Comme toujours, mon boulot est important. Aujourd'hui, après une enième mission menée à bien, je soupire. Vingt-deux heures. Et pourtant, pas envie d'rentrer chez moi, d'avoir toujours la même routine, de r'garder le programme TV avant d'aller dormir. Non, pas ce soir. Secoues-toi ma vieille, ce soir, tu sors.
Alors que je passe devant une vitrine, à la lueur d'un lampadaire, je m'examine. Une petite jupe courte, blanche, avec une ceinture de cuir. Deux bottines brunes, en daim. Talon ? 15 centimètres. Un débardeur au décolleté généreux. Noir. On aperçoit d'ailleurs mon soutien-gorge d'un rouge profond. Le débardeur remonte un peu sur mon ventre, et un liseré rouge également témoigne de la présence d'un tanga. Je redescend un peu le débardeur, et referme ma veste de tailleur, blanche, en ne nouant que le bouton situé au-dessous de ma poitrine. Voilà. J'ébourriffe un peu mes cheveux, je m'humecte les lèvres, et je me fais un clin d'oeil aguicheur. Oui, je suis présentable. J'allais rentrer dans le premier bar venu lorsque mon portable sonne. Je décroche. C'est un collègue.
- Allô ?
- St Cyr ? C'est Davis. T'es chez toi ?
- Non, pas encore. Je n'avais pas l'intention d'rentrer tout de suite.
- Ha oui ? C'est cool ça.
- Pourquoi donc ?
- On va boire un coup ce soir, pour l'anniversaire d'Andy. Tu te joins à nous ?
- Heu... Oui, bien sûr.
- Chouette. Tu veux qu'on passes te prendre ? On s'retrouve au Darling. T'es où ?
- Oh là. Calmos. Et bien, étant donné que ce bar est à trois kilomètres d'où je suis, je veux bien que vous veniez me chercher. Je suis... Au carrefour de Yun.
- D'accord. On est là dans deux minutes.
Cling. Et voilà que ça raccroche. Sans au revoir, ni rien. Une habitude. Je souris. Le vent me fait un peu frissonner, mais je m'en fiche. Ma soirée ne s'annonce pas si mal. L'anniversaire d'Andy. C't'un type bien ce mec. Pas mon genre, même s'il a un faible pour moi. Mais sympa. Et fêtard. Je crois qu'on va être trèèèèès bien à la fin de la soirée. Surtout au Darling ou, pour une tournée achetée, une est offerte. Et trois verres gratuits pour les dames le vendredi soir. Et nous sommes vendredi soir.
Un bruit de moteur me fait tourner la tête. C'est le 4x4 de Davis. Anton Davis. Ils sont déjà quatre à l'intérieur. Joe Rigby, Anton Davis, Marc Phillips et Sebastien Dutour. Je grimpe à l'arrière, lorsque Seb descend pour m'ouvrir la portière. Je me glisse au milieu, et Seb remonte. Me voilà coincée, si jamais je changeais finalement d'avis. Après trois minutes de routes, Davis se gare. On descend. Alexis Strogoï, Denis Marshall et Ryan Van Heven nous attendent. Andrew Gilmore -Andy- et Jenna Miller sont à l'intérieur et on réservé les tables. On y va. Les discussions vont bon train. Mais je reste silencieuse.
Je me déride ensuite lorsqu'on entre. On parle, de tout et de rien. On enchaîne les verres. Les uns après les autres. Jenna et Alexis finissent par s'en aller les premiers, visiblement très en phase ce soir. D'autres verres sont vidés. Et un concours est organisé. Celui qui finit tous les shoot de vodka posé devant lui, sans vomir, a gagné. Je me plie de bon coeur au jeu. On rit, on boit. Andy va vomir, et décide de rentrer. Il habite à côté, c'est pas dangereux pour lui. Les mecs vont loger chez lui aussi. Quand ils auront finis de boire. Après Andy, d'ailleurs, c'est Denis et Ryan qui laissent tomber. Seb suit. Et puis Marc. Joe, Anton et moi sommes les grands gagnants. On a le droit de finir les verre de ceux qui ont abandonné. Mais Joe finit par aller rendre le contenu de son estomac. On rit. Le bar ferme. Il est trois heures du matin. Je ris, et prend congé. J'habite pas très très loin, mais le trajet risque d'être long.
Je titube, et passe par le quartier de la Toussaint pour me raccourcir. Fait sombre. Je trébuche deux fois, et finit par tomber à genoux dans une flaque d'eau croupie. Quoique non. C'est pas de l'eau. A bien y regarder, à la lueur du réverbère, c'est plutôt rouge sombe. Serait-ce... Oui. Du sang. Oh putain. Mon regard suit la rigole de sang, et tombe sur un homme tenant une lame. A ses pieds, une femme. Une prostituée d'après ses vêtements et son maquillage outrageusement accentué. Je crois que je met une minute au moins à réaliser ça. Mes yeux vairons remontent sur l'homme, et mue par une impulsion professionnelle, je balbutie d'une voix un peu pâteuse :
- Lâchez votre... Votre Arme ! Je vous.. Arrête... Pour Homicide volontaire. Je euh.. Tout ce que... Oh merde. Fais chier. Lâches ton arme putain...
Je me redresse en vacillant, et cherche à me saisir de mon flingue. Peine perdue, je me rappelle l'avoir laissé chez moi à midi. Pareil pour mes dagues. Ha... Mais y m'reste le Saï.. Je le sors de ma bottine, et le brandit vers l'homme. Mon regard voit trouble, mais ma conscience professionnelle me dicte d'avancer pour le neutraliser.