Puisque cela me fut demandé, je m’exécuta. Non sans une légère appréhension, j’entreprenais l’ascension de ces quelques marches de bois censées me mener, par-delà la pénombre, jusqu’à ce bain qui, j’en étais convaincu, me délasserait assez pour finir de m’achever. Ma fatigue étant telle que monter l’escalier me parut une véritable épreuve, je ne doutais pas un seul instant qu’il ne me faudrait plus très longtemps pour m’écrouler d’épuisement.
Ni feu ni lumière n’éclairant l’étage, j’avais avancé difficilement comme à tâtons, prenant même peur une brève seconde, en entendant le bois craquer sous mes pieds. J’eus peur d’être trop lourd ou d’avoir fait une bêtise, eu craint de casser quoique ce soit de ces choses qui ne m’appartenaient pas… et j’en me serais voulu.
Chaperon eut beau me répéter qu’il me fallait me détendre, cela m’était encore bien difficile. Il était à croire que j’étais, plus que véritablement craintif, plutôt du genre méfiant, ce qui… à n’en pas douter, prenait sûrement tout son sens à la lumière de ces nombreuses mésaventures qui, toujours, ponctuèrent ma courte existence.
Le pas léger, mais surtout peu vif, j’avançais alors, un peu hésitant. Le manque de lumière ne m’aidant pas, j’errais longuement, tout en comptant les portes qui commençaient à se dessiner sous mon regard, à mesure qu’il s’habituait aux ombres de la nuit. La porte de gauche d’abord, tout de suite après les escaliers, puis celle de droite qui, je le comprenais en m’approchant, était restée entrouverte.
Sortait de par son ouverture comme une sorte de halo blanchâtre, un long filament de lumière dû, sans nul doute, à la présence d’une fenêtre à peine plus loin, et qui devait éclairer toute la petite pièce à la lumière d’une pleine lune enfin découverte de nuages. Guidé par l’éclairage plus que par un trop-plein de curiosité, je m’en approchais pour illuminer un peu mon regard et pour m’aider à distinguer un peu mieux la seconde porte, qui m’avait été indiquée.
À travers l’embrasure de la porte distinguais-je les contours éclairés d’un mobilier que je devinais coquet, mais également un grand lit, tout fait de bois massif, sur lequel trônaient quelques douces peaux de bêtes, ainsi qu’une somme conséquente d’oreillers, que j’imaginais truffés de plumes… et confortables. Je ne laissa pas mon regard se perdre trop longtemps et n’abusa pas de curiosité, toutefois, l’idée de m’écrouler sur un lit comme celui-ci m’apparut comme un signe d’une véritable providence. Jamais ô grand jamais n’avais-je eu droit à pareil confort et imaginer qu’une telle chance me soit donnée après pareilles épreuves me réchauffait le coeur. J’en aurais presque eu les larmes aux yeux, si l’épuisement ne les avaient pas rendus rougis et piquants.
Effleurant le mur du petit couloir du bout de mes doigts, je continuais, faisant attention à tout, de peur de faire tomber un objet sur mon passage, que je n’aurais su distinguer qu’au dernier moment. Dessinant de ma main les contours d’une nouvelle charnière, je me devinais arrivé à destination, et ne perdit plus de temps pour poser ma grande main calleuse sur la poignée de la porte. L’ouvrant, je découvrais alors la petite pièce de toilette, que la nuit, bien heureusement, éclairait elle aussi.
« Je te rejoins. »
Seul de ce côté de la maison, j’acquiesçais silencieusement aux mots du Chaperon, sans encore me douter de tout leur sens. Laissant mon regard fureter à gauche à droite comme pour me faire à ce nouvel espace, tout aussi coquet lui aussi, j’avais déjà repéré la grande baignoire, qu’un grand conduit semblait relier au rez-de-chaussée. Ainsi m’étais-je simplement imaginé, même si cette idée me gênait un peu vue ma tenue, que la jeune femme entendait par là qu’elle monterait à ma suite, pour faire couler un bain pour moi, avant de repartir. Et, quand bien même j’étais affreusement gêné de prendre l’eau chaude le premier, pour ne lui en laisser qu’une tiède après mon passage, l’idée ne m’était nullement apparue choquante.
Mes doigts glissant sur le bois des meubles qui m’entouraient, je m’arrêtais, après de longues secondes à chercher, sur l’objet qui faisait ma curiosité, comme mon intérêt : une petite lampe à huile, disposée dans un renfoncement de la pièce. L’allumant progressivement, je laissais enfin l’espace baigner dans la lumière, et me réjouissais d’enfin y voir clair.
