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Les saveurs du bordel | Gerlympe

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Gerd:
La Ville.
C'était pas très propre. C'était pas très sûr en apparence.
La plupart l'auraient probablement condamnée à l'Enfer en tombant dessus, par dessein ou par hasard, mais la plupart n'avaient pas les reins assez solides pour y parvenir.
On n'entrait pas dans la Ville n'importe comment. On y était généralement invité.
Et si ça n'avait ni la monumentalité d'Ashnard ou la richesse de Nexus, pour un mutant comme Gerd, c'était presque un endroit qu'il aurait pu appeler sa maison.

Le sorceleur faisait régulièrement escale ici. Par régulièrement, comprenez qu'il y passait quand il pouvait et qu'il était dans les environs. Au rythme de plusieurs fois par an, on pouvait quand même presque qualifier la Ville d'escale de choix, surtout avec la difficulté qu'il y avait à y pénétrer.
Il aimait l'endroit parce qu'il s'y sentait paradoxalement en sécurité. L'espèce d'anarchie calme régnant dans les rues garantissait un équilibre paisible malgré les individus parfois très louches y passant ou y résidant. Même ses épées étaient emballées dans une couverture lacée dans son dos.
C'était aussi un très bon endroit pour y trouver certaines commodités très rares dont il pouvait avoir besoin, ou en écouler d'autres dont il n'aurait pas l'usage. Parfois, les chasses étaient bonnes et il se retrouvait avec un excédent d'organes de monstres et de plantes avec, parfois, un fort potentiel alchimique. Il en tirait souvent un bon prix, qui couvrait tout ou partie de ce dont il avait besoin.

Evidemment, le commerce n'était pas la seule raison de sa venue régulière ici. La Ville avait trois bordels. Tatie ne l'intéressait pas et il avait trouvé le Père un peu formel et rude, même pour ses bons. La Mère avait su le convaincre et lui trouver une bonne fille et il avait pris ses habitudes là-bas, revenant régulièrement pour la même. Propre, tranquille malgré son allure patibulaire, utile en cas de grabuge et bon payeur, il était bien accueilli et gardait toujours un cadeau pour la pute qui recevait ses assauts pour une nuit avant de quitter sa vie jusqu'à la prochaine fois.
Mais, cette nuit, la fille en question n'était pas disponible. C'était un aléas malheureusement possible dans ce métier lorsqu'on ne pouvait prévenir à l'avance de sa venue et, en tunique de coton et de soie bleu et argent, son armure et ses armes laissées à l'auberge du coin derrière une lourde porte et de bons verrous, Gerd se préparait à apprendre la nouvelle.
Il n'y avait pour le moment aucun signe de la menue déception qui le conduirait à faire la connaissance d'une catin qu'il n'attendait pas, et il fit son entrée au bordel de Mère en se dirigeant vers l'hôtesse du soir, pour s'annoncer et demander celle qui ne pourrait lui être libérée.

Heureusement, la Mère avait toujours une solution sous le coude.

Olympe Polyxena:
Spoiler (cliquer pour montrer/cacher)https://www.pinterest.ch/pin/300052393935278854#imgViewer la tenue de Olympe, mais elle est pieds nus.
Il règne Chez Mère un étrange calme. Non pas que normalement ce soit chaotique, mais il y a en général des bruits. Du passage dans les couloirs. L’entrée, coincée entre les grandes portes de devant et celles donnant accès au bordel, est large et est souvent animée de discussions. Afin que la maison ne résonne pas des échos répercutés par les murs de pierre, Mère a fait tendre des tentures aux plafonds et meublés les lieux avec goût…les siens. Le confort est le maître mot de la maison. Aussi, on trouve de quoi s’asseoir ou même folâtrer un peu partout. En somme, c’est un bordel qui veut donner la sensation en y entrant, de chaleur et de bien-être. Il y a donc beaucoup d’activités entre ses murs. (Il ne faut pas être choqué trop facilement, car il y a des gens qui aiment le faire dans des endroits peu cachés et il n’est pas rare d’apercevoir une paire de fesses en pleine besogne ou…un pénis…voir plus.)

