite à déboutonner sa chemise avant de la jeter au sol rejoindre sa veste. Il se tenait à présent droit, torse nue, mais au moins ainsi le froid ambiant de la nuit, lui semblait moins dérangeant qu’auparavant. Encore une fois il s’approcha d’elle et cette fois se colla lui-même contre sa poitrine. Aussitôt son bras passait derrière le dos du vampire et la ramenait contre lui.

- Je veux jouer. Et il se vînt mordre les lèvres de Linnea jusqu’au sang.

La séduction est à concevoir comme un jeu de pouvoir. Qui aura l’ascendant sur l’autre… Linnea a toujours été éduqué dans l’optique de servir le pouvoir, d’en être un accessoire indiscutable jusqu’à le désirer à tel point d’en devenir la Maîtresse incontestable. Le Créateur n’a-t-il pas cédé à ses caprices incessants ? N’a-t-il pas fait d’elle cette ode indécente au stupre ? Pire encore, il lui a appris à toujours garder son rôle de prédatrice. Aussi le baiser qu’elle lui avait donné, était parfaitement pensé. Une dose d’espoir, une pincée de désir et une grosse louche d’égoïsme. Dans un petit soupire ravi, elle put goûter véritablement le sang du jeune homme. Mais si la première fois il lui avait paru aussi prometteur que l’étreinte qu’elle s’apprêtait à lui offrir, elle n’avait pas pris en compte les nouveaux éléments indescriptibles que son être savait reconnaître.
Il était joueur, naïvement joueur et la fatalité seule, savait comme Linnea était inconstante, comme il suffisait d’un rien pour qu’elle ne change du tout au tout. Et chanceux qu’il était, il aurait droit à ce genre de renversement de situation.

L’embrasser de son propre chef était déjà une belle pirouette devant son arrogance, mais la mordre... Même en la gardant contre lui, il sentirait bientôt la froide entité s’agiter. A l’intérieur la bête se mit à hurler incapable de supporter qu’on l’asservisse et les yeux de Linnea prirent le reflet de la fureur dévastatrice. Sa main fila sous le cou de l’importun. Sans la moindre complaisance ses ongles s’enfoncèrent dans la chair, la déchirant et ses doigts se pressèrent contre sa gorge. Les lèvres ourlées sur la dentition carnassière, elle exigea sa liberté raffermissant davantage sa prise.
Il voulait jouer, n’est-ce pas ? Il était servi. Il avait désormais droit à la plus détestable des furies. Mauvaise, elle le jaugea, se gardant bien de le lâcher du regard alors que son autre main, ses doigts vinrent palper la lèvre blessée. L’odeur qui remonta jusqu’à ses narines la fit un peu plus déraper et du plus profond de sa poitrine un grognement remonta alors qu’elle lui montrait le liquide visqueux qui maculait ses doigts neigeux.

« 人道，你想殇吗  ?  我应该戮你 ! » Lâcha-t-elle à son encontre.

Oui, il fallait désormais qu’il se contente de l’entendre déblatérer dans une autre langue. Langue à laquelle la demoiselle devait être intimement liée pour en arriver à s’exprimer dans celle-ci, de loin dépassait par la colère qui coulait dans ses veines. Son affront ne pouvait pas rester impuni. Pourtant la main de Linnea qui jusqu’à présent étreignait la gorge de Piro se retira pour venir masser sa tempe et l’autre main, celle maculée de son propre sang retomba mollement contre sa cuisse. Elle soupira en fermant les yeux avant de faire l’effort de le regarder une nouvelle fois.
Et la seconde d’après elle fut contre lui. Une main contre son torse nu, l’autre, les ongles plantés dans son épaule et ses lèvres toutes proches de son cou.

