Le Grand Jeu - Forum RPG Hentai

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Le Torrent [Laura]

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Laura

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Re : Le Torrent [Laura]

Réponse 15 mardi 31 décembre 2013, 16:01:54

Le compliment caressa à nouveau l'ego de la Sirène, bien qu'il n'eut dans les fait rien de très rassurant. Encore une fois, Ozvello mettait implicitement en doute l'humanité de son interlocutrice, et celle-ci n'avait pas la moindre idée de la manière dont elle était censée répondre à ces accusations en sourdine. Les ignorer, c'était certainement la meilleur chose à faire, décidément. Plutôt que de travailler à sauver sa couverture, elle préféra entrer dans le jeu de son flatteur :

« Qui te dit que tout ceci est réel, et que tu ne reposes pas en ce moment même au fond du torrent ? Penses-tu qu'il y ait de grandes chances pour que quiconque vienne à ton secours, dans cette région inhabitée ?... En réalité, ton cerveau se berce de douces rêveries pour alléger son agonie. Mais que cela ne t'empêche pas d'en profiter. »

Un léger rire découvrit la blancheur impeccable de sa dentition bien ordonnée. Ses cheveux noirs étaient de nouveau lisse et soyeux, et bien qu'elle ait passé toute la nuit à les démêler soigneusement, elle ne pouvait s'empêcher de les faire glisser sans cesse entre ses doigts, à la recherche d'une quelconque imperfection. C'est donc le visage légèrement incliné de côté, ses deux mains s'activant lentement sur les ondulations de sa crinière, qui passait toute entière par dessus son épaule, qu'elle observait Ozvello. La cape était maintenue par deux fins morceaux deux bois qu'elle avait taillés en pointe à l'aide de la dague du dormeur et soigneusement débarrassés de leur écorce. Ceux-ci perçaient chacun le tissu en deux endroit et faisaient office d’agrafes de fortune. Laura doutait être capable de poignarder quiconque avec des outils d'une si médiocre facture, mais au moins n'avait-elle plus à tenir elle même son habit. Et puis, selon le besoin, elle pourrait toujours emprunter à nouveau le poignard du jeune homme.

« C'est volontiers que je vous la laisse ! Cependant, moi qui pensais avoir eu un... euh, privilège particulier... en vous trouvant... dans votre plus simple appareil... Puis-je m'inquiéter du sort de vos affaires ? Il m'a semblé que vous aviez l'élégance d'une princesse, et que vous deviez avoir des atours en accord. Si vous n'en possédez pas, alors nous vous en trouverons à la prochaine ville... ?
- J'ai malheureusement du laisser mes vêtements derrière moi pour secourir un malheureux happé par les flots. Il nous faudrait traverser la rivière pour les retrouver, et je crains que cela n'en vaille pas la peine. »


Elle observa en silence Ozvello qui tentait de se mouvoir à l'aide de son bâton et les pieds nus. Sa curiosité la démangeait au sujet ce cette paire d'artefacts, mais elle ne chercha pas à en savoir plus pour le moment. Elle avait une foule de questions à poser, et si cela pouvait leur donner à parler durant le trajet, ça ne serait pas plus mal. Quelque part, elle était excitée à l'idée de passer quelques heures seule avec cet humain. Les conversations qu'elles avaient tenues jusqu'alors sur le continent avaient toutes été plus ou moins sources d'angoisse, du fait qu'elle se trouvait perdue et isolée dans un environnement étrange et potentiellement hostile. Elle avait hâte d'avoir réglé les questions pratiques qui s'imposaient pour pouvoir bavarder à l'envie. Elle opina doucement du chef lorsque qu'il lui proposa de contourner la rivière. C'était peu ou prou l'idée qu'elle avait en tête.

« Justement, nous pourrions suivre cette rivière dans le sens du courant : elle nous mènera à un village, si mes souvenirs sont bons. Si toutefois tu as de quoi me procurer des vêtements, ça sera l'occasion d'enfiler quelque chose de... plus pratique. »

A condition que son sens de l'orientation ne se soit pas trompé, le torrent devait, quelques heures de marche plus tard, rejoindre un fleuve qu'elle connaissait un peu. Il lui était arrivé de chasser dans les environs. A son embouchures, située à quelques vingts minutes de nage de la jonction avec le torrent, s'était installée une petite ville vivant essentiellement de la pèche. Par chance, les deux voyageurs n'auraient pas à traverser la rivière pour s'y rendre. Elle rejeta donc ses cheveux dans son dos et se mit calmement en marche, rejoignant la berge pour la longer ; à moins qu'Ozvello ne décidât de rester sur place et de la laisser partir seule devant pour lui jouer un tour cocasse, les deux voyageurs entamèrent leur périple côte à côte. Il ne fallut pas longtemps pour que la femelle se mette à causer joyeusement :

« Donc tu penses que je pourrais être confondue avec une princesse ? Tu en as déjà vu dans ta contrée ? A quoi cet endroit ressemble, exactement ?... Oh, tu peux t'appuyer sur moi, si tu juges que c'est plus pratique, pour marcher. » Disant ceci, elle lui proposait son bras avec enthousiasme, « J'espère que c'est un endroit plus grandiose que Nexus. Est-ce qu'ils laissent facilement entrer des étrangers ? Oh, j'ai vraiment hâte d'y être... Ah, tu marches vraiment lentement. Tu es sûr que tu ne veux pas d'aide ? Comment s'appelle l'endroit d'où tu viens, déjà ? Castel... j'ai oublié, hehehe ! »

Ozvello Di Luccio

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    Description
    Jeune homme de haute extraction (Castelquisianni), élégant dans ses manières. Richesse manifeste et étiquette respectée, malgré des habitudes de plus en plus mercenaires. Taille et carrure moyennes, souple.
    
    Bretteur et poète, gentilhomme en herbe, en perpétuelle quête de gloire.
    
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Re : Le Torrent [Laura]

Réponse 16 dimanche 26 janvier 2014, 22:50:04

Il fallait marcher, et surtout, ne pas se plaindre. C’était seulement les enfants qui disposaient de ce droit, et en choisissant de quitter Castelquisianni, Ozvello y avait renoncé définitivement. Ainsi, personne n’aurait connaissance de sa douleur et de sa gêne. De toute façon, il avait déjà vécu de pires épreuves le jour même. Il convenait simplement de se changer les idées, et la meilleure façon de le faire était encore de parler d’autre chose. La parole, songeait-il encore, c’était bien le meilleur des remèdes à la plupart des maux de l’univers. S’exprimer avec un ton gai, insouciant, et s’efforcer de tenir un rythme un peu plus rapide que ce qui aurait été raisonnable, voilà quel serait son anesthésiant.

« Assurément, vous avez une grâce pareille à celle des princesses... de plus, vous avez toutes ces choses innées qui font la beauté des femmes, et ni le temps ni le labeur ne vous les ont prises. Car voyez-vous, je pense qu’une paysanne peut naître avec les attributs d’une reine... mais sa mauvaise vie lui les prendront le plus souvent bien vite. Hélas, je crois que cela se décline parfois dans un sens contraire ! Même une noble famille peut avoir quelques héritiers sans aucun charme, auquel seuls de précieux atours donneront un peu d’attrait. Cependant, avec ou sans parures, personne ne douterait jamais du prestige de votre lignage, si vous vous présentiez de cette manière ! »

L’esprit de l’adolescent était stimulé par son propre monologue, et sa pensée rattrapait avec peine seulement une langue qui avait toutes les aisances à galoper sans lui. Les mots qui sortaient de ses lèvres le poussaient à formuler de nouvelles phrases, et à creuser sa réflexion.

« D’ailleurs, vous n’avez pas davantage de manières roturières. J’espère que vous ne me tiendrez pas rigueur d’avancer que vous n’avez pas l’air d’avoir jamais travaillé la terre... Quelle est donc votre condition ? Êtes-vous fille de bourgeois, de bailli ? »

Toujours les mêmes questions se posaient quant à la présence mystérieuse de la jeune femme en ces lieux, dévêtue et pourtant excellent nageuse. Pourtant, il choisit de mettre ces préoccupations de côté un instant. La tentation de s'étendre sur un sujet qu'il connaissait si bien, la ville dont il était originaire, était trop forte. Il avait eu tellement de cours de commerce et d'histoire... et même s'il aurait souhaité les oublier, il ne pouvait que les restituer.