Pourtant…Olympe déambule dans des couloirs presque vide. Les quelques clients présents pour les quelques putes restantes, sont confinés dans les chambres. Au détour d’un couloir, elle aperçoit de temps en temps quelqu’un. Client en attente de son amante qui se prépare, employés qui fait quelques nettoyages. Drapée dans une tenue légère, car comme souvent, il fait chaud dans La Ville, Olympe frappe à la grande porte des appartements de Mère.

« Entre. »

Avec la maquerelle, il n’y a pas besoin de se signaler, elle sait qui c’est derrière. On spécule sur le comment elle parvient à savoir et beaucoup y vont de leurs théorie allant de la magie noire à une technologie plus moderne qu’elle serait parvenu à mettre au point…alors que ce talent tient a ses oreilles et sa bonne mémoire des sons. Ainsi, elle a reconnu à sa manière nonchalante de lâcher son poing contre la porte, que c’était Olympe.

« Mère. Avez-vous des nouvelles ? »
« Tous sont bien partis de Nexus, mais il y a eu un problème durant le voyage. Dont la nature ne m’est pas encore parvenue aux oreilles. Mais…tout le monde va bien. Il y a juste quelques…nausées, mais je pense que c’est le mal du transport. »

Olympe ne comprend toujours pas pourquoi les employés ont préférés voyager par les airs plutôt qu’autrement. Ce ne sont pas les moyens de parvenir à La Ville qui manquent.. si tant est que vous en connaissiez l’emplacement. Comme si Mère lisait dans les traits d'Olympe, elle répond sans attendre de question.

« Il y en a qui n’ont pas confiance en la magie. Tout comme quelques employés viennent par la terre. Moi je leur ai dit qu’ils devaient faire de sorte d’arriver. Qu’ils viennent en licorne ou en Baleine…je m’en tapote le cul par terre. »

Que voulez vous répondre à ça ? Face à une vieille maquerelle, qui paraît si petite et fragile derrière son bureau, mais à l’air si sûr d’elle à vous toiser derrière ses lunettes de lecture. Qu’elle ne met que rarement « je vois plus la laideur des gens comme ça. » pour ne pas dire qu’elle ne veut pas vieillir.

« Ça va aller d’ici à ce que tout le monde revienne ? Il ne reste pas grand monde et les clients vont finir par ne plus revenir s’ils trouvent mieux chez Tatie ou Père… »

Olympe ne parle que rarement. Elle laisse Mère faire le plus grand de la conversation, mais bien que silencieuse, elle ne donne pas l’impression de ne pas participer.

« oui. On va gérer. »

Comme toujours. Chez Mère, il n’y a que rarement des problèmes, car les employés ont beaucoup de solution.

« Tu es la seule aînée ce soir. »
« Oui. »

Mère hoche simplement la tête et Olympe sort rejoindre Alice à l’accueil. Pas besoin d’en dire plus. Elle va devoir gérer, car Mère est occupée à faire de sorte de récupérer ses enfants, perdus entre Nexus et ici.



A l’accueil, Alice gère comme elle peut. Pendant que Olympe allait voir Mère, la jeune recrue essayait tant bien que mal de diriger les clients au mieux. Elle a reçut une note de Mère qui lui explique quoi dire et quoi faire. Heureusement, lorsque sa douceur l’empêche de hausser le ton, la sécurité prend la relève. Et lorsqu’un Orc fait office de gardien, peu sont celles et ceux qui essaient longtemps de soudoyer la recrue.

Des clients vont et viennent. Certains semblent déçus lorsqu’ils reçoivent la liste des prénoms d’employés disponibles, d’autres accepte volontiers d’attendre un peu, mais la plupart disent qu’ils reviendront. Alice promet que ça durera pas, bien qu’elle ne sache pas vraiment. Mais bêtement, elle se dit que ça fait plaisir aux gens.