De mes yeux, je pouvais alors comprendre et entrevoir tout l’aspect réconfortant que prenaient ces choses ça et là, parsemées à travers la pièce. Des serviettes douces, de quoi ranger l’utile comme l’agréable, de nombreuses herbes sèches, qui habillaient les lieux pour leur donner l’air d’un décorum apaisant et cosy… Même pour l’œil, cela paraissait agréable.
Mon esprit gagné par ce calme ambiant, je me laissais alors choir sur un petit tabouret, en attendant que mon hôte ne fasse son entrée. La gorge toutefois nouée à l’idée que ses yeux ne se posent sur moi, je tirais dans un sens, puis re-tirais dans l’autre la peau de bête qui me couvrait le corps, de peur que n’en dépasse ne serait-ce qu’un bout de peau de cette longue et bien trop épaisse saucisse de Vienne qu’elle servait à cacher. Réajustant sans cesse ma tenue de fortune, je finissais par redevenir nerveux, cherchant un point auquel me raccrocher, et qui me rassurerait un peu, en me permettant de penser à autre chose.
J’observais un temps le bain, me demandant s’il ne valait pas mieux que je le fasse couler moi-même, mais je me repris vite en me remettant à penser qu’il serait plus sage de laisser faire mon hôte, plutôt que de risquer la moindre bêtise. Soufflant un coup, j’observais plutôt par la fenêtre, regardais la lune, si dégagée, puis les quelques maisonnettes de village où il semblait faire bon vivre. Malgré l’heure, qui sans doute devait être tardive maintenant, quelques lumières restaient encore allumées, celles de la maison la plus proche notamment. Je regardais la forme de ces maisonnettes, les potagers environnants… tentais de penser à autre chose. À ce bon repas, aux bras de Morphée…
« J’arrive. »
… au Chaperon.
Me remettant bien droit, je me levais à ces mots comme au garde-à-vous, allez savoir pourquoi.
Les marches craquèrent, comme pour m’avertir de son arrivée imminente, puis… la porte s’ouvrit. D’un pas souple, la jeune femme entra et m’apparut soudain telle que je ne l’attendais tout simplement pas, c’est-à-dire, tout aussi peu vêtue que moi. Surpris que j’étais, mes yeux avaient dû s’écarquiller encore alors que, tandis qu’elle s’affairait à allumer l’eau, avant d’aller farfouiller dans l’un de ces petits bocaux qui traînait là, j’en venais à la détailler de haut en bas, comme de bas en haut.
Le rouge à mes joues sembla soudain me brûler, tandis que je faisais un pas de côté pour me pousser. Serrée à son corps, pincée entre ses doigts fins, la peau de bête épousait toute la volupté de ses formes d’une façon qui m’était encore tout à fait inédite. Aussi pleine de grâce soit-elle, je n’aurais su décrire cette autre chose qu’elle m’inspirait, alors que je la savais maintenant si peu couverte… et si près de moi. Sous la peau, les bosses rondes formées par sa poitrine m’a parurent plus grosses et plus lourdes encore et… je dus humecter mes lèvres pour ne pas m’assécher sur place. Gêné, je détournais les yeux, quand elle ne sembla même pas s’en soucier.
À son renfort, l’eau se mit bien vite à couler, chaude. Quelques volutes de vapeur se dispersaient déjà dans l’air et réchauffaient plus encore la salle de bain, que le conduit relié à la cheminée chauffait pourtant déjà bien assez. J’osa à peine regarder lorsqu’elle tira quelques bourgeons de lavande de son petit bocal, mais un instant encore, leur fragrance me réconforta, me ramenant au souvenir de vieux jours lointains et plus heureux, lorsque les printemps de mon enfance étaient encore synonymes de joie. Posant mes yeux sur la baignoire pour voir le Chaperon y déposer les bourgeons, sans risquer de vraiment la regarder elle, je laissais un fin sourire m’échapper et dessiner sur mes joues amaigries.
« Oui… ça sent bon. Je sais qu’ils en font des baumes, chez moi. Ça aide à soulager quand on a mal… »
C’est du moins ce qu’il se disait. Qu’on se le dise encore, jamais on ne m’avait passé ni de pommade ni même de quelque onguent que ce soit. Cette odeur m’était toutefois familière et j’entendais beaucoup de choses, quand les paysans discutaient entre eux.
Ceci étant dit, le petit sourire qui s’était dessiné sur mon visage disparut aussi vite qu’il était apparu quand Chaperon fit de nouveau entendre sa voix. Ces mots, bien étonnants à mon oreille, sinon plus que ça, résonnèrent toutefois avec les précédents, et je me figea sur place pour la regarder, espérant de sa part une explication, ou bien l’aveu d’une farce. Il me fallut un certain temps pour digérer l’information. Même si je comprenais bien qu’il ne fallait pas gâcher l’eau, j’avais été bien loin d’imaginer qu’elle escomptait que je baigne, nu, avec elle, dans cette baignoire qui, sans aucun doute, n’avait pas été conçue pour deux.