« La bourgeoisie et la noblesse se confondent aisément à Castelquisianni. Les barons de la principauté se trouvent le plus souvent être les marchands qui réussissent depuis plusieurs générations. Mais n'est-ce pas ainsi dans tout état civilisé ? La noblesse d'épée n'est pas très courante, en réalité, et cela fait longtemps que les armes ne constituent plus la voie d'ascension principale. Les fonctions strictement militaires ne sont pas tellement prestigieuses, encore que tout privilégié sait manier le fleuret. La tradition est de cultiver ses propres richesses, plutôt que d'annexer celles des autres. »

Lorsque Laura lui proposa son bras, le garçon hésita une seconde. Puis il décida qu'il serait plus impoli de refuser l'aide que l'accepter ne serait humiliant. Il n'était plus vraiment à une assistance près, et même sans cela, il était déjà son obligé... Le tableau, une femme nue enveloppée dans une cape, et un bretteur boitant, ne souffrirait pas d'un peu plus de ridicule. Il convint donc de consentir à se faire soutenir, tout en faisant bien attention à s'y appuyer le moins possible. Au-dessus de la cime des arbres épars, on apercevait un ciel bleu pâle.

« Si vous aviez été une créature des flots, j'aurais voulu en être une des vents. Je n'aime guère garder les deux pieds sur terre. Cela me désole que les événements vous ai donné une image aussi  gauche de moi. Je crois avoir quelques qualités pour la voltige, quand une blessure ne me fixe pas à la glaise ! »

En effet, à mesure qu'ils avançaient, le sol sous leurs pieds devenait un peu plus meuble, et le ruisseau moins profond quoique plus large. Si le processus continuait ainsi, ils arriveraient certainement à un gué sous peu. Son passage ne serait toutefois pas nécessaire, si les connaissances de la jeune femme en matière de géographie se révélaient exhaustives, et qu'elle continuait dans son idée d'atteindre le village proche. En attendant cela, Ozvello répondit aux dernières questions.

« Entrer dans Castelquisianni est une chose facile ! Bien sûr, si l'on transporte des marchandises destinées au commerce, il faut s’acquitter d'une taxe... à moins de posséder un titre. Il en va de même si l'on souhaite emprunter le fleuve dans une embarcation, pour se rendre à la cité Nexus, ou vers le royaume elfique de la Sylve. Demeurer à Castelquisianni est une autre affaire, du moins si l'on veut résider dans un beau quartier. Les auberges sont plutôt chères, il me semble. Mais j'avoue ne pas connaître les faubourgs les plus populaires et certainement plus accessibles. Je n'ai jamais eu à m'y rendre. »
TelkaArchieVianOzvelloCyriel
MP


Laura

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Re : Le Torrent [Laura]

Réponse 17 lundi 24 février 2014, 18:00:35

Pas insensible à la flatterie, la Sirène minauda comme une adolescente devant le premier charmeur venu. Pour sûr elle avait de la grâce, et il était toujours plaisant de l'entendre relever de si belle manière. Elle se voyait déjà dans une parure de reine, étouffante mais chatoyante, au milieu de ces Hauts Hommes. Si son guide lui assurait que c'était possible  - et c'était bien ce qu'il faisait, à moins qu'une nuance n'ait échappée à l'esprit sagace de l'ondine - elle saisirait sa chance. Peut être qu'elle aurait la chance de faire la guerre.

Alors, fille de bailli ou de bourgeois ? Qu'est-ce qu'un bailli, d'ailleurs ? Elle aurait bien opté pour la réponse du bailli - la sonorité était bien plus plaisante que celle de "bourgeois" - si elle seulement elle avait eu la moindre idée de ce sont il s'agissait. Et son ignorance l'aurait sûrement faite pencher vers la deuxième réponse, si elle avait eu plus de connaissance de ce côté là.

« Fille de musicien ! »

Elle n'en dit pas plus. Elle espérait bien qu'il n'en demande pas plus non plus, car elle risquait fortement ne pouvoir satisfaire sa curiosité. Toutefois, fille de musicien était le rôle qu'il lui semblait le plus aisé de jouer. Après tout, elle aurait été bien en peine de soutenir une conversation sur autre chose que la musique ou la poésie, sans que son interlocuteur ne commence à trouver son inculture générale étrange.

« Mais mon père est mort, et ma mère aussi. Donc voilà. »

Voilà qui lui éviterait des questions auxquelles elle ne pourrait répondre.= : Les ancêtres décédés, le sujet était clos, en principe. Une bonne chose de faite. Peut être aurait-il été avisé de prendre un air chagrin, mais c'est bien trop tard qu'elle y pensa. Elle ne se laissa pas tracasser trop longtemps par son erreur, suivant avec attention l'exposé que lui donnait Ozvello de sa cité natale.

Le récit était fascinant et, bien qu'elle ne le comprit que partiellement, elle ne disait mot, se contentant de hocher la tête en encourageant le bavard de son regard pétillant de curiosité. Il lui faudrait certes reprendre la parole à un moment où à un autre, mais que pouvait-elle répondre à tout ça ? Pas grand chose, en vérité. L'expérience et le vécu lui manquaient cruellement, pour mettre des images sur les mots qu'Ozvello bombardait sur elle. Pour l'heure, elle ne pouvait que fantasmer. Des paysages rutilants se déployaient dans son imagination : des tours effilées grattant les nuages, des bâtiments énormes formant des dédales aux formes insensées, de larges avenues fleuries encadrées par des façades de granite blanc aux nervures bleues. Quelques hommes et femmes, jeunes, beaux, vêtus de manière extravagante, affairés à... à leurs affaires d'humains.

« J'ai vraiment hâte d'y être ! »

Mais je risquerais de m'y perdre...
songea-t-elle, je ne peux pas prendre le risque de faire autant de bêtises qu'à Nexus. Je n'aurais peut être pas de la chance éternellement... il me faudra absolument un guide.

« Il faudra que tu m'expliques... une foule de choses. Tous les hommes te connaissent, là d'où tu viens ? A Nexus, j'avais beau m'attirer des ennuis, il me suffisais de m'enfuir et on ne me retrouvais jamais ! Je ne veux pas te faire tuer, évidement, mais ce serait quand même très pratique si tu pouvais entrer avec moi. Je ne connais pas grand chose aux villes. »

Peut être parlait-elle de la survie du jeune homme avec trop de légèreté. Après tout, c'était certainement un sujet qui lui tenait à cœur, à lui. Il avait pourtant l'air si dévoué qu'elle se demandait jusqu'à quel point il serait capable de négliger ses propres intérêts.

« Enfin, tu feras comme bon te semble, évidemment. » ajouta-t-elle avec un sourire bienveillant. Elle n'aurait pas le cœur de l'entrainer à sa perte contre son gré, s'il préférait finalement se dérober. Et puis, ç'aurait été plus dangereux et contre-productif pour elle.

[...]