« J’aurais dû aller avec les autres pour ce voyage. »
« Tu n’es pas prête Alice. Le client voulait les employés qui savent y faire…qui sont plus à l’aise. »
« OLYMPE ! »

La petite créature  aux oreilles pointues saute au cou de son aînée, qui la rattrape sans ciller. Le mètre cinquante quatre de la demoiselle la rend facile à porter. Le couple ainsi formé se dirige vers le bureau et Olympe dépose délicatement Alice sur son siège.

« Comment ça se passe ? »
« Plutôt…bien ? Je crois… »
« Elle gère. »

La voix de basse de l’Orc monte du coin de la pièce. Assis sur un siège, il semble faire partie du décor, car il ne bouge pas. Une statue verte. Olympe le remercie d’un sourire et rassure Alice. Elle va aller voir si quelqu’un peut prendre sa place à l’accueil. Soulagée, Alice reprend du courage pour continuer son dur labeur.

« Prend le comme une leçon. Savoir accueillir et rester courtoise face à tout client est une vertu ici. A tout à l’heure. »
« Oui ! » La porte se referme sur le visage souriant de Alice. « MERCI !...Ah. Elle a pas entendu… »

Alice retourne donc à son travail, profitant qu’il n’y ait personne pour relire les notes de Mère. Lorsqu’une nouvelle âme vient chercher de la chaleur humaine entre, Alice fait son petit rituel. Si le ou la cliente décide de rester, elle les fait entrer dans le bordel avec l’autorisation de promener. La prostituée choisie saura les trouver.
Replongée dans les notes prise d’une belle écriture ronde, comme elle l’a appris à l’école dans son village natale, tirant la langue sous la concentration, la petite ne voit pas, ni n’entend lorsque l'orc prend sa pause. Elle ne relève la tête que pour se rendre compte qu’il n’est plus à sa place.

« La politesse des Orcs. »

D’un ton légèrement boudeur, elle se dispute à voix haute tout de suite après.

« Alice. Tu ne dois pas faire de raccourci sur la race des gens. Ou leur espèce. Olympe serait déçue… »

Petit soupir, elle sursaute lorsque la lourde porte s’ouvre. Et elle semble oublier qu’il ne faut pas juger, car elle prend peur face à l’homme qui vient d’entrer. Si elle obéit à son instinct, elle se lève et part en courant chercher de l’aide. Mais dans la maison de Mère, ce comportement la mettrait pour sur à la rue.

Elle reprend ses notes en tremblant, essayant de ne pas trop laisser voir sa crainte. Mais Alice est mauvaise aux Poker et ce n’est pas pour rien.

« Bon…soir. Bienvenue…ici. Chez Mère…je… »

Il voulait voir Mnemosyne. Une jolie créature connue pour sa souplesse et sa belle chevelure blonde. Mnemosyne, qui est partie et est coincée quelque part avec les autres employés. La jeune femme lui tend le papier où il y a des noms, identité et âge des employés disponibles. Olympe n’y figure pas, devant gérer la maison pour l’instant. Alice pose un doigt moite sur la feuille, sa voix n'étant plus qu’un chuchotement.

« Mais je peux essayer de…je peux vous prévenir si vous me laissez un… »

Elle ne voulait pas avoir à faire à cet homme. Il ressemblait aux méchants dans les livres d’histoire. Voilà pourquoi elle n’est pas partie avec les autres. Parce qu’elle est incapable de laisser ses préjugés de côté. Si seulement Olympe était avec elle maintenant. Elle traite les gens avec la même chaleur, quelle que soit sa nature. Voilà pourquoi elle est aînée alors que ce n’est pas la plus âgée de la maison. Et que Alice est encore recrue, alors qu’en pratique, elle a déjà fait ses preuves.

« Je vais m’occuper de monsieur…Alice. »

Olympe vient d’ouvrir la porte qui donne sur le bordel. Elle se tient entre l’ouverture et l’accueil et sourit à Alice.

