Marcher, marcher.
Encore et encore.
Sentir la fatigue s'approcher, sentir la mort nous caresser le visage.
C'était une douce sensation.
Mais pour le moment, Heine ne marchait pas. Non. Il était assis, simplement, sur un banc, dans le bois. Il ne savait que faire, que dire. Occupé à regarder les étoiles d'une nuit fraîche, il fermait les yeux pour mieux sentir un vent frais, fouetter lentement son visage. Il poussa un léger soupir de plaisir, heureux, pour une fois. Aucune folie, aucun Docteur. Aucun meurtre, aucune odeur de sang. Il aurait aimé que le temps s'arrête à ce moment précis, qu'il dure une éternité, qu'il reste assis, durant une nuit éternelle, à ne rien faire, à ne rien avoir à faire. Que ses instincts ne reprennent pas le dessus, que la folie ne reprenne pas le dessus. Que le poison qui était devenu sa malédiction ne reste qu'une capacité comme une autre. Était-ce tant demandé, de vivre une vie normale ?
Mais Heine n'est pas quelqu'un de normal, loin de là.
C'est à ce moment qu'il poussa un léger grognement, avant de se tenir la tête. Cette sensation, cette douleur qui devint lentement autre chose, une chose beaucoup plus sombre. Folie. Douce folie. Il se lève, et à mesure qu'il marche - difficilement - le monde change autour de lui. Ces frissons de plaisir deviennent peu à peu des tremblements de peur, d'énervement. Le ciel devint poison, la terre devint galets, et le bonheur devint folie. Tombant à genoux, un sourire se dessina sur son visage, alors que le monde devint un miroir du plan de l'angoisse. Il n'y était pas rentré, ce n'était qu'une hallucination comme celles qu'il avait, mais comment le savoir ? Tel était la question, question qu'il ne se posait plus maintenant. Ses bras furent rapidement recouvert d'une couche de poison, et il se releva difficilement, ses sens trompés.
Il devait avancer, avancer. Jusqu'à sortir, sortir. Disparaître, mourir. Il devait faire ce pour qu'il était fait, tuer, tuer, tuer. Dans une dance macabre, sous un doux requiem, il allait tenter de sauver sa peau dans un monde où la moindre erreur était fatale. C'est ainsi qu'après quelque minutes de marches, il arriva devant un groupe de zombies. Dégueulasse. Les habits en lambeaux, les yeux pendouillant de leurs orifices, leurs ventres étaient ouverts et presque vidé, seul le coeur qui tenait seulement grâce à un fil étant visible, le reste n'étant que des morceaux de chairs, ou bien du sang, qui dégoulinait des corps. L'attention de Heine fut alors attiré par un corps, attaché au mur, dont les chaînes, sortant de son corps, semblaient être tirés. Le corps était à moitié déchiqueté, et il ne restait qu'une partie du visage, visage qui regarda alors Heine d'un air moqueur, avant d'avoir des spasmes et de ne regarder que le reflet de la mort.
Après une dizaine de minutes, Heine avait reprit ses esprits. Regardant le clair de lune, il serra les poings, qui n'étaient plus recouvert par du poison mais par quelque chose de rouge. Du sang. Il avait fait ce qu'il savait faire le mieux, et comme d'habitude cela avait fini par payé. Les zombies qu'il venait de tuer n'étaient qu'un groupe d'adolescents, qui étaient surement venu ici dans le but de se faire peur la nuit. Leurs corps ensanglantés étaient désormais derrière lui, des jambes, des bras, des têtes détachées pendouillant à des arbres, ou bien sur un banc. La scène était une véritable boucherie, l'odeur du sang était si présente que la plupart des gens vomiraient rien qu'à l'odeur, sans voir la scène. Regardant le clair de lune, obligé de souffrir, Heine était au bord du gouffre, mais comme d'habitude, il allait devoir sauter par dessus, pour survivre, pour trouver une solution.
Comme d'habitude.