« Q-quoi ? »
Je ne rajouta rien à cela. Les actes parlèrent d’eux-mêmes, et je ne pus trouver d’autre mot pour exprimer ma surprise à cet instant. À dire vrai, j’étais bouche-bée, littéralement.
Sans gêne ni pudeur, la belle brune défit l’emprise de ses doigts sur sa peau de bête, et celle-ci tomba d’un coup sur le sol, face à la baignoire. Suivant son mouvement soudain, sans être capable de détourner mes yeux cette fois, je resta silencieux, en observant la chute en cascade de ses longs et fabuleux cheveux d’ébène qui lui tombaient dans le dos.
Lentement, surpris comme émerveillé, il fallait l’avouer, mes yeux descendirent. Sa peau était d’un blanc presque nacré, immaculé, et semblait vierge de toutes mauvaises traces ou marques disgracieuses. Sa tenue comme son port étaient droits, parfaits… ses jambes étaient longues, et fines comme l’était sa taille, mais ses hanches, elles… Plus larges sans trop l’être, étaient quant à elles plus charnues et musclées, comme l’était cette paire de fesses rondes et dodues, dont la jolie forme sculptée, comme la couleur immaculée, n’étaient pas sans rappeler ce bel astre lunaire qui nous éclairait. Quand bien même je n’en avais jamais vraiment vu de si près, je le savais pertinemment : jamais n’avais-je vu si beau cul. Si belle et grosse lune.
Mon regard hypnotisé par le spectacle de ce court et parfait mouvement de balancier que ces fesses me donnaient, je ne pus le lâcher, encore bien trop sous le coup de l’émotion. Comme pétrifié, je restais encore sans un mot, peinant à articuler ma surprise, alors que mon hôte levait finalement une jambe, puis l’autre, pour entrer dans l’eau claire du bain.
Sentant comme du mouvement dans mon bas-ventre, je pus sentir, sans véritablement comprendre de suite, comme une chaleur intense se répandre et parcourir mon aine. Incapable de ne pas m’émouvoir devant son corps de femme nu, je me perdais au détail de son profil, à constater les effets de la gravité sur l’une de ses mamelles gigantesques. Je laissais mes yeux curieux -et plus désireux que je ne pouvais alors le comprendre- caresser et épouser les traits de sa raie ferme et charnue, sous laquelle je finissais par deviner autre chose… qui s’ouvrait et se dessinait, tendue dans ma direction.
Au vu de cette soyeuse toison semblable à la mienne, je compris vite ce qu’était cette petite fente, ces jolies pétales blanches et entrouvertes, aux teintes légèrement plus sombres que le reste de sa peau. C’était… la toute première fois pour moi, que je voyais le sexe d’une femme, mais je compris, à la mémoire de certaines scènes que je n’aurais sans doute pas dû surprendre dans les étables, quel était le principe… finalement très similaire à celui des bêtes que nous faisions saillir tous les ans.
Mais cela semblait si petit.
Une seconde à peine, une fois le Chaperon dans l’eau, je me perdis à poser mes yeux plus bas, sur moi. En effet, je ne comprenais pas comment… « un truc pareil » était censé entrer dans cette toute petite fente. Avec un peu de recul commençais-je sans doute à comprendre ce qui pouvait bien horrifier les gens de mon village dans mes impressionnantes mensurations. Même dans son état de repos, une saucisse d’un tel diamètre ne pourrait sûrement entrer nulle part. Ce serait comme essayer d’y passer le bras, cela n’aurait aucun sens.
Cela dura une seconde à peine, peut-être un peu plus, toutefois la question me vint aussi subitement à l’esprit : si c’est pour cela que les miens s’étaient de moi toujours moqué, étais-je alors condamné à rester seul ? N’étais-je pas, comme le serait tout autre, à-mème de me reproduire ? Étais-je condamné à ne jamais avoir d’enfants, ni… de femme ?
Je n’avais pas vingt ans. J’étais encore jeune pour y penser, bien sûr, toutefois chez moi, les gens ne faisaient pas de vieux os. Et, pour moi qui était resté seul toute ma vie durant, la perception de ce futur impossible me parut bien funeste.
« M-mais… vous… êtes nue. »
Quelque peu embêté par ces récentes pensées, je l’étais finalement plus encore alors que je comprenais peu à peu la raison de ces vagues de chaleur qui gagnaient mon bas-ventre. Comme les hommes de mon village aimaient… les femmes de mon village, comme j’avais moi-même connu quelques émois devant d’autres femmes nues, à la rivière, je comprenais ces sensations qui réchauffaient mon corps comme prenant leurs sources à la vision du corps délicieusement formé et nu de mon hôte.