« Il y a quelqu’un qui va venir prendre ta place. Il faut que tu ailles voir Mère. Elle a une mission. »

Soulagée, Alice bredouille des excuses emmêlées, entre « pardon vous me faites peur » et « je dois vraiment y aller pardon d’être une recrue » a un débit tel qu’elle a disparu avant d’avoir attendu une réaction.

« Veuillez pardonner le comportement d'Alice. C’est une recrue. Elle est jeune. On l’a tous été non ? »

Sans-gêne, Olympe détaillait de ses yeux hypnotiques Gerd, de la tête aux pieds. Elle s’attarde là où ça flatte parfois l’autre, les muscles, le visage. Ses yeux brillent légèrement car son goût pour les personnes imposantes est un fait. La porte reste ouverte après le passage de Alice, Olympe se dirige sans prendre le temps de la refermer, vers Gerd. Elle s’arrête entre lui et le bureau d’accueil, s’appuyant contre, son corps proche de celui du client.

« Je suis Olympe. »

La voix est aussi caressante que celle de Alice n’était effrayée et troublée…

Gerd:
Les bordels de la Ville avaient pour réputation de se concurrencer par tous les moyens, et si chacun avait son truc, sa niche, son petit quelque-chose qui saurait mettre les déçus d'ailleurs à l'aise chez eux, il ne faisait aucun doute qu'une personne qui ne trouverait pas son compte chez Mère irait pousser la porte de Père ou de Tatie, et vice versa. Il était donc toujours question d'un accueil de qualité et d'une organisation efficace entièrement vouée à satisfaire les attentes de la clientèle.
Autant dire que la surprise du sorceleur face à l'amateurisme de la jeune Elfe était grande. Mais, évidemment, le mutant solitaire et renfrogné, dont la trogne avait déjà effrayé la petite chose, ne put exprimer son désarroi en silence que par une trogne encore plus terrifiante.
A la Ville, Gerd faisait toujours en sorte de se montrer diplomate ; mais ce n'était pas vraiment son fort. Il ne savait pas vraiment comment interrompre l'Elfe gentiment et lui demander de respirer, de retrouver son calme, et il se serait convaincu de tourner les talons et de quitter les lieux si une voix n'avait pas mis fin au massacre.

Dès qu'il avait entendu le timbre profond et confiant de l'autre inconnue soudain apparue dans le cadre de l'accès au bordel, Gerd avait arrêté de se concentrer sur Alice. Son intelligence sociale particulière, rudimentaire mais efficace, avait instantanément reconnu une personne d'autorité et d'expérience avant de la voir de ses propres yeux, et il ne suivait plus l'Elfe que d'une oreille vaguement attentive tandis que son attention se tournait exclusivement vers la jeune humaine.
En tout cas, il supposait qu'elle était humaine. Il avisa rapidement son apparence. Elle semblait bien jeune pour une telle assurance. Peut-être n'était-elle pas humaine, ou peut-être avait-elle vécu bien des choses ; peut-être les deux. Elle était un peu plus petite que lui, avec une beauté naturelle réhaussée par un habile maquillage. Des cheveux bruns, épais, des yeux bleu pâles perçant entre eux comme des flèches de givre. Elle est bien faite de sa personne, bien faite de corps, mais ce qui la sublimait, outre la robe très ouverte et suggestive, au style nexusien ancien, c'était son attitude. Le sorceleur put en témoigner à la façon dont elle semblait le toiser du regard avec flatterie, et à celle dont elle se déplaça, nonchalamment, sensuellement, de la porte au comptoir, chez elle, en terrain conquis, certainement pas intimidée par la carrure ou l'allure de l'homme à qui elle faisait face.
La putain était jeune mais avait vu son lot de personnages, semblait-il. Mais cela seul n'expliquait pas sa noblesse. Cette Olympe était intéressante.

"Et je suis Gerd," répondit-il à sa présentation, plongé dans ses yeux clairs.

