Bienheureux dans son lit, l'immortel dormait paisiblement.
Ses songes, jamais agités mais toujours vivaces, étaient inhabituellement confus. Il se souvenait de la verdure, des cerisiers en fleurs, vaguement rosés dans ses souvenirs. Ou était-il ? Dehors ? Ah oui. Il campait à la belle étoile, dans la campagne, admirant le ciel étoilé, jusqu'à ce que les étoiles disparaissent. Et depuis... le néant. Il fronce les sourcils, ne comprenant pas pourquoi ses songes se transforment en néant.
Sentant une agitation près de lui, il se réveille doucement. Il baille à s'en décrocher la machoire, lui qui n'a pas réellement un besoin vital de sommeil. Il se retourne lentement, devinant une forme féminine à ses côtés, aux cheveux courts et encore, comme lui, émergeant péniblement d'un lourd et long sommeil. Le cerveau du mâle ne s'interroge pas plus que ça.Il se rapproche naturellement d'elle. Sa peau est douce, son corps est chaud. Elle sent bon. Un frisson parcourt son corps. Il a envie d'elle, mais la fatigue est toujours présente.
En pilote automatique, il murmure un "Bonjour chérie" et se redresse un peu pour embrasser maladroitement et chastement son front à travers ses cheveux, avant de se retourner et de reprendre son somme. Pourquoi s'inquiéter ? Il est dans un lit avec une femme. Ils ont du se rencontrer, folâtrer un peu, et il se retrouve tout simplement chez elle, profitant d'un repos bien mérité avant que survienne l'embaras habituel des amants n'ayant au final pas grand chose à se dire, ou il apprend qu'elle a en fait un copain, un mari, voir des enfants, qui sont d'ailleurs dans la chambre à côté, et qu'il devrait vite partir.
Tout va bien !
Puis, lentement, son cerveau commença à se poser des questions. Comment elle s'appelle cette fille ? Aucune idée. Tu l'a rencontrée où ? Aucune idée. Cet endroit te dit quelque chose ? Rien du tout. C'est quoi notre dernier souvenir ? On campait.
Peu à peu, l'idée que quelque chose n'allait pas fit chemin dans son esprit. Et, quelques secondes à peine après avoir embrassé sa " chérie ", il se redressa, parfaitement réveillé, ses yeux bleus exorbités.
- Un instant, on est où et vous êtes qui ?! Il répéta ses questions plusieurs fois, passa d'une langue à l'autre, français, anglais, espagnol, puis japonais, voyant qu'elle réagissait à ce dernier.
Il regarde la jeune femme : elle est jeune, bien plus jeune que lui, probablement encore une adolescente... et elle le regarde avec un air aussi interdit que lui, qui signifie un très clair " j'en sais rien " à sa question. Il sort du lit. Il ne porte qu'un caleçon -même pas le sien d'ailleurs- relativement fin et complètement déformé, qui ne cache rien du désir vivace qu'il a éprouvé il y a quelques instants.
D'un œil alerte, il regarde autour d'eux. La pièce est sombre, il ne voit pas de fenêtre ou de rideau. Mais surtout, il n'y a rien d'autre qu'un lit, une table, et une armoire. Son expérience lui chuchote que ce n'est pas une pièce normale ou on vit. Il se dirige vers la porte, flairant l'embrouille. Verrouillée, et salement. Il sent la lourdeur de la porte, et ce n'est clairement pas un truc qu'il pourra forcer.
Malgré l'étrangeté de leur situation, il ne paniqua pas. Comme toujours, le pérégrin était d'un calme olympien. Quand on avait assisté à un big crush et vécu 20 ans sur une planète sauvage remplie de dinosaures, être coincé dans une chambre avec une ado était loin d'être la pire chose qui lui soit arrivé.
- Merde, c'est quoi ce délire ? D'un coup d’œil, il avise la lettre, posée bien en évidence, sur la table. Il l'ouvre, et lit la phrase, silencieusement, haussant et fronçant chaque sourcil au fur et à mesure, avant de regarder, cette fois avec plus d'attention, sa partenaire.
- Hey, euh... mince, il ne connaissait pas son nom. Tu t'appelle comment ? Moi, c'est Grayle. Il lui balança la lettre. Je crois qu'on a beaucoup de choses à se dire.