Il n'y avait pas la moindre once de violence dans les gestes de la voleuse - cela donnait à réfléchir, pour la blonde qui restait cramponnée à la table. Aurait-elle eu la possibilité de s'enfuir ? Bien sûr que non, étant donné que les deux autres malfrats auraient probablement eu vite fait de la rattraper. Mais sans leur présence, aurait-ce été possible ? Probablement. Ryiah avait beau être - la noble en était sûre, désormais, vu les réactions et les paroles qu'elle avait échangé avec les autres - de la même trempe qu'eux, elle ne semblait pas violente ou malfaisante, ou du moins, pas au même niveau. Sa présence au sein de ce groupe sanguinaire ne témoignait que d'une chose : un opportunisme notoire. Elle les avait probablement rejoint pour profiter de leur expérience et acquérir des richesses pratiquement sur leur dos, et pas par pure envie de pratique sadiques comme elles avaient pu en voir en rejoignant les caves, un peu plus tôt. C'était en cela que Madeleine lui faisait confiance, et ne s'enfuyait pas.
Mais la blonde se serait menti si elle avait dit que ce n'était que pour cette raison. Le toucher de la terranide, sa langue râpeuse sur sa peau, tout cela constituait une source agréable. Un peu comme un câlin tendre, ou un bon chocolat chaud. Il y avait de l'appréhension, bien sûr, totalement justifiée par le contexte et par l'inexpérience, mais Madeleine ressentait plus la présence de la voleuse sur son corps comme quelque chose de protecteur - une "couverture", au sens propre comme au sens littéral.
L'inconfort reprit son cours, cependant, quand la brigande se risqua à glisser un doigt fin dans l'intimité de Madeleine. La sensation était étrange, et la blonde aurait préféré que personne ne revienne s'aventurer par là. Cela se manifesta par ses mains, qui se crispèrent et lâchèrent la taille de sa partenaire, pour aller se poser sur ses bras fins. Une langue vint titiller sa clavicule, laissant son sein tranquille, et Madeleine put sentir la terranide se pencher pour faire ce geste, pressant sa poitrine mince et habillée contre celle imposante de l'adolescente. Madeleine découvrait quelque chose qu'elle ne savait pas, jusqu'ici - la sensibilité accrue de sa poitrine. La pression et les frottements suffisaient à faire renaître cette chaleur au niveau de son bas-ventre, qui lui semblait si sale et si délicieuse à la fois.
« Hh-nah... »
Madeleine réprima un gémissement. Les attouchements au niveau de son bas-ventre faisaient augmenter sa température, elle se sentait fiévreuse. Le jus étrange qui s'écoulait de son intimité la gênait, lui laissant penser qu'elle s'était uriné dessus sans s'en rendre compte. Pourtant, le liquide était trop épais pour que ce soit le cas. Et Ryiah n'avait pas l'air dégoûté de la palper à cet endroit, ce qui confirmait que sa théorie n'était pas bonne. Elle pouvait sentir ce liquide chaud s'écouler hors d'elle et aller partout, touchant ses cuisses, la main de Ryiah, le bois de la table. En tendant l'oreille, il lui semblait même percevoir le bruit de gouttes s'écrasant au sol, au milieu des bruits mouillés provoqués par le geste de sa camarade.
*Qu'est ce que c'est que ça... et pourquoi y'en a-il autant ?..*
Une voix masculine se fit entendre, probablement un commentaire d'un des brigands, mais l'esprit de la blonde était tellement embrumé par son propre plaisir qu'elle ne parvint pas à analyser leur sens à temps. Elle ne comprenait pas grand-chose à ce qui se passait. Tout ce qu'elle comprenait, c'était le plaisir qui se diffusait dans son corps, ce corps qui lui procurait d'habitude tant de douleur et de frustration, mais qui parvenait aujourd'hui à lui faire connaître autant de plaisir sans beaucoup d'efforts de sa part. C'était... intéressant.
Les yeux mi-clos, la bourgeoise sentit Ryiah sur ses lèvres avant de la voir. Un baiser - au moins une chose qui lui semblait bien plus familière. Quelque chose qui était assez sécuritaire au sein des mœurs pour qu'elle ce soit permise d'en demander le sens et les détails. Le vivre, cependant, était tout autre chose. Le baiser était rude, humide, la langue de la terranide s'infiltrant dans sa bouche sans plus de permission. Madeleine perçut le goût de l'alcool, mélangé à la saveur d'un fruit quelconque, et ne trouva pas cela désagréable.
Et puis, il y eut une douleur intense, qui remplaça le plaisir dans son intimité. La douleur se répandit dans son bas-ventre, comme une traînée de poudre. Madeleine ouvrit grand les yeux, apeurée, son cri caché par le baiser échangé. Par réflexe, elle se dégagea, et regarda en bas d'un air terrifié.
« Qu-hng ! »
Elle avait la sensation que quelque chose s'était cassé, tout en bas. Est-ce que son corps redécidait, finalement, de lui jouer des tours, après lui avoir laissé quelques instants de répit ? Madeleine essaya de vérifier d'un regard. Mais tout avait l'air normal, dans ses os, dans ses muscles... la seule chose étrange, ce fut le rouge sur les doigts de Ryiah. Madeleine comprit, alors.
C'était la seule chose que ses parents avaient bien voulu lui dire sur une éventuelle sexualité. Rajoutant que cela arriverait impérativement avec l'homme avec lequel elle se marierait. Il fallait croire que non.
En plus du choc, une tristesse l'envahit, à l'idée que les choses ne se passeraient pas comme prévu. C'était comme un déclencheur, qui l'aurait soudainement ramené à la dure réalité. Madeleine regarda Ryiah, de la même façon qu'un chien pourrait regarder son maître qui vient de le frapper, un regard qui quémande une réponse à un "pourquoi". De grosses larmes commencèrent à couler de ses joues, s'écrasant sur le bois. Elle gémissait, anéantie.
Le geste ne s'arrêta pas pour autant. Le spectacle devait continuer, ou elles seraient toutes les deux assassinées. Madeleine laissa donc faire Ryiah, sans pouvoir cependant retenir ses larmes ou ses sanglots. Le scène prenait, au moins, la tournure visuelle d'un viol, et se retrouvait suffisamment convaincante pour éviter que les deux hommes ne découvrent le pot aux roses.
Les sensations, cependant, restaient toujours aussi inédites. Après quelques mouvements de va-et-vient, la douleur commençait à s'affaisser. Et le plaisir, lui, qui semblait s'être fait la malle pour un temps, revenait poser ses valises, à l'exact endroit d'où il était parti. En vérité, ça semblait même être pire qu'avant, maintenant que Ryiah avait plus de place pour faire son œuvre. Et les sanglots de la noble vinrent se superposer à d'énièmes gémissements, la laissant dans l'incapacité d'apposer des filtres sur ses sentiments ou ses réactions. Elle ne comprenait plus rien.
*Pourquoi est-ce que ça redevient si bon ?..*