Comme dans un effort déterminé, il s'en détacha pour revenir au comptoir déserté par la jeune Elfe. Ses sens s'orientèrent autour d'eux. Il n'y avait personne d'autre dans la pièce. L'ancienne cathédrale était, quant à elle, d'un calme inhabituel. Il pouvait l'entendre : le bruit de fond était bien ténu. Par réflexe, il l'avait ignoré, ne souhaitant pas être assailli par les ahanements, les grincements et les gémissements ininterrompus alors qu'il n'était qu'au vestiaire, mais, maintenant qu'il l'analysait, il réalisait que quelque chose d'aussi inhabituel que ce bruit de fond si léger avait conduit Alice au comptoir et Olympe à la gestion client.
Il recentra ses perceptions sur la pièce, puis sur eux deux. Ses oreilles bougeaient légèrement, et il pouvait entendre la respiration d'Olympe, les battements de son cœur, les frottements du tissu. De ses narines arrondies, pouvait sentir sa fragrance, l'odeur du savon qu'elle utilisait pour sa toilette et avec quelles essences elle relevait l'eau qu'elle y employait. Ses pupilles verticales s'ouvraient et se fermaient comme il détaillait sa personne et sa tenue. Ses mains...
Ses mains restèrent où elles étaient. Il se restreint à une perception plus légère des choses afin de ne pas se laisser gagner par un désir indécent de la découvrir.

"Les novices sont une source d'embarras," finit-il par dire avec un certain détachement. "Mais nous devons tous apprendre, comme vous dites. Ne vous excusez pas pour elle."

Parmi les Ours, l'inexpérience était vue avec fatalité et méfiance. On ne se laisserait pas handicaper par un jeune sorceleur comme on ne se laisserait pas porter par un sorceleur expérimenté. Les Ours étaient solitaires ; sans doute trop pour leur propre bien, d'ailleurs. Gerd avait conscience que leur solitude, leur dissociation de toute structure sociale corporative ou familiale, les avait fragilisé et avait favorisé la mort de leur Ecole. Il n'y avait plus d'Ours novice depuis longtemps, mais personne, pas même les Ours eux-mêmes, ne s'émouvaient du fait qu'ils seraient les derniers de leur espèce.

Il décrocha ses yeux d'Olympe pour porter ses yeux sur le plafond, faisant mine d'aviser la bâtisse et son activité réduite comme s'il pouvait la constater ainsi. Il revenait ainsi au sujet de sa venue et à l'activité inhabituelle du soir.

"On dirait que beaucoup de vos chambres sont vides. Le salon est tranquille. Ce qui explique ceci explique sûrement l'absence de Mnemosyne et les quelques noms de cette liste."

Gerd avisa la feuille de papier qu'il avait gardé en main depuis qu'Alice la lui avait tendue, et il s'avança vers le comptoir, contournant Olympe de très près, la frôlant presque, pour le reposer sur le plan de bois sans un autre commentaire. Ses yeux se retournèrent dans ceux de la jeune femme aux mille expériences. Il était assez près d'elle pour ne pas avoir besoin d'aiguiser ses sens pour la ressentir très nettement.

"Il est... vraiment très dommage qu'Olympe n'y figure pas, mais je saurai me fier à son jugement pour me trouver une compagnie de choix, si telle compagnie il y a ce soir."

Il ignorait exactement ce que Mère avait dit de ses clients à cette pute de confiance et il ignorait ce qu'elle avait pu lire ou mémoriser, ou même deviner de sa personne depuis qu'ils s'étaient rencontrés. Peut-être était-elle à sa place parce qu'elle avait un don pour cerner les gens ?

"Je passe la nuit ici. Je ne dors pas. Mnemosyne et moi nous entendons bien parce qu'elle sait varier les plaisirs sur la durée. Y a-t-il une fille qui se prêterait au jeu sur la liste ?"

Olympe Polyxena:
Olympe, la fesse calée contre le bureau, observe. Déshabille du regard  Gerd, essaie sans en donner l’impression, de ramener à sa mémoire si elle a déjà eu à faire à ce dernier. Non. Jamais. Pas elle en tout cas. Mais son attitude et sa dégaine …de guerrier ? La seule chose qui soit une certitude en cet instant, c’est que cet étranger a parfaitement sa place en ces lieux. Pas uniquement « Chez Mère » mais aussi dans La Ville. C’est ainsi. Si La Ville accueille tout le monde sans regard sur ses origines ou son aspect, Olympe voit tout se même lorsque quelqu’un est habitué ou non. Si ce quelqu’un a sa place ou risque de ne plus jamais revenir.

