Les deux vampires partageaient un moment doux, qu’elles n’auraient jamais pu partager si l’une d’entre elles avait été une humaine ou une quelconque terranide. Ou vampire, car un lien les unissait, un lien sanglant, certes, mais au combien puissant et agréable. Pour la première fois, Kira pouvait tenir contre elle quelque chose d’aussi froid que sa peau, mais qui lui paraissait tiède et attirant. Caressant lentement le dos de sa fille, elle comprenait qu’elle avait besoin de son affection, de ce que seule cette petite vampire pouvait lui donner. Elle l’avait crée, elle pouvait donc la percevoir où qu’elle soit, maintenant qu’elle n’ignorait plus son existence et qu’elle la souhaitait à ses côtés. Si jamais quelque chose lui arrivait, elle serait ainsi en mesure de lui porter secours. L’amour d’un vampire, la chose la plus puissante et dévastatrice au monde, puisque rien ne peut l’arrêter ni l’empêcher de faire quoi que ce soit.
Loin de ce que les humains peuvent ressentir pour leurs parents ou même pour leur amour, celui des vampires est tenace, puisqu’il n’a pas de limites. Les humains, eux, ne peuvent ressentir que ce qu’ils sont à même de gérer, sinon ils seraient détruits. Les vampires n’ont pas ce problème, puisqu’ils ne peuvent mourir et que leur esprit est aussi vaste que l’univers. Désormais que Kira aimait, elle ressentait plus que jamais tout ce qui l’entourait, et surtout la peau contre la sienne, la peau de celle à qui elle avait fait cadeau d’une vie égale à la sienne au lieu de la tuer comme elle aurait pu le faire.
Puis, vint le moment où elle pu retirer son masque. Là, elle pu constater que sa fille appréciait le visage de sa mère, car la main qui se trouvait auparavant sur sa gorge remonta en une douce caresse afin de se poser sur sa joue, contact doux et rassurant que pour rien au monde Kira n’aurait voulu sentir cesser. Mélusine exprima ses pensées en la complimentant sur son physique, ce qui fit sourire sa mère, qui pensait exactement la même chose de celle qui l’animait d’un amour sans faille. Elle regardait sa fille, pleine d’une véritable adoration pour ses beaux yeux bleus, qui exprimaient une affection égale à la sienne, ce que peu d’iris seraient à même de faire. Elles semblaient comme destinées l’une à l’autre.
C’est alors que Kira devint triste, se demandant si sa chère fille ne lui en voulait pas de l’avoir transformée, de l’empêcher de se tenir face au soleil, d’avoir fait d’elle une créature qui pour vivre devait prendre la vie d’une autre créature. Sa fille écouta ses remords sans mot dire, puis de sa voix chantante et envoûtante, comme la sienne, lui expliqua qu’elle ne lui en voulait pas, qu’elle était même heureuse de sa condition de vampire, surtout étant donné qu’elle ne connaissait rien d’autre, ayant oublié sa vie humaine. L’air triste de la vampire s’envola petit à petit, laissant place à une sorte d’euphorie. Sa fille l’aimait, elle ne lui en voulait pas, au contraire, elle ne voulait même pas savoir pourquoi sa mère l’avait laissée se débrouiller seule sitôt qu’elle l’avait crée et allait jusqu’à la remercier d’avoir fait d’elle une vampire. La serrant plus fort contre sa poitrine de marbre, Kira déposa un doux baiser sur le front de sa fille, qui formula ses pensées à voix haute en disant qu’elle avait trouvé sa raison de vivre. Un sourire flotta sur les lèvres de l’être aux cheveux de jais, qui pourtant savait qu’elle lui devait une explication. Au lieu de se mettre tout de suite à lui dire tout ce qu’elle aurait dû lui dire, elle se contenta de la soulever dans ses bras et de sauter. Haut, très haut, jusqu’à se poser sur le toit de l’un des immeubles devant lequel elles s’étaient retrouvées. Il était hors de question qu’un vulgaire terranide se mêle de leurs retrouvailles et détruise l’instant merveilleux qu’elle était en train de vivre.
Une fois à l’abri des regards indiscrets, elle sourit et regarda le visage de sa fille. Il était angélique, elle était d’une beauté exquise que même les anges envieraient. Caressant du bout des doigts les pommettes de la vampire, suivant le contour de son visage jusqu’à son menton, puis ses lèvres, Kira n’était que douceur et elle aurait voulu que ce moment ne cesse jamais. Finalement, elle prit la parole.
- Lorsque je t’ai rencontrée, tu étais la plus jolie des humaines qu’il m’avait été donné de voir. La vie te souriait, tu était jeunes et tous les hommes se retournaient sur ton passage. Je t’ai suivie plusieurs jours, tu ne t’étais rendue compte de rien. Puis, tu as fini par te retrouver, un soir, dans une ruelle sombre, le genre de ruelle qu’affectionnent les voleurs. Tu n’étais pas méfiante, tu voulais juste rentrer chez toi… Mais un homme t’a abordée, il était soûl et ce qu’il voulait de toi ne faisait aucun doute. Prise d’une subite rage, je l’ai abattu d’un coup sec, sans même qu’il ne se rende compte que vous n’étiez plus seuls. Tu as eu peur. J’aurais pu te laisser partir et ne jamais te revoir, mais je ne sais pas ce qui m’a pris et au lieu de cela, je t’ai attirée à moi avec mon charme vampirique et je t’ai mordue. J’ai bu longtemps, tu voulais t’échapper mais je te retenais entre mes bras. Puis, tu n’as plus bougé. Tu vivais encore, mais tu étais si faible… Il ne restait presque plus de vie dans ton regard… Mais je ne voulais pas que tant de beauté disparaisse comme cela. Au lieu d’abandonner ton corps comme je l’aurais fait avec une autre, j’ai mordu mon poignet et ouvert ma peau. Alors, je j’ai forcé à boire mon sang, encore et encore, jusqu’à ce qu’il te remplisse… Il a fait cesser de battre ton cœur, mais tu vivais. Tes yeux se sont fermés et j’ai eu peur. C’était la première fois que je faisais de quelqu’un un de mes semblables, et je craignais d’avoir fait une erreur. Quoi qu’il en soit, je n’eus pas le temps de faire quoi que ce soit, car je sentais une présence, et mon instinct de survie fut le plus fort. De toute façon, je me souvenais très bien de la haine que j’avais ressentie face à mon créateur, allant même jusqu’à le tuer. Je ne voulais pas voir ta haine, qui aurait été égale à celle que j’avais ressentie. Tu étais désormais un vampire, nous pouvions nous comprendre, peut-être même ressentir de l’empathie… Je suis partie en te laissant là… Je regrette, si tu savais comme je regrette…