Dans l'immensité gelée de La Cania, territoire et demeure de Méphistophélès, une étrange créature se hâtait, pressée. Les immondes créatures, résidant dans l'antre l'ignorèrent, sans doute avaient-elles senti qu'il s'agissait de l'un des leur, d'un être démoniaque et hideux tout autant dans l'âme que dans la chair. Des grondements sourds résonnaient au loin, faisant parfois légèrement trembler le sol et les parois de glace. Glace dans laquelle il n'était pas rare de trouver des corps sans vie parfaitement conservés, ou des cadavres meurtris.
Mais notre individu n'avait cure de tout cela, il traçait son chemin sans jamais s'arrêter. Enfin, il parvint à l'entrée de la fournaise, le cœur de La Cania, où l'on retrouvait l'air brûlant et saisissant que l'on connaissait bien aux enfers. Et où l'on trouvait aussi son Maître, le propriétaire des lieux, Méphistophélès.
Un peu essoufflée, la créature continua son chemin. Le changement brutal de température ne le ralentit même pas. Il croisa quelques rares Diantrefosses et Barbazus, avant d'atteindre enfin l'immense Palais. Il se présenta aux portes à deux autres immondes créatures, puis se glissa
dans le hall. Le Palais n'avait rien de si étrange, il ressemblait à l'entrée d'un manoir, bien que décoré au goût du Mal. Il fit là une pause, reprenant son souffle, tandis que l'intendant des lieux, un démon douteux du nom de
Lutax ne s'approche avec un sourire dévoilant ses crocs pointus. D'une voix criarde, il s'écria :
- Ptomérax ! Puis-je savoir ce qui t'amène ?- Je dois parler au Maître immédiatement.- Hum ? Mais il ne veut pas être dérangé...Lé dénommé Ptomérax poussa un grognement furieux et empoigna Lutax par le cou, qui n'eut aucune réaction particulière, si ce n'est de garder son sourire agaçant. Le colérique approcha son visage de celui de l'intendant et reprit :
- C'est un cas d'urgence, sombre crétin ! Alors mènes-moi au Maître sur le champs ! Ou nous en pâtirons tous les deux...Lutax ricana et flatta Ptomérax de quelques petites tapes sur l'épaule. Une fois qu'il l'eut lâché, l'intendant lança :
- Fort bien, fort bien mon ami. Puisque tu insiste. Gardes donc ta mauvaise humeur, et suis-moi.Satisfait et soulagé que ce stupide intendant ne lui fasse pas perdre plus de temps avec des questions curieuses, il lui emboîta le pas, passant alors la porte qui menait à la salle du trône. La pièce était véritablement gigantesque, si bien qu'il faille marcher plus de trente mètres avant d'atteindre le trône. Celui-ci, d'ailleurs plongé dans le noir, ne permettait pas encore à Ptomérax de distinguer l'Archidiable. Il était d'ailleurs particulièrement nerveux à l'idée de se retrouver devant lui.Méphistophélès était assis négligemment dans le fond de son trône, caressant d'une main la tête
d'un énorme monstre, laissant des sueurs froides au visiteur.
Il y eut un long silence. Lutax s'était contenté de poser un genou à terre et d'attendre. Ptomérax l'imita donc. Au bout de longues secondes, l'Archidiable posa son regard de braise et terriblement terrifiant sur celui qui venait lui rendre visite.
- Pourquoi viens-tu m'importuner, Ptomérax ?La voix grave, suave, mais étrangement imposante du démon venait de retentit dans l'espace infini de la pièce. La créature prit son courage à deux mains et redressa la tête pour le regarder et prendre la parole :
- Maître. Il y a eu des complications... je...- Viens en au fait.- Plusieurs des camps orcs des forêts aux alentours de la Cité de Nexus où nous étions positionné ont été... entièrement détruits, Maître. - Voyez-vous ça...Les yeux luisants de Méphisto brillèrent subitement d'un éclat plus vif encore, puis il plissa les yeux. Il était clairement en colère. Ptomérax frissonna, mais ajouta :
- Nous avons été attaqués par une force mystique et étrange, mais extrêmement puissante. Comme si... la végétation était devenue furieuse, au moment où nous avons commencé la déforestation. Un orc a dit voir un espèce de gros arbre humanoïde... Il nous a eu par surprise... j'ai tenté de m'occuper seul de tout cela, mais... je suis impuissant. Pardonnez-moi, Maître.Il salua aussi bas que possible, craignant la colère de l'Archidiable. Celui-ci se redressa et se leva de son trône, s'approchant à pas lent, descendant les quelques petites marches qui le séparaient de ses sous-fifres. Là, il regarda ce général qu'il avait élu responsable de cette armée orc sensée décimer les villages autour de Nexus, et alors que celui-ci s'attendait à mourir dans d'atroces souffrances, Méphistophélès le contourna et se dirigea vers la sortie en lançant d'un ton ferme :
- C'est la dernière fois que tu me déçois, Ptomérax. Lutax, donne-lui quelque chose d'utile à faire en attendant mon retour.- Bien, Maître, répondit la voix criarde de l'intendant avant que l'Archidiable ne disparaisse dans une fumée noire.
Comme il l'avait souvent constaté, lorsque l'on veut que les choses soient bien faîtes, il faut les faire soi-même. Voilà pourquoi notre être démoniaque, l'un des maîtres des neufs enfers, s'était téléporté au milieu de l'une des plus grande forêt des environs de Nexus. La végétation y était vive et luxuriante. Méphistophélès regarda un instant ce spectacle avec dégoût, fit apparaître des flammes entre ses mains, et au moment même où il claqua celles-ci l'une contre l'autre, un brasier phénoménal commença à dévorer tout ce qui se trouvait autour de lui. Une véritable fournaise en moins d'une seconde. Alors que la nuit tombait, le brasier illuminait la nuit, défiant la clarté pure de la Lune, et l'Archidiable éclata d'un rire tonitruant.
Il savait que, très bientôt, ce défenseur de la nature si mystérieux allait faire son apparition...