«  Et je suis Gerd. »

Gerd. Il suffit souvent d’une information plus précise pour que la mémoire de Olympe parvienne à mettre un souvenir dessus. Gerd. Ce prénom n’est pas sorti souvent, ce qui est une bonne nouvelle (dans les bordels, être connu comme Loup blanc n’est pas une si bonne chose que ça. Si l’on parle beaucoup de vous, c’est toujours parce que vous avez fait quelque chose de honteux ou qui a énervé quelqu’un. Les bons amants, les bonnes amantes sont gardés comme des secrets. Tout comme les bons payeurs). Ça remonte à une conversation avec mère au détour d’un couloir. « Envoie Mnemosyne. Gerd est un homme face à qui tu ne peux pas envoyer n’importe qui. Quelqu’un de trop fragile ne tiendrait pas, mais de trop rustre…il est ici pour du sexe pas pour faire un combat sur matelas… » Mnemosyne. Et elle qui n’est pas là, Olympe n’a pas besoin de longtemps pour comprendre le désarroi de Alice. La pauvre. Elle qui n’aime pas devoir dire non à qui que ce soit…

Olympe ne lui dit donc pas « Bienvenue Gerd », tout comme elle ne se mit pas à poser mille questions. Non. Elle se contente de sourire, prenant un meilleur appui contre le bureau. Une posture qui dit qu’elle n’est pas pressée. Les clients habitués, il ne faut pas les faire se sentir nouveau, même si c’est la première fois que vous avez à faire à eux. Les habitués aiment être traités comme tels, car après tout, ils sont ici chez eux. Certains plus que d’autres.

«  Les novices sont une source d’embarras… »

Gerd a raison. Parfois, les novices sont pénibles par leur manque d’expérience ou leur empressement à faire bien. Trop bien, quitte à perdre de vue le principal. Mais Olympe n’est pas totalement d’accord avec cette affirmation. On a tous été novices un jour. Mais nous avons tous été source d’embarras aussi. Gerd…d’autres morceaux de souvenirs affluent. Un ours. Un sorcier ? Sourcier ? Qu’avait dit Mère à son propos. Olympe ne laisse pas son questionnement marquer ses traits. Ni passer la barrière de ses lèvres.

Tandis que Gerd coupe le contact visuel avec elle, Olympe ne cesse pourtant pas de le détailler. Elle a cru apercevoir quelque chose dans ses yeux, mais avec la luminosité des lieux, le jeu des lumières sur les objets et les corps, elle n’est sûre de rien.

«  Vous êtes fin observateur. Des circonstances particulières nous amènent parfois à être en nombre restreint, comme ce soir. Mais c’est assez exceptionnel… »

Son ton reste égal à celui qu’elle avait en entrant. Peut-être à peine plus chaud que celui employé avec Alice. Plus caressant. Si Mère lui a parlé de Gerd, c’est qu’il est à compté parmi les « Bons clients ». Ceux qui reviennent de temps en temps. C’est comme ça que c’est fait la réputation de l’établissement. Parce que Mère, qui n’est pourtant pas souvent présente et se montre rarement à la clientèle, connaît du monde en dehors. Mais aussi, elle aime que ses prostituées lui fassent des rapports de temps à autre, afin qu’elle puisse prendre note d’informations importantes au bien-être de sa clientèle. Mère n’hésite pas à ensuite faire passer quelques informations à Olympe. Tenté de dire que c’est pour le bon déroulement des affaires, la vérité  elle, dit autre chose : Mère est une bavarde qui affectionne de passer du temps avec son aînée. Sa Dame de confiance.

