Shoubousho 99, 00h52Clayton était tout contre
Tashigi, l'ayant à peine plaquée contre le mur du vestiaire du premier étage. Elle avait finit sa journée et partait pour trois jours de repos bien mérité et était venue saluer l'américain, qui n'avait pas manqué de lui faire comprendre qu'il avait les couilles pleines. Comme toujours, la blonde avait réagi au quart de tour et s'était laissée prendre au jeu, d'abandonnant aux mains calleuses et assurées que son amant avait passé dans son chemisier ouvert. Il était prêt à presser fermement son sein siliconé quand l'alerte avait retenti avec violence dans leurs oreilles, les faisant se redresser aussi prestement que des gosses surpris par des adultes en pleine séance de touche-pipi. Comme figés dans leurs gestes, les amants tendirent l'oreille alors que le haut parleur se mit à crachoter par-dessus la sirène, la voix de l'opérateur du standard délivrant un rapide billet quant à l'alerte qui avait mit tous les pompiers présents sur le qui-vive.
"Feu d'origine vraisemblablement criminel à l'angle de Fuji Avenue et Kadowa. Equipe 7 pour intervention d'urgence, on se bouge le cul !"
Sans hésiter ni même échanger un mot, Clayton et la blonde se séparèrent prestement pour se ruer vers leurs
tenues de feu. Ils étaient deux des cinq membres de l'équipe 7 et se devaient de partir à l'attaque du feu dans des délais incroyablement courts. Même Tashigi n'hésita pas, pourtant prête à quitter la caserne quelques secondes plus tôt. Son corps retapé sur le billard avait beau être moulé dans un séduisant mais inconfortable ensemble de lingerie affriolante, elle s'enferma dans l'une des lourdes tenues d'intervention qui se trouvait là et emboîta le pas de Clay, qui lui glissait déjà contre la barre prévue à cet effet pour rejoindre au plus vite le garage situé sous leurs pieds.
Le camion était déjà démarré et leurs deux équipiers à pied d'oeuvre, effectuant les rapides vérifications d'usage. Dès lors que Tashigi eut un pied sur l'une des contre-marche du véhicule et une main fermement agrippée à une barre de maintien, le pompier qui était au volant démarra en trombe et lança son engin dans la nuit, qu'il assassinait de ses puissants gyrophares rouges et de son assourdissante sirène. Clay, quant à lui, terminait de prendre les infos via la radio, écrasant un juron en américain.
- Ces connards ont foutu le feu à l'un des taudis de la rue Kadowa. Ça va flamber comme du petit bois et se propager rapidement aux bâtiments alentours. Écrase le champignon, Yuki ! Yuki d'obtempérer tandis que Clayton hurlait à ses hommes les consignes à suivre, préparant l'intervention à l'avance. Ils connaissaient tous le terrain; la Toussaint était malheureusement trop familière pour ces soldats du feu. Il y aurait rapidement des badauds, voire des yakusas si c'était un règlement de comptes. D'autant plus de problèmes à gérer en plus de l'incendie, que la capacité seule de leur petit camion ne pourrait gérer. L'équipe 7 devrait d'abord baliser un périmètre de sécurité et temporiser la propagation du feu en attendant que des renforts puissent arriver.
Clayton les réclama en vociférant dans l'émetteur qu'il tenait à la main, tandis qu'au loin se dessinait l'éclat orangé des flammes, qui luisait dans une très inquiétante colonne de fumée noire. Il fallait faire très vite, ou le pâté de maison incriminé ne serait bientôt plus qu'un brasier qui s'étendrait en un clin d'oeil à l'ensemble du quartier.
Taudis en flammes, 01h09Ça n'avait bien sûr pas manqué : tous les paumés encore debout qui zonaient dans le coin s'étaient amassés à distance respectable de l'édifice en proie à la colère des flammes, ne s'écartant que de mauvaise grâce pour laisser passer le véhicule de pompier qui arriva comme une bombe rouge et chrome sur le trottoir, toutes sirènes hurlantes.
Ils descendirent tous les cinq de là pour s'activer avec une précision d'horloger et une efficacité toute militaire, trop heureux de constater que les flics les avaient suivis de près et s'employaient déjà à dresser le périmètre. L'échelle téléscopique fut déployée et la belle Tashigi se trouvait dans la nacelle à son extrémité, foudroyant les flammes vivaces du bout de sa lance incendie pendant que les deux recrues vérifiaient la pression et les branchements aux bornes de flotte auxquelles les pompiers s'étaient précipitamment raccordés. Clayton quant à lui organisait grâce à ses ordres précis et concis l'efficace ballet, quand un policier s'approcha de lui.