Ce que mon corps aurait voulu me dire, s’il avait été doté d’une voix, c’est qu’elle excitait tout en moi, mes sens, le reste et que cela éveillait en moi d’animales urgences. Sa peau semblait si douce, comme l’était sa voix, et son corps… c’est le mien qui le réclamait. Biologiquement parlant, ç’aurait été très simple : tel un étalon fougueux, mon corps se faisait à l’idée qu’il me fallait la saillir et l’ensemencer. Puisqu’elle était la plus belle femme que j’eus vu, ç’aurait été facile à dire, mais puisque c’était le cas, disons-le, comme je le comprenais : le Chaperon me plaisait, m’attirait. Peut-être tout cela n’était-il dû qu’à mon jeune âge, qu’à mes hormones au travail comme à ma bête inexpérience, toutefois comprenais-je alors avec gêne la vérité : la voir ainsi me donnait envie d’elle.
Les yeux ailleurs tandis que je la vis s’appuyer au bord de la baignoire pour me faire de la place, je vins me positionner autrement pour lui tourner le dos. Je n’avais pas vu ce miroir avant, celui face auquel je me tenais désormais. Toutefois, je me prenais à penser qu’ainsi, je pourrais veiller à ce qu’elle ne me regarde pas, tandis que je me mettrais aussi à nu.
« Je peux… attendre que vous ayez terminé, vous savez ? L’eau tiède m’ira très bien. Il fait déjà si chaud ici. »
Vrai. Au fil des minutes qui avaient défilé, le bois s’était durement empreint de toute la chaleur dégagée par le bain, comme par le conduit de la cheminée. La pression s’ajoutant à cela, j’avais désormais l’impression de cuire sous ma peau de bête.
Face au miroir, depuis lequel je l’observais fixement, j’hésitais. Jusqu’ici, le Chaperon n’avait été qu’aide et douceur. Toutes ses attentions n’avaient fait que me témoigner chaleur et bienveillance… Bien plus que jamais on ne m’en avait offert. Elle n’était, du moins je le croyais, pas quelqu’un de mauvais, ou de méchant. Peut-être ne me jugerait-elle pas, me dis-je. Peut-être que si, me dis-je aussi.
J’avais bien peur que ce soit le cas. Toutefois, alors que je prenais moi-même la mesure de mes émotions, comme du fonctionnement de mon corps, je me mis à penser qu’il me fallait au moins faire preuve d’honnêteté. Après tout, elle-même venait de se montrer, totalement nue, aussi sublime et attirante qu’elle était dans son plus simple appareil.
Triturant encore nerveusement la peau de bête à ma taille, j’hésitais. Encore.
« V-vous… vous êtes… »
Mordillant fermement mes lèvres, j’expirais fortement par le nez, puis me retournais pour lui faire face. Je n’osais pas la regarder, mais… je crois que j’avais pris ma décision.
« Vous pouvez regarder. J-je… je veux dire… j’aimerais que vous regardiez. Vous êtes bel-… nue… alors… »
Pinçant entre mes doigts le noeud que j’avais improvisé à ma taille, je soufflais encore, la regardant parfois, mais n’osant jamais aller jusqu’à soutenir ses yeux.
« Promettez-moi juste de ne pas crier… ou de ne pas me mettre à la porte. D’accord ? »
Défaisant doucement la boucle, je m’approchais d’un pas pour me tenir face à la jeune femme qui prenait appui au bord du bassin.
Dénouant le noeud, je laissais à mon tour tomber ma peau de bête sur la sienne, déjà au sol, pour découvrir à nouveau mon buste large, comme pour mettre juste sous ses yeux l’épaisse bûche de chair, de presque un pied et demi. L’engin se balançant d’un côté à l’autre au gré des tapotements de pied, je continuais timidement.
« S-si… si vous ne me trouvez pas monstrueux, comme les autres… alors… alors je vais entrer. »
Hésitant et n’arrivant toujours pas à la regarder, je contournais alors le bain et l’enjambais enfin pour entrer. Sans trop savoir s’il me fallait rester ainsi dans son dos, ou me tourner, je me mettais alors à genoux, prêt à faire volte-face, le rouge aux joues.
Observant son dos nu, sa formidable chute de reins, ses fesses que je pouvais entrevoir sans difficulté tant l’eau était claire, je me tenais toutefois au plus de distance possible. D’une main fébrile, je me saisissais du savon et, laissant mon corps disparaître un peu plus dans l’eau parfumée, hésitais à faire le moindre geste, après m’être montré ainsi.
Mais son corps, si près, ne semblait faire que m’appeler, encore. J’avais… envie de la toucher, de l’étreindre… de la sentir.
« Est-ce que… je dois me tourner ? Ou… ou voulez-vous que je vous frotte le dos ?»