Les deux "amis" ne tardèrent effectivement pas à croiser le chemin d'un passage à gué, que la Sirène n'envisagea même pas d'emprunter, sûre qu'elle était de sa destination. Elle ne déviait pas d'un pouce de sa trajectoire, et suivait le courant de manière rectiligne, ignorant les fluctuations du lit en largeur et en profondeur, quitte à marcher pieds et mollet dans l'eau, quitte à entrainer le gentil-jeune-homme dans le sillon de ses clapotis décidés (non, ne soyons pas mauvaise langue, elle ralentissait assez, lorsque nécessaire, pour qu'il reste à son côté). Heureusement pour Ozvello, dont la fierté était sans doute le pire des instincts possibles entre les griffes de sa créancière, la tendance à l’élargissement du fleuve fut bien vite effacée par son austère opposée, et les flots dilués se resserrèrent progressivement en un courant profond pour s'enfoncer avec un calme grondement entre les pente douces qui se formaient inexorablement à ses flancs. Bientôt, l'inclinaison du terrain devint trop marquée pour y randonner convenablement, et le couple de marcheurs dut s'écarter du rivages de plusieurs mètres pour progresser aisément. Les arbres, eux, se clairsemaient, et de discrets souffles d'air chatouillaient par moment la peau de Laura ; à mesure qu'ils avançaient, les arbres se faisaient de plus en plus rare et la brise de plus en plus insistante, jusqu'à ce qu'ils se retrouvent au beau milieu d'une plaine battue par le vent, à peine bosselée par des reliefs recouverts d'une herbe inégale et terne. Les bourrasque firent voler à plusieurs reprises les cheveux de la noiraude ainsi que son vêtement de fortune, amenant chaque fois à ses narines l'odeur discrète et familière du grand large. Une odeur qui aurait été réconfortante, en d'autres situations. Seulement, ici, elle indiquait que la mer était dramatiquement proche... alors que les voyageurs n’apercevaient toujours pas signe de vie sédentaire. Une émotion désagréable, à mi chemin entre la panique et la honte, noua les entrailles de Laura. Il devrait y avoir une ville ici. Non, pas ici, mais au bout de ce fleuve. Elle était sûre de suivre le bon fleuve. Elle ne reconnaissait pas l'endroit. Elle ne voyait pas de ville. Pas de village. Rien du tout.

Mais peut-être, en grimpant ce petit relief, là devant ?...

Ozvello Di Luccio

Humain(e)

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Re : Le Torrent [Laura]

Réponse 18 mardi 08 avril 2014, 16:18:35

Succédant à une expression de surprise, c'est une expression plus sombre qui vint s'inscrire sur le visage d'Ozvello. Quel statut social se cachait-il donc derrière cette déclaration un peu obscure de descendante de musicienne ? Cela pouvait signifier à la fois tout et rien, et ne lui en apprenait en somme pas beaucoup sur son interlocutrice, qui paraissait vouloir rester plus que jamais mystérieuse. En effet, les musiciens, à Castelquisianni comme dans de nombreuses autres régions semblables, étaient divisés en plusieurs catégories qui avaient entre-elles peu de choses à voir.

Il y avait pour une part que beaucoup des nobles savaient jouer d'un ou plusieurs instruments. Cet enseignement ne concernait dans la cité marchande, contrairement à certaines cultures voisines, pas seulement les progénitures féminines. Les plus doués de ces individus privilégiés se consacraient également à la composition, dont certains faisaient même une activité prenante. Toutefois, on appelait rarement ceux-là musicien, car même s'ils y passaient beaucoup de temps, ce n'était pas là leur titre principal. Il y avait pour une autre part les fabricants d'instruments, qui savaient assez souvent en jouer, mais qui ne se représentaient qu’exceptionnellement. Le terme consacré était luthier lorsqu'ils faisaient des cordes, facteur quand il s'agissait de vents ou de claviers. Ceux-là étaient de petits artisans, et les plus réputés, des artisans d'art.

Puis il y en avait encore d'autres, qui se spécialisaient uniquement sur l'interprétation. Cependant, pour combien gagnant leur vie grâce au mécénat d'une personnalité fortunée en existaient-il qui trimaient, ne se produisant guère ailleurs que dans les auberges et les places ? Une grande partie de ces derniers, et tout ceux qui vivaient à la campagne plutôt que dans les villes, n'étaient des vagabonds... des forains à l'honnêteté discutable qui se déplaçaient en caravane, cherchant leur public sur les routes et gardant dans leur roulotte toute leur famille. En conséquence, lorsque le père était musicien, de quel travail pouvait bien écoper leurs proches ? Ozvello n'était pas naïf au point de penser qu'une majorité d'entre-eux ne s'adonnaient pas à une mauvaise vie... Une mauvaise vie qui aurait pu d'ailleurs tout-à-fait expliquer leur disparition prématurée. La combinant aux autres éléments qu'il avait réussi à récolter, cela s'orientait vers une explication crédible quoiqu'assez déplaisante.

Toutefois, il n'était pas garçon à garder de suspicions trop encombrantes sur les gens qu'il croisait. Caracole, si elle avait été encore là, songea-t-il malgré lui, aurait certainement tenté de le mettre en garde. Il n'avait connu l'épée que pendant une courte période, mais il avait déjà pu éprouver la méfiance qu'elle avait des individus. Sans doute, se dit-il, aurait-elle fait une partenaire idéale, comblant son manque de prudence et son ambition par sa paranoïa et son scepticisme. En l'absence de la rapière enchantée, il n'avait plus aucune sinistrose pour tempérer son optimisme. Cependant, encore un peu troublé par sa réflexion, qui jetait une lumière particulière sur la nudité dans laquelle il avait trouvé la jeune femme, il se contenta de baisser les yeux et d'affirmer, de façon lacunaire et d'une voix blanche :

« Je suis désolé. »

Comment ses spéculations pouvaient-elles se mouvoir avec une si grande vivacité de cela à l'être mystique ? Probablement parce qu'aucune n'était sûre. Et quand bien même il se serait agit d'une follieuse –il se refusa à la nommer ainsi, et préférait le terme de courtisane–  il n'avait pas à la juger de quelque façon que ce soit. Beaucoup de filles, il ne l'ignorait pas, avait leur beauté pour toute ressource, ce qui ne les rendait pas moins dignes d'être considérées. S'il s'était échappé de Castelquisianni, du reste, ce n'était guère pour côtoyer encore la belle aristocratie à la vertu préservée, comme il l'avait fait jusqu'ici. Croiser le chemin de telles personnes ferait partie intégrante de l'apprentissage qu'il avait lui-même décidé de s'imposer. Restait la nécessité de se comporter en homme honorable face à ceux et celles auxquels la vie n'avait pas donné d'éducation semblable.

« Je vous suivrais jusqu'au bout du monde, madame, s'il m'en incombe, et cela avec un plaisir infini. Je vous dois plus que tous les risques qu'il me serait donné de prendre. Toutefois, j'ai pour devoir supérieur de veiller à votre sécurité, et il me faudra faire preuve de discrétion si je veux m'assurer que ma présence à vos côtés ne constitue pas un danger trop important pour vous. Je pourrais peut-être concevoir de me déguiser à l'avenir, car dans la tenue où vous me trouvez, je demeure encore trop identifiable. Il ne faudrait pas plus de quelques pas dans l'enceinte de la ville pour que l'on signale mon retour à la princesse, qui elle me ferait aussitôt emprisonné, et vous avec si je n'y prends pas garde. C'est une perspective qui ne m'enchante guère, mais l'habit d'un bourgeois sera sans doute pour moi salvateur dans le cas de figure où je devrais vous accompagner à l'intérieur même de Castelquisianni. Nous pourrons probablement acquérir tout cela sur la route. »

Il aurait préféré affronter un dragon que de pénétrer à nouveau dans sa ville natale, mais pour autant, les dragons ne l'avaient jamais tant effrayé que cela. Pour celle qui l'avait secouru, de plus, il aurait affronté tous les monstres cracheurs de feu de Terra. Faire face à une famille furieuse et à une monarque voulant plus que sa mort ne demandait après tout qu'un degré légèrement supérieur de courage. Celui d'affronter la possibilité d'un regard sur ce qu'il valait. En plus d'être mort, il risquait bien d'être jugé, et c'était bien plus dérangeant que l’office d'une chimère, qui, elle, se serait contenté, sans autre forme de procès, de le brûler vif.