« 你想殇吗 ?  »

Cette fois-ci, elle avait soigneusement pris le temps d’espacer chaque mot les uns des autres et retrouva sa voix mielleuse. Question qui, même sans la barrière de la langue n’attendait aucune réponse puisqu’elle mordit dans sa chair. Les crocs perforèrent le derme sans qu’elle n’en éprouve l’euphorie habituelle. Ainsi, encore plus frustrée, elle retira ses canines avant de les replonger dans la blessure plus sèchement encore. Le sang jaillit dans sa gorge et la demoiselle se contenta d’une simple gorgée retirant déjà ses lippes de l’odieuse petite créature. Tel le fantôme de sa chanson, elle se retira, la tête penchée sur le côté, son sang perlant sur ses lèvres avant qu’une goutte n’ose descendre sur son menton. La main qui gisait sur son torse s’envola jusque derrière sa nuque se nichant dans ses cheveux pour le contraindre à renverser sa tête en arrière et les lippes de l’Hématophage se posèrent contre celle de Piro. Le baiser s’enflamma rapidement pour l’amener à entrouvrir ses lèvres et une fois fait son visage s’écarta de celui du jeune homme. On pouvait très clairement voir le sang de Piro s’évader d’entre les lèvres du Vampire pour rejoindre celles de son propriètaire.

« Je n’ai pas même besoin de te tuer, je suis presque certaine que tu m’écouteras, hm ? »

Impérieuse, Blanche Neige s’écarta non sans laisser la main qui trônait dans sa nuque passer par-dessus son épaule, puis son torse qu’elle égratigna avant de rejoindre sa hanche.

Il venait de parier sur la mauvaise méthode, après sa morsure sur les lèvres du vampire, celui-ci sorti de ses gonds et s’attaquait directement à sa gorge, enfonçant ses ongles et blessant dangereusement Piro.  Elle se mit à parler en Chinois, une langue qu’il comprenait à moitié car il avait déjà eu affaire avec à de nombreux businessmen chinois. Il étouffait, n’arrivait plus à respirer, la situation était de plus en plus critique. Elle lui demandait par deux fois s’il voulait mourir, mais il n’arrivait pas à répondre. Peut-être avait-il été trop confiant car à présent, il s’inquiétait de son sort.  Ensuite les lèvres du vampire s’approchèrent mortellement de son cou et sans détour les viles canines s’enfoncèrent dans sa chair.  A deux reprises, elle suça son sang. Il appréciait énormément cette sensation, elle lui procurait un plaisir intense comme lors qu’il pouvait atteindre le nirvana lors d’un ébat sexuel. Cependant, même s’il était au bord de la jouissance, ces deux morsures bien trop profondes et n’allaient clairement pas arranger le fait qu’il titubait déjà à cause du froid qui régnait. Tel une vraie sadique elle approcha ses lèvres pleines du sang de Piro et vînt le verser dans la bouche du jeune geek lors d’un fougueux baiser. Le lâchant en fin, le garçon se mit à tituber de plus belle.

- .. Que puis-je faire pour que tu me laisse la vie sauf. Il ne tenait presque plus sur ses pieds.

Il avait perdu le match, il n’allait pas pouvoir tenir très longtemps. Il ne fallut que quelques secondes avant qu’il ne s’effondre à terre. Il était encore conscient, mais la force de tenir debout n’y était plus... Il avait perdu beaucoup de sang et le fait d’être trempé n’arrangeait en rien la situation.

-   Je vais devoir rentrer à la maison pour me mettre dans un bain chaud… qu’il disait alors qu’il était encore à terre.

Sur ce coup, c’était plutôt pathétique, mais il n’avait vraiment aucune chance de gagner, il se mit à ramper sur le sol glacial pour atteindre le banc qui n’était pas loin et ainsi pouvoir trouver un appui pour s’aider à se relever. Il ne regardait plus du tout en direction de la vampire, son unique but c’était de se dépêcher d’atteindre la banquette qui se trouvait à cinq mètres de lui. Mais même s’il ne jetait pas de regard en arrière,  il savait très bien que son ennemi n’allait surement pas le laisser sans aller ainsi. Une fois arrivé prêt du banc et à nouveau debout et se remit en marche en direction de son appartement en  compressant ses plaies s’il ne voulait pas se vider totalement de son sang.