 Les déplacements de Gerd ne sont pas épargnés par les yeux clairs de Olympe. Et bien qu’elle ne laisse rien paraître à l’extérieur, une oreille attentive ou un fin observateur peut remarquer les léger changement chez la prostituée. De sa respiration qui s’est légèrement accélérée lorsque Gerd l’a contourné, au léger frisson qui marque sa peau de ce qu’on appelle « la chaire de poule ».

Mnemosyne. C’est donc elle. Ce nouveau prénom des lèvres de Gerd, lui apporte d’autres informations. Mnemosyne à été une des recrue de Olympe, donc elle sait parfaitement pourquoi elle peut plaire , plus qu’une autre. Pourtant moins expérimentée que certaines plus anciennes, il est vrai qu’elle possède l’avantage d’être ouverte à tout et d’être endurante.

« Oh. »

Gerd serait il parvenu à faire rosir Olympe ? Non, mais à la surprendre en pleine pensée peu honnête. Le souvenir des conversations avec Mnemosyne. L’appétit de son « client Gerd ». L’ennui d’une maison plus calme que d’habitude.

« Je passe la nuit ici. Je ne dors pas. Mnemosyne et moi nous entendons bien parce qu’elle sait varier les plaisirs sur la durée. Y a-t-il une fille qui se prêterait au jeu sur la liste ? »
«  Laissez moi regarder…je ne sais pas qui est disponible ou ne l’est pas actuellement. »

Olympe se penche sur le comptoir, fait glisser la pointe de la plume saisie sur le bureau, le long des prénoms. Elle souligne lorsque c’est une femme, marque d’une petite croix lorsque la personne ne fera pas l’affaire. Que ce soit par son manque d’expérience ou sa nature. Arrivée au bas de la liste, il y a beaucoup de croix. Les sourcils froncés, très légèrement, elle lève le visage vers Gerd.

«  Il n’y a pas deux putains pareille ici. Nous essayons d’offrir de la diversité. Mais le problème se pose au moment des absences…visiblement. »

La jeune femme fait mine de réfléchir à une solution. Lui proposer deux prestations au prix de une ? Essayer de voir si Mère à des nouvelles ? Olympe réfléchit, toujours penchée, une main en appui, l’autre tenant toujours la plume. La solution. Elle l’a depuis qu’elle a posé ses yeux sur Gerd.

« Personne ne peut remplacer Mnemosyne au vu de ce que vous désirez…cependant, est-ce que celle qui la formée vous conviendrait ? »

Olympe n’attend pas vraiment de réponse et ajoute son nom en bas de la liste. Elle repose la plume dans son support et tend la feuille à Gerd, se redressant pour contourner le bureau et se rapprocher de lui sans pour autant le toucher. Ce n’est pas dans les habitudes de Olympe de se mettre sur la liste alors qu’elle n’est pas prévue. Pas sur un coup de tête et encore moins à la demande. Pas que cela la dérange en soi, mais Olympe doit en général faire de sorte de rester disponible pour la gestion de la maison ainsi que répondre aux employés.

« Que désirez vous faire Gerd ? »

Olympe se trouve face à lui, la feuille pour seul rempart entre Gerd et elle. Sorceleur. C’est ça. Ni sorcier, pas sourcier, mais Sorceleur.

Gerd:
De par ses sens plus fins que la normale, Gerd ne manquait pas une seule palpitation chez Olympe. Ce qui était utile lorsqu’il chassait pouvait être aussi utile, sinon plus encore, au contact de ses semblables –ou ceux qu’on pouvait qualifier le plus de semblables–. Ainsi, il devinait son trouble, léger mais bien présent, à son contact. Il savait qu’elle n’était pas insensible à sa présence et à sa personne. C’était une chose que les catins se retenaient de ressentir par professionnalisme, et il le respectait. Elles ne voulaient pas faire de différences et ne voulaient pas risquer de se faire avoir par un coup de cœur mal intentionné. Elles restaient pourtant des êtres de chair et de sang soumis à leurs propres pulsions instinctives. Si ça pouvait parfois pimenter le travail, quel était le mal ?
Mais Olympe n’était pas sur la liste. Dommage, et tant mieux peut-être ? Elle n’avait pas à subir les aléas de son être charnel et pouvait se décharger de son problème sur une autre. Elle se mit d’ailleurs en quête d’une alternative pour lui, se penchant au comptoir et commençant à tracer lignes et croix sur la liste. Gerd marcha tranquillement le long du séparateur bien modeste, mais ne manqua pas de porter son regard sur la silhouette de la brune depuis le bout, profitant de ce que sa position et les drapés ouverts de sa tenue offraient de nouvelles perspectives sur sa personne. Il remarquait ses courbes féminines, le huit formé par ses épaules, sa taille et ses hanches. Il revint sur ses longs et épais cheveux bruns, sur les yeux bleu à moitié fermés qui dansaient sur les noms sous elle.