« Je serais bien en peine de  vous comparer la garde de Castelquisianni avec celle de Nexus, ou de toute autre grande ville. Je suppose qu'elles sont toutes plus ou moins semblables, à l'exception de la Specia, la garde militaire, à laquelle nous n'aurons je l'espère pas affaire. C'est un bon corps d'armée, pauvre en hommes mais dont les entraînements sont très exigeants, d'autant que j'en sais. J'ai un frère qui y officie en tant que lugarteniante... ce qui est un bon grade pour un mâle de son âge : les officiers sont le plus souvent des femmes, qui conservent jalousement un pouvoir acquis il y a de nombreux siècles. Quant à ce que vous souhaitez faire au sein même de cette ville, vous voudrez peut-être me le dire ? »

Que son interlocutrice soit en mesure de s'attirer régulièrement suffisamment d'ennuis pour s'en préoccuper ne le rendait pas particulièrement serein. L'inquiétude était pourtant compréhensible, pensait-il, car les provinces où s'exerçait un pouvoir xénophobe relevant de la tyrannie militaire ne devaient pas être rares. On lui avait toujours affirmé qu'il possédait beaucoup de chance de vivre dans une cité dont les dirigeants étaient si éclairés et modérés en toute chose. Évidemment, depuis qu'il était recherché par les dirigeants en question, l'affirmation lui parlait moins.

[…]

Le trajet ne fut pas particulièrement agréable pour Ozvello, qui n'appréciait pas vraiment de se souiller les pieds sur les terres molles de la route. Toutefois, malgré le défaut évident qu'elles présentaient : elles étaient salissantes, elles avaient pour avantage de faire moins souffrir sa cheville que ne l'aurait fait un sol plus ferme. S'enfonçant légèrement dans la glèbe tendre, ses appuis étaient moins violemment sollicités, permettant la marche soutenue qu'il s'imposait. Devant eux, le paysage s'annonça d'abord comme désespérément vide. Les narines du garçon, moins entraînées que celles de sa complice, ne relevèrent dans l'air rien de particulier. Il n'y avait que des collines verdoyantes ou boueuses autour desquelles serpentait inlassablement le cours d'eau au tracé peu régulier. Il espérait seulement que ce voyage épuisant et douloureux pour lui prenne fin au plus vite, et qu'ils trouvent un lieu sûr pour faire escale.

Ses prières furent entendues dans la soirée, après plusieurs heures encore de randonnée éreintante. Arrivés au sommet d'un relief, se découvrit enfin devant les yeux des marcheurs, non-pas le village attendu, mais un hameau isolé. C'était la demeure typique d'un paysan qui devait vivre à une distance relativement importante de toute autre bourg, et qui devait pour cela être dans la capacité de se défendre d'éventuels petits groupes de pillards. Excepté cela, le bretteur, peut-être trop meurtri pour bien voir, ne nota rien de particulier. La vision lui fit tout-de-même grand plaisir :

« Ce n'est pas la cité que nous espérions, mais cela fera à n'en pas douter le meilleur des endroits pour faire escale ! Les cultivateurs sont des gens bons et généreux, possédant un sens inné de l'hospitalité ! … du moins, c'est ce que l'on m'a dit. »


Le garçon n'avait bien sûr aucune expérience de ce type de milieu... en sus, il fallait ajouter que les agriculteurs des alentours de Castelquisianni, bien plus riches que la plupart de leurs homologues, étaient aussi pour cette raison bien moins rustres. La ferme était toutefois trop éloignée pour bénéficier à coup sûr du rayonnement de la cité.

« En revanche, il me semble que ce sont des gens extrêmement religieux et conservateurs. La retenue est de mise : il ne s'agit pas de heurter leurs croyances et leurs convictions profondes. Il nous faudra éviter les sujets qui pourraient faire des polémiques, même s'ils semblent vouloir les aborder, et nous montrer modérés ou abstraits dans toutes nos réponses. Soyons humbles et consensuels, et ils nous accueillerons avec bienveillance. »

Ozvello secoua la tête, conscient de faire preuve d'un peu trop de prévenance. Ce serait beaucoup plus simple, il était prêt à le parier, lorsqu'ils seraient face à un vieux paysan, le cheveux blanc mais l’œil vif et bon, prêt à leur offrir gîte et couvert sous le toit qui abritait sa petite famille.

« Enfin, vous avez peut-être une meilleure connaissance que moi en la matière. J'ai pu assister à de nombreux cours de diplomatie et de protocole, mais je doute de leur pertinence. L'étiquette Castelquisianne est affaire complexe. Il ne faut peut-être pas chercher matière si compliquée. Que diriez-vous d'aller frapper à leur huis ? »

Il sourit gaiement à son interlocutrice, et entreprit de descendre la colline, suivant un sentier qui les conduirait droit à la propriété.
TelkaArchieVianOzvelloCyriel
MP


Laura

Créature

Re : Le Torrent [Laura]

Réponse 19 lundi 14 avril 2014, 12:52:26

[Suite à une mauvaise manipulation de votre Sirène favorite, le pavé que vous auriez du prendre dans la gueule fut perdu. Pour cette fois, l'action sera résumée en quelques lignes (et ça nous fera pas de mal de respirer un peu, hein?)]

« Quant à ce que vous souhaitez faire au sein même de cette ville, vous voudrez peut-être me le dire ? »

Cette question reste sans réponse jusqu'au sortir de la forêt, puisque sinon la narration précédente en serait contredite. Cependant, cette interrogation ne cesse de tourner dans la tête de l'ondine, tandis qu'ils randonnent en direction de leur objectif ; Laura s'abandonne donc à l'introspection, et finit par en tirer la conclusion qu'elle n'a aucun objectif précis, et qu'elle se fait sûrement des idées à propos de Castelquisianni. Cela n'émousse cependant pas sa détermination à avancer car, comme elle le fait remarquer de but en blanc à son jeune compagnon alors qu'ils débouchent tout deux dans la plaine :

« Il faut bien aller quelque part, j'imagine. »

Prise par la double envie de se confier et de le taquiner, elle lui fait l'aveu suivant, tandis qu'ils escaladent le relief au sommet duquel ils verront la misérable bâtisse qui trône en lieu et place de ville :

« Si c'est important pour toi, sache simplement que je n'ai rien à faire à Castelquisianni. J'y vais simplement guidée par mon intuition, même si celle-ci m'a souvent trompée. En fait, je compte une peu sur toi et la chance pour me donner des idées, une fois arrivée là bas... J'espère que je n'émousse pas ta loyauté, petit homme ! » achète-t-elle en gloussant.

Arrivée en haut de la colline, la constatation de l'absence de ville met un coup à la détermination de Laura. Crotte de poulpe, jure-t-elle en elle-même. Elle écoute cependant les conseils avisés de on guide avec une attention certaine, et finit par hocher la tête d'un air approbateur.

« Très bien, allons frapper à leur ouïe, alors! »

Et les deux voyageurs descendent jusqu'à l'entrée de l'habitation. La sirène hésite un moment devant la porte et se tourne à nouveau vers Ozvello :

« Je... il serait mieux que je te laisse parler. »

Et elle frappe le battant de sa main gauche, avant de la laisser retomber le long de son corps, masquant sa douleur derrière un visage inexpressif, maudissant intérieurement cette coutume masochiste de s'interpeller en frappant du bois avec les jointures.

PNJ

Re : Le Torrent [Laura]

Réponse 20 lundi 14 avril 2014, 16:05:15

Quelque part, dans les étages d’une ferme abandonnée depuis plusieurs mois déjà, une silhouette se réveillait d’un long sommeil. Roulée en boule sous les poutres soutenant les tuiles du toit branlant, l’ombre s’étira, laissant chaque membre glisser sur le parquet grinçant, évitant les trous dans d’indescriptibles arabesques. La pièce se remplit peu à peu de sa présence, habitant chaque recoin éclairé pour ne plus finir qu’en obscurité. Puis, dans un bruit strident d’un ballon de baudruche que l’on lâche pour qu’il se dégonfle, l’ombre se rétracta. Demeurant présente malgré la luminosité, elle reprit la taille qu’elle préférait, celle d’un humain aux alentours de ses dix ans. S’extrayant du vieux coffre en pommier dans lequel elle s’était lovée, la silhouette se redressa, hésita avant de se couler sur le sol et de filer en direction de la porte. Sans prendre la peine de l’ouvrir, elle glissa dessous et se colla soudainement au mur pour immédiatement grimper au plafond. Elle n’aimait pas les escaliers, et préférait largement prendre la voie des airs.