Quelle fâcheuse tendance à se mettre dans de sales draps. Décidément, le jeu ne sera que de courte durée si la donzelle ne dompte pas ses ardeurs au plus vite. D’ailleurs la voilà qui l’observe scrupuleusement, ses doigts tapotant en rythme sa lèvre inférieure, profitant par la même occasion d’essayer cette lippe profanée par l’hémoglobine du jeune homme. C’est si joli, ce rouge sombre sur sa peau ivoire. Un contraste aussi éclatant que divin.

« Que puis-je faire pour que tu me laisses la vie sauve. » Osa-t-il lui demander tout faiblard.

Linnea resta silencieuse et se fit l’amante docile du temps. Sourire aux lèvres, elle ne cilla pas lorsque le corps s’effondra au sol, incapable de supporter son propre poids. La Vampire s’en amusait. Odieuse créature qu’elle était, il lui offrait néanmoins un spectacle dont elle se lasserait vite.

« Je vais devoir rentrer à la maison pour me mettre dans un bain chaud. » Trouva-t-il le courage de lâcher.

A pas mesuré, faisant de la lenteur une arme vicieuse, elle vint jusqu’à Piro, et se percha près de lui sans une once de compassion. Son visage était toujours marqué de cet air faussement enjoué. Ca lui plaisait, certes, mais cela manquait d’un petit quelque chose.

« Certainement oui. Et je songerais à un tel gâchis. » Soupira la demoiselle en le suivant.

Et elle retrouva un semblant de calme. Main dans le dos, la jeune femme laissa place à la petite fille contrainte de ne pas trop s’éloigner. Les pas s’enchaînaient et ses pensées ne voulaient s’accorder à une idée unique. Pourtant il faudrait bientôt trancher. Si le temps n’avait aujourd’hui plus d’importance aux yeux de la belle Immortelle, il était un cycle à ne pas oublier. La nuit, le yin, le jour, son yang.  Toute aux prises de ses obscures pensées, elle avait pris le rythme de marche de Piro jusqu’à ce qu’une nouvelle idée saugrenue ne vienne ébranler son calme apparent.

« Je sais. » Déclara la jeune femme en le dépassant. « Puisque tu es un peu trop faible à mon goût mais dans l’instinct prometteur, je t’offre une vision du monde plus… éclairée. »

Et dans ces derniers mots elle était venue tout contre Piro, achever son corps de son étreinte froide et délicate. Il ne lui en faudrait pas plus pour succomber, n’est-ce pas ? Tout sourire et joueuse jusqu’au dernier moment, son visage vint se nicher dans le coup du jeune homme. Ses lèvres contre sa gorge, elle fit sortir sa langue qui taquina aussitôt les plaies causées par ses crocs. Elle inspira doucement et retira ses lippes de sa peau. Son visage se présenta enfin devant celui du jeune homme aussi blanc que neige dont le sourire léger trahissait presque une forme de bienveillance. L’un de ses crocs perfora sa propre lèvre. Tout juste de quoi laisser une goutte perler sur les lippes carmines.

« Tu voulais y goutter tout à l’heure. Il ne te reste qu’à profiter. »

Son visage s’approcha à nouveau de celui de Piro et les lèvres délicates de la Belle s’apposèrent sur les siennes. Un baiser à la frontière de la tendresse avant que ne laisse ses pulsions ressurgir. Il avait dû le sentir la première fois, son sang a légèrement tendance à corrompre les facultés des humains et bien souvent, les décupler. Un véritable poison capable de rendre le buveur du soir à la merci d’une obsession de taille.
Ses mains glissèrent contre ses joues et avec un regret certain elle mit un terme au baiser.

« Ainsi je suis certaine qu’à la prochaine nuit nos chemins se recroiseront. »

Sa langue passa sur sa propre lèvre blessée alors qu’elle jetait un coup d’œil vers l’horizon. N’est-ce pas le soleil qui vient la chasser ? Sans plus n’accorder d’intérêt à Piro, elle tourna les talons.

To be continued...