Vraiment, c’est dommage qu’elle ne soit pas sur cette liste, se dit-il en laissant finalement son badinage silencieux pour répondre à ses paroles, sûrement destinées à atténuer l’ennui potentiel de l’attente –un ennui qu’il n’avait manifestement pas laissé s’installer–.

« On ne peut pas vous blâmer de vouloir convenir à tous. »

Terra avait tant de caractères et de formes différents à concilier que c’était un ouvrage non-négligeable à entreprendre. Être capable d’accommoder tout le monde était un argument de vente rare qui laissait passer bien des désagréments –non pas que le bordel de Mère ait été sujet à plainte–.

Quoi qu’il en soit, les observations suivantes de la belle firent tiquer le sorceleur et le firent même s’arrêter. Un sourcil curieux dressé au-dessus de son œil gauche, il posa son attention sur sa tête baissée. Elle connaissait ses préférences, elle savait donc des choses sur lui. C’était intéressant ! Elle avait donc bien des qualités cachées et avait bien un rôle s’apparentant à celui d’un second en ces lieux. Elle avait dû faire preuve d’une qualité et d’une ardeur rares pour en arriver là. Vraiment, quel dommage !
Elle n’avait pas attendu de réponse à sa question, cela dit, et, comme elle saisissait une plume pour compléter la liste, Gerd se tut, laissant à Olympe le loisir de noter le nom de l’alternative parfaite au bas de la liste avant de l’attraper avec douceur lorsqu’elle la lui tendit. Il tourna le dos à la brune et s’appuya au comptoir avant de tendre le papier entre ses doigts et de passer rapidement en revue la version altérée du personnel. Puis, comme il l’entendait s’approcher avant de s’arrêter près de lui, il arriva au bas de la liste et parcourut deux fois le nouveau nom, rédigé d’une belle écriture cursive.
Positionnée face à lui, elle lui demanda son avis et le sorceleur ne lâcha pas la fiche du regard pendant un instant. Dans sa barbe, seulement, un fin sourire se dessina, et ses yeux se plissèrent légèrement avec amusement. Il écarta la feuille et la reposa sur le comptoir à côté de lui. Ses mains s’étendirent de chaque côté tandis qu’enfin il reposait ses yeux sur Olympe.
Il laissa quelques secondes flotter, comme s’il n’avait pas encore eu la réponse. Olympe devinait sans doute la réponse à son regard, mais il s’amusait de l’observer ainsi suspendue à ses lèvres.

« Vous avez formé Mnémosyne ? » finit-il enfin par demander.

Il n’attendait pas vraiment de réponse. Il était convaincu qu’elle disait la vérité. Le ton n’avait d’ailleurs pas été si interrogatif que cela. Il y avait même dans ses paroles plus de respect que d’interrogation. Quelqu’un qui avait formé une putain si compétente et dévouée que la petite Elfe méritait au moins l’appréciation de l’Ours, qui finit par se détacher du comptoir pour s’approcher de la brune. Il la toucha presque, et leurs étoffes se frôlaient en fait. Il restait plongé dans ses yeux bleu acier en silence.

« Je suis heureux de voir Olympe sur cette liste et j’aimerais beaucoup profiter de ses services. »

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