Arrivant au premier étage, l’ombre disparut un instant dans l’obscurité étouffante du couloir, avant de finalement réapparaitre à la fenêtre d’une des chambres. Deux humains se tenaient devant la porte, et semblaient hésiter à entrer. Un sourire narquois se dessina sur les traits de l’ombre, creusant un fossé blanchâtre étonnamment brillant. Voilà donc ce qui l’avait réveillée. Voilà ce qui trompait enfin son ennui. La silhouette se fit floue, tout à coup, et les bords de son être parurent trembler, comme si elle était prise d’une crise d’hilarité incontrôlée. Puis, dans le même chuintement que lors de son exercice au saut du lit, elle se dispersa à travers toute la ferme. Des ombres s’agitèrent derrière les fenêtres du rez-de-chaussée, chassant leurs congénères entre les assiettes en porcelaine ébréchée et les fers à cheval ayant appartenus aux anciens étalons de la ferme suspendus au mur, symbole de chance. La silhouette se referma peu à peu, morceau par morceau, souriant toujours en prévision de l’amusement que les deux humains l’ayant réveillée allait lui procurer.

Tout à coup, la porte d’entrée s’ouvrit en grinçant devant les deux jeunes gens. Au même moment, une boite à musique se mit en route dans le grenier, la mélodie arrivant difficilement jusqu’en bas, portant un air de berceuse pour enfant. La chatière se mit en branle et s’agita, comme sous l’effet d’un vent inexistant. La silhouette fit un petit tour du côté du bâtiment de derrière la construction principale, pour ouvrir en grand les portes de l’étable à présent vide de toute présence. Un peu de paille s’envola sur son passage, avant qu’elle n’en ressorte, satisfaite de la noirceur du lieu. Elle y laissa quelques ombres disséminées pour s’agiter en bordure de la lueur, laissant l’impression que le tout était vivant, puis retourna à son poste d’observation, au plafond de l’escalier. Elle voulait s’amuser quelque peu avec ces humains, et en dernière invitation, laissa une flamme naître au sommet d’une bougie pleine de poussière, rendant presque la cuisine rudimentaire accueillante malgré son abandon de toute forme de vie.
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Ozvello Di Luccio

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    Jeune homme de haute extraction (Castelquisianni), élégant dans ses manières. Richesse manifeste et étiquette respectée, malgré des habitudes de plus en plus mercenaires. Taille et carrure moyennes, souple.
    
    Bretteur et poète, gentilhomme en herbe, en perpétuelle quête de gloire.
    
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Re : Le Torrent [Laura]

Réponse 21 jeudi 17 avril 2014, 17:30:14

C'était toujours la même chose avec les femmes, finit par penser Ozvello, quoi qu'il n'eut aucune expérience pertinente dans ce domaine. Elles n'avaient pas d'objectif précis, créatures indécises et volages, incapables de constance, mais souhaitaient quand même imposer leur volonté changeante à ceux assez galants pour les écouter. Il avait même une théorie sur pourquoi Laura souhaitait rallier Castelquisianni en particulier, tout en sachant que ce serait pour lui la plus dangereuse des destinations : ce que les femelles cherchaient en premier lieu, c'était que l'on se batte pour elles. Il y avait une analogie certaine avec ces bêtes aux grandes cornes, dont seuls les mâles ayant triomphé à grand fracas de leurs concurrents recevaient les grâces des femelles. Plus proches encore, les joutes chevaleresques pendant lesquelles s'affrontaient soldats en armes pour l'amour d'une princesse. Voilà qui n'était qu'une illustration particulièrement éloquente du désir des femmes d'être au centre de conflits.

Heureusement, un tel comportement avait toujours fait parti des aspirations romantiques du bretteur. Il y avait, songeait-il, beaucoup de noblesse à se battre pour une demoiselle ; bien plus qu'il n'y en avait d'ailleurs à guerroyer pour des terres ou des richesses... Aussi n'était-il pas particulièrement réticent à ce qu'on le balade un peu, et n'en tint aucunement rigueur à son interlocutrice.

« Aucunement, madame. » répondit-il, avec un sourire démuni et un peu résigné. « Votre intuition ne vous trompe pas si elle vous amène à supposer qu'il s'agit d'une cité merveilleuse. C'est simplement qu'elle ne l'est pas pour tout le monde... »

Au bout des pérégrinations des voyageurs s'offrit alors la porte d'entrée de la ferme. Le jeune homme se permit de sourire encore au calembour de Laura. Puis il ne put qu'acquiescer lorsqu'elle lui proposa de parler pour eux deux. Il avait l'habitude de prendre la parole, dialoguer avec son prochain était pour lui une seconde nature. Cependant, les occasions qu'il avait de se frotter aux gens du peuple avaient été peu nombreuses, et il craignait que sa verve un peu trop littéraire ne le desserve lorsqu'il allait s'agir de communiquer avec ces individus simples. Devrait-il éliminer de son vocabulaire les termes trop recherché, tels que « objurgation », « impécuniosité » ou encore « munificence » ? Il ne s'agissait pas non-plus les prendre pour des imbéciles complets. Les paysans devaient au moins connaître le second, tant la chose leur était familière.

Alors que les coups avaient été frappés et que l'adolescent préparait ses phrases les plus élémentaires, la porte s'ouvrit soudain... sans qu'aucun hôte ne s'en trouve révélé pour autant. Ozvello se demandait là s'il devait croire à une intervention du hasard. Les légers chocs sur le bois avaient-ils été suffisants pour faire céder une clenche usée ? C'était l'explication qui lui parut la plus rationnelle sur l'instant. C'était sans compter sur la musique douce qui remplaça aussitôt le silence, et un coup de vent aussi imperceptible qu'inattendu. Troublé, il murmura :

« Voilà qui n'est pas absolument rassurant... Non ! Je veux dire, un accueil comme celui-ci n'est pas chose commune. »

Il s'était vite repris, ne voulant laisser penser que l'étrangeté de l'événement l'effrayait, ou même le mettait seulement mal-à-l'aise. Il n'y avait rien, ou tout du moins personne : c'était le cas de le dire. La conjecture la plus vraisemblable aurait été que la ferme était abandonnée... Mais alors, comment expliquer la mélodie ? Pire, le bretteur aperçut un peu plus loin la flamme d'une bougie. Ne se laissant pas aller au doute, il entreprit d'appeler de vive voix un éventuel résident.

« Bonjour ! … Quelqu'un demeure-t-il ici ?! … Bien...  Disons qu'il convient d'entrer, alors. Peut-être nos hôtes souffrent-ils d'hypoacousie. »

C'était un mot un peu compliqué, destiné au cas où un paysan écouterait encore... il ne s'en sentirait ainsi sans doute pas vexé. S'il y avait encore quelqu'un qui habitait ici, ne put-il s'empêcher de penser, il était bien négligé. Cependant, il convenait de faire preuve de tolérance, car probablement les petits gens ne disposaient pas de tout le temps qu'il aurait fallu pour garantir une hygiène impeccable. Abandonnant là son immobilité et les derniers fondement qui le poussaient à croire à quelque-chose de banal, Ozvello s'avança dans la pièce aux allures de cuisine. Le bois était froid sous ses pieds, et bien que le sol fut poussiéreux, il ne s'en formalisa pas, car il n'avait plus non-plus de propreté plantaire à faire valoir.

Aussitôt, il porta son attention sur l'étrange cierge, encore allumé. Une observation minutieuse lui apprit que la cire était encore majoritairement froide et solide. Les gouttes blanches autour de la mèche s'étaient solidifiées depuis longtemps, et n'étaient réveillées que lentement par le feu. C'était particulièrement troublant considérant qu'aucune présence n'était détectable.

