Belle, cruelle, et puissante, sous-estimer Madelyne était une erreur qu’on ne commettait pas deux fois. Cependant, elle devait bien admettre que la scierie était lourdement défendue. Au Japon, les armes à feu étaient bien moins fréquentes qu’ailleurs ce qui expliquait tous ces clichés racistes sur les arts martiaux et les armes blanches… Des clichés qui n’étaient toutefois pas si exagérés que ça, car il était fréquent que les Yakuzas se promènent avec des wakizashis ou des katanas. Cependant, les Guramu avaient la particularité de faire partie du trafic d’armes à feu à Seikusu, et, en tant que tel, ils avaient très souvent des armes. Ce soir, ils avaient des pistolets ou encore des Uzis.
Voir une telle concentration sembla paniquer Ix, ce que Madelyne sentit. Les deux femmes avaient quitté le tapis roulant, et se tenaient sur le sol, derrière une pile de rondins de bois. La mutante se retourna vers elle, et la rejoignit alors. On aurait pu croire à un autre baiser, mais elle se contenta de caresser le ventre de la femme, et de l’embrasser dans le creux du cou.
« N’aie pas peur, mes gobelins sont là… Si tu veux être ma chatte, laisse-moi être ton tigre, je te protègerai… »
Pourquoi une telle sollicitude envers cette femme ? En réalité, elle-même l’ignorait. Peut-être était-ce juste parce qu’elle la trouvait très belle, et que son côté « femme fatale », mélangée à ce soupçon d’innocence et de peur, était amusant. En tout cas, Madelyne s’attachait déjà à cette femme, et, tout en caressant son ventre, elle l’invita à regarder autour d’elle. Dissimulés dans l’ombre, les gobelins étaient là, furtifs, discrets, mortels, seuls leurs yeux verts transparaissaient brièvement. Comme des espèces de sinistres araignées, ils avançaient dans l’ombre, grimpant au plafond.
La main de Madelyne caressa la joue de Ix, et elle l’embrassa finalement sur le bout du nez. Un autre élément qui jouait en la faveur de cette femme était que Madelyne avait pris goût à ses lèvres.
« Je suis un tigre, oui, une femme puissante. De cela, on ne peut douter. Si je le voulais, je pourrais massacrer tous ces gens. »
Madelyne continuait à doucement caresser la joue de la femme en parlant de tueries et de massacres.
« Je vois les pensées de ces gens. Ils ont une famille, pour certains, une fiancée, une petite-amie… Pour autant, je n’aurais aucun remords à les tuer. Car, vois-tu, ces mêmes qui chérissent leurs bébés sont aussi ceux qui vont battre de simples commerçants parce qu’ils ne paient pas les taxes frauduleuses imposées par les Yakuzas. Ce sont aussi eux qui décapitent leurs rivaux, ou n’hésitent pas à capturer des fillettes pour en faire des esclaves sexuels. »
Elle parlait d’une voix calme, exposant ainsi tout le dégoût qu’elle éprouvait envers l’humanité
« J’ignore qui tu es, Ix… Assurément, tu n’es pas une humaine ordinaire, et je sens quelque chose de trouble dans ton esprit, quelque chose… D’atypique. C’est ce qui m’attire, mais sache que je ne tue pas ces gens parce qu’ils sont mauvais, ou néfastes. Je les tue juste parce qu’ils sont mes ennemis. Tu comprends ? Toi, tu es avec moi, mon alliée, mon amie… Tu ne risques rien avec moi. Et, si ces gens t’effraient, alors je vais te libérer de cette peur. »
Madelyne retourna l’embrasser, la serrant entre ses bras, et, entre-temps, tous ses gobelins fondirent sur les gardes. On put les entendre soupirer, gémir, hurlant même un peu, avant d’entendre le bruit de griffes et de crocs tranchant la chair. Les gobelins infernaux de Madelyne n’avaient rien à voir avec les gobelins de Tolkien. Il s’agissait de créatures redoutables, dangereuses, sauvages et impitoyables, maîtrisant la magie. Certains bondirent sur les Yakuzas, et plantèrent leurs crocs dans leur cou, avant de les égorger, si ce n’est de les décapiter. Un autre gobelin en scalpa un, et planta ses mains dans la masse rosâtre et sanguine de son cerveau, se délectant de cet organe.
Le sang se mit, peu à peu, à maculer les murs et le sol de la scierie. Et, plus le massacre se poursuivait, et plus Madelyne embrassait Ix, mordillant ses lèvres, fourrant sa langue dans sa bouche, serrant son corps contre le sien, la plaquant contre le mur.
« Mmhhmmm… Hmmm… !! »
Un coup de feu amena soudain Madelyne, qui en était même à peloter les fesses de Ix, à rompre le baiser. Elle tourna la tête en voyant, depuis une plate-forme en hauteur, un homme courir, le bras ensanglanté, tirant sur un gobelin. La première balle fit hurler le gobelin, du sang vert s’échappant de sa poitrine, et il partit à la poursuite de l’homme.
« N-N-Noon… HAAAAAAAAAAA… !! »
Le gobelin bondit sur lui, plantant ses griffes dans son dos, et l’envoya s’écraser sur le sol, l’homme appuyant à nouveau sur la gâchette, plus par réflexe qu’autre chose. Il s’était écroulé devant le bureau-cible, qui s’ouvrit alors sur un homme, faisant bien deux mètres de haut, et qui brandit sur la gueule du gobelin le bout noirâtre d’un fusil à canon scié.
*BANG !!*
Le tir partit, et fit sauter la tête du gobelin.
En souriant, Madelyne libéra donc Ix.
« Ah, enfin un peu d’action ! »
L’homme écrabouilla du doigt un bouton rouge situé sur sa droite, déclenchant une alarme qui résonna dans toute la scierie…