- Des jeunes disent qu'une femme doit être encore à l'intérieur ! - Quoi ? - Une fille qu'ils ont amené avant que ça ne flambe, probablement pour la faire tourner. Elle n'est pas avec eux, ils disent qu'elle doit encore être dans la chambre de l'étage.- PUTAIN ! Clayton ne perdit pas davantage de temps et se rua vers le camion à la recherche d'un équipement de respiration, l'
ARI*. Il hurla à Yuki qu'il entrait à l'intérieur et n'attendit pas la réaction de la recrue pour agir, fonçant comme une bombe vers la porte laissée ouverte de la maison. Feignant d'enfiler le masque complet dans sa course, l'américain pénétra en fait les flammes la tête parfaitement nue et se retrouva instantanément dans un environnement familier.
Le feu lui léchait agréablement le visage, comme l'aurait fait une amante pleine de tendresse ou même une mère attentionnée envers son rejeton. Il savait que le brasier ne lui ferait aucun mal et ne s'était équipé que pour ne pas trahir son secret, gardant l'ARI à la main tout en prenant une seconde pour jouir -littéralement ou presque- du bonheur incommensurable qu'il éprouvait à se tenir là, dans les flammes dansantes qui lui susurraient de doux mots à l'oreille. Clayton ne s'attarda toutefois pas davantage et se mit en quête de dénicher l'escalier, qu'il découvrit après quelques secondes d'investigation. Il s'y aventura prudemment -le bois était trop entamé pour résister convenablement à son poids- et parvint à l'étage supérieur sans encombres... Avant que ne s'écroule les marches derrière lui, rongée par la bête Feu. Le retour allait se montrer désespérément plus compliqué que l'aller.
Le temps jouait contre lui et il le savait. Si la fille était encore vivante (presque improbable, mais il se refusait à l'accepter), elle succomberait bientôt à la fumée et à la chaleur infernale. Il n'y avait que dans les films que l'héroïne pouvait danser le bootyshake dans un appartement ravagé par le feu : dans la vraie vie, la fumée aussi chaude que toxique aurait eu tôt fait de la tuer douloureusement.
Le pompier cavala à travers l'étage qui se délabrait de plus en plus, jusqu'à trouver une forme qui gisait dans un coin, heureusement proche du sol. Ça lui avait fait gagner le temps nécessaire pour que Clayton envisage de la sauver, mais les secondes s'égrainaient avec la même fatalité.
Si l'incendie ne parvenait pas à les tuer, l'écroulement de la maison le ferait presque à coup sûr.
L'homme arriva à son niveau d'un bond ou presque et n'attendit qu'un signe de vie pour lui coller le masque respiratoire sur le groin. Pas le temps de s'attarder sur les détails, à tel point que Clay ne percuta même pas qu'elle était seins nus face à lui. Il passait la bonbonne d'air sur son dos tout en tentant de la rassurer du mieux qu'il pouvait.
- Respirez là-dedans normalement, okay ? Je vais vous sortir de là, mais vous allez devoir me coller au cul comme jamais vous n'avez collé quelqu'un. Gardez TOUJOURS ce putain de masque sur la gueule à partir de maintenant. L'équipement respiratoire ne ferait pourtant pas tout. La peau de la belle allait bientôt commencer à cloquer sous la chaleur infernale, si ce n'était pas déjà le cas. Elle serait brulée avant qu'ils ne parviennent à atteindre le palier vers la sortie, ce qui poussa Clayton à faire plus qu'il n'aurait pensé au départ. Il ôta sa veste, puis ses bottes et son pantalon à bretelles et ses rangers pour faire enfiler le tout à la blonde. Impensable ! Lui savait que même complètement à poil, il pouvait se foutre à danser des claquettes en chantant du Sinatra que le feu n'aurait aucun effet sur lui. Elle l'ignorait... Mais il ne pouvait pas la laisser mourir au profit de son seul petit secret. Clay aurait bien sûr préféré garder ça pour lui mais son sens du devoir était bien au-dessus de ce genre de considération et il le prouva à ce moment précis, fermant la tenue ignifugée sur les formes sculpturales. Maintenant, il leur fallait sortir de là.
- On dégage. Vous n'avez rien à craindre tant que vous êtes équipée, mais on ne peut pas rester ici trop longtemps. Une poutre s'écrasa à un pas derrière lui dans un fracas sec, comme pour étayer ses dires.
ON BOUGE MAINTENANT ! Et il tira la main de l'inconnue en l'entraînant à sa suite dans l'enfer de poche qui les engloutissait de son immonde gueule béante, dévorant doucement mais sûrement toutes les issues.
Si elle en connaissait une autre que l'escalier qui brûlait avec fureur, c'était le moment qu'elle ouvre sa gueule pour le dire à Clayton.
*
Appareil Respiratoire Isolant. Et oui, c'est un "vrai" terme ^^