« Je peux me méprendre, mais il me semble que cette bougie n'a été embrasée qu'à l'instant... Une personne se trouvait donc ici il n'y pas plus d'une minute. Curieux... Si Caracole avait été avec nous, elle aurait su nous dire si une quelconque sorcellerie était à l’œuvre ici. Qu'en pensez-vous, madame ? »

L'adolescent se retourna vers la jeune femme. Évidemment, les chances qu'elle en sache plus que lui sur le sujet étaient minces... encore que les familles de bohémiens étaient parfois versées dans de petites magies. Toutefois, peut-être un conseil féminin ne serait-il pas de trop, même s'il ne valait pas l'expertise d'un objet lui-même enchanté et dont les énergies mystiques constituaient la nourriture.
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Laura

Créature

Re : Le Torrent [Laura]

Réponse 22 samedi 19 avril 2014, 10:11:59

« Oh, de la musique. » releva simplement Laura.

Elle avait décidé de laisser Ozvello agir, c'est pourquoi elle ne fit aucun mouvement jusqu'à ce que lui même se décide à pénétrer les lieux. Ceux-ci n'avaient rien d'effrayant et, pour tout dire, la Sirène ne voyait pas en quoi cette ferme pouvait différer de n'importe quelle construction de main d'homme. Mais certainement son jeune guide avait l’œil plus entraîné à reconnaître ces choses là ; si quelque chose l'inquiétait, elle, ça n'était rien d'autre que la réaction de son compagnon. Et encore. Non, elle ne se sentait décidément pas menacée. Elle fit le tour des lieux en passant ses doigts sur les meubles poussiéreux, s'amusant à les recouvrir de d'une douce pellicule grise et à faire voler de petits nuages derrière elle. La semi-obscurité ne la dérangeait pas vraiment ; les yeux de ses semblables avaient la capacité de percer la lourde noirceur des fonds marins, et, dans cette cuisine éclairée par une faible chandelle, la Sirène n'avait rien à envier à la finesse de perception d'un chat.

« Je ne perçois nulle sorcellerie... j'ai déjà vu des portes s'ouvrir par des mécanismes tarabiscotés, et tout le monde trouvait ça normal. Enfin, tu dois savoir mieux que moi – je suis musicienne, je n'y connais rien en portes. »


Elle frotta ses doigts l'un contre l'autre pour les épousseter et pivota nonchalamment pour marcher jusqu'à une embrasure sans porte, qui traversait la roche d'un mur massif. Dans une large salle non éclairée et aux volets fermés, elle repéra un escalier qui, de doute évidence, menait à l'étage supérieur. Elle s'engouffra dans la pièce rectangulaire, où la lumière était rare au point qu'Ozvello n'y distinguait sûrement pas grand chose, et s'arrêta au pied de l'escalier dont les marches étaient recouvertes de la même couche de neige grise uniforme que les meubles et le plancher. C'est drôle... aucune trace de pas. Peut être bien qu'une quelconque magie était à l’œuvre ici, finalement. Si c'était le cas, elle semblait plutôt bienveillante. Ne les avait elle pas invités à entrer, tout en prenant soin de leur offrir la lueur d'une bougie ?

Laura jeta un coup d’œil ascendant : l'étage supérieur était bien plus sombre que leur position actuelle, mais encore une fois, ce genre d'ambiance n'était pas de celles susceptibles de l'effrayer : à moins de se trouver dans le noir complet, elle y verrait toujours bien assez pour se repérer aisément.

« Je vais voir là haut. »

Sans rien ajouter, elle entama l'escalade d'un pas souple et relativement silencieux, malgré les craquements plaintifs que ses pieds arrachaient parfois aux planches. Elle restait l'oreille aux aguets, attentive à cette mélodie aux notes brèves et clinquantes. C'était sans aucun doute de la musique d'humain. Ceux-ci avaient souvent recourt à des sons discontinus, au contraire des Sirènes, qui n'utilisaient pour tout instrument que leurs voix. Un signe distinctif qui était particulièrement marqué ici. Qui dit musique dit musicien... il y a donc un humain ici. Ou une créature qui joue de la musique d'humain ?...

Elle déboucha dans un couloir où de fins rayons de lumière, traversant les volets des pièces alentours, venaient trancher par endroit l'obscurité. La musique provenait de plus haut encore, de toute évidence ; Laura se dirigea directement vers un second escalier, posé à l'autre bout du couloir. Elle posa le pied sur la première marche puis... se ravisa. Elle resta quelques secondes au pied de l'escalier, à écouter. Le son lui parvenait encore faiblement, mais elle en distinguait toutes les notes... c'était une très jolie musique, fascinante, peut être parce que tellement différente de ce qu'elle pouvait entendre dans son monde... elle posa la paume sur la vieille rambarde, incapable d'avancer. Elle s'était franchement éloignée de son compagnon, attirée par cette mélopée de tintements. Elle ne pouvait s'empêcher de penser aux marins, qui, happés par la beauté d'un chant de femme, se laissaient entraîner dans un rêve dont ils ne se réveillaient jamais. L'homme, ou la chose, qui vivait en ces lieux n'était pas nécessairement leur allié, même s'il semblait se montrer aceuillant.

« B-bonjour ? »

Le son de sa propre voix, brisant soudainement le silence, la fait frémir violemment. Elle rebrousse chemin à petites foulée précipitées, descend, les escaliers et se présente devant Ozvello, le cœur lancé dans une course folle.

« Tu... tu viens avec moi ? »


Sans attendre sa réponse, elle se place du côté de sa cheville blessée pour l'aider à marcher, bras dessus bras dessous. Et, à moins qu'il ne proteste, elle lui fera gravir les deux escaliers. L'inconnu, à deux, semble toujours plus aisé à affronter.
« Modifié: mercredi 10 septembre 2014, 09:16:49 par Laura »

PNJ

Re : Le Torrent [Laura]

Réponse 23 mercredi 23 avril 2014, 19:29:04

La créature s’arrêta un instant, profitant du moment où les humains pénétrèrent dans son refuge pour observer leurs réactions. Elle n’avait pas souvent de sujets de divertissement, et se plaisait particulièrement à prendre soin de ces deux jeunes gens. Un sourire naquit dans l’ombre, sans révéler de dents blanches et inquiétantes. Ce ne fut qu’un frémissement, signe de son contentement, comme si l’obscurité elle-même riait de la retenue de l’un, et de l’envie de découverte de l’autre. La musique avait attiré la femme jusqu’à elle, et la silhouette avait trembloté à son approche, atténuant le bruit de la boîte à musique qui reprenait à présent en boucle la même mélopée. L’homme était plus prudent, alors qu’il parlait seul pour se rassurer d’une présence ici, croyant finir par tomber sur le propriétaire de la ferme. Alors que l’autre redescendait vers le rez-de-chaussée, la silhouette glissa le long de l'escalier, dévalant les marches jusqu’au premier étage. Elle se coula contre un mur, et un rire de fillette retentit dans la demeure, presqu’inaudible. Juste assez pour qu’ils le perçoivent, mais suffisamment bas pour que quiconque croie à une hallucination auditive.

La créature renouvela l’opération, plus proche d’eux cette fois. Elle descendit encore, glissant derrière eux, leur donnant très certainement l’impression d’être observés. Puis leur environnement se fit plus froid, laissant comme une empreinte de fraîcheur sur son passage. Dans la pièce principale de la ferme, ce qui semblait être un salon auparavant chaleureux, une porte d’armoire claqua sous l’effet d’un vent imperceptible. Puis, l’ombre décida qu’elle s’était assez amusée en silence et à l’insu des visiteurs. Elle se fondit donc au tapis de ce même salon qu’ils n’avaient pas encore visité, et sembla tout à coup grandir, gagner en relief et en consistance. Moins d’une minute après, une jeune femme se tenait à sa place. L’ombre qui n’en était plus une se saisit d’une bougie présente, souffla sur la cire pour l’allumer, et vint ouvrir la porte qui lui permettrait de tomber sur eux.

Ses cheveux, auparavant blonds, semblaient sales et collants. Pourtant, cela n’enlevait rien au magnétisme certain qu’elle dégageait, vêtue d’une simple robe de coton fin, pieds nus et l’air hagard. Son épiderme était glacé, et les poils de ses bras hérissés devant la fraicheur dont elle était responsable. La créature s’arrêta face à eux, et mit un moment avant de se souvenir comment parler.


