Il était une fois un rêve merveilleux, probablement engendré, l’espace d’une nuit, par un enfant épanouit. Dans ce rêve, il y avait une riante forêt. Des arbres hauts et vénérables à perte de vue. De leurs verdoyantes ramures ruisselaient le chant des oiseaux. Le soleil estival parcheminait de ses rayons dorés les sentiers ombragés où flottaient bien des parfums sucrés. Fleurs et papillons multicolores, buissons chargés de baies charnues, tapis de mousse, champignons rondouillards, tel était le quotidien de l’insouciant promeneur. Au cœur de cette forêt sans nulle autre pareille se nichait le village des joyeux écureuils. Il se constituait d’un harmonieux ensembles de maisonnettes en bois, certaines perchées entre les branches, d’autres blotties entre les racines noueuses. Un ingénieux réseau de ponts suspendus, d’échelles de corde et d’escaliers en colimaçon permettait de circuler facilement au sein du bucolique hameau. Non loin de ce dernier serpentait une rivière cristalline dans le cours vivace s’auréolait d’écume au pied d’une belle chute d’eau. C’était vers cette cascade que paressait un groupe d’amis.
« D’après les rumeurs, la fête de ce soir sera superbe ! » s’enthousiasma Manon, tout en cueillant des fleurs pour en faire un bouquet.
Manon était un écureuil au beau pelage argenté et aux yeux d’émeraude. Une robe Lila et des sandales assorties lui conféraient tout le charme dont pouvait rêver les demoiselles du village.
« Ha, Manon et les rumeurs ! » rigola Vincent qui, lui, était occupé à pécher.
Vincent était un écureuil à la chatoyante fourrure dorée et aux yeux ambrés. Une tunique vert pomme, un pantalon bouffant, un chapeau à plume et des souliers de cuir l’habillaient. Il était l’un des rares garçons à ne pas trop courtiser Manon.
« Mais ce ne sont pas de simples rumeurs ! C’était... hum... un présage. Voilà, un présage ! Et puis, faut voir comme le bourgmestre tient à soigner l’événement. »
« Le pauvre, il a l’air toujours exténué quand je le croise », intervint Romain.
Petit frère de Manon, Romain avait lui-aussi une toison d’argent, quoi qu’un brin plus sombre. Ses yeux d'azur pétillaient de malice. Il portait une tunique et un short blancs. Ses souliers, pour l’instant, étaient délaissés non loin d’un fraisier. Romain courait pieds nus, cherchant à attraper des libellules et, de temps en temps, il jetait des galets dans l’eau, ce qui pouvait expliquer pourquoi Vincent n’avait toujours rien attrapé comme poisson.
« En tout cas, mon bouquet est terminé. Moi, je file », déclara Manon.
Elle partit en direction du village. Son frère récupéra ses chaussures à la main et la suivit.
« Hé, attendez-moi ! » cria Vincent.