Le visage d’ange endormi, soupirant dans ses rêves chaotiques, les cauchemars s'étripent, s’attrapent, dévalent le long de ses bras. Depuis combien de temps n’as-tu pas “bien” dormi, petite vagabonde ? Tu refusais longtemps de fermer les yeux, quand, lorsque tu les fermais, tu revoyais les piles de cadavres qui étaient laissées par ta colocataire… Un dieu qui est à présent dans ta tête et te confère des pouvoirs, une force démesurée, te régénère et te consume. Les marques dans ton dos qui n’arrangent rien, elles sont très douloureuses depuis… Ta petite escapade en ville. Elle se réveille d’un coup, la tempe suintante, Arès lui demande si elle va bien.
Mais elle ne répond pas vraiment. Ses pensées, encore dans le flou, ses mains serrent les draps. Elle halète très légèrement rapprochant le drap de sa poitrine. Un cauchemar, encore un. Elle finira bien par s’habituer, pas vrai ? Allez, il faut se rendormir, il le faut… Elle referme les paupières, il lui faut juste un autre endroit, autre chose à penser, un endroit… Apaisant… Comme du sable, par exemple…
Les colonnes s’érigent. Le toit s’étend, la lumière l’aveugle. Lyra lève la main lentement, devant ses yeux, trop de lumière. Des vêtements sobres, distingués, les mains pâles couvertes de dorures, les yeux maquillés, le visage apaisé, discret, malicieuse renarde. Elle a toujours été comme ça et… Dans ce palais, elle savait où était sa place. Courbettes ennuyeuses, coucheries, orgie. Elle était certainement loin de tout ça, nouvelle à ce monde un peu trop… dévergondé. Elle regardait les murs se dessiner, la chambre qui l’attendait, les portes qui s’ouvraient, les gens qui passaient.
Lyra venait, semble-t-il d’un tout autre endroit, un autre pays, une autre contrée. Sa peau pâle, ses vêtements noirs, l'or qui tisse des formes sur sa robe. Elle était sans doute en voyage dans la région. Arès toussote dans sa tête. Tu t’amuses bien ? Lyra secoue la tête sans comprendre, depuis quand Arès est aussi dans ses rêves ? Elle regarde autour d’elle. Inutile, je suis là, mais pas là. Je vais regarder tes rêves, pour une fois. Bonjour le voyeurisme… Lyra passe une main dans ses cheveux rouges qui tombent sur sa longue robe noire, ample qui ne laisse pas beaucoup deviner ses formes. Elle observe les alentours, que peut-il bien se passer aujourd’hui ? Elle avance et discute avec quelques passants, cette hypocrisie ambiante lui donne la nausée. Elle avance vers un escalier et le monte lentement. Ses vêtements changent au fur et à mesure de sa montée, plus légers, plus adaptés, toujours amples… Une robe cintrée sur sa taille qui dévoile doucement ses jambes à demi-nues grâce à d'élégants bas. Sa tenue est oujours tissée d'or et ses manches toujours amples. Mais cette fois, on peut apprécier ses formes agréables, fines. Elle s’avance vers un balcon pour observer les grandes étendues de sable. Elle pose ses mains sur la rambarde, lève les yeux, puis elle tâte doucement ses cuisses.
Quelque chose ? Une lame, la même. Que ce jour-là. Le jour où elle a tué Arès. Elle secoue la tête, la lame change et elle regarde les alentours. Quoi, doit-elle vraiment faire du mal à tous ces gens ? Non. Elle soupire et range la lame à nouveau contre sa cuisse. En arrivant à nouveau vers les escaliers elle entend des bruits de pas. Elle se dérobe doucement aux yeux du passant, sans avoir regardé qui ça pouvait bien être. Elle compte bien savoir ce qu’il se passe ici, dans ce rêve et non ce cauchemar. Elle tourne dans un couloir et commence à marcher rapidement à l’abri des regards. Personne, elle regarde une porte en face d’elle. Elle est presque certaine qu’elle n’est pas supposée être là. Elle détache doucement ses cheveux et en retire les épingles. Elle étire un petit sourire malicieux et s’approche de la porte… Oh, Lyra ne changera jamais, toujours cette curiosité, une petite voleuse… Une sale gosse. Les yeux brillants vers le cadenas, elle n’écoute pas derrière-elle, c’est un rêve, rien ne pourrait se passer…