- Vous… Comprendre ?

Sa voix était légèrement gutturale, rocailleuse. Elle s’éclaircit la gorge, secouant la tête comme si elle peinait à aligner plusieurs mots. Ce n’était pas le bon timbre de voix. Elle reprit donc, plus clairement et avec des nuances légères.

- Vous me comprenez ? Bienvenue… Puis-je vous aider ?

Son visage hagard et un peu perdu se fendit alors d’un sourire. Un sourire assez particulier, puisqu’il était dénué de la moindre chaleur, de la moindre joie. On ne pouvait y lire qu’une expression de façade parfaitement exécutée, et pourtant on n'aurait pu sourire de façon plus détachée et fausse. La silhouette voulait s’amuser un peu, et profiter du contact de ces humains était une bonne occasion.
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Re : Le Torrent [Laura]

Réponse 24 mercredi 30 avril 2014, 16:58:00

Qu’aurait fait un bretteur aguerrit en une telle situation ? L’adolescent s’interrogeait, se demandait ce qu’aurait fait dans un tel cas son frère aîné. Son éducation était excellente, à n’en point douter, elle avait passé en revue toutes les connaissances nécessaires pour un marchand de bonne famille, et pour le noble plein d’honneur qu’il était destiné à être. Mais la magie, elle, n’avait pas été jugée par ses aînés comme un sujet indispensable à son cursus. La gestion des affaires était bien trop prenante et riche en elle-même, et la sorcellerie était bien trop complexe : il fallait y passer des années pour en savoir les rudiments seulement. Même quelqu’un de vif d’esprit se devait de faire des choix, l’on ne pouvait être expert en tout. S’il était resté à Castelquisianni, il aurait eu un conseiller dédié à ce type de question, et n’aurait eu à se préoccuper que des finalités.

L’ambiance se faisait inexplicablement de plus en plus lourde et de plus en plus inquiétante. Ses oreilles se perdaient à savoir si ce qu’elles entendaient était ou non le fruit de son imagination, qu’il avait toujours eu fertile. C’était en cet instant un défaut majeur. Il aurait été préférable, songea-t-il, d’être dans ce type de situation beaucoup plus cartésien. Un homme avec seulement du bon sens et très peu de fantaisie s’en serait sans doute bien mieux sorti que lui, car il aurait su ne pas disposer de suffisamment de créativité pour engendrer sans source extérieure de telles impressions. Mais le bretteur se devait d’agir seul ; par défaut, il se devait s’efforcer au mieux de faire usage de sa raison. Une première chose lui passa par l’esprit :

« Nous devrions prendre garde à ne pas nous séparer. Il me serait difficile de vous porter secours si... » commença-t-il en se retournant.

Il chercha Laura des yeux, et se rendit compte que celle-ci avait déjà gravi les marches de l’escalier, et se trouvait vraisemblablement au premier étage. Perdu dans une analyse introspective rigoureuse, il ne l’avait même pas entendu annoncer son départ. Il fronça les sourcils et se renfrogna un peu, passant par un bref moment de panique. Où était-elle passé ? Comment était-il donc supposé la protéger si elle n’en faisait qu’à sa tête ? Ne voyait-elle donc pas qu’ils se trouvaient dans un environnement plus que suspect ? La jeune femme était d’une témérité si stupéfiante qu’après l’avoir surpris et outré, elle le rassura presque. Après tout, elle avait encore moins de biais pour se défendre que lui... alors il serait risible de sa part, lui qui était armé, de ressentir plus d’angoisse qu’elle.

« Vraiment, ce serait une chose ridicule » murmura-t-il pour lui-même.

Il allait la rejoindre en toute hâte, sans prendre garde lorsqu’il entendit l’imprudente redescendre. Elle n’affichait toujours pas  de  signe de grand malaise, et cela le calma. L’étage était peut-être sûr, après tout. Il voyait son regard bleu, sans aucune trace, ni de malice ni de peur, et il ne pouvait aussitôt plus lui, ni lui en vouloir, ni éprouver d’inquiétude. Tout était beaucoup plus rassurant lorsque l’on était plus tout seul dans le noir. Il attrapa la bougie qui brûlait encore et accepta son aide, en répondant :

« Volontiers, je préfère être à vos côtés jusqu’à être complètement persuadé que rien en ces lieux ne se dissimule à notre vue. Deux personnes sont plus difficiles à surprendre qu’une seule. »

Pourtant, les quelques secondes qui suivirent le glacèrent. Sa certitude qu’il y avait une présence à les observer refit aussitôt surface. Il ne voulait pas trop se montrer fébrile, mais il craignait à tout moment une attaque dont il ne connaissait pas la nature... ce qui rendait l’éventualité plus accablante encore. Dans chaque recoin sombre semblait se cacher un monstre prêt à bondir sur eux. Un monstre, au final, ça ne l’aurait pas dérangé ! Mais qu’il se montre, de suite, et sans le faire attendre ! Bon sang, c’était surtout cela, l’angoisse de se faire prendre par surprise, sans savoir quand, sans avoir où, tout en étant persuadé que cela arriverait. L’attente était anxiogène, et Ozvello tentait au mieux de percer les ténèbres à l’aide de la seule minuscule flamme qu’il avait à disposition.

« Voyons, si ces paysans sont assez fortunés pour posséder une boîte à musique, ils devraient l’être également pour disposer du temps d’entretenir leurs intérieurs. L’évidence même est que cet endroit est inhabité depuis une durée déjà substantielle. Il y a certainement un élément qui nous échappe ! Je le pense malsain, sans doute une créature, peut-être un esprit ou une fée malveillante. Les récits sur les tourments qu’ils infligent aux voyageurs sont légions. Il faut espérer qu’il ne représente pas trop de danger. Il n'y à rien à craindre ! Je, ah ! Voilà ! »

Un bruissement plus fort que les autres, une porte qui s’ouvrait, lui fit tirer sa dague. La lame courte brillait, à demi-sortie de son fourreau, le regard du bretteur attentif et nerveux au plus infime mouvement douteux autour de lui. Il distingua rapidement la silhouette dans l’entrebâillement de la porte. Il s’agissait d’une jeune femme, qui ne devait pas être plus âgée que Laura, et qui avait une grâce presque équivalente, si ce n’était qu’elle était beaucoup moins soignée.

« Nous vous entendons, en effet... en doutiez-vous ? » répondit rapidement l’adolescent.

En fait, l’état d’hygiène dans lequel elle se trouvait faisait même peine à voir. Sa voix était étrange, mais elle avait au moins le mérite de communiquer. Ozvello sentait son cœur ralentir un peu, et l’adrénaline qui lui faisait bouillir les veines redescendre. D’accord, c’était une paysanne négligée et louche. Il pensait pouvoir faire face dignement à une telle menace... même s’il était encore convaincu que quelque-chose n’allait pas, sans pouvoir dire quoi.

« Votre demeure n’est guère rassurante, cependant... nous devons nous excuser pour y avoir pénétré sans votre autorisation. Nous avons frappé mais, sans réponse, nous pensions que l’endroit était inhabité. Nous sommes des voyageurs en route pour Castelquisianni, et nous aurions souhaité faire escale en votre demeure. Nous disposons bien sûr de toutes les ressources pour vous dédommager de votre hospitalité. »

Le bretteur, qui était poli, sourit en réponse à l’air amical de son interlocutrice. Amical n’était peut-être pas tout-à-fait le mot... mais la volonté de le paraître, elle, était bien présente. C’était à peu près tout ce qui comptait, même si la sincérité aurait été plus apaisante. Il rangea son arme et n’y toucha plus. En lieu et place, il se détacha légèrement de Laura, et salua comme il le put. Il fallait se montrer simple avec les petits gens, et cela ne lui était malgré tout pas sorti de l'esprit.

« Je manque à l’étiquette. Je suis Ozvello Di Luccio, et c’est un plaisir de faire une rencontre si charmante ! C'est là une chance qui m'est donnée pour la seconde fois aujourd'hui. »

Il adressa un regard en coin à la jeune femme, l’appelant à se présenter elle-même en détails. Après tout, il ignorait jusqu’à son nom de famille, et la manière dont elle préférait se montrer lui était tout aussi inconnue. C’était pour un castelquisian un élément très personnel.
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Laura

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Re : Le Torrent [Laura]

Réponse 25 mercredi 10 septembre 2014, 12:14:14

« Malveillant ?... » répondit-elle simplement, légèrement anxieuse. Décidément, la frousse de cette humain lui était communicative. Peut être aurait-elle dû se reprendre et garder la tête froide pour deux. Le garçon ne semblait pas en état de diriger cette exploration. Un grincement de porte et l'apparition d'une jeune fille lui épargna cependant cette peine. Fée ou non, elle n'était physiquement pas bien menaçante, et Ozvello pourrait toujours la poignarder en cas de problème. Les deux intrus se dirigèrent vers cette demoiselle, avant qu'elle ne prenne la parole d'une voix passablement enrouée.

Au moins, ce sourire sans émotion rassura quelque peu la Sirène, qui se détendit. Elle avait du se tromper sur le compte de l'inconnue. Celle-ci souriait comme une humaine, jusqu'à en être un cas d'école. Ces créatures terrestres, particulièrement celles des villes, avaient pour coutume d'effectuer ce genre de "faux sourires" à de nombreuses occasions et, bien que Laura n'ait jamais réussi à vraiment saisir toute la logique de ce rituel, adresser la parole à un inconnu était de ces situations où déformer les joues sans plisser les yeux s'imposait.

Son jeune guide de se présenter, et elle d'en faire autant, dans les grandes lignes, le singeant à la limite de l'ironie :

« Je m'appelle Laura, et ne peux que confirmer ce qu'affirme le jeune mâle ; c'est un plaisir de faire une rencontre si charmante, et c'est une chance qui m'est donnée pour la première fois aujourd'hui. »

Laura se sourit à elle même, lançant à peine un regard en coin à Ozvello, pour apprécier sa réaction. Elle espérait que sa pique le ferait sourciller. Il l'avait méritée, après tout, pour avoir mis la beauté de des deux femmes sur le même plan, dans son élan de flatterie. Grave impair. Hors de question que la brune laisse insinuer que cette humaine de rang inférieur et aux cheveux négligés, aussi bien faite soit-elle, puisse porter concurrence à la grâce d'une Sirène. Question d'orgueil, d'abord, et de bon goût, ensuite.

La Sirène saisit sa chevelure entre ses mains et la remonta au sommet de son crane, découvrant des pans de chair jusque là noyés sous la noirceur de ses mèches. Une peau pâle et lisse, tendue sur les arêtes de ses omoplates et laissant se dessiner entre elles le discret relief de la colonne vertébral ; « Vous vivez seule là dedans ? » Des épaules minces, légèrement anguleux à la naissance de la clavicule. Des aisselles glabres, Mésopotamies d'une musculature gracile, sous lesquelles l’œil attentif pouvait percevoir le début de la zébrure des côtes, accentuée alors que les deux bras s'étaient hissés pour s'affairer à nouer le chignon de la belle. Celle-ci n'était pas pressée ; elle faisait de son exercice une parade langoureuse et feignait de n'avoir d'yeux que pour la nouvelle venue.

La petite était belle, c'est vrai. Malgré son état piteux et négligé, elle dégageait sans aucun doute une grâce indissociable de sa fragilité. Laura se laissa aller à un sourire bienveillant à son égard, tout en achevant son ouvrage ; la copieuse cascade noire était maintenant réduite à la discrétion, sous la forme d'un chignon serré. Celui-ci laissait cependant échapper une épaisse mèche sombre dont la pointe balançait à quelques centimètre du milieu de la nuque de la Sirène, dont les oreilles respiraient enfin.



Laura

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Re : Le Torrent [Laura]

Réponse 26 mercredi 24 décembre 2014, 01:56:20

La jeune fille restait immobile depuis longtemps ; si longtemps que de ses bras nus s’étendaient maintenant des toiles d'araignées, et que quand elle cligna des yeux à nouveau ses cils chassèrent des petits flocons de poussière. Les visiteurs, figés dans leurs positions respectives, se mettent à reprendre du mouvement lentement, hésitants comme de vieilles mécaniques rouillées. Des regards s'échangent lentement entre les trois personnages ; étions nous endormis ? Sommes nous réveillés ? Un frisson les agite tous, et la couche de poussière qui les couvrait s'évapore dans une volute diaphane ; c'est un frisson qui vient d'ailleurs, qui secoue la peau et les os, un grondement qui se transmet par les pieds au travers du sol. La maison l'a ressenti aussi : elle vibre d'un mugissement sourd à travers chaque poutre et chaque latte.

« Il s'impatiente... », la petite murmure en tordant ses mains maigrichonnes, ses grands yeux paniqués regardant autour d'elle. « Nous avons un problème... oui, un problème ! »

Les tremblements s'accentuent par poussées, redescendant régulièrement pour recroître de plus belle. Les personnages évaluent des possibilités, envisagent de fuir par la porte ; mais privés de leur libre arbitre ils restent sur place à claquer des dents, craignant d'être déchirés avec le tissu de la réalité.

Le récit trop longtemps endormi sort de sa torpeur en baillant, fait ses étirement la gueule grande ouverte et emplit l'air d'une odeur de charogne. Il secoue sa lourde tête, fait ondoyer sa trame narrative. Les portes des meubles s'ouvrent et brinquebalent, et leurs contenus s'échappent en rythme stochastique pour frapper le sol ; assiettes de bois et pots en terre rebondissent et se fracassent de concert, accompagnés par le craquement du bois, le tonnerre des armoires renversées, et des volets qui éclatent en milliers d'échardes. Un bruit de vieilles brindilles qu'on brise et de tomate qu'on presse, et la jeune fille s'aplatit du bas vers le haut, écrasée par un pouce invisible ; cervicales, fémurs et le reste sont émiettés, comprimés, éclatés tout fluide dehors, et la galette de chair est jetée à la mer. Les protagonistes hurlent tandis que les pierres des murs se déchaussent autour d'eux. D'acteurs à spectateurs, ils se regardent et s’auscultent mutuellement de leurs regards horrifiés, se voient bouger à reculons, entraînés par leurs jambes qui s'activent à rebours, comme articulées par des fils invisibles.

La bâtiment dont ils ont été extraits n'est plus qu'un souvenir qu'ils contemplent de face en s'en éloignant, un champs de terre labouré par un soc gigantesque. Et un essaim de pierres et poutres qui zonzonnent au dessus du sol avec un grondement de tempête. Il en fait pleuvoir, des briques, des volets, des tuiles et des portes, imprimant les fondations dans le sol et élevant des chaines de maisons mal fagotées les unes en face des autres. Le bruit est de plus en plus étouffé pour les deux voyageurs, qui marchent dans leurs propres traces en les effaçant.

Le titanesque chantier finit par disparaître derrière les reliefs et se faire totalement inaudible. Alors le grand horloger frappe sa montre d'une pichenette, et l'aiguille des secondes se remet à tourner dans son sens habituel. Avec elle, les membres des deux aventuriers retrouvent leur mobilité normale, et l'expression de leur visage revient à une certaine neutralité.

« Si c'est important pour toi, sache simplement que je n'ai rien à faire à Castelquisianni. J'y vais simplement guidée par mon intuition, même si celle-ci m'a souvent trompée. En fait, je compte une peu sur toi et la chance pour me donner des idées, une fois arrivée là bas... J'espère que je n'émousse pas ta loyauté, petit homme ! » achète-t-elle en gloussant.

Arrivée en haut de la colline, la constatation que la ville est bien là où elle avait pensé la trouver renfloue légèrement l'ego de Laura. Elle se tourne vers son jeune compagnon avec un sourire ;

« Nous y voilà encore un petit effort, chevalier, nous